Interview de M. Robert Hue, secrétaire national du PCF, dans "Le Figaro" du 7 novembre 1996, sur la volonté du PCF de "regarder son passé en face" et l'ouverture de ses archives à la consultation.

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Le Figaro : Les archives de Prague disent-elles, selon vous, la vérité sur ce qui s’est passé au PCF ?

Robert Hue : Je me réjouis quand des archives s’ouvrent. La vérité a toujours à y gagner. Le PCF veut regarder son passé en face. Dans ses ombres comme dans ses lumières. Nous sommes preneurs de travaux historiques, avec tout ce que cela suppose de sérieux et de confrontations. Hors de toute instrumentalisation d’une « histoire officielle », de toutes manipulations. Toutes les archives en notre possession – et bien entendu celles de Prague qui nous concernent – sont ouvertes aux chercheurs. Selon les normes de consultation des archives publiques. Mon prédécesseur a fait ce choix. Il a eu raison. De nombreux chercheurs de toutes convictions y travaillent.

Le Figaro : Dans un parti qui se revendique de Jaurès et des couleurs de la France, quelles conséquences tirez-vous de ces révélations ?  Allez-vous, par exemple, continuer de demander à Lise London de patronner vos manifestations ?

Robert Hue : Le Parti communiste est profondément français, enraciné dans les luttes de notre peuple. Et, en même temps, il a été membre d’une internationale, avec un « centre », un « modèle »… Et il y a eu le stalinisme… Ces « révélations », comme vous le dites, enrichissent une histoire passée dont le sens est déjà bien connu. Cela ne donne que davantage de force à la profonde mutation de notre parti. Quant à Lise London, elle est une grande résistante, une déportée. Cela mérite à mes yeux un respect que rien ne peut altérer.

Le Figaro : Quand et comment avez-vous été personnellement informé des activités occultes du PCF à l’Est ?

Robert Hue : Puis-je vous avouer que ces questions me sont totalement étrangères ? Le Parti communiste a choisi, irrévocablement, la transparence. Élu à sa direction, je me tiens à cette règle. Me permettra-t-on une remarque ? Jean Moulin, Pierre Cot, Raymond Aubrac, Charles Hernu et à présent Artur London… Je commence à trouver que cela fait beaucoup de « révélations », si délibérément orientées dans un même sens…

Le Figaro : Estimez-vous toujours que le PCF a terminé son examen de conscience historique ?

Robert Hue : Comme le travail de l’historien, la réflexion d’un parti sur son passé n’est jamais achevée, car sa matière est complexe. Nous ne voulons rien en perdre. Non par souci de remuer le terreau de l’histoire, mais par volonté de mieux préparer l’avenir.