Texte intégral
Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux de participer pour la deuxième fois à vos rencontres annuelles et de manifester ainsi mon attachement au Comité national et à sa vocation d’instance de réflexion, de dialogue et d’information sur toutes les questions concernant les retraites et les personnes âgées. Le CNRPA, au niveau national, comme les CORERPA et les CODERPA dans leurs ressorts géographiques sont des lieux privilégiés d’expression de la sensibilité et des positions des personnes âgées sur les sujets qui les concernent spécialement. Ils apportent aux pouvoirs publics et à la société tout entière une aide indispensable à une prise de décision de qualité. Comme ministre du travail et des affaires sociales, je sais combien cette expression est aujourd’hui importante et nécessaire.
Comme l’ensemble de ses partenaires occidentaux, notre pays connaît de profondes mutations. Certaines comme le vieillissement de la population seront durables.
Ainsi, le nombre de retraités et de personnes âgées est en constante augmentation puisqu’il représente aujourd’hui 11,7 millions de personnes contre 10 millions en 1985.
Toutefois, face à ces évolutions, nul ne conteste que beaucoup a été fait en faveur des retraités et des personnes âgées. Sous la Cinquième République leur niveau de vie a considérablement augmenté c’est pour les Gouvernements qui se sont succédés un motif de satisfaction légitime.
L’état de santé de nos aînés s’est également amélioré de façon remarquable. Une des conséquences les plus sensibles en est un allongement de l’espérance de vie dont il faut, bien entendu, se féliciter. Il a toutefois pour contrepartie l’augmentation du nombre des personnes âgées dépendantes, généralement estimé à 700 000.
Dans le même temps, l’environnement économique que nous connaissons depuis maintenant deux décennies a fait du chômage une réalité quotidienne qui affecte chaque famille même si les populations les plus fragiles sont les plus affectées avec le risque pour certaines de basculer de la précarité dans l’exclusion. Dans ce contexte, les personnes âgées, grâce à leurs activités, à la solidarité qu’elles déploient envers les autres générations, notamment au rein du cercle familial, et souvent grâce tout simplement à leur présence rassurante, ont permis d’atténuer les effets de la crise.
Pour ma part, je suis persuadé qu’il faut aider les aînés à poursuivre leur rôle si précieux en matière de solidarité. La collectivité, elle, se doit d’apporter l’aide nécessaire aux personnes âgées qui sont affectées par une réduction de leur autonomie. Il s’agit là d’une juste réciprocité dans une société que nous voulons tous véritablement solidaire.
A cet égard, l’intervention de la loi du 24 janvier 1997 représente une étape supplémentaire importante dans l’amélioration de la situation de ceux de nos aînés qui rencontrent des difficultés pour accomplir les actes de la vie quotidienne.
Je voudrais insister sur l’importance de cette loi. Elle ouvre des perspectives et marque un changement profond dans l’approche de la prise en charge de la dépendance.
C’est une loi de transition. Son titre l’indique d’ailleurs très explicitement. Elle représente une première étape qui en appelle d’autres. Ce caractère transitoire ne lui enlève pas sa profonde originalité. Appelée à évoluer elle pose des principes durables.
Tout d’abord cette loi apporte une réponse claire à la question de la responsabilité de la coordination qui faisait l’objet de débats depuis des années. En effet, l’organisation de la coordination des financeurs des aides aux personnes âgées dépendantes est placée en tête de la loi. Le département en sera le maître d’œuvre et cette coordination sera mise en œuvre par convention entre le département et les organismes de sécurité sociale, ce qui paraît particulièrement bien adapté à la prise en compte de réalités très diverses selon les départements.
Le cahier des charges que doivent, aux termes de la loi, respecter les conventions départementales et que j’arrêterai prochainement recommandera aux partenaires la création d’une instance départementale de coordination et la présence en son sein des représentants du CODERPA.
Cette loi crée une prestation destinée aux personnes âgées dépendantes. On va ainsi mettre fin à une situation dans laquelle l’ambiguïté des textes conduisait trop souvent une pénalisation des usages.
La prestation spécifique dépendance est une prestation d’un type nouveau, moderne :
- la prestation sera en effet adaptée aux besoins d’aide de la personne puisque son montant résultera notamment d’une évaluation réalisée au lieu de vie de celle-ci par un des membres d’une équipe médico-sociale de proximité. Au cours de cette visite devrait s’instaurer un véritable dialogue avec le demandeur, ses proches, son médecin traitant si le demandeur le souhaite, permettant ensuite à l’équipe médico-sociale de proposer un plan d’aide concerté. Ce plan, après acceptation par le demandeur, servira à déterminer le montant de la prestation accordée. Il sera également le support de la coordination des intervenants auprès du bénéficiaire ;
- la prestation sera affectée au paiement de services effectivement reçus par son bénéficiaire. Ainsi sera réellement assurée une partie au moins de la prise en charge de la dépendance, dans des conditions claires et contrôlables.
Il faut souligner que cette affectation est également de nature à permettre l’aide aux aidants dont on parle tant et que le versement d’une prestation en espèces ne pouvait garantir.
Je sais que la prestation spécifique dépendance n’est pas exactement la prestation que le CNRPA avait appelée de ses vœux. Je tiens toutefois à vous dire que lors de l’élaboration de la loi et dans la préparation des décrets, j’ai été attentif à prendre en compte, chaque fois que cela était possible, vos préoccupations.
C’est ainsi que j’ai donné mon accord à un amendement prévoyant la publication annuelle par le comité national de la coordination gérontologique d’un rapport comprenant un bilan de l’application de la loi, bilan dont vous aviez regretté l’absence dans la proposition de loi du Sénat.
S’agissant de la composition de ce comité, votre souhait était que le CNRPA y soit représenté : la loi le prévoit explicitement et je veillerai à lui assurer une représentation conforme à son rôle.
Vous aviez souhaité que l’obligation alimentaire ne soit pas appliquée : elle ne le sera pas.
Vous aviez estimé que le plafond de ressources envisagé était trop bas : nous avons fait en sorte d’inscrire dans la loi ce qui doit y figurer, à savoir le relèvement du plafond pour un couple lorsque le bénéficiaire est en établissement et je suis en mesure de vous dire que les plafonds de ressources qui seront fixés par décret permettront d’attribuer la prestation à des personnes dont les ressources ne sont pas celles des plus démunis.
Enfin, le montant maximum de la prestation vous paraissait insuffisant au regard des charges imposées par la grande dépendance : là encore il est répondu à votre demande et ce montant va être fixé au niveau même de la MTP, c’est-à-dire 25 % au-dessus de celui de l’ACTP.
Cette loi représente donc une avancée importante dans l’aide aux personnes âgées dépendantes. Je sais que vous vous êtes émus des délais de publication des textes d’application de la loi. Je puis vous confirmer que ses décrets sont en cours d’examen au Conseil d’État et devraient donc pouvoir être prochainement publiés.
Je voudrais répondre à présent aux questions que vous avez posés, Monsieur BONNET.
S’agissant de la représentation des retraités et des personnes âgées dans les organismes qui traitent de leurs problèmes propres ou des problèmes de société, vous savez que nous avons avancé ces derniers temps même si nous n’en sommes pas encore arrivés à la situation que vous souhaitez.
Ainsi :
- quatre membres du CNRPA siègent dans les sections du Conseil économique et social ;
- trois siègent au conseil de surveillance du fonds de solidarité vieillesse ;
- trois également dans chacun des conseils de surveillance des organismes nationaux de sécurité sociale ;
- deux membres du comité siègent au conseil d’administration de la caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salaries ;
- un au conseil national de la vie associative ;
- un enfin au comité national de l’organisation sanitaire et sociale.
Ceci concerne les participations de membres du CNRPA dans des organismes nationaux.
Il convient d’ajouter pour le niveau régional la désignation, sur proposition des CODERPA, de représentants des personnes âgées dans la plupart des comités économiques et sociaux régionaux.
De plus, l’ordonnance du 24 avril 1996 portant mesures relatives à l’organisation de la Sécurité sociale a prévu la présence d’un représentant des retraités dans le conseil d’administration de la caisse régionale d’assurance vieillesse de Strasbourg, dans celui de chaque caisse régionale d’assurance maladie et de chaque caisse générale de sécurité sociale des départements d’outre-mer.
Vous avez exprimé le souhait du Comité national de voir instituer dans les CODERPA un second vice-président élu et de voir les CODERPA rendues obligatoires. Ces propositions sont intéressantes et nous les avions évoquées il y a quelques mois. La première recueille mon accord de principe. Il nous reste à la traduire dans les textes. Je ne vous cacherai pas cependant qu’il me paraît nécessaire de réfléchir encore à l’opportunité du caractère obligatoire des CORERPA. Faut-il créer une commission consultative à un niveau territorial qui ne détient pas de compétences à l’égard des retraités et des personnes âgées en particulier ? Ne conviendrait-il pas plutôt de rappeler aux préfets de région une disposition des circulaires des 7 avril 1982 et 2 mai 1988 précisant qu’il leur appartient d’examiner avec la collectivité régionale l’opportunité de la création d’un tel organisme qui me paraît avoir pour vocation d’assurer une coordination entre les CODERPA d’une région, leur représentation étant désormais assurée dans les comités économiques et sociaux régionaux.
Vous avez posé la question de la pérennité du financement des CODERPA et des CORERPA qui est d’actualité. Sur ce point je voudrais vous rassurer en ce qui concerne cette année. Malgré la rigueur budgétaire, nous sommes en mesure de mettre à la disposition des services déconcentrés des crédits, certes un peu inférieurs à ceux de 1996, mais qui permettront aux comités départementaux et aux conférences régionales de fonctionner dans de bonnes conditions.
En ce qui concerne les années suivantes, vous savez combien je souhaite parvenir à assurer la stabilité de leur financement. Vous vous souvenez sans doute que j’ai pris récemment une initiative dans ce but qui n’a pu aboutir. Je puis vous assurer que je ne souhaite pas en rester là.
Vous avez enfin émis le souhait de voir les retraités qui donnent une partie de leur temps pour des activités d’utilité sociale bénéficier d’une déduction fiscale pour ce don de temps à l’instar de la déduction pour les dons pécuniaires aux œuvres d’intérêt général. C’est en effet une proposition très intéressante mais vous ne vous étonnerez pas que je vous demande un délai pour l’expertiser car elle comporte naturellement un enjeu budgétaire.
Je ne voudrais pas terminer sans vous rassurer, M. BONNET, sur les modalités financières de fonctionnement du CNRPA pour cette année. Ces modalités restent celles des années précédentes. En revanche, comme vous le savez, nous devons définir un nouveau dispositif pour l’an prochain. J’ai demandé an directeur de l’action sociale d’examiner ce dossier au plus vite en concertation avec vous-même et les services du contrôleur financier de manière à déterminer une procédure qui soit la plus simple possible tout en tenant compte des principes budgétaires applicables aux dépenses de l’espèce.
Voilà, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, les quelques points dont je voulais vous faire part aujourd’hui. Je sais la qualité de vos réflexions et je ne doute pas de l’excellent travail que vous avez réalisé pendant ces trois journées.
Ces rencontres annuelles des représentants de tous ceux qui œuvrent bénévolement chaque jour dans le département, dans la région et au niveau national pour que nos alliés conservent la place qui doit être la leur dans notre société, permettent des synthèses dont je sais la richesse. Je ne manquerai pas d’en prendre connaissance avec attention pour poursuivre avec vous le dialogue permanent qui nous permet d’avancer, avec mesure mais résolument, dans la voie de la consolidation de la citoyenneté des retraités et des personnes âgées.
Je vous remercie de votre attention.