Texte intégral
Question : Quel bilan tirez-vous de la grève des enseignants du 30 septembre et de la grève dans la fonction publique le 17 octobre ?
Réponse : L’emploi est au centre des revendications. C’est banal, mais la fonction publique est de plus en plus concernée. Pendant l’été, une rumeur faisait état de 40 000 suppressions de postes. Finalement, on en annonce 6 à 7 000. C’est moins que ce qui était prévu, mais il ne faut pas tromper les gens. C’est une stratégie malsaine de dire : « Vous êtes très malade ». Et ensuite de dire : « On ne supprime que 6 000 emploi parce que vous n’êtes pas aussi malade que cela ». C’est grave, surtout en ce moment. On ne peut pas dire au privé : « Allez, embauchez ! » et faire le contraire dans le public.
Le gouvernement explique que les suppressions de postes correspondent à une baisse des effectifs scolarisés…
Effectivement, le nombre d’élèves dans le primaire va baisser, mais il y a plus de 70 000 écoles en France. Statistiquement, il y aura un élève de moins par classe. Est-ce que cela justifie des suppressions de postes ? Le gouvernement fait de la cavalerie budgétaire. On va prendre sur les budgets de suppléance. Il risque d’y avoir des trous. De plus, on met en péril la formation. Les élèves des IUFM (instituts universitaires de formation des maîtres) vont aller moins en cours et plus en apprentissage pour faire ces remplacements.
Il y a 6 000 postes en moins, mais le ministre de l’Éducation François Bayrou nous dit qu’il recrute pour remplacer les départs en retraite et qu’on est plus nombreux. Il y a là un mystère mathématique qui m’échappe. On dit qu’il faut renforcer les équipes pédagogiques dans les ZEP (zones d’éducation prioritaire) et lutter contre la désertification rurale, et on supprime des emplois, on ferme des écoles. Il n’y a pas de raisons pour limiter les dépenses. Le ministre gère plus le temps que l’éducation. Il y a beaucoup de rencontres, de débats, de négociations, mais il n’y a jamais de décision. Commençons par appliquer la loi de programmation.
Question : Qu’est-ce que vous préconisez ?
Réponse : On traverse une grave crise sociale. Il ne faut pas que le service public soit sacrifié. Sinon, on va vers une société éclatée où régnera l’égoïsme, où les extrêmes seront favorisés. Le gouvernement fait un choix politique qui est exclusivement comptable. Il s’agit de réussir les critères pour la monnaie unique. Je suis pro-Européen, mais je ne tiens pas à mourir guéri. On va arriver à l’Europe exsangue. Il faut investir.
Question : L’hiver social sera-t-il chaud ?
Réponse : Il faut qu’on discute avec les autres organisations syndicales en oubliant la compétition entre les formations. La situation est très préoccupante. C’est beaucoup plus grave qu’on ne le pense. Je n’oublie pas que, pas très loin d’ici, un régime s’est construit sur le mécontentement, sur la faillite de la République de Weimar.