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Ouest-France : Avec vos mesures en faveur de l’artisanat annoncées il y a onze mois, réussirez-vous à tenir l’objectif de 100 000 emplois par an ?
J.-P. Raffarin : Il faudra attendre décembre pour faire un premier bilan. L’ensemble du nouveau dispositif - financement de l'apprentissage, soutien accru à la qualification des maîtres-artisans, réforme de l'urbanisation commerciale - n'est en effet opérationnel que depuis cet été. Mais je pense que nous tiendrons le rythme des créations de 300 000 emplois sur trois ans, souhaité par l'Union professionnelle artisanale.
Ouest-France : Quel sera le plafond pour la baisse des impôts sur les bénéfices réinvestis ?
J.-P. Raffarin : L’arbitrage que j'ai obtenu, c'est de faire descendre le taux de l'impôt de 33,33 % à 19 %. Pour le reste, ce sera aux parlementaires d'en décider Mais ce que je souhaite, c'est que le plafonnement soit élargi. On partait d'une hypothèse de base de 200 000 francs maximum. M. Rebuffel, patron de la CGPME, demande un million. Je suis assez tenté par une voie médiane, entre 400 000 et 500 000 francs. Ce serait un bon signal dans un pays où les pouvoirs constitués ne sont pas habitués à prendre en compte une logique PME. Défendre les PME reste un combat permanent.
Ouest-France : Et en ce qui concerne la suppression de l'aide aux chômeurs créateurs d'entreprise. Que va-t-il se passer ?
J.-P. Raffarin : Nous voulons rebâtir une politique nationale de création d'entreprises. On s'est trop laissé obséder par le taux mensuel de créations. Ce n'est pas un indicateur économique sérieux quand on sait qu'il y a un taux de « mortalité » des entreprises de 50 % pour les cinq premières années. Afin de diminuer ce taux de moitié, nous allons concentrer les aides sur les projets qualifiés, remplacer l'aide a priori aux chômeurs créateurs d'entreprises par un dispositif concentré sur des projets qualifiés a posteriori. On change de logique. Avant, c'était la prime d'abord, le projet ensuite. Désormais, ce sera l'inverse.
Ouest-France : Comment faire pour atteindre cet objectif ?
J.-P. Raffarin : Nous allons d'abord engager un programme national de valorisation de l'esprit d'entreprise pour bien montrer que ce n'est pas un acte d'humeur mais d'ardeur. Développer ensuite une politique de qualité « prénatale » en aidant celui qui a un projet à le bâtir, en mettant en place un conseil national de la création d'entreprise. L’idée, c'est d'avoir une démarche qualité dans la création comme elle existe dans tous les processus de management. Enfin, il s'agit d'avoir un accompagnement « postnatal », grâce notamment au réseau local « Entreprendre en France » et à l'ensemble des sociétés spécialisées. Le créateur est trop isolé en France.
Ouest-France : In fine, est-ce que cela ne diminuera pas le volume des aides ?
J.-P. Raffarin : Globalement, les financements ne seront pas diminués. S'il y a d'un côté la diminution de l'aide aux chômeurs créateurs d'entreprise, il y a de l'autre le travail de la Banque de développement des PME. Il y a aussi le milliard de prêts bonifiés pour l'installation dans l'artisanal Simplement, nous passons d'une logique de subvention à une logique de financement.
Ouest-France : Pour améliorer la discussion entre PME et banques, vous annoncez aussi une charte des bonnes relations. Sur quels fondements ?
J.-P. Raffarin : Il serait souhaitable que l'habitation principale du chef d'entreprise ne fasse plus partie des garanties exigées par la banque, qu'elle soit protégée de telle façon que le chef d'entreprise puisse mettre sa famille à l'abri de sa démarche d'entreprise. Par ailleurs, il serait utile que les banques créent en leur sein - certaines l'ont déjà fait - un dispositif de médiation et de possibilité d'appel. Cette charte pourrait voir le jour à la fin de l'année.