Texte intégral
Mesdames et Messieurs les ministres,
Monsieur le Secrétaire général de l'OCDE,
Mesdames et Monsieur les secrétaires exécutifs,
Monsieur le Président de l'IPBES, Madame la vice-présidente du GIEC,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de vous accueillir ici, à Metz, pour la réunion des ministres de l'Environnement du G7.
Le Président de la République a décidé de faire de la lutte contre les inégalités la priorité de la Présidence française du G7. L'extension de l'économie de marché depuis la fin de la guerre froide, le phénomène de mondialisation ou encore la révolution technologique ont, certes, bénéficié à de larges pans de l'Humanité. Elles ont extrait de la pauvreté et amélioré les conditions de vie de centaines de millions de personnes. La proportion de la population en état de pauvreté extrême est ainsi passée de plus de 50% au début des années 80 à moins de 10% aujourd'hui.
Dans une certaine mesure, la communauté internationale a donc progressé pour réduire les inégalités et nous nous en sommes collectivement donné le cadre, avec l'agenda 2030 pour le développement durable, ou l'Accord de Paris pour le climat.
Mais le combat reste à mener. La hausse des inégalités économiques est observée dans presque tous les pays pour lesquels on dispose de données fiables, qu'ils soient ou non industrialisés.
Est-il soutenable que 10% des habitants les plus riches de la planète concentrent 40% des revenus mondiaux et soient à l'origine de 50% des émissions mondiales de gaz à effet de serre ? En particulier lorsque l'on sait que 100 millions de personnes de plus seront condamnées d'ici 2030 à une situation d'extrême pauvreté, si nous n'arrivons pas à tenir nos engagements sur le climat.
Face à ce constat, l'ambition de la Présidence française est d'aboutir, lors du Sommet de Biarritz, en août prochain, à un « cadre d'actions contre les inégalités ». Ce sera un agenda de solutions pour lutter contre les inégalités, résultant notamment des travaux des différentes ministérielles. Notre réunion du G7 Environnement a ainsi vocation à développer des solutions concrètes permettant à la fois de réduire les inégalités sous toutes leurs formes et de préserver l'environnement.
Quels sont les liens entre inégalités et environnement ?
Il est vrai que l'environnement reste trop souvent perçu comme une préoccupation des seules classes moyennes éduquées, issues de pays prospères. Les politiques environnementales sont souvent critiquées au motif qu'elles ne prennent pas assez en compte les plus modestes.
[La notion d'inégalité environnementale n'est pourtant pas nouvelle. Elle trouve son origine dans les années 80, aux Etats-Unis, où des mouvements pour la justice environnementale se sont développés. Il s'était agi, à l'époque, de mobilisations locales contre la double injustice liée à la pollution : les principales victimes de la pollution en sont en effet généralement les moins responsables et les moins favorisées sur le plan économique.]
Les crises environnementales que nous traversons, que ce soit le changement climatique ou ce qui pourrait être la 6ème crise d'extinction de biodiversité de la planète, sont d'abord des injustices profondes envers les générations futures. Les milliers de jeunes qui marchent pour le climat à travers le monde nous le rappellent avec vigueur.
Ces crises s'accompagnent par ailleurs d'inégalités dans l'accès aux ressources naturelles et énergétiques et dans l'exposition aux pollutions et aux catastrophes qui en découlent. Si la dégradation de l'environnement n'a pas le même impact social partout dans le monde, elle révèle partout les inégalités sociales et les aggrave.
Les inégalités, non contentes de fragiliser la cohésion de nos sociétés et de saper la confiance dans les institutions démocratiques, sont également autant d'obstacles à la nécessaire transition écologique. Pays, groupes sociaux ou individus seront d'autant plus décidés à participer à une action commune qu'ils jugeront la répartition des tâches équitables, et que des mesures seront prises pour réduire les inégalités et faire en sorte que ce ne soit pas les plus démunis et les plus vulnérables qui subissent les impacts les plus graves. Une politique climatique et environnementale qui ignorerait ses effets sociaux s'exposerait à être à la fois injuste et inefficace.
Ce sont toutes ces dimensions des inégalités que nous allons aborder dans les deux jours qui viennent. Et ce au travers du prisme de l'action pour la biodiversité et pour le climat. Car le changement climatique frappe de manière disproportionnée les pauvres et les plus vulnérables. Et les plus pauvres dépendent également de manière disproportionnée de la biodiversité - à la fois en termes de revenus et d'assurance contre le risque.
Nos deux jours de débats et l'ensemble de nos livrables sont organisés selon 4 axes.
[session science et mobilisation internationale]
Le premier est dédié aux alertes scientifiques et à la mobilisation internationale sur la biodiversité et le climat. Nous nous appuierons sur la science, qui a un rôle clé pour nous alerter, mettre en cohérence et susciter une mobilisation politique à la hauteur des enjeux.
Notre première session, ce matin, sera ainsi ouverte par les trois principales plateformes en matière d'environnement : la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques, l'IPBES ; le Groupe Intergouvernemental d'Experts sur le Climat (GIEC) ; et le Groupe Intergouvernemental d'experts sur les ressources (GIER). Je remercie tout particulièrement le Président de l'IPBES, le Professeur Watson, et la Secrétaire exécutive, le Dr. Larigauderie, de faire l'effort d'être avec nous alors qu'ils étaient encore hier en négociation sur le premier rapport global de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques, l'IPBES, adopté hier, à Paris après une semaine de travaux intenses.
En s'appuyant sur leurs informations, nous nous accorderons sur les meilleurs moyens pour rehausser la place accordée à la biodiversité sur la scène internationale et pour aboutir à un résultat ambitieux à la COP15 de la convention sur la diversité biologique qui aura lieu fin 2020 en Chine. Je vous proposerai, à l'issu de nos débats, lundi, d'adopter une Charte du G7 sur la biodiversité.
Le climat sera également au centre de nos débats alors que le changement climatique est projeté pour devenir la principale menace sur la biodiversité. Même en supposant que l'ensemble des pays mette en oeuvre leurs engagements climatiques, nous resterions sur une trajectoire de réchauffement supérieure à 3°C d'ici la fin du siècle. C'est pourquoi le maître mot de cette année 2019 est « l'ambition climatique ». Il faut relever l'ambition des engagements pris afin de combler l'écart entre les efforts actuels et ceux demandés pour respecter les objectifs de température de l'accord de Paris, si possible avant 2020.
[session inégalités et transition écologique solidaire]
Notre deuxième axe de travail est spécifiquement dédié aux inégalités et à la transition écologique solidaire. Nous étudierons, lors du déjeuner, les voies et moyens pour promouvoir une transition écologique juste. Nous accorderons une attention particulière à l'égalité entre les femmes et les hommes.
[session solutions concrètes pour la biodiversité et le climat]
Notre après-midi sera consacrée aux solutions concrètes pour la biodiversité et le climat. Je vous inviterai alors à prendre des engagements concrets en faveur des solutions fondées sur la nature et contre les pressions majeures sur la biodiversité, dont notamment la déforestation, la surexploitation ou encore la pollution par les plastiques.
[session financement de la préservation de la biodiversité]
Enfin, demain matin, et cela sera notre dernier axe de travail, nous poserons les jalons pour l'émergence d'une véritable finance pour la biodiversité, à l'image de la finance pour le climat. Nous savons tous qu'un accord, aussi ambitieux soit-il, à la COP15 de la Convention sur la diversité biologique ne restera qu'un accord de papier si les acteurs économiques ne montent pas à bord. Il nous faut créer les conditions d'une redirection massive des flux financiers en faveur de la biodiversité.
Nos travaux s'appuieront sur deux rapports sollicités par la Présidence française du G7. L'OCDE présentera ses travaux sur l'intérêt économique de la préservation de la biodiversité, la quantification des flux financiers dédiés et la mesurabilité des différentes pressions sur la biodiversité. Le WWF a quant à lui produit, en collaboration avec AXA, un rapport sur l'intégration du risque biodiversité dans les décisions d'investissements.
Pour conclure, permettez-moi de souligner les deux éléments nouveaux que nous avons souhaité apporter pour ce G7 Environnement.
D'abord l'ouverture :
L'ouverture à de nombreux pays au-delà du G7, que je remercie pour leur présence, et que je remercie d'avance pour leurs contributions aux débats et leurs engagements.
L'ouverture ensuite à la société civile. Le G7 Environnement se déroulera en deux espaces côte à côte : le Palais des congrès pour la plénière ministérielle et le centre Pompidou pour la programmation société civile. Les événements du Centre Pompidou sont ouverts à tous et j'invite les délégations officielles à y participer. L'échange avec la société civile aura également lieu au centre des congrès Robert Schuman. Nous échangerons lundi matin avec les représentants de la société civile qui auront finalisé leurs messages grâce aux événements parallèles de ce jour.
Enfin, l'action concrète. Durant ces deux jours, seront présentées, à chaque session, des initiatives concrètes visant à faire émerger ou renforcer des coalitions d'acteurs portant des solutions effectives pour la biodiversité et le climat. Vous serez appelés à vous prononcer sur ces initiatives. J'espère que nous pourrons témoigner lundi soir, en complément des engagements
politiques que nous prendrons dans le communiqué et la charte du G7 sur la biodiversité, d'un engagement collectif pour une action résolue et concrète.
Je vous remercie de votre attention et je nous souhaite deux jours de travaux fructueux.
Je vous propose de faire un premier tour de table, en commençant par les pays du G7. J'inviterai ensuite les pays invités à prendre la parole dans un deuxième temps. Merci d'avance de faire des interventions courtes, d'une minute.
Source https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr, le 7 mai 2019