Interview de M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur, dans "le Progrès" du 27 janvier 1997, sur la réforme des horaires des policiers, le statut de la police municipale et la redéfinition des zones de police et de gendarmerie.

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Média : La Tribune Le Progrès - Le Progrès - Presse régionale

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Le Progrès : Doit-on craindre que la violence extrême régnant durant la période de ramadan en Algérie atteigne la France ?

J.-L. Debré : Elle nous incite en tout cas à demeurer extrêmement vigilants. Nous avons ainsi renforcé le plan Vigipirate à Paris, Lyon et dans la plupart des grandes villes de province : augmentation des effectifs sur le terrain, participation de la gendarmerie et de l’armée.

Le Progrès : Le menace pesant sur la France est-elle directement liée à la situation en Algérie ?

J.-L. Debré : Je sais seulement que la situation en Algérie est très préoccupante, et que sa médiatisation peut influencer en France certains individus. L’heure est donc plus que jamais à la vigilance.

Le Progrès : Comprenez-vous l’inquiétude des policiers devant la réforme de leurs horaires ?

J.-L. Debré : Bien sûr, toute modification des règles, c’est compréhensible, provoque des inquiétudes et des angoisses. Pour cette raison, le directeur général de la police, à ma demande, a fait le tour des régions de France afin de dialoguer avec les policiers. J’ai moi-même rencontré tous les commissaires de police de France et les responsables d’unités de CRS, multiplié les visites dans les commissariats, institué les comités départementaux où le dialogue au sein de la police peut, à l’échelon local, se formaliser et se poursuivre. Nous avons également fait un effort considérable dans le budget de 1997 pour les logements des policiers, leurs conditions de travail et l’action sociale. Aujourd’hui, la réforme des cycles de travail est en place et, j’en suis sûr, bien acceptée, comme l’autre grande réforme, celle des corps et carrières.

Le Progrès : Mais le dialogue avec les policiers s’est parfois accompagné de quelques « provocations » – par exemple les déclarations du directeur général sur les policiers ne travaillant que trente heures ou moins par semaine…

J.-L. Debré : Je ne veux pas d’un dialogue académique, émasculé, je souhaite pour la police un dialogue franc, clair, où l’on ne se cache rien. Comme dans une famille – et je suis fier d’appartenir à cette famille – d’être comme on dit « le premier flic de France ». Ce ne sont donc pas des « provocations », mais la marque d’un dialogue vrai, honnête, dans la poursuite du même but : une police nationale, républicaine, efficace, de proximité.

Le Progrès : Allez-vous enfin cette année avancer sur le vieux dossier des polices municipales ?

J.-L. Debré : J’ai d’abord voulu mener cette réforme de la police nationale. Mais il est temps maintenant de donner un statut à la police municipale pour qu’elle puisse évoluer dans un cadre juridique précis. Je souhaite que cette question soit soumise au Parlement avant l’été.

Le Progrès : Et l’armement des policiers municipaux ?

J.-L. Debré : c’est une question difficile qui sera largement abordée lors du débat parlementaire. J’ai déjà dit, à maintes reprises, mes réticences à cet égard.

Le Progrès : La réforme de la gendarmerie, qui amène les gendarmes à intervenir dans des domaines nouveaux, provoque chez les policiers des inquiétudes. Justifiées ?

J.-L. Debré : La gendarmerie renforce ses effectifs dans les zones relevant de sa compétence et ce [illisible] redéploiement de ses personnels. Rien d’anormal, au contraire, cela va dans le sens d’une meilleure sécurité pour nos compatriotes, car le renforcement de la gendarmerie a lieu dans les zones de gendarmerie, pas dans les zones de police. Mais la vraie réforme qu’il faudra mener un jour, est celle de la redéfinition des zones de gendarmerie et de police. Dans l’immédiat, il importe de maintenir la bonne coopération entre police et gendarmerie, indispensable face aux menaces pesant sur notre sécurité.