Texte intégral
CECILE DE MENIBUS
C'est le petit déjeuner politique d'Elisabeth BORNE, qui est ministre de la Transition écologique et solidaire et chargée des transports.
PATRICK ROGER
Bonjour Elisabeth BORNE.
ELISABETH BORNE
Bonjour.
PATRICK ROGER
Alors avant de parler transports, voitures, trains, avions même, un mot sur la démission de Laurent WAUQUIEZ chez Les Républicains, que dites-vous aux LR, aux maires notamment un petit peu déboussolés par cette défaite aux européennes ?
ELISABETH BORNE
Ecoutez, je pense que c'était inéluctable que Laurent WAUQUIEZ démissionne, mais au-delà, c'est plutôt un sujet de ligne politique, je pense que dans les européennes, finalement, on n'a pas très bien compris quel était le projet, est-ce qu'ils sont pour l'Europe, contre l'Europe, avec qui ils veulent s'allier au niveau européen, avec ORBAN ou avec d'autres. Voilà, donc je pense que c'est un enjeu aussi pour eux de clarifier leur ligne politique, et c'est sans doute ce qui a un peu déconcerté leurs électeurs.
PATRICK ROGER
Mais est-ce qu'il y a de la place encore d'ailleurs aujourd'hui pour une droite en France ?
ELISABETH BORNE
Eh bien, c'est à eux de le dire et de voir s'ils peuvent proposer un projet français…
PATRICK ROGER
Elle n'est pas incarnée par Emmanuel MACRON, la droite finalement en France ?
ELISABETH BORNE
Enfin, je ne pense pas qu'Emmanuel MACRON incarne la droite, il incarne une ligne progressiste, une ligne écologique, et voilà, c'est le projet qui a été voté…
PATRICK ROGER
Avec beaucoup de gens de droite, vous avez beaucoup de vos collègues qui sont issus de la droite ?
ELISABETH BORNE
Eh bien, il y a des gens qui sont issus de la droite et des gens issus de la gauche, et c'est une ligne qui veut promouvoir une Europe qui protège, qui aussi accorde une place très importante aux enjeux écologiques, et je pense que c'est ce que les Français attendent.
PATRICK ROGER
Oui, alors, c'est le jour J pour votre loi Mobilités, 3.500 amendements, ça va durer 2 semaines, ça change par rapport à ce qui se faisait auparavant où les débats pouvaient durer, s'éterniser, là, cette fois-ci, ce sera plus cadré, malgré les 3.500 amendements, Elisabeth BORNE ?
ELISABETH BORNE
Alors, on est dans ce qu'on appelle le temps programmé, donc il y a un temps accordé à chacun des groupes parlementaires, moi, je pense que ces 3.500 amendements, ça montre que c'est un sujet qui vient dans le débat politique, et je pense que c'est une bonne chose, la mobilité, c'est un sujet qui concerne tous les Français, leur vie quotidienne. Jusqu'à présent, on était plutôt limité à des sujets pour ou contre telle grande infrastructure, là, c'est un projet de loi qui a un objectif clair, des transports plus faciles, moins coûteux, plus propres, et ça intéresse forcément tous les Français et les députés…
PATRICK ROGER
Oui, eh bien, c'est un sacré défi pour les 20 ans qui viennent puisque la loi s'inscrit un peu pour les 20 ans qui viennent, jusque 2040. D'abord, sur la prime mobilité, est-ce que cette prime que les employeurs doivent accorder à leurs salariés, elle va être obligatoire ou pas dans votre loi, 400 euros par an, je crois que c'est ça ?
ELISABETH BORNE
Alors, ce qui va être obligatoire, c'est de discuter des sujets de mobilité, de déplacement domicile-travail dans les entreprises, c'est un thème de dialogue social. Je pense que c'est très important, parce que je suis convaincue que les employeurs peuvent faire beaucoup pour faciliter ces déplacements domicile-travail qui sont encore trop souvent une galère pour les Français, qui peuvent peser sur leur pouvoir d'achat, et le chef d'entreprise, il peut aider à simplifier ces trajets domicile-travail en jouant sur les horaires, sur le télétravail, en permettant, en facilitant le covoiturage, donc je pense que c'est un sujet important, et puis, ils auront aussi dans l'entreprise à débattre de la façon dont on accompagne financièrement la mobilité des salariés…
PATRICK ROGER
Oui, mais obligatoire ou pas alors finalement ?
ELISABETH BORNE
Ça n'est pas obligatoire, c'est la discussion qui est obligatoire, et on fera un bilan dans 18 mois, si tout s'est bien passé, si on a des bonnes réponses qui ont été apportées par les entreprises, eh bien, très bien. A défaut, on sera amené à prendre des dispositions pour rendre cette prime systématique et obligatoire.
PATRICK ROGER
Oui, le retour aux 90 km/h sur les nationales et départementales, ça va être dans votre loi avec l'expérimentation ?
ELISABETH BORNE
Alors, ce n'est pas un retour systématique, on va maintenir le 80 km/h qui a montré qu'il permettait d'épargner des vies, 116 vies au deuxième semestre de 2018, mais on entend aussi d'abord une demande des Français de décision en proximité, et puis, des élus qui nous disent : laissez-nous prendre nos responsabilités, eh bien, c'est-ce qu'on fait dans ce texte avec un avis de la Commission départementale de sécurité routière, les présidents de départements pourront relever de 10 km/h sur certaines routes en tenant compte des accidents sur ces routes, ils pourront relever de 10 km/h la limitation de vitesse.
PATRICK ROGER
Et il y a un engouement des présidents des collectivités territoriales pour ça ou pas ?
ELISABETH BORNE
Ecoutez, certains ont dit qu'ils allaient se saisir de cette possibilité, on verra, ils prendront leurs responsabilités.
PATRICK ROGER
Oui, voilà, c'est ça. Ils vont prendre leurs responsabilités. L'Etat se défausse un petit peu quelque part, non ?
ELISABETH BORNE
Non, l'Etat répond à une demande des élus qui nous disent : laissez-nous prendre nos responsabilités, eh bien voilà.
PATRICK ROGER
Oui, alors, l'autre objectif de cette loi, c'est quand même de réduire les déplacements en voitures polluantes d'une façon générale ; comment parvenir à cet objectif : la fin du moteur à essence, du moteur thermique en 2040, c'est demain, c'est dans 20 ans ?
ELISABETH BORNE
Eh bien, écoutez, je pense que…
PATRICK ROGER
On peut y arriver, ça, raisonnablement ?
ELISABETH BORNE
Evidemment, moi, je suis convaincue qu'on peut y arriver, et qu'il faut se donner des objectifs de long terme pour ne pas prendre les gens par surprise, donc c'est ce qu'on fait en donnant cet objectif à 2040, vous avez vu que dès cette année, les constructeurs français proposent des modèles électriques, il manquait…
PATRICK ROGER
Pas beaucoup, mais…
ELISABETH BORNE
Eh bien, maintenant, on va avoir…
PATRICK ROGER
Très peu, mais bon…
ELISABETH BORNE
Non, non, maintenant, cette année, on aura des voitures électriques, et puis, il y a aussi des constructeurs qui proposent des voitures à hydrogène, on peut aussi avoir des biocarburants, et je pense qu'on se donnant ces 20 ans, eh bien, c'est le temps qu'il faut pour faire cette transition qui n'est pas simple. Et il faut effectivement travailler avec les entreprises, c'est-ce qu'on fait, on a signé un contrat de filière avec les constructeurs automobiles pour engager cette transition sur 20 ans, plutôt que d'être pris par surprise au dernier moment, il faut se donner un cap, donner des moyens aussi, et dans la loi en particulier, on facilite la recharge des véhicules électriques sur tout le territoire en multipliant par cinq…
PATRICK ROGER
Eh bien, oui, c'est ça, comment est-ce qu'on va faire, oui, multiplier par cinq, ce n'est pas suffisant, vous le savez, quand vous avez... vous êtes déjà allée sur tous les territoires, il n'y a pas de bornages en fait, très peu…
ELISABETH BORNE
Eh bien écoutez, je peux vous assurer que ça se développe…
PATRICK ROGER
Ah oui, mais ça se développe, mais enfin, bon, j'étais, comme beaucoup de Français sur les routes ce week-end, pardon, mais je n'ai pas vu beaucoup de bornages, et puis, quand il y en a quelques-unes, eh bien, il y a déjà une file d'attente.
ELISABETH BORNE
Enfin, on va donc multiplier par cinq les bornes de recharge…
PATRICK ROGER
Non, mais si vous voulez qu'il y ait effectivement des voitures électriques sur tout le territoire, quand vous regardez les millions de voitures, franchement, il va falloir, pas multiplier par cinq, beaucoup plus, vous le savez…
ELISABETH BORNE
Vous savez que dans 90 % des cas, la recharge, elle se fait, soit au domicile, soit sur le lieu de travail, et donc pour pouvoir installer…
PATRICK ROGER
Oui, non, mais lieu de travail ou lieu de déplacement aussi, en week-end, en vacances, pour faire des courses, pour un tas de choses !
ELISABETH BORNE
Enfin, donc on va non seulement multiplier les bornes de recharge sur la voie publique, on obligera à installer ces équipements dans les nouveaux parkings, ensuite, on va faciliter…
PATRICK ROGER
Et dans les parkings anciens, puisque vous dites nouveaux parkings, ça, c'est simple, mais les parkings anciens aussi ?
ELISABETH BORNE
On facilitera notamment les discussions dans les copropriétés, on va réduire par deux le délai pour faire inscrire le sujet à l'ordre du jour dans sa copropriété, on va diviser par deux les coûts de raccordement, donc je pense qu'on a un plan global pour passer, pour permettre effectivement de recharger partout sa voiture électrique sur le territoire.
PATRICK ROGER
Alors, et qu'est-ce que vous répondez aux écolos qui disent : il faut le faire dès 2030 ?
ELISABETH BORNE
Eh bien, écoutez je pense que vous voyez ça montre peut-être qu'on a trouvé le bon équilibre, puisque certains nous disent : vous allez trop vite, d'autres : vous n'allez pas assez vite, voilà, on a repris cet objectif, qui était celui du plan climat annoncé par Nicolas HULOT en juillet 2017, un objectif en 2040, qui est ambitieux et qui laisse le temps à l'industrie automobile aussi de gérer cette transition.
PATRICK ROGER
Oui, et qu'est-ce que vous répondez à ceux, alors, je viens maintenant aux lignes aériennes, et puis, et aux trains, qu'est-ce que vous répondez à ceux qui veulent arrêter les lignes aériennes intérieures assez vite, c'est-à-dire sur les lignes à moins de 2h par exemple de Paris, 2h, comme un Paris-Nantes par exemple ?
ELISABETH BORNE
Ecoutez, moi, je réponds que, évidemment, il faut encourager les transports plus propres, et c'est ce qu'on fait dans cette loi Mobilités, sur tous les modes, il faut avoir en tête que le transport aérien, c'est entre 1 et 2 % des émissions de gaz à effet de serre, donc il faut s'occuper de tous les modes de transport ; je pense que les Français, ils n'ont ni envie ni besoin d'interdictions dans la loi pour prendre le train quand on a un temps de trajet performant, entre Paris et Strasbourg, plus personne ne prend l'avion, entre Paris et Bordeaux, depuis la mise en service de la ligne à grande vitesse, on a baissé de 40 %, plus de 40 %…
PATRICK ROGER
Donc il faut fermer ces lignes intérieures alors ?
ELISABETH BORNE
Mais attendez, je dis simplement que les Français, quand ils ont une offre de trains qui est performante, qui répond à leurs besoins, ils prennent le train, il n'y a pas besoin de mettre des interdictions dans la loi, voyez, avec les amendements qui sont déposés, on interdirait Paris-Toulouse par exemple, ou on interdirait une liaison aérienne entre Nantes et Bordeaux, donc il faut aussi laisser les Français prendre leurs responsabilités, prendre le train quand ils ont une offre satisfaisante…
PATRICK ROGER
En tout cas, vous n'y êtes pas favorable, lors de ce débat à l'Assemblée ?
ELISABETH BORNE
Eh bien, non, moi, je pense que les Français nous l'ont dit très clairement, voyez, des interdictions, ce n'est pas comme ça que ça marche, il faut offrir des bonnes alternatives, en train notamment, et c'est comme ça qu'on arrivera à avoir effectivement des modes de transport plus propres…
PATRICK ROGER
A propos du train, sur les réseaux sociaux, il y a une question notamment sur les places réservées aux vélos dans les transports urbains, et puis, dans les trains, que ce soit en grande banlieue ou même sur les plus grandes lignes, est-ce que ça deviendra un jour obligatoire d'avoir des wagons réservés aux vélos ?
ELISABETH BORNE
Alors, des places réservées aux vélos, oui, c'est donc aussi une disposition qui a été votée dans la loi, on a un règlement qui est en cours de discussion au niveau européen qui prévoit 8 emplacements pour les vélos dans les trains, je pense que c'est bien aussi, quand vous prenez votre vélo, on prévoit aussi des garages sécurisés dans les gares, mais pour certains, pour certains Français qui...
PATRICK ROGER
Eh bien, il faut aussi prendre son vélo pour aller plus loin…
ELISABETH BORNE
Voilà, pouvoir prendre leur vélo, il y aura des places réservées dans les trains.
PATRICK ROGER
Oui, bon, eh bien, décidément, il y a du travail. Les cheminots sont en grève demain, du moins, certains, qu'est-ce que vous leur dites pour essayer de les rassurer ?
ELISABETH BORNE
Eh bien, je pense qu'on a une réforme effectivement très importante, qui revoit le modèle, et tout le modèle effectivement aussi économique du ferroviaire, y compris pour pouvoir avoir des TGV moins chers, et c'est bien ce qu'on voit, puisqu'on aura 25 millions de billets OUIGO, donc les TGV à petits prix dès 2020, qui prévoit une transformation profonde de l'entreprise, et une ouverture à la concurrence. Moi, j'entends que les cheminots peuvent nous dire qu'il y a des inquiétudes, on avance dans cette réforme, et moi, je suis convaincue que la SNCF sera plus performante demain, répondra mieux aux attentes des Français, c'est pour ça qu'on a fait la réforme.
PATRICK ROGER
D'un mot : trains de nuit et LGV, c'est terminé ou pas ?
ELISABETH BORNE
Trains de nuit, on continue les trains de nuit, on a maintenu les trains de nuit qui... enfin, moi, que j'ai trouvés en arrivant, il y avait 2 lignes de trains de nuit que j'ai décidées de maintenir, même de reconduire la convention pour ces trains de nuit…
PATRICK ROGER
Qui vont d'où à où ?
ELISABETH BORNE
C'est Paris-Briançon et Paris-Latour-de-Carol, et on va même moderniser ces trains de nuit, moi, je crois beaucoup aux trains de nuit. Dans la loi est également, il est prévu qu'on présente une stratégie pour ces trains de nuit, je pense que c‘est une bonne solution…
PATRICK ROGER
Et les LGV, alors que puisque vous dites qu'un jour, on arrêtera aussi sans doute l'aérien sur les lignes intérieures, même si aujourd'hui, vous dites non…
ELISABETH BORNE
Alors, les LGV, ce que je dis, c'est que les lignes à grande vitesse, on a consacré l'essentiel de nos investissements dans les transports à faire des lignes à grande vitesse, et dans le même temps, on a oublié une partie du pays où il y a un véritable sentiment d'injustice, parce que pendant qu'on va plus vite dans certaines métropoles, eh bien, les réseaux, les réseaux ferrés, les trains se sont dégradées, et donc la programmation que moi, je propose, les investissements, c'est de rééquilibrer, d'entretenir en priorité les réseaux, les lignes ferrées, les routes sur tout le territoire, et là aussi de répondre au sentiment d'injustice de beaucoup de Français.
PATRICK ROGER
Oui, le mot de la fin avec Cécile de MENIBUS, Elisabeth BORNE.
CECILE DE MENIBUS
Le Parlement européen étudie la possibilité de mettre des boîtes noires dans les voitures neuves de 2022, ça va enregistrer ce qui va se passer dans l'habitacle à quelques secondes de l'accident, mais est-ce que ça ne pose pas un problème de vie privée ?
ELISABETH BORNE
Eh bien, écoutez, je pense que quand on progresse comme ça sur des meilleures connaissances de ce qui s'est passé dans les voitures, il faut évidemment le faire avec une prise en compte de la protection de la vie personnelle, vous savez qu'on a un règlement européen très exigeant sur le sujet, et donc qui s'appliquera aussi dans ce domaine.
CECILE DE MENIBUS
Mais comment vous ferez puisque c'est une discussion, ce sera une…
ELISABETH BORNE
Non, mais je pense que... enfin, je vous dis, le règlement sur la protection des données personnelles, il vaut dans tous les secteurs, il prévoit d'anonymiser des informations quand elles sont utilisées par exemple sur des objectifs statistiques, et puis, de réserver notamment, sur les enquêtes judiciaires ou des dans des cas très limités, l'utilisation de ce type d'informations.
CECILE DE MENIBUS
Merci. Vous avez un invité surprise.
DANY MAURO
Bonjour Elisabeth, c'est Bertrand DELANOË, le grand sherpa du PS, le Parti socialiste, tu te rappelles vaguement ce que c'est, bon, on parlait d'alternatives des transports assez propres, on va peut-être remettre les diligences au goût du jour, à ce propos, en ce moment, au gouvernement, ça ressemble un peu à un remake façon spaghetti : « Le Bon, la borgne et le borné. Bon, la « Borne », c'est toi, le borné, on sait qui c'est. Bon, tu peux me dire qui c'est qui est le bon ?
ELISABETH BORNE
Eh bien écoutez, je pense que tout le gouvernement s'efforce d'être le meilleur possible pour répondre aux attentes des Français.
DANY MAURO
Bonne directrice de casting…
PATRICK ROGER
Voilà, absolument. Elisabeth BORNE, la ministre des Transports et de la transition écologique, était l'invitée ce matin de Sud-Radio.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 12 juin 2019