Texte intégral
Le Figaro : Vous avez gagné la bataille contre Bruno Mégret, mais à quel prix. On le voit dans les élections partielles.
Jean-Marie Le Pen : Je ne suis pas d'accord. Nous sommes en progrès par rapport au résultat des européennes. Si on prend les dix dernières partielles, seuls quatre de nos candidats ne passent par la barre des 5 %. Mégret, lui, dégringole. À descendre comme cela, il va bientôt trouver du pétrole ! Cela dit, c'est évident, le Front a subi un gros coup dur. Quand un type est renversé volontairement par la voiture de son voisin, il a des fractures et des chocs traumatiques. Le blessé se retrouve d'abord en soins intensifs, puis il rentre en convalescence. Après, on fait en sorte de le remettre sur pied.
Le Figaro : Et vous en êtes où ?
Jean-Marie Le Pen : Disons que notre convalescence se termine. Lors de notre prochain congrès, en avril 2000, le FN sera complètement d'attaque. Avec comme objectifs les municipales, les cantonales, les législatives, la présidentielle et même les sénatoriales de 2002.
Le Figaro : Vous avez des nouvelles de ceux qui vous ont quitté ?
Jean-Marie Le Pen : J'aurais sans doute eu zéro chez Machiavel parce que je n'ai pas une mentalité à surveiller les gens de chez moi. Je sais donc peu de chose sur eux, mais je trouve tout de même curieux que M. Mégret passe ses journées à parcourir la France alors que, en principe, il est maintenant haut fonctionnaire au ministère des transports que dirige M. Gayssot.
Le Figaro : Certains partis, dont le RPF, chassent sur vos terres…
Jean-Marie Le Pen : Le phénomène de lepénisation de la vie politique est en plein développement. Pasqua et Villiers, par exemple, s'alignent sur nos positions. Et il y en a même quelques-uns à gauche qui empruntent nos thèmes. Par exemple, sur la sécurité.
Le Figaro : Vous pourriez dialoguer avec Pasqua et Villiers ?
Jean-Marie Le Pen : Je suis ouvert au dialogue, mais je ne vais pas prendre en considération un mouvement qui n'existe pas encore. D'autant qu'on sait bien que la vocation de Charles (NDLR : prononcé avec l'accent) est, en réalité, de ramener les brebis égarées au bercail.
Le Figaro : La Cour de cassation vient de confirmer votre condamnation à une année d'inéligibilité. Vous allez perdre vos mandats de député européen et de conseiller régional…
Jean-Marie Le Pen : Pendant une année, effectivement, je ne suis pas éligible. Cette année-là, elle a commencé ». En revanche, je suis en désaccord total avec ceux qui prétendent que ma condamnation entraînerait la déchéance des mandats actuels. Dans son arrêt, la cour d'appel dit : « perte de l'éligibilité », et elles précisé : « limitée à l'éligibilité ». En outre, le code pénal dispose que les condamnations prononcées sur la base de l'article 131-26 et 131-27 ne peuvent entraîner la perte des mandats électifs ou syndicaux. C'est lumineux.
Le Figaro : Tout le monde n'est pas d'accord…
Jean-Marie Le Pen : Le gouvernement a tellement peur qu'on l'accuse de servir la soupe à Le Pen qu'il s'accroche à l'interprétation qui me serait la plus défavorable. Il peut prendre un décret en Conseil des ministres prononçant ma déchéance. Mais il est clair que, s'il s'agit ainsi, j'attaquerai ce décret pour excès de pouvoir devant le conseil d'État, et je solliciterai le sursis. Je me battrai jusqu'à la dernière limite. Je gêne, mais on ne me fera pas taire.