Texte intégral
Le Matin : La rigueur, selon la CFDT, est subordonnée à un certain nombre de conditions. Quelles sont-elles ?
Jean Kaspar : Notre premier objectif est de réduire la durée du travail. Je rendrai publiques, jeudi prochain, nos propositions. Le passage aux 39 heures a ouvert la voie à la négociation. Dans certains secteurs (transports routiers, par exemple), elle a déjà permis d'abaisser à 40 heures la durée maximale du travail. Plus globalement, elle est responsable de la création ou du non-licenciement de quelque 70 000 salariés. Mais il faut passer la vitesse supérieure. Aujourd'hui, nous nous fixons comme objectif d'obtenir pour toutes les professions, et au plus tard en 1985, le passage aux 35 heures.
Le Matin : Vous parlez aussi d'augmenter le pouvoir d'achat du SMIC…
Jean Kaspar : Ici le but de la CFDT est d'obtenir les 3 900 F par mois sur la base d'avril 1982. En d'autres termes, nous aurions dû obtenir 7 % d'augmentation du pouvoir d'achat en 1982. Nous n'avons eu en fait que 4 %. D'où un retard de trois points. Cette année, il faut donc que le pouvoir d'achat du SMIC augmente de 7 %. Cela signifie, avec une inflation de 8 %, un SMIC de 4 064 F. J'ajoute que pour éviter un écrasement de la hiérarchie des salaires, la CFDT préconise un salaire en « deux éléments ». Une partie des augmentations pourrait se faire en fonction de la hausse des prix ; l'autre partie dépendrait de la qualification et du secteur du salarié. J'ai envoyé aujourd'hui une lettre au Premier ministre pour lui demander de réunir le plus tôt possible la Commission nationale de la négociation collective. Je souhaite que cette idée de salaire à deux vitesses, dont le IXe Plan a reconnu le bien-fondé, soit discutée le plus rapidement possible.
Le Matin : Vous préconisez aussi de développer les investissements productifs ?
Jean Kaspar : L'idée de la CFDT, c'est de dégager des moyens financiers pour que les entreprises puissent développer des investissements créateurs d'emplois. Le problème de l'emploi est en effet au coeur des objectifs des politiques économiques et sociales. Les moyens que nous préconisons seront précisés très prochainement.
Le Matin : Et la réforme fiscale ?
Jean Kaspar : C'est notre dernière proposition. Ici notre objectif est de procéder par avancées successives compte tenu des résistances sociologiques. Nous ne pouvons avancer d'ailleurs que progressivement. Sans créer d'impôts nouveaux, nous pouvons tout à fait augmenter les taux des impôts existants, augmenter par exemple ceux de l'impôt sur la succession ou ceux de l'impôt sur les grandes fortunes. Autre possibilité : majorer le taux de l'impôt direct. On a créé une tranche à 65 %. Pourquoi ne pas en créer une à 70 % ?