Texte intégral
MARC FAUVELLE
Et ce matin sur Franceinfo, c'est la Secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations qui est avec nous jusqu'à neuf heures. Renaud DELY vous pose la première question.
RENAUD DELY
Bonjour Marlène SCHIAPPA.
MARLENE SCHIAPPA, SECRETAIRE D'ETAT A L'EGALITE FEMMES-HOMMES
Bonjour.
RENAUD DELY
D'abord une question actualité puisque les chiffres viennent de tomber ce matin. L'INSEE a révélé que, donc ce sont les résultats de l'économie française en 2018, le déficit public sera finalement moins élevé que prévu puisqu'il ne s'élève qu'à 2,5 %. Le gouvernement redoutait 2,6 ou 2,7. En tout cas on est largement en dessous du fameux seuil de 3 % du PIB, 2,5 donc. Est-ce que ça signifie que le temps de la redistribution et des coups de pouce au pouvoir d'achat est venu ?
MARLENE SCHIAPPA
D'abord je crois qu'on peut se réjouir de cette nouvelle parce que Gérald DARMANIN et Bruno LE MAIRE, sous l'impulsion du Premier ministre Edouard PHILIPPE, ont fait un travail extrêmement sérieux, extrêmement rigoureux pour faire en sorte justement que ce déficit soit réduit. Ce n'est pas une nouvelle qui tombe du ciel. C'est le résultat d'un travail intense qui est menée par le gouvernement, et je crois que c'est la première fois d'ailleurs qu'un gouvernement parvient à réduire à ce point le déficit public. Ensuite en matière de redistribution, il y a des choses qui ont commencé à être faites, ne serait-ce que les mesures d'urgence économique et sociale avec un engagement de 10 milliards d'euros qui ont été annoncées par le président de la République il y a quelques mois.
MARC FAUVELLE
Ça veut dire qu'il reste de l'argent dans les caisses et qu'il pourrait y avoir des annonces à la fin du grand débat ?
MARLENE SCHIAPPA
Alors à la fin du grand débat, il y aura des annonces. Mais je crois que l'enjeu, ce n'est pas forcément de savoir quelle somme va être décaissée comme vous dites. Je crois que l'enjeu, c'est plutôt de savoir comment chacun va se sentir partie prenante de la démocratie. On a vu qu'il y avait une grande demande à la fois de pouvoir d'achat ou de pouvoir de vivre de la part des gilets jaunes et de la population, mais aussi une demande de participation, d'inclusion dans la vie démocratique du pays.
RENAUD DELY
Mais l'enjeu pour les catégories les plus modestes qui se sont mobilisées depuis des mois, notamment dans le cadre du mouvement des gilets jaunes, c'est justement de savoir s'ils obtiendront un coup de pouce en matière de pouvoir d'achat. Par exemple un coup de pouce pour le SMIC, est-ce que c'est quelque chose d'envisageable ?
MARLENE SCHIAPPA
Alors la demande première du mouvement, c'était l'arrêt de la taxe carbone. La taxe carbone a été arrêtée. Ensuite il y a eu des demandes de coup de pouce, comme vous dites, ou de pouvoir d'achat et ces demandes elles ont été entendues puisque le président a présenté des mesures. Et ensuite, la dernière demande qu'on a entendue, c'était plus une demande vraiment d'inclusion dans la démocratie et je pense que si le président fait des annonces en ce sens, ce sera quelque chose de très positif.
RENAUD DELY
Et sur un point précis, la réindexation des retraites les plus modestes sur l'évolution de l'inflation, est-ce que c'est nécessaire aujourd'hui ? Est-ce que c'est justifié et est-ce qu'il faut le faire ?
MARLENE SCHIAPPA
Je crois que c'est un sujet qui est sur la table, la question du pouvoir d'achat ou du pouvoir de vivre encore une fois. Mais la question du pouvoir d'achat des retraités, c'est une question qui est vraiment importante et je pense que tous les débats doivent être sur la table, et ensuite il y aura un temps pour les annonces sur ces sujets-là.
MARC FAUVELLE
Marlène SCHIAPPA, est-ce qu'il vous viendrait à l'idée à vous, comme l'a fait Emmanuel MACRON, de sermonner une vieille dame de 73 ans blessée lors d'une manifestation, fut-elle interdite ?
MARLENE SCHIAPPA
Moi je n'ai pas le sentiment que le président a sermonné cette dame. D'abord il lui a souhaité un prompt rétablissement et en souhaitant qu'elle soit vite sur pied, et je crois que tous ici on peut lui envoyer ce message.
MARC FAUVELLE
Ça, c'est la première partie de la phrase. Il y en avait une deuxième.
MARLENE SCHIAPPA
C'est la première partie. Mais je crois que c'est un message simplement de bon sens, le fait de se dire que quand il y a une manifestation qui, pour certains cas, est interdite, qui pour certains cas déborde dans des phénomènes de mouvements de foule, de violence tels que tout le monde les a vus à la télévision, quand on est dans une condition fragile, quand on est avec un bébé, quand on est avec une personne qui n'a pas une condition extrêmement solide, c'est la prudence de ne pas se rendre dans ces manifestations et de ne pas se mettre en danger.
RENAUD DELY
Mais dire à cette dame en l'occurrence, et c'est le message du président de la République, qu'elle n'est pas sage puisqu'il l'a invitée à faire preuve de sagesse. Et donc effectivement quand on est fragile, dit-il, à ne pas se rendre dans des lieux définis comme interdits, est-ce que ça ne manque pas un petit peu d'empathie dans les propos du président ?
MARLENE SCHIAPPA
Non. D'abord moi je crois que le président de la République, il a commencé par lui souhaiter un bon rétablissement et ensuite par dire ça. A un moment…
RENAUD DELY
Il ne manque pas un peu d'empathie dans son expression ?
MARLENE SCHIAPPA
Non. Pardon, moi j'ai l'impression qu'on est dans une époque où on ne peut absolument rien dire. Toutes les déclarations des personnalités publiques doivent être une espèce de robinet d'eau tiède permanent dans lequel on n'a plus jamais le droit d'émettre aucun avis…
MARC FAUVELLE
Ce n'est pas n'importe qui, là on parle du chef de l'Etat qui a déjà fait la leçon à un chômeur depuis qu'il est là.
MARLENE SCHIAPPA
Justement, dès que… Il n'a pas fait la leçon.
MARC FAUVELLE
On a l'impression que c'est plus fort que lui.
MARLENE SCHIAPPA
Non. il y a un contexte à chaque fois. Vous savez très bien que quand il a dit à ce jeune homme qu'il fallait traverser la rue pour trouver un emploi, il parlait de Montparnasse et en face il y avait effectivement beaucoup d'offres d'emplois. Ce n'était pas une vérité générale, ça ne voulait pas dire : « Partout en France où vous êtes, vous traversez la rue… »
MARC FAUVELLE
Le pognon de dingue, les Gaulois réfractaires, ça fait beaucoup non ?
MARLENE SCHIAPPA
Moi je pense que c'est quelqu'un, le président, qui parle cash et moi, pour être très sincère avec vous, c'est une des raisons qui m'a donné envie de le soutenir. Quand il avait parlé notamment des femmes illettrées qui avaient des difficultés pour se réinsérer dans l'emploi.
RENAUD DELY
De chez GAD.
MARLENE SCHIAPPA
Absolument. Moi à l'époque, je venais de terminer des missions de bénévole d'alphabétisation des femmes primo-arrivantes et je me suis dit : « Waouh ! Enfin il y a un responsable politique qui dit les choses telles qu'elles sont et qui aborde ce sujet qui est tabou habituellement. »
RENAUD DELY
Et y compris dans le contexte actuel d'une France fracturée, morcelée, en ébullition ? C'est bien comme ça, c'est prudent de parler cash ? Est-ce que c'est sage pour le coup de parler cash ?
MARLENE SCHIAPPA
Moi je crois que ça l'est.
RENAUD DELY
Ça n'attise pas les fractures en question ?
MARLENE SCHIAPPA
Non. Je crois qu'il est aussi le garant de l'ordre public et le fait de dire à chacun : « Attention, prenez garde et soyez prudents dans la manière dont vous vous associez à tel ou tel mouvement qui peut être violent, avoir des débordements, parfois être interdit », je pense qu'il est au contraire pleinement dans son rôle.
RENAUD DELY
Alors hier il y de manifestation de soutien à cette dame, Geneviève LEGAY, qui s'est tenue à Nice. Il y à peu près 300 personnes qui se sont rassemblées. Le procureur de la République, lui, a tenu une conférence de presse lors de laquelle il a expliqué que, selon les images dont il dispose, on ne voit pas un membre des forces de l'ordre pousser ou bousculer Geneviève LEGAY. Ce n'est pas la version de l'avocat de cette dame, Arié ALIMI, qui était l'invité de Franceinfo ce matin.
ME ARIE ALIMI, AVOCAT DE LA FAMILLE DE GENEVIEVE LEGAY
Il semblerait qu'il y ait d'autres vidéos qui montrent tout à fait le contraire et qui montrent une poussée par un membre des forces de l'ordre. Il y a toujours une communication du gouvernement, du préfet qui représente le gouvernement, du procureur de la République qui est un serviteur assez servile du gouvernement.
RENAUD DELY
Est-ce que vous attendez de l'enquête qu'elle tire au clair ce qui s'est passé ? Et pourquoi est-ce que madame LEGAY a été blessée grièvement ?
MARLENE SCHIAPPA
Mais bien évidemment. Moi je crois qu'il faut que cette enquête nous montre ce qui s'est passé mais le procureur, qui est un professionnel dont l'expertise ne peut pas être remise en cause, nous donne les informations qu'il a lui. Moi je n'ai pas accès aux vidéos.
RENAUD DELY
Lui à ce stade mais l'enquête n'est pas close.
MARLENE SCHIAPPA
Absolument. Mais ce stade en tout cas, ce sont les informations qu'il a. Après il faut que l'enquête se déroule sereinement et qu'on sache ce qui s'est passé pour cette dame. Mais manifestement d'après le procureur, c'est plus un mouvement de foule et en aucun cas un contact avec les forces de l'ordre. C'est ce qu'il dit en tout cas à ce stade.
RENAUD DELY
Un mouvement de foule provoqué par une charge des forces de l'ordre.
MARLENE SCHIAPPA
Un mouvement de foule en tout cas et pas de contact direct avec les forces de l'ordre.
MARC FAUVELLE
Il faut continuer les prochains week-ends à interdire les manifestations des gilets jaunes ? Indépendamment de ce qui s'est passé à Nice ?
MARLENE SCHIAPPA
Bien sûr. Moi je pense qu'il faut être extrêmement ferme sur les questions d'ordre public. On est quand même à la fin du mois de mars. Depuis le mois de novembre, les Françaises et les Français subissent des samedis de blocage, de violence, de mouvements qui sont extrêmement désagréables avec dernièrement aussi des pillages, des exactions, des actes d'une violence inouïe. Donc je pense que oui, effectivement, toutes les mesures qui permettront de maintenir l'ordre public telles que celles qui ont été décidées par Christophe CASTANER et Laurent NUNEZ sont bonnes et doivent être mises en oeuvre. (…)
MARC FAUVELLE
On va évoquer, si vous le voulez bien, les questions liées au remaniement qui arrive au sein du gouvernement avec le départ annoncé de Nathalie LOISEAU qui va conduire la liste de La République en Marche aux Européennes. Je voudrais d'abord vous faire écouter ce qu'a dit votre collègue ministre des Sports, Roxana MARACINEANU. C'était samedi matin sur Franceinfo, interrogée sur ce qu'elle voit aujourd'hui dans les stades de foot et notamment sur ce qu'elle a vu au Parc des Princes, le stade du Paris-Saint-Germain et les insultes homophobes proférées dans les tribunes.
ROXANA MARACINEANU, MINISTRE DES SPORTS
C'était juste inadmissible d'entendre les chants que j'ai entendus. C'était le PSG qui criait contre Marseille. Au lieu d'encourager son équipe, ils disaient des choses horribles sur Marseille. Apparemment c'est historique mais c'est juste pas possible. Enfin moi, je n'emmènerai pas mes enfants dans un match comme ça pour qu'ils me demandent : « Mais maman, qu'est-ce qu'ils sont en train de chanter ? » Donc voilà, je ne vois pas pourquoi dans le dans le sport et dans les stades on pourrait se permettre des choses qu'on ne se permet pas par ailleurs.
MARC FAUVELLE
Comment on lutte contre l'homophobie dans les stades aujourd'hui ?
MARLENE SCHIAPPA
D'abord, moi je voudrais saluer l'engagement de la ministre des Sports Roxana MARACINEANU parce que je crois que c'est très courageux de la place où elle est, c'est-à-dire en étant ministre des Sports, de s'attaquer à ce sujet de l'homophobie dans les stades qui est un tabou, un fléau et qui est souvent considéré comme du folklore. D'ailleurs il y a eu un certain nombre de réactions à ses prises de paroles…
MARC FAUVELLE
Alors je voulais vous interroger sur la réaction de la patronne de la Ligue de foot professionnelle…
MARLENE SCHIAPPA
Voilà, par exemple.
MARC FAUVELLE
Nathalie BOY DE LA TOUR qui dit : « Les chants homophobes effectivement font partie du folklore aujourd'hui dans les stades. » C'est folklorique donc de traiter un adversaire de je ne sais quoi ?
MARLENE SCHIAPPA
Oui mais ça, on ne peut pas admettre ce type d'argumentaire dans la mesure où ça, c'est exactement ce qu'on nous dit dans tous les milieux pour faire exception à la lutte contre l'homophobie.
MARC FAUVELLE
Vous allez lui dire ?
MARLENE SCHIAPPA
Mais évidemment. Il y a un dialogue qui est instauré avec la ministre des Sports. On travaille ensemble main dans la main. On a présenté en conseil des ministres il y a quelques mois un plan interministériel de lutte contre l'homophobie partout. Et notre message justement, c'est de dire que ça ne sert à rien de faire de la prévention contre l'homophobie dans les écoles, comme on le fait avec Jean-Michel BLANQUER, si derrière dans les stades vous avez une banalisation des propos homophobes. Les chants homophobes, c'est le début de l'engrenage qui peut ensuite mener à la violence et au fait qu'on a une recrudescence des agressions homophobes dans l'espace public.
RENAUD DELY
Donc concrètement, comment vous faites là ? Vous légiférez pour interdire les chants homophobes dans les stades ?
MARLENE SCHIAPPA
Pour l'instant, il y a une loi qui existe. Et ce que dit Roxana MARACINEANU, c'est que la loi elle ne s'arrête pas à l'entrée du stade. Donc la loi, elle existe déjà, il faut qu'elle soit appliquée et il faut que dès lors qu'il y ait des injures homophobes les personnes soient interpellées.
RENAUD DELY
C'est compliqué dans un stade. Il faut aller identifier qui a chanté ou proféré une injure, une insulte homophobe parmi la foule et ensuite entamer des poursuites.
MARLENE SCHIAPPA
Bien sûr que c'est très compliqué, et c'est pour ça que c'est un travail de longue haleine et que je salue celui qui est lancé par la ministre des Sports. Mais vous savez, le PSG par exemple…
RENAUD DELY
C'est aux clubs d'agir donc vous demandez aux clubs d'identifier ces individus ?
MARLENE SCHIAPPA
Alors je pense que c'est aux clubs d'agir mais je crois que le PSG a mené un gros travail contre le racisme. Il y a encore une dizaine d'années quand vous alliez au Parc des Princes, il était habituel d'entendre des propos racistes, de voir des banderoles racistes affichées. C'est nettement, nettement moins le cas maintenant parce qu'il y a eu un travail notamment du club qui a été engagé. Donc je crois qu'il faut qu'on arrive à faire passer ce message au club, de dire que l'homophobie ça n'est plus permis et que c'est ringard et beauf maintenant.
MARC FAUVELLE
Est-ce que le meilleur moyen de lutter contre ça, ce ne serait pas de sanctionner financièrement les clubs qui laissent faire.
MARLENE SCHIAPPA
Tout est sur la table pour l'instant. La ministre des Sports a annoncé qu'elle allait lancer un travail…
MARC FAUVELLE
On parle d'un phénomène qui dure depuis des années et des années et des décennies en France dans les stades.
MARLENE SCHIAPPA
Bien sûr mais je crois que…
MARC FAUVELLE
On ne le découvre pas aujourd'hui.
MARLENE SCHIAPPA
On ne le découvre pas aujourd'hui, absolument. D'ailleurs je vais très souvent au Vélodrome, je suis supporter de l'Olympique de Marseille, et j'y étais…
MARC FAUVELLE
C'était pour vous donner l'occasion de le rappeler.
MARLENE SCHIAPPA
Je vous remercie. J'étais avec Roxana MARACINEANU au Vélodrome d'ailleurs il y a quelques mois de cela.
MARC FAUVELLE
Il y a les mêmes chants au Vélodrome ?
MARLENE SCHIAPPA
J'ai l'impression que c'est quelque chose qui est assez généralisé, si vous voulez. Je ne vais pas jeter l'opprobre sur un club ou un autre en particulier, ça dépend. Après il y a des cultures plus ou moins agressives dans les clubs. On sait que Paris-Marseille et les classicos en général crispent un peu.
RENAUD DELY
Il y a les mêmes chants marseillais anti-parisiens eux aussi homophobes.
MARLENE SCHIAPPA
Voilà, mais ce n'est pas plus acceptable parce que ça vient de supporters marseillais. C'est inacceptable de toutes parts.
MARC FAUVELLE
Evidemment. Renaud DELY, le remaniement et les Européennes.
RENAUD DELY
Alors le remaniement, c'est pour aujourd'hui. Nathalie LOISEAU, la ministre des Affaires européennes, va donc quitter le gouvernement pour prendre la tête de liste de la République en Marche pour le scrutin du 26 mai. Est-ce que c'est bien raisonnable de changer de ministre des Affaires européennes comme ça, à quelques jours d'une échéance européenne importante, le Brexit ?
MARLENE SCHIAPPA
D'abord elle restera engagée, et ô combien, puisqu'elle est tête de liste aux Européennes. Et ensuite, il y a Jean-Yves LE DRIAN qui est un ministre des Affaires étrangères et des Affaires européennes qui était son ministre de tutelle qui, à ma connaissance, reste engagé sur ces sujets pleinement.
RENAUD DELY
Mais c'est secondaire d'être au gouvernement par rapport à une candidature aux Européennes ? On a l'impression qu'on préfère quitter le gouvernement pour aller conduire une liste.
MARLENE SCHIAPPA
Non, je ne crois pas que ce soit ça, au contraire. Moi je pense que c'est une démarche courageuse de la part de Nathalie LOISEAU. Elle aurait pu rester au gouvernement et choisir de ne pas prendre de risque. Elle choisit finalement d'aller conduire cette liste, de mener ce combat en France et au niveau européen, pour d'abord affronter le Rassemblement national et lutter contre une forme de populisme qui gangrène l'Europe maintenant depuis plusieurs années.
RENAUD DELY
C'est l'enjeu de ce scrutin du 26 mai ? C'est la montée des populismes en Europe ? L'Europe se joue à quitte ou double d'après vous ?
MARLENE SCHIAPPA
Oui. D'abord, je crois qu'on va prolonger aussi la recomposition politique qui a commencé à se faire en France. On va la prolonger en France mais aussi au niveau européen. Les populistes sont très doués pour s'allier entre eux. Il faut que maintenant les forces de progrès puissent aussi s'allier entre elles et c'est ce que va mener Nathalie LOISEAU avec Stéphane SEJOURNE, le directeur de campagne.
RENAUD DELY
Et est-ce que c'est populiste à l'échelle de l'Europe, et Marine LE PEN en France, ce n'est pas en fait vos adversaires préférés pour ce scrutin et que vous ne dramatisez pas l'enjeu de façon à justement en faire votre seul interlocuteur ?
MARLENE SCHIAPPA
Je crois qu'hélas on ne peut pas choisir ses adversaires. Moi je préférerais largement, pour la qualité du débat public, qu'il y ait des débats entre progressistes et qu'il y ait des personnes qui soient engagées sur ce sujet. Mais on a vu un récent sondage qui montre que le Rassemblement national est très haut. On montre que les intentions de vote pour LaREM et le MoDem et la liste que nous conduirons sont en tête, mais je crois qu'il n'y a pas non plus de quoi se réjouir quand on voit que le Rassemblement national est un au-dessus. On ne peut pas se permettre d'avoir en France une élection qui soit gagnée par le parti de Marine LE PEN.
MARC FAUVELLE
C'est Pascal CANFIN qui l'a confirmé ce matin au Monde : il sera bien numéro deux sur cette liste menée par Nathalie LOISEAU, lui qui a été ministre de François HOLLANDE et député écologiste européen. Voici ce qu'en disait hier soir sur Franceinfo le patron d'Europe Ecologie-Les Verts, David CORMAND.
DAVID CORMAND, SECRETAIRE NATIONAL D'EUROPE ECOLOGIE-LES VERTS
On a l'impression d'assister au mercato à l'intersaison où les différents clubs de foot s'échangent leurs joueurs pour essayer d'être plus performants. Moi je vais vous dire, ça me fait de la peine et ça m'écoeure un petit peu. Je pense que ça ne contribuera pas à ce que les gens se mobilisent davantage pour ces élections européennes.
MARC FAUVELLE
Vous pensez que ça fait Nouveau monde effectivement d'aller embaucher quelqu'un de l'écurie en face ?
MARLENE SCHIAPPA
Je pense que les choses ne sont pas à présenter comme ça. Vous savez, moi je compare souvent le combat de l'écologie avec le combat du féminisme. Je pense que ce sont deux enjeux majeurs de ce siècle. Et de la même façon que je crois que ce qui est souhaitable, c'est qu'il y ait un enjeu féministe partout porté dans toutes les listes, ce qui est souhaitable c'est qu'il y ait de l'écologie portée dans des partis qui ne soient pas des partis de niche et qui ne soient pas spécialistes forcément uniquement sur ce sujet. Donc moi, je trouve que quand on est un écologiste sincère, on devrait au contraire se réjouir que la liste qui est créditée de la majorité et des intentions de vote puisse être conduite par un binôme dont une personne qui a une expertise qui n'est plus à démontrer et un engagement sincère sur les questions de transition écologique.
RENAUD DELY
Comment vous expliquez que Pascal CANFIN qui avait été pressenti, en tout cas son nom avait circulé, mais qui n'avait pas souhaité rentrer au gouvernement pour succéder à Nicolas HULOT parce qu'il réclamait un big-bang de la politique gouvernementale en matière d'écologie, il accepte là d'être deuxième de liste alors qu'il n'y a pas eu de big-bang depuis le départ de Nicolas HULOT ?
MARLENE SCHIAPPA
Il faudrait lui poser la question mais je pense qu'il a dû être convaincu par le projet qui sera porté dans le cadre du projet Renaissance qui a été présenté par le président de la République.
RENAUD DELY
Il a été convaincu par la tribune d'Emmanuel MACRON ?
MARLENE SCHIAPPA
Mais je pense qu'il a dû être convaincu par les nombreux échanges, par les échanges de fond, par les engagements qui ont été pris. On est au tout début de la campagne. Vous savez, la liste sera présentée tout à l'heure dans l'après-midi. Il y a un meeting qui sera organisé ce samedi à Aubervilliers pour lancer la campagne des Européennes. Des propositions seront faites, un projet sera porté et donc il y a une dimension écologiste assez importante pour avoir convaincu en tout cas Pascal CANFIN.
MARC FAUVELLE
Est-ce que le chef de l'Etat Emmanuel MACRON participera à cette campagne ? Est-ce qu'il s'impliquera ? Est-ce qu'on le verra par exemple dans les meetings ?
MARLENE SCHIAPPA
Je crois que le rôle du président de la République, il n'est pas de faire campagne. On a beaucoup dit de façon indue qu'il était engagé dans la campagne des Européennes : il est engagé dans son rôle de chef de l'Etat. Et en tant que président de la République française, c'est son rôle de travailler à l'union de l'Europe. C'est pour ça qu'il a invité, par exemple aujourd'hui, à la fois la chancelière allemande Angela MERKEL mais aussi à monsieur JUNCKER de la Commission européenne pour rencontrer ensemble le président chinois. Je crois qu'on lui crédite, en tout cas, de cet engagement européen en tant que chef de l'Etat.
MARC FAUVELLE
Donc on ne le verra pas dans les meetings ?
MARLENE SCHIAPPA
Mais ça, c'est une question qu'il faudra lui poser à lui.
RENAUD DELY
Ça vous choquerait qu'on le voit dans les meetings ?
MARLENE SCHIAPPA
Non.
RENAUD DELY
Non ?
MARLENE SCHIAPPA
Ça ne me choquerait pas. Mais après, ce n'est pas parce que ça ne me choquerait pas que ce sera sa décision.
MARC FAUVELLE
On verra bien ce qui se passera. (…)
MARC FAUVELLE
Marlène SCHIAPPA, vous avez été victime le week-end dernier, d'une Fake news, un site parodique vous a attribué des propos que vous n'aviez pas tenus, je vais les citer, si vous le permettez, « contester le président de la République c'est déjà faire un premier pas vers le terrorisme », c'est une phrase que vous n'avez jamais prononcée, site parodique donc, qui met en ligne, repris ensuite pas des milliers d'internautes, et aussi par le site russe Sputnik, qui a fini par vous présenter ses excuses. C'est assez incroyable, non, quand même, la propagation des fausses nouvelles à cette vitesse-là.
MARLENE SCHIAPPA
Oui, moi je trouve ça extrêmement préoccupant, d'abord je trouve ça préoccupant qu'il y ait une crédulité des internautes à un tel stade, c'est-à-dire que maintenant on voit une photo de quelqu'un avec une citation à côté, on ne se dit pas qu'on va vérifier la source, de surcroît quand cette citation paraît un peu improbable, on la prend pour argent comptant, quelle que soit la source, sans aller vérifier, et on la partage, on la commente, comme si elle était vraie, sans aucun libre arbitre et sans aucun esprit critique. Et puis ensuite je trouve ça aussi préoccupant qu'il y ait ce type de sites ou de comptes TWITTER qui se disent parodiques, mais qui n'indiquent pas, dans les visuels qui sont partagés, que c'est une parodie, qui ne sont pas…
MARC FAUVELLE
Alors, en l'occurrence, dans le site dont on parle, dans le titre, il y a écrit « parodie. »
MARLENE SCHIAPPA
Alors c'est indiqué, si on veut être très précis, c'est indiqué en haut à gauche, en petit, quand vous « scrawlez », et quand des gens découvrent ça sur TWITTER, ce n'est pas…
MARC FAUVELLE
Quand vous faites défiler sur un écran de téléphone portable on ne voit pas…
MARLENE SCHIAPPA
Mais même sur un ordinateur ce n'est pas indiqué parce que ça passe dans le fil d'actu, dans la « timeline » TWITTER…
MARC FAUVELLE
Et donc on interdit les parodies ?
MARLENE SCHIAPPA
Non, je ne dis pas qu'il faille interdire les parodies, je dis qu'il faudrait peut-être des signes distinctifs, là ce n'est pas le cas, ça s'appelle « le journal de l'Elysée », il y a un logo, il y a une un titre et il y a des citations qui sont faites de façon extrêmement… qui imitent très bien, de façon très réaliste, et qui honnêtement ne sont pas extrêmement drôles non plus. Alors après la question de l'humour elle est subjective, moi je ne trouve pas ça très drôle de faire tenir à des gens des propos anti-jeunes, des propos antisémites, sexistes, racistes, des propos ubuesques, c'est très dommageable. Et ce n'est pas la première fois, ce site, je termine juste là-dessus, ce suite m'avait fait dire, il y a plusieurs mois, « la plupart des Français vivent avec 300.000, on vit très bien avec cette somme par mois », je n'ai évidemment jamais dit ça, mais quand on a vu des micro-trottoirs de personnes, de citoyens, eh bien on a vu qu'en fait il y avait une majorité des gens qui avaient vu ça, qui l'avaient cru et qui avaient pensé que j'avais prononcé cette phrase. Il y a un préjudice manifeste.
MARC FAUVELLE
Vous les avez contactés ?
MARLENE SCHIAPPA
Ce n'est pas mon rôle de les contacter, TWITTER, qui est un hébergeur, je vais le recevoir dans quelques jours, je crois que TWITTER, de façon générale, si on peut se dire les choses, n'est vraiment pas au niveau, c'est lamentable, pour ce fait-là, mais pour les faits de harcèlement, de contenus haineux de façon générale. Quand vous avez un contenu haineux, sexiste, antisémite, etc., et que vous le signalez à TWITTER, la réponse de TWITTER c'est : ce contenu n'enfreint pas nos conditions d'utilisation.
RENAUD DELY
Qu'est-ce que vous pouvez faire pour TWITTER justement, pour punir TWITTER ?
MARLENE SCHIAPPA
Alors, c'est assez désagréable, quand on est soi-même secrétaire d'Etat, etc., mais je pense que moi c'est anecdotique, derrière il y a des jeunes, qui ont 15 ans, 16 ans, qui sont dans un village ou dans une banlieue, qui ont honte et qui se retrouvent seul face à ça. Donc nous on peut faire plusieurs choses. d'abord, cet été, j'ai fait voter une loi contre le cyber harcèlement en meute, mais là on va aller plus loin, avec une loi porté par la députée Laetitia AVIA, contre la cyber haine, pour obliger les réseaux sociaux, et notamment TWITTER, à supprimer ces contenus et à mettre en place des dispositifs d'alerte qui soient beaucoup plus clairs que ceux existant, qui sont très nébuleux quand on est jeune ou pas informé sur l'utilisation de ces réseaux sociaux.
RENAUD DELY
Vous avez fait voter aussi l'année dernière, Marlène SCHIAPPA, une loi pénalisant le harcèlement de rue, combien de plaintes, combien d'amendes ont été dressées, à peu près 8 mois, je crois, après l'entrée en vigueur de ce texte ?
MARLENE SCHIAPPA
Alors ce texte il a été promulgué en octobre, donc on est sur vraiment quelques mois, sur 4, 5 mois, on a eu environ 400 amendes qui ont été mises par les forces de l'ordre, ce qui est beaucoup. Je rappelle qu'au moment où ce texte a été voté la quasi-unanimité des commentateurs, ou des opposants politiques, nous disaient « verbaliser le harcèlement de rue ce ne sera pas possible, c'est une loi d'incantations, il n'y aura rien derrière. » En fait on voit que, un, on a abaissé et mis un seuil, abaissé le seuil de tolérance sociale vis-à-vis du harcèlement de rue, on a mis une limite, une norme, avec cette loi, premièrement, et deuxièmement on voit qu'il y a un véritable effet, avec ces plusieurs centaines d'amendes mises en flagrant délit par les forces de l'ordre.
RENAUD DELY
Et donc ce sont des flagrants délits à chaque fois.
MARLENE SCHIAPPA
Pas à chaque fois, dans la grande majorité ce sont des flagrants délits, parce que le but de cette loi c'est de mettre des amendes et que les femmes n'aient pas à aller au commissariat, mais il a pu arriver qu'il y ait, lors du jugement, des juges qui s'appuient sur cette loi pour sanctionner également l'outrage sexiste, en plus de l'agression sexuelle ou de l'injure publique.
MARC FAUVELLE
Marlène SCHIAPPA, vous avez des nouvelles de la loi sur la PMA pour toutes les femmes ?
MARLENE SCHIAPPA
Il n'y a pas de contre-arbitrage, ni de nouvelle information sur la loi sur la PMA.
MARC FAUVELLE
Elle arrive quand ?
MARLENE SCHIAPPA
Comme l'a indiqué le Premier ministre elle arrive au moment de l'été 2019 en Conseil des ministres.
MARC FAUVELLE
Cet été.
MARLENE SCHIAPPA
Tout à fait.
MARC FAUVELLE
Elle était prévue, à l'origine, pour 2018, là elle arrive, elle sera examinée avant l'été au Conseil des ministres ?
MARLENE SCHIAPPA
Elle sera au Conseil des ministres, oui, au moment de l'été.
RENAUD DELY
Au moment de l'été ou avant l'été ?
MARLENE SCHIAPPA
Au moment de l'été. Sincèrement, il y a eu deux expressions sur ce sujet, moi je vais vous dire les choses honnêtement, à chaque fois…
RENAUD DELY
Donc, début mars vous disiez avant l'été ! Le 8 mars vous avez dit avant l'été.
MARLENE SCHIAPPA
A chaque fois que je parle de PMA, dans n'importe quel média, il y a une dépêche AFP derrière pour dire que j'ai annoncé la PMA. Alors je le dis là clairement, si l'AFP nous écoute, ce n'est pas une annonce, la PMA elle fait partie, l'ouverture de la PMA à toutes les femmes elle fait partie des engagements de campagne du président, tous les engagements de campagne du président seront tenus, donc il y aura un débat au Parlement, qui sera rendu, Richard FERRAND et Edouard PHILIPPE se sont exprimés sur ce sujet…
RENAUD DELY
Pourquoi c'est si lent, on ne comprend pas, la PMA pour toutes pourquoi c'est si lent, vous avez peur de réveiller les opposants à cette réforme ?
MARLENE SCHIAPPA
Non, ce n'est pas le sujet, le sujet c'est qu'il y a un travail qui a été mené de consultation, parce que l'autre engagement du président c'était de consulter et de rassembler le plus largement possible sur ce sujet, on a eu les états généraux de la bioéthique, qui se sont passés, rien aujourd'hui ne s'oppose au débat au Parlement de l'ouverture de la PMA pour toutes les femmes.
MARC FAUVELLE
Vous confirmez qu'elle sera bien remboursée par la Sécu ?
MARLENE SCHIAPPA
Moi c'est mon souhait qu'elle soit remboursée par la Sécurité sociale, oui.
MARC FAUVELLE
C'est votre souhait, ou c'est celui du gouvernement, ou c'est la position de l'Elysée ?
MARLENE SCHIAPPA
Alors, encore une fois, ça il faut que ce soit débattu au Parlement.
MARC FAUVELLE
Ce n'est pas tranché ?
MARLENE SCHIAPPA
Il y a une loi qui sera présentée en Conseil des ministres, qui sera une loi beaucoup plus large d'ailleurs, sur la question de la bioéthique, présentée par Agnès BUZYN, Frédérique VIDAL et Nicole BELLOUBET, il y aura ensuite des débats au Parlement, ce sera aux parlementaires de se prononcer, mais moi je suis très favorable à ce qu'elle soit remboursée, bien sûr, on ne remplace pas une discrimination par une autre discrimination.
MARC FAUVELLE
Marlène SCHIAPPA, je voudrais qu'on termine avec quelque chose qui s'est passé au-dessus de nos têtes il y a quelques jours, la NASA a fait savoir cette nuit qu'elle avait prévu de faire voler dans l'espace deux femmes astronautes vendredi dernier, deux femmes qui se trouvent en ce moment dans la station spatiale internationale. Le vol, qui aurait été une première, avec deux femmes astronautes, a été annulé au dernier moment, vous savez pourquoi ? parce qu'il n'y avait pas deux combinaisons à la taille des femmes à bord de la station spatiale internationale, on n'avait jamais prévu ça, tout simplement on a annulé ça. Ça vous fait sourire ou pas ?
MARLENE SCHIAPPA
Ça me fais sourire jaune parce que ça nous prouve, par des petits détails comme ça, presque anecdotiques, mais qui ne le sont pas en réalité, à quel point rien dans ce monde n'est prévu pour les femmes…
MARC FAUVELLE
Même dans l'espace.
MARLENE SCHIAPPA
Même dans l'espace, et quand on a des femmes qui sont courageuses et qui brisent les murs de verre et les plafonds de verre, et qui sont prêtes à prendre des responsabilités importantes, et à être la première équipe totalement féminine à faire quelque chose, eh bien il y a quand même un détail matériel qui les en empêche, donc je trouve ça très dommage.
MARC FAUVELLE
Merci Marlène SCHIAPPA d'avoir accepté ce matin l'invitation de France Info.
MARLENE SCHIAPPA
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 28 mars 2019