Texte intégral
Le rapport que Madame Rassat vient de remettre au garde des sceaux, Jacques Toubon, qui le lui avait commandé, sous couvert de protéger le secret de l'instruction vise à « verrouiller » l'information judiciaire et constitue une attaque intolérable contre la liberté de la presse, et plus généralement contre la liberté d'expression, droit intangible reconnu par notre Constitution.
L'ensemble des mesures préconisées par le rapport Rassat n'est rien d'autre qu'une tentative cynique de mettre en oeuvre les recettes miracles qui permettraient à l'avenir d'étouffer les scandales financiers et politiques susceptibles de gêner le gouvernement en place. Et, pour obtenir ce résultat et terroriser les intéressés, Madame Rassat n'hésite pas à prévoir des sanctions exorbitantes : financières contre les journalistes (300 000 F d'amende !), professionnelles contre les magistrats et les avocats (allant jusqu'à l'interdiction d'exercer leur métier pendant cinq ans !), au mépris des libertés que toute démocratie a le devoir de respecter.
On trouve d'autre part avec effarement dans ce rapport toute une série de mesures qui, en revenant sur les progrès accomplis au cours des dernières années (par exemple la présence de l'avocat pendant la garde à vue pour assurer les droits de la défense, ou la possibilité pour des personnes morales ou des syndicats de se constituer parties civiles dans une affaire), représenteraient une redoutable régression de notre état de droit.
On peut heureusement espérer que les menaces contenues dans le rapport Rassat se condamnent, par leur excès même, à rester lettre morte, comme toutes les tentatives faites dans le passé pour museler la presse. Le Parti socialiste y veillera, avec la vigilance qui s'impose.