Déclaration de M. André Santini, secrétaire d'Etat en charge de la fonction publique, sur la réflexion et la réforme en cours dans la fonction publique, notamment en matière de gestion des ressources humaines, de recrutement et de notation, Paris le 8 février 2008.

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Circonstance : Clôture de la semaine de la Fonction publique du 1er au 8 février 2008

Texte intégral

Mon Général
Messieurs les Directeurs Généraux,
Mesdames et messieurs les DRH,


Cette table-ronde vient clôturer de la Semaine de la Fonction publique, que nous avons souhaité organiser pour rendre compte de l'avancement de notre débat national sur les valeurs, les missions et les métiers de la fonction publique. Ce débat est ouvert depuis le 1er octobre et il s'achèvera en mars prochain, avec la remise d'un Livre blanc sur l'avenir de la fonction publique. La table-ronde vise à installer un Comité de DRH, issus du public et du privé, en charge d'échanger sur les bonnes pratiques en matière de gestion des Ressources humaines.

Les débats que nous avons déjà conduits ont permis de mettre au jour deux éléments clés : d'une part, l'une des principales préoccupations des fonctionnaires est la mobilité professionnelle. C'est pourquoi nous avons préparé un ensemble de textes législatifs et réglementaires destinés à la favoriser. Un projet de loi sera également déposé à l'Assemblée nationale au printemps. L'enjeu porte aussi sur la mobilité entre le secteur public et le secteur privé : la nécessité de créer des passerelles public-privé vient d'être mis en exergue par le rapport de la Commission Attali ; d'autre part, de réels points de convergence existent entre secteur public et secteur privé en matière de gestion des Ressources humaines.

Je commencerai par vous livrer une conviction : je pense que l'Etat, pour la gestion de ses agents, notamment, a tout intérêt à s'inspirer du privé, tout en se gardant de deux travers diamétralement opposés : le premier est d'idéaliser le fonctionnement du secteur privé. Chacun sait que les grandes entreprises sont bien souvent confrontées aux mêmes difficultés et aux mêmes insuffisances que les grands organismes publics. Le second est de décrier le fonctionnement du secteur privé sans autre forme d'examen. Rappelons que les frontières entre les secteurs public et privé ne sont pas toujours simples à établir. Le "secteur public", le "service public" et la "fonction publique" désignent des périmètres qui ne se recouvrent pas nécessairement. Confronter les expériences des secteurs public et privé est une nécessité. J'y vois pour ma part deux grandes catégories d'avantages.

Pour la fonction publique, s'intéresser au secteur privé a le mérite de mettre un terme à un certain nombre d'idées reçues. On parle, en effet, souvent des "spécificités" du secteur public. Elles sont moins nombreuses qu'on ne le dit souvent. Prenons quelques exemples. En matière de rapport au temps, il paraîtrait que le temps du public serait le temps long de la bureaucratie, chargée de la stabilité et de la continuité des normes, alors que le privé primerait le temps court et la réactivité du marché. J'ai le sentiment que l'on confond là une prétendue "spécificité" avec un mode de fonctionnement et d'organisation. Les CDD existent dans la fonction publique, ou même dans l'armée dans laquelle il est possible d'être recrutés parfois pour quatre ans. Je ne veux pas dire que l'action de l'Etat doit désormais s'inscrire dans le temps court. Mais il convient en tous cas que l'Etat évite les travers du temps long : la promotion et la rémunération strictement à l'ancienneté en sont les exemples les plus caricaturaux en matière de GRH. Voilà pourquoi par exemple nous travaillons à introduire la rémunération à la performance au sein de la fonction publique : elle est non seulement plus juste, mais aussi plus motivante. Elle concerne déjà les directeurs d'administration centrale et d'établissement public. Nous engagerons en 2008 son extension progressive à tous les cadres. Il est un autre exemple : il concerne les modes de recrutement. Dans le secteur privé, le recrutement est toujours individualisé puisqu'il se concrétise sous la forme d'un contrat de gré à gré entre un salarié et son employeur. Dans la fonction publique, rien de tel : ce qui prévaut, c'est un concours.

La déclaration des droits de l'homme et du citoyen fait de l'égalité d'accès aux emplois publics un principe de valeur constitutionnelle. Cela impose-t-il pour autant de proposer des concours aux épreuves académiques, qui excluent précisément ceux qui n'en ont pas les codes ? Les entreprises, elles aussi, sont face à la même exigence : le principe de non-discrimination est clairement inscrit dans les traités européens. Elles y répondent pourtant par des modes de recrutement plus souples, qui n'hypothèquent pas la tentative de gestion par les compétences. Voilà le type de considération qui nous conduira à réviser les modes d'accès et de promotion dans la fonction publique dès 2008, afin qu'il soit davantage tenu compte des mérites et des compétences professionnels des candidats. Là aussi, votre expérience nous intéresse.

Il est un deuxième point que je voudrais souligner ici : les synergies entre secteurs privé et public peuvent également s'exprimer au niveau des outils de gestion budgétaire et managériale. En termes de gestion des ressources humaines, nous avons beaucoup à apprendre du secteur privé. Qu'il soit, en effet, public ou privé, le gestionnaire doit remplir certaines missions de base (anticiper, recruter, former, évaluer, ...). Pour ces missions, le secteur public peut s'inspirer des pratiques qui sont en vigueur dans le secteur privé. Cela dessine donc précisément l'ambition de ce Comité des DRH : il doit permettre l'échange entre les administrations et les entreprises publiques et privées pour :

- alimenter tout de suite la réflexion en présentant quelques bonnes pratiques en matière RH ;
- contribuer sur la durée à la mise en oeuvre de la réforme en accompagnant la modernisation de la fonction publique.

Tout ne peut se résoudre par des textes. Il faut aussi conduire une véritable réforme managériale. Et je suis heureux à cet égard d'installer aujourd'hui ce Comité des DRH. Je remercie ses 16 membres d'avoir accepté d'y participer.


Source http://www.le-nouveaucentre.org, le 12 février 2008