Interview de M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Education nationale et de la jeunesse, à Europe 1 le 14 février 2019, sur la mise en place du dispositif du service national universel.

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Intervenant(s) : 
  • Gabriel Attal - Secrétaire d'État auprès du ministre de l'Education nationale et de la jeunesse

Média : Europe 1

Texte intégral

AUDREY CRESPO-MARA
Bonjour, Gabriel ATTAL.

GABRIEL ATTAL
Bonjour.

AUDREY CRESPO-MARA
Vous n'avez pas encore 30 ans, ce qui fait que vous appartenez à une génération qui n'a pas fait son service militaire, ça vous manque ?

GABRIEL ATTAL
Je pense qu'il manque un moment effectivement de brassage social, de creuset républicain, on apprend un certain nombre de choses, les risques ont évolué, on n'a plus besoin d'apprendre à toute une génération à manier les armes, mais oui, je pense qu'il manque un moment.

AUDREY CRESPO-MARA
Alors vous êtes en charge de l'organisation du service national universel qui sera testé dans 13 départements au mois de juin, ça ressemble de loin au service militaire, sauf que ça concerne nos enfants dès la fin de la 3ème quand ils viennent juste de quitter le collège, c'est jeune ?

GABRIEL ATTAL
Dès la fin de la Seconde, donc c'est après le collège…

AUDREY CRESPO-MARA
Fin de Seconde.

GABRIEL ATTAL
Oui fin de Seconde, il y a plusieurs différence avec le service militaire, d'abord ça concerne tout le monde, c'est-à-dire aussi les femmes, les filles n'étaient pas concernées par le service militaire. Ensuite encore une fois l'objectif n'est pas d'apprendre à toute une génération à manier les armes, l'armée s'est professionnalisée, on a moins de risques, des risques différents qu'avant.

AUDREY CRESPO-MARA
C'est 15 jours.

GABRIEL ATTAL
C'est deux fois 15 jours. 15 jours d'abord en internat, en mobilité, c'est-à-dire que les jeunes ne feront pas leur service national dans leur département, dans leur région, mais dans une autre.

AUDREY CRESPO-MARA
Pourquoi les éloigner ?

GABRIEL ATTAL
Parce que c'est important pour élargir le champ des possibles des jeunes, pour leur faire découvrir un autre territoire, d'autres opportunités économiques, d'autres opportunités de formation…

AUDREY CRESPO-MARA
Ils feront quoi ?

GABRIEL ATTAL
… faire tomber un certain nombre de stéréotypes. Il y aura un certain nombre de formations, des formations sur les questions de sécurité, comment réagir face à un attentat terroriste ? Comment se protéger ? Comment réagir face à une catastrophe naturelle, intégrer un poste de secours ? Comment réagir face à une disparition en organisant une battue pour retrouver la personne disparue ? Ces réflexes là, les jeunes ont envie de les avoir, on va les former. Et puis des formations sur la question des institutions, des valeurs de la République, des formations sur les éco-gestes et puis des bilans aussi, bilan de santé complet pour tous les jeunes, bilan de maîtrise de la langue française, bilan point d'étape pour savoir où en sont les jeunes dans leur insertion, c'est tout ça qui va être proposé.

AUDREY CRESPO-MARA
A partir de quelle date ce sera obligatoire le service national universel ?

GABRIEL ATTAL
Alors on travaille sur le calendrier, il y a un rapport qui propose une généralisation en 2026, moi j'ai demandé qu'on regarde pour aller plus vite, donc on ira probablement plus vite.

AUDREY CRESPO-MARA
Alors Gabriel ATTAL, Emmanuel MACRON envisagerait d'intégrer l'examen du permis de conduire dans le cadre du service national universel, qu'en est-il réellement ?

GABRIEL ATTAL
Oui, c'est absolument ce sur quoi on travaille et d'ailleurs dans la nostalgie qu'on entend parfois du service militaire on entend souvent au moins ça permettait d'avoir le permis. Dès la phase pilote de juin prochain, les jeunes qui seront volontaires pour cette phase pilote du service national auront leur code de la route gratuitement, c'est-ce qu'on va leur proposer dans le cadre de cette phase pilote. Donc c'est un plus très important. Moi je suis aussi ministre en charge de la Jeunesse et la mobilité, c'est un frein énorme pour des jeunes pour aller saisir un apprentissage, un emploi, une opportunité. Le permis de la route, le permis de conduire, c'est parfois un coût trop important pour certains jeunes, l'idée c'est de faire en sorte qu'il coûte moins, il y a un rapport qui a été remis sur ce sujet, on va travailler aussi avec les auto-écoles évidemment, mais on veut élargir le champ du possible des jeunes en leur permettant de bouger et pour ça il faut les aider à avoir le permis moins cher.

AUDREY CRESPO-MARA
Donc rendre le code de la route gratuit, c'est un cadeau de l'Etat pour que la corvée du service national universel soit mieux acceptée ?

GABRIEL ATTAL
Non, encore une fois, moi je ne vois pas ça comme un cadeau, c'est un outil au service de la mobilité des jeunes, c'est un drame aujourd'hui vous avez…

AUDREY CRESPO-MARA
Gratuité, c'est un cadeau.

GABRIEL ATTAL
Vous avez des centaines de milliers de jeunes qui naissent chaque année dans des territoires, dans des quartiers, et qui n'ont que ce territoire ou ce quartier comme horizon pendant plusieurs décennies. Et qui choisissent leur formation, leur possibilité d'insertion dans le scope unique de ce quartier-là. Nous, ce qu'on veut c'est élargir le champ des possibles, montrer qu'il y a d'autres choses sur le territoire, qu'il y a plein d'opportunités et pour ça il faut qu'ils puissent bouger.

AUDREY CRESPO-MARA
Et est-ce que vous êtes favorable au permis dès l'âge de 17 ans, donc ?

GABRIEL ATTAL
Ça, ça fait partie des propositions qu'on regarde, moi je n'y vois pas d'opposition de principe, on va regarder à partir du rapport qui a été remis par Françoise DUMAS.

AUDREY CRESPO-MARA
Gabriel ATTAL dans les débats la moyenne d'âge est assez élevée, vous croyez que les jeunes sont intéressés de participer à des débats sur la réindexation des retraites et ses conséquences sur le déficit public ?

GABRIEL ATTAL
Quand le Grand débat a été lancé, moi qui suit en charge de la jeunesse, tout de suite, j'ai senti le truc, j'ai senti que si on ne se mobilisait pas particulièrement, les jeunes ne se déplaceraient pas dans des réunions et qu'il fallait organiser un cadre spécifique pour les jeunes.

AUDREY CRESPO-MARA
Et c'est le cas.

GABRIEL ATTAL
Oui, c'était le cas au début, on a organisé un cadre spécifique, on a mobilisé les MJC, on a mobilisé des réseaux associatifs de jeunes, Animafac, la jeune chambre économique, les maisons des lycéens pour qu'ils organisent des débats pour les jeunes. On a fait plusieurs débats avec le Premier ministre, avec le président de la République, avec les jeunes et de quoi on se rend compte ? Un : Que les jeunes, ils ont envie de participer pour peu qu'on organise un cadre qui leur permette de le faire, parce que se retrouver dans une salle en mairie avec des gens qui ont toute une expérience, tout un vécu, ça peut être un peu intimidant pour s'exprimer quand on n'a pas la même expérience et le même vécu.

AUDREY CRESPO-MARA
Vous animerez vous d'autres débats ?

GABRIEL ATTAL
Oui, jeudi prochain, mercredi prochain pardon, le 20 avec Marlène SCHIAPPA, on va animer un débat avec jusqu'à 1000 jeunes qui sont des jeunes en service civique, qui vont venir débattre avec nous.

AUDREY CRESPO-MARA
Marlène SCHIAPPA, est-ce que vous pourriez vous rendre comme elle dans l'émission de Cyril HANOUNA pour toucher des jeunes justement ?

GABRIEL ATTAL
Moi je n'ai aucun tabou, et d'ailleurs Cyril HANOUNA m'a dit qu'il était intéressé à l'idée d'organiser une émission sur le service national universel et dans ce contexte-là évidemment je serai présent si c'est le cas.

AUDREY CRESPO-MARA
Gabriel ATTAL, selon Paris-Match le nombre de Français qui soutiennent l'action du président a augmenté de 11 points en 2 mois, c'est l'effet de la campagne qu'il mène actuellement à travers la France ou la politique de fermeté à l'égard des manifestants et les casseurs ?

GABRIEL ATTAL
Il n'y a pas de campagne…

AUDREY CRESPO-MARA
Si un peu quand même.

GABRIEL ATTAL
Il y a un dialogue avec les Français. Moi, je suis étonné parfois on nous dit, le président, on ne le voit pas assez discuter avec les Français, est-ce qu'il est déconnecté et puis quand il échange directement sans tabou en n'éludant aucune question avec les Français, on explique que c'est une campagne, il est juste connecté au pays. Et il le fait avec des élus, il le fait avec des citoyens, il le fait avec des jeunes, il va le faire aujourd'hui avec encore des élus et puis le monde économique…

AUDREY CRESPO-MARA
Sa popularité remonte.

GABRIEL ATTAL
… dans l'Indre. Je pense que c'était attendu par les Français, c'est important qu'il le fasse.

AUDREY CRESPO-MARA
Un sondage paru hier annonce que 56 % des Français estiment que la mobilisation des gilets jaunes doit s'arrêter, c'est la conséquence des débordements de violence autour des manifestations ?

GABRIEL ATTAL
Moi je pense qu'un grand nombre de Français en ont plein… en ont ras-le-bol, ras-le-bol de cette mobilisation, de ces dérives, moi honnêtement quand on regarde la mobilisation des gilets jaunes le 17 novembre, on voit bien les mots d'ordre, on voit bien les questions de mobilité, les questions de pouvoir d'achat, les questions de ruralité. D'ailleurs on les a entendu, on a apporté une première réponse, 10 milliards d'euros de pouvoir d'achat annoncé par le président de la République, on va en annoncer d'autres après le Grand débat. Aujourd'hui dans les manifestations, dans les mobilisations, qu'est-ce qu'on voit à part les violences, moi je ne vois plus les mots d'ordre, je ne les vois plus, à par la contestation du pouvoir ou la contestation des institutions de la République.

AUDREY CRESPO-MARA
Donc ce ras-le-bol des Français, vous le partagez ?

GABRIEL ATTAL
Je le partage totalement, oui et c'est le ras-le-bol aussi des commerçants qui ne peuvent plus exercer dans de bonnes conditions le week-end, c'est le ras-le-bol des salariés qui ont parfois été mis au chômage partiel ou au chômage technique parce qu'il y a une baisse d'activité dans leur commerce ou dans leur PME. Ça devient insupportable pour beaucoup de Français, donc je comprends parfaitement moi, qu'il y ait un agacement.

AUDREY CRESPO-MARA
Alors l'opinion se retourne, mais suffira-t-il de demander aux gilets jaunes de s'arrêter pour qu'ils le fassent ?

GABRIEL ATTAL
Moi je suis attaché au droit constitutionnel de manifester, si des gens ont envie de manifester, qu'ils le fassent, pour peu qu'ils respectent les règles, déclarer sa manifestation, on voit que c'est quand même une règle s'est un peu perdue. Et ensuite ne pas être coupable ou couvrir des violences, des dégradations, des attaques, c'est quand même ça qu'on a vu. On a vu des attaques d'institutions, on a vu des attaques de forces de l'ordre et moi je considère que quand on ne dénonce pas, on couvre.

AUDREY CRESPO-MARA
Mais l'opinion qui se retourne, est-ce que vous pensez que c'est la fin des gilets jaunes ?

GABRIEL ATTAL
Moi je ne dirais pas ça, je ne suis pas Madame Irma et je ne suis pas là pour tirer des plans sur la comète. Il y a est un sujet de fond, encore une fois il y a des sujets de fond notamment des sujets de mobilité, des sujets de service public, des sujets de pouvoir d'achat, on est en train de les traiter avec le grand débat national, il y aura une réponse…

AUDREY CRESPO-MARA
Il faudra y répondre.

GABRIEL ATTAL
Il y aura une réponse politique qui sera faite par le président de la République à l'issue de ce débat.

AUDREY CRESPO-MARA
Merci Gabriel ATTAL.

GABRIEL ATTAL
Merci.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 18 février 2019