Plate-forme de l'union RPR - UDF, signée par MM. François Léotard, président de l'UDF, et Philippe Séguin, président du RPR, pour les élections régionales, mars 1998.

Prononcé le 1er mars 1998

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Circonstance : Elections régionales du 15 mars 1998

Texte intégral

Ce sont les élus de l’Union RPR-UDF qui auront permis, grâce à leur action à la tête de 20 exécutifs régionaux, de donner toute leur place de 1992 à 1998 aux Régions dans le système politique et administratif français. Ils sont fiers de leur bilan.

Aujourd’hui, les candidats RPR et UDF se présentent à nouveau ensemble aux suffrages de leurs concitoyens, sur des listes d’Union renouvelées, rajeunies et féminisées.

Ils proposent de parfaire et d’amplifier l’oeuvre accomplie, d’explorer de nouveaux terrains pour plus d’emplois et une meilleure qualité de vie.

Ils mettent en garde contre une gauche plurielle qui ne cherche qu’à trouver dans des régions bien gérées et dont elle ne manquerait pas d’alourdir la fiscalité, les ressources complémentaires que sa politique dispendieuse réclame avec avidité.

I - NOTRE BILAN : LES CINQ BATAILLES GAGNÉES

C’est une réussite qui se mesure du point de vue du citoyen, du point de vue de l’usager et du point de vue du contribuable.

L’institution régionale est désormais connue et reconnue.

La visibilité et la crédibilité de l’institution régionale se sont renforcées depuis six ans. Plus des deux tiers des Français pensent que le Conseil Régional est porteur d’un projet de développement pour leur région et près de 60 % d’entre eux souhaitent un « développement du pouvoir régional ».

L’institution régionale a gagné la bataille de la légitimité.

L’identité régionale est devenue facteur d’adhésion.

Les territoires régionaux ont pris vie et gagné en cohérence, y compris dans les espaces qui y étaient les moins prédestinés par l’histoire. Le niveau régional apparaît de plus en plus comme le bon niveau de prise de conscience de notre double dimension : des racines accrochées au terroir, facteur de rassurance et un horizon de plus en plus large, facteur de progrès. La région offre ainsi un repère moderne pour la synthèse entre le local et le global, le passé et l’avenir, la réflexion et l’action.

Les régions ont gagné la bataille de la confiance.

Les régions ont bien préparé l’avenir de leur jeunesse.
 
À travers leurs actions pour la formation professionnelle et l’apprentissage, leurs efforts pour construire, rénover et entretenir les lycées, leur implication dans un nombre croissant d’initiatives, accompagnant le cursus de formation, les Conseils régionaux gérés par l’Opposition Nationale auront par leurs décisions, largement contribué à façonner le paysage éducatif des années 1990 et à mieux assurer l’avenir des jeunes.
 
Ils ont su, dans un délai rapide, apporter des réponses efficaces aux problèmes de formation. À telle enseigne que, dans ce domaine, l’ensemble des acteurs concernés s’accorde à dire que la Région a mieux réussi que l’État.

Les régions ont gagné la bataille de l’action dans leurs compétences éducatives.

Les régions se sont avérées un bon niveau pour « voir clair et agir ensemble ».

Les régions se sont avérées un bon niveau pour rassembler les énergies, mobiliser les partenaires et « passer contrat », « Ni trop petites pour les grands problèmes ni trop grandes pour les petits problèmes », elles offrent un cadre adapté pour les actions publiques nécessitant à la fois la connaissance du terrain et une vision plus large :

– Avec le « supra-régional », (l’Europe et l’État), les programmes européens ou les contrats de Plan État-Région ont non seulement injecté des ressources nouvelles dans les territoires régionaux mais ils les ont aussi mis en réseau et ouvert sur des espaces plus larges.
– Avec « l’infra-régional » les villes mais aussi les pays institués par la loi du 2 février 1995 relative à l’aménagement du territoire, dite loi Pasqua, les contrats de territoires ou de développement local mis en oeuvre ont créé une dynamique nouvelle.

Europe, État, Région, Départements, Villes-Pays : cette chaîne de la solidarité s’est renforcée grâce au rôle pivot de la région conçue comme une collectivité de mission plus que d’administration – sauf quand elles avaient la malchance d’avoir une direction socialiste ou « verte ».

Les régions ont gagné la bataille des contrats et de la stratégie.

Nos régions ont maîtrisé leur gestion.

La montée en puissance des Régions devait, à écouter certains Cassandre, se solder par une dérive des coûts de fonctionnement, un endettement excessif et une pression fiscale démesurée. Ces prédictions se sont avérées inexactes : il n’y a pas eu dans l’ensemble, dérive des budgets régionaux. Les dépenses de personnel représentent 6 % des dépenses totales de fonctionnement, la part des régions dans la fiscalité locale ne s’élève qu’à 8 % (64 % pour les communes et groupements et 27 % pour les départements). Enfin, le désendettement est bien engagé dans la quasi-totalité des cas.

Toutefois, l’analyse des comptes financiers des régions révèle clairement les différences de choix de gestion de leurs élus. Le contraste est saisissant entre d’un côté les régions à dominante UDF-RPR qui ont réussi à contenir la fiscalité locale grâce à une gestion rigoureuse et de l’autre, les régions tenues par la gauche plurielle qui ont laissé filer les déficits : ainsi le Nord-Pas-de-Calais est-elle la championne de France pour l’importance de l’endettement et le Limousin arrive en tête pour la pression fiscale.

Les régions UDF-RPR ont gagné la bataille de la gestion et de la responsabilité.

II - NOTRE AMBITION : DONNER LEUR CHANCE À TOUTES NOS REGIONS

Notre ambition repose sur une double conviction :

– une conviction libérale qui s’oppose à l’esprit de féodalité comme à l’esprit bureaucratique, ces deux fléaux empêchant les initiatives d’éclore et menaçant l’esprit même de la décentralisation.
– une conviction humaniste tendant à développer les solidarités au sein de la communauté régionale et à mettre la volonté politique au service de la Cité Région.

Cette volonté suppose une relation claire avec l’État. Celui-ci ne peut, à travers certaines méthodes, comme le contrat de plan, reprendre d’une main ce qu’il a confié à la région de l’autre. Enfin, il ne peut abandonner sa fonction de garant de la solidarité nationale. Il doit, en particulier, veiller à ce que la décentralisation n’accroisse pas les inégalités entre les régions, laissant les plus modestes d’entre elles à la traîne.

Un pacte est donc plus que jamais nécessaire pour donner un fondement éthique à la décentralisation et clarifier les compétences entre l’État et les collectivités locales.

La région, bonne réponse pour un meilleur aménagement du territoire ;

La France doit aux Régions un nouveau rapport de force entre Paris et la Province. Tout ne vient plus d’en haut. Toutefois, si un pas a été franchi, il reste encore dans ce domaine, des efforts à fournir. Notre pays, en effet, étouffera si l’on ne donne pas à l’ensemble de son territoire les moyens de respirer.

Il y va de la crédibilité du discours politique tout entier. Pour être à nouveau entendu, ce dernier doit être plus national et moins parisien.

– En donnant la parole aux régions dans les grands choix nationaux de l’aménagement et du développement du territoire : chaque année, au moment de l’élaboration de la loi de finances, devrait être organisée une conférence nationale État-Régions.

– En renforçant la parole de l’État dans les régions grâce au Préfet à qui il faut donner des délégations nouvelles et à son état-major, le secrétaire général à l’Action Régionale, auprès duquel il faut déconcentrer les moyens supplémentaires.

– En développant une réelle « conscience géographique » au Gouvernement et dans les Ministères. L’impact géographique des grandes décisions n’est pas, en outre, suffisamment pris en compte et les organismes nationaux qui ont la charge des questions territoriales comme la DATAR ne sont pas suffisamment implantés en province.

- En inversant le mouvement de concentration de la matière grise. Parmi les compétences qui pourraient être transférées dans les régions, la priorité doit être accordée à celles susceptibles de donner un souffle nouveau de vitalité, de créativité et d’innovation, autrement dit : priorité au transfert de la matière grise. La meilleure décentralisation, c’est, en effet, celle de l’intelligence devenue la matière première du développement et des métiers nouveaux.

À titre d’exemple et contrairement à certaines craintes, le transfert de la compétence « lycées » a contribué à réduire les écarts entre Régions en matière de scolarisation ou de résultats aux examens. Le Mouvement de transfert doit être étendu à l’enseignement supérieur et à la recherche pour mieux l’intégrer à la vie locale sans nuire à son ouverture et à son universalité. L’université, comme le lycée, peuvent constituer un pôle de rayonnement et de développement, une pépinière pour des projets. Dans cette perspective, des formules expérimentales doivent être proposées et discutées avec tous les partenaires concernés.
 
En donnant aux régions de nouvelles possibilités d’intervention et de nouveaux moyens pour créer les outils au service du développement économique. L’action de l’État en matière d’aménagement du territoire peut contribuer à mieux répartir les richesses mais elle n’a pas vocation à en créer de nouvelles.

Une des principales réponses au problème du chômage repose sur le soutien aux initiatives et particulièrement aux initiatives des « pépites » (petites entreprises personnelles industrielles et tertiaires). Au-delà des capacités à mobiliser les ressources de l’épargne locale, la régionalisation d’une partie des aides à l’emploi renforcera la dynamique de proximité.

La région, bonne réponse pour accompagner le changement économique et social.

La région doit répondre aux nouvelles aspirations des Français.

La première de ses aspirations, c’est celle de la proximité.

Progrès économique et progrès social ne se conjuguent plus de manière aussi « automatique » que durant les « Trente Glorieuses ». Concilier la logique de compétitivité et la logique de cohésion, c’est à dire la logique de la force et la logique de l’équilibre, ne va plus de soi.

Il s’agit de générer une « nouvelle dynamique de responsabilité » associant tous les acteurs de l’emploi, qui ont chacun un élément de réponse mais qui collectivement doivent s’engager.

Cette démarche peut se construire plus facilement à partir des solidarités locales et des effets de réseaux. Les phénomènes de l’emploi et de l’exclusion sont trop complexes pour être maîtrisés à partir du seul niveau national. Le local simplifie, et rapproche, l’action administrative du citoyen, en la décloisonnant au plus près des acteurs et des personnes. La région s’est vue, en outre, confier de nouvelles responsabilités en faveur des jeunes en difficulté d’insertion. Une nouvelle étape doit être franchie avec le public adulte.

- Une autre de ces aspirations, c’est celle de la diversité.

Le constat selon lequel « on ne gouverne bien que de loin, on n’administre bien que de près » n’a jamais été aussi vrai. L’heure n’est plus au « prêt à porter » administratif qui reproduit à l’identique des dispositifs conçus au niveau national, mais, au contraire, au « sur-mesure ».

Trois évolutions s’imposent :

– Le droit à l’expérimentation a été reconnu pour l’organisation des transports régionaux et la formation professionnelle.
– la reconnaissance des « discriminations positives », notamment fiscales, doit s’imposer afin de compenser les inégalités entre régions qui résultent des disparités de situations.
– l’arrêt de l’inflation des normes réglementaires qui, au-delà d’un certain seuil, dorénavant franchi, aboutit à l’effet inverse de celui attendu en paralysant l’action et en entraînant des surcoûts non justifiés.

Une troisième aspiration concerne la capacité d’écoute et son corollaire, la citoyenneté.

Mieux formés et mieux informés, les citoyens veulent participer davantage aux choix qui les concernent.

Le niveau régional est un atout pour rendre en compte cette aspiration à une nouvelle citoyenneté. Il l’a démontré en rendant possible des réformes bloquées au niveau national.

Ainsi pour l’enseignement privé, les Régions ont-elles apporté la preuve que ce sujet « impossible », brûlot constant de la vie politique française, pouvait être traité en cherchant des solutions à la base. Les régions ont fait la paix scolaire.

Ainsi, les régions développent-elles des initiatives en faveur de l’insertion ou de la mise en activité des jeunes, sans parti pris idéologique et sans générer les débats stériles qui annihilent leur mise en oeuvre. Souvent même sur le terrain, les différents acteurs travaillent main dans la main, quelles que soient leurs compétences respectives. C’est le cas, notamment, des lycées où autorités académiques et collectivités territoriales s’entendent pour mener des projets communs tendant à ouvrir le lycée sur son environnement, à animer la vie de l’établissement et à favoriser les coopérations avec les entreprises.

Deux orientations se justifient :

– Consolider le fondement politique du Conseil Régional.

Au-delà de mars 1998, la réforme du scrutin est une ardente obligation. Qui autant que les régions est, en effet, à l’écoute du pays réel et bénéficie d’une représentation aussi fidèle des courants d’opinion ? Cette valeur ajoutée politique ne doit, cependant, pas rendre le système ingouvernable.

– Asseoir dans la région la démocratie politique et la démocratie sociale.

L’existence, tout à fait originale, d’un Conseil Économique et Social placé auprès du Conseil Régional, est un atout pour le dialogue par et dans le territoire. Outre sa fonction de conseil, le CESR doit jouer un rôle plus actif de « partenaire des partenaires sociaux » en lui reconnaissant une fonction spécifique d’animation et une plus forte autonomie d’organisation et de fonctionnement vis-à-vis de la région.