Interview de M. Jean-Pierre Raffarin, vice-président de Démocratie libérale et président de la région Poitou-Charentes, dans "Le Figaro" du 25 février 1998, sur la proposition de loi sur la réforme du vote des budgets régionaux ("non au verrouillage").

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  • Jean-Pierre Raffarin - Vice-président de Démocratie libérale et président de la région Poitou-Charentes

Média : Emission Forum RMC Le Figaro - Le Figaro

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Le Figaro : Le système proposé va accroître le pouvoir des présidents de régions. N’est-ce pas un motif de satisfaction pour vous ?

Jean-Pierre Raffarin : Ce dispositif est de nature parlementaire. Or, je considère que tout ce qui rapproche la vie régionale du parlementarisme n’est pas bon. Il y a là une manœuvre de dernière minute, à moins d’un mois des élections régionales, qui vise à imposer le régime des partis dans la vie régionale. Au fond, c’est une forme de verrouillage politique que la gauche « plurielle » veut imposer à d’éventuelles majorités futures au sein des assemblées régionales.

Si j’en juge ma propre expérience, les majorités relatives ont jusqu’à présent permis aux régions d’être gouvernées sans l’appui du Front national. Ceux qui sont comme moi attachés au fait régional préfèrent les libertés aux contraintes. Entre républicains, il est toujours possible de dégager des consensus au quotidien. Il vaut mieux inciter au rapprochement des positions qu’au verrouillage des votes, surtout dans le cadre des régions, qui ne doivent pas être gouvernées comme de mini-parlements.

Le Figaro : Les risques de blocage de l’institution régionale, notamment au moment du vote du budget, existent pourtant…

Jean-Pierre Raffarin : Le président voit son pouvoir limité par l’assemblée de manière très démocratique. Il faut laisser vivre le fait régional, laisser les majorités se dégager. Le bon sens fait le reste. La démocratie consiste précisément à faire confiance au bon sens. Ce n’est pas parce que le budget sera voté que le conseil régional sera plus facile à gouverner.

J’ajoute que 90 % des sujets relevant de la compétence des régions se situent en dehors des clivages partisans, qu’il s’agisse de défendre la ruralité ou de la construction des lycées. Si l’on excepte tout ce qui relève de l’enseignement privé, de la chasse, de la charte Natura 2000… les clivages ne se font pas sur des rapports de force partisans.
Il y a en revanche des clivages entre départements, entre zones urbaines et zones rurales, des clivages aussi entre générations. Gardons-nous de politiser l’institution régionale !