Texte intégral
Monsieur le président, Messieurs les présidents,
Mesdames et Messieurs les Bâtonniers,
Mesdames, Messieurs,
Permettez-moi, tout d'abord, de vous remercier de m'avoir invité à ouvrir les travaux de votre assemblée générale statutaire.
C'est tout d'abord pour moi l'occasion, Monsieur le Bâtonnier BRUGUES, de rendre hommage à l'institution que vous présidez depuis maintenant deux ans.
L'UNCA, qui a fêté l'année dernière ses vingt ans, occupe incontestablement malgré sa jeunesse, une place de tout premier rang dans votre profession.
A côté des grands organismes représentatifs, ordinaux ou syndicaux, elle a su en effet, très rapidement, acquérir, dans le domaine qui est le sien, une légitimité que nul ne songe à lui contester.
Légitimité en premier lieu au sein de la profession, puisque l'UNCA regroupe actuellement la quasi-totalité des CARPA.
Légitimité ensuite aux yeux des pouvoirs publics, qui ont toujours tenu à associer l'UNCA aussi bien aux grands débats de fond sur toute question intéressant les CARPA qu'à la mise en oeuvre des réformes successives.
L'UNCA est, ainsi, devenu un interlocuteur reconnu des professionnels comme de la Chancellerie.
Elle n'aurait pu acquérir cette place sans le concours et le dévouement de toute une équipe, et, bien sûr de ceux qui se sont succédés pour assurer sa présidence.
Et je tiens à vous remercier, Monsieur le président, de votre action à la tête de l'UNCA.
La présidence de l'UNCA n'est pas une tâche facile. Force est de reconnaître que votre mandat en apporte la pleine démonstration.
Vous avez dû, en effet, tout en continuant à exercer votre activité professionnelle à Montpellier, gérer une actualité des CARPA particulièrement chargée.
Les exemples ne manquent pas pour illustrer le nombre et la qualité des actions menées, afin d'harmoniser le statut des CARPA et les moyens de contrôle des règlements pécuniaires.
Je ne veux pas disgresser ni évoquer des problèmes de fond tels que la baisse des taux d'intérêts, ou le financement de la formation.
Je souhaite seulement souligner l'importance de la contribution qu'a apportée l'UNCA, à la mise en oeuvre de deux grandes réformes :
– celle de l'aide juridique que j'évoquerai tout d'abord ;
– celle, plus globale, issue du décret du 5 juillet 1996, que j'aborderai ensuite.
I. – Aide juridique
L'UNCA a connu une mutation profonde par l'effet de la réforme de l'aide juridique résultant de la loi du 10 juillet 1991.
Un des axes essentiels de la réforme résidait dans la volonté d'associer le barreau à l'organisation et à la gestion du dispositif d'aide juridictionnelle.
A ce titre, la loi a confié aux CARPA la fonction de gestion des fonds versés aux barreaux par l'Etat, au titre de la rétribution des avocats assurant des missions d'aide juridictionnelle.
Cette nouvelle mission confiée aux CARPA est d'une essence différente de leurs missions initiales : il s'agit toujours d'une mission au service de la profession, mais cette mission est aussi une mission de service public, portant sur la gestion de fonds alloués pour l'exécution du service public de la défense assurée par les barreaux.
Un tel rôle rend bien évidemment nécessaire l'édiction de règles contraignantes et la mise en place de dispositifs de contrôle.
Face au pari que représentait en 1991 l'obligation de mettre en place en six mois un dispositif totalement nouveau, la Chancellerie avait besoin d'un interlocuteur disposant des capacités techniques pour s'assurer de la création d'outils appropriés et d'un relais dans la diffusion des informations à destination des CARPA.
C'est donc tout naturellement qu'elle s'est tournée vers l'UNCA.
Malgré la difficulté de la tâche et les inévitables balbutiements, une coopération fructueuse s'est vite développé dans un climat de confiance mutuelle.
Les CARPA ont vécu une mutation importante : elles se sont équipées d'un logiciel informatique, elles ont recruté et formé des agents. Sur les 200 agents affectés dans les barreaux, à temps plein ou partiel, au service de l'aide juridictionnelle, près de la moitié ont été recrutés à partir de 1992.
Aujourd'hui, c'est plus de 900 millions de francs, représentant plus de 600.000 missions, qui sont versés à plus de 12 000 avocats chaque année.
Pour répondre aux besoins nouveaux nés de la montée en charge de cette gestion, les services de votre siège ont accompli un travail considérable. Quelques chiffres en témoignent :
– plus de 7 000 réponses annuelles à des appels téléphoniques,
– plus de 10 000 pages de notes d'information technique,
– environ 4 000 fiches internes portant comptes rendus des travaux effectués.
Aujourd'hui, nous avons atteint un rythme de croisière : le dispositif, comme l'a souligné le rapport déposé l'an dernier devant le Parlement, fonctionne bien. Il restait à être conforté par la formalisation de règles issues de la pratique ou de circulaires, la création d'une assise comptable cohérente et un élargissement des missions du commissaire aux comptes.
C'est à cet objectif que répondent les décrets récemment publiés au Journal officiel du 12 octobre dernier.
Leur mise en oeuvre qui constituera un nouveau chantier, plus modeste que les précédents, sera, je n'en doute pas, l'occasion de poursuivre avec les services de la Chancellerie un fructueux dialogue fondé sur la transparence et la technicité, mais aussi l'occasion pour votre organisation de consolider le rôle essentiel de fédérateur des énergies et de structures naturellement très dispersées.
II. – Réforme des CARPA issue du décret du 5 juillet 1996
Il conviendra également de faire face, avec l'ensemble des organisations représentatives de la profession d'avocat, aux profondes mutations engendrées par le décret et l'arrêté du 5 juillet 1996 portant réforme des CARPA.
Je ne vais pas, en ces lieux, me livrer à une description exhaustive des différentes innovations contenues dans ces deux textes.
Je voudrais, simplement, vous faire part de quelques réflexions qui ont pu m'être inspirées par les réactions suscités par cette réforme.
Comme vous le savez, la Chancellerie s'est résolument engagée dans la voie de la réforme des CARPA. Elle l'a fait car elle était convaincue que, comme l'a fort bien indiqué le président BRUGUES dans la revue « Droit et patrimoine », le temps était venu « d'instituer des garde-fous contre les déviances susceptibles de fragiliser une institution qui a apporté et continue à apporter à la profession les sources de financement indispensables à son fonctionnement et à sa modernisation ».
Il n'était pas concevable, en effet, que les agissements de quelques uns puissent remettre en cause un système qui a su faire ses preuves vis-à-vis tant de la profession que des justiciables.
Certes, alors même que jusqu'à présent avait prévalu une conception purement contractuelle, reposant sur une liberté presque totale d'organisation et de gestion laissée à la profession, il a fallu édicter des règles impératives et imposer des contrôles et de sanctions.
Je conçois qu'un tel changement – au moins formel, car en réalité de nombreuses CARPA s'étaient déjà dotées d'un dispositif aussi contraignant – ait pu susciter de nombreuses réactions, voire des interrogations ou des critiques.
Je voudrais cependant rappeler que la réforme n'a pas été imposée à votre profession. C'est la profession elle-même, bien au contraire, qui est à l'origine de la plupart des dispositions retenues, et le décret a fait l'objet d'une étroite et longue concertation avec l'ensemble des organismes représentatifs, ordinaux, syndicaux ou techniques.
Pour une fois, nous avons eu la démonstration que la profession pouvait être unie, et agir ainsi en étroite collaboration avec les pouvoirs publics.
La réforme a d'ailleurs été conduite en ayant toujours présent à l'esprit la nécessité de respecter les principes qui ont inspiré l'institution des CARPA depuis sa création en 1956, et, notamment, l'autonomie des barreaux et l'indépendance de l'avocat.
Pour illustrer mon propos, je souligne simplement que le texte dispose que les CARPA sont placées sous la responsabilité du ou des barreaux qui les ont instituées et qu'elles doivent personnellement exercer la surveillance et le contrôle des maniements de fonds.
Ce sont donc les avocats, et eux seuls, qui exercent la pleine responsabilité du contrôle des CARPA.
Cette volonté trouve, notamment, sa traduction dans la composition de la Commission de contrôle, qui regroupe, dans sa variété et sa richesse, l'ensemble des composantes de votre profession.
De même, contrairement à ce que j'ai pu lire ou entendre, ça et là, l'obligation désormais mise à la charge de toutes les CARPA de recourir aux services d'un commissaire aux comptes ne remet nullement en cause la responsabilité exclusive des avocats et, partant, leur indépendance.
Les termes du décret et de l'arrêté sont, en effet, clairs à cet égard. Les commissaires aux comptes sont chargés du contrôle du respect par la caisse de l'ensemble des règles et obligations posées par ces textes.
Il ne s'agit donc nullement d'une mission classique de commissariat aux comptes telle que posée par la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, mais d'une mission ad hoc, qui consiste seulement à s'assurer que les CARPA ont bien mis en place les instruments susceptibles de leur permettre de faire face à ces nouvelles contraintes.
Certes, la frontière entre les investigations et méthodes qui peuvent ou non être diligentées dans ce cadre par les commissaires aux comptes n'est pas nécessairement aisée à tracer. Elle l'est d'autant moins qu'à l'exception des commissaires aux comptes intervenant déjà dans les CARPA pour les missions d'aide juridictionnelle, le monde des CARPA est pour la plupart de ces professionnels une « terra incognita ». Comme le président BRUGUES, je suis néanmoins persuadé que les deux professions sauront définir les modalités de ce contrôle de manière à assurer sa pleine efficacité dans le respect des règles régissant chacune d'entre elles ; et la présence ici du président Kling en est un excellent augure.
Sachez en tout cas, d'une part, qu'elles y travaillent activement, et, d'autre part, que la Chancellerie, partie prenante à toutes ces discussions, veillera en toute hypothèse à ce que l'esprit des textes récemment publiés soit pleinement préservé.
Je vais maintenant laisser vos débats se poursuivre. Je ne doute pas qu'ils ne soient, pour vous, l'occasion de soulever et de clarifier nombre de questions très pratiques relatives à la mise en oeuvre d'une réforme que nous avons, tous, je crois, appelée de nos voeux.
Il est en effet de notre intérêt commun que perdure et se renforce une institution que certains, justement admiratifs de l'équilibre qu'elle a su instaurer entre les intérêts du justiciable, des pouvoirs publics et de votre profession, ont pu qualifier de « formule magique ».