Texte intégral
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2020 (projet n° 98, rapport n° 104, avis n° 103).
(…)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames, messieurs les sénateurs, la discussion qui s'ouvre au Sénat à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 sera, comme chaque année, l'occasion de confronter nos visions des orientations que le Gouvernement a prises et qu'il défendra devant vous.
Mme Agnès Buzyn vient de vous présenter ce que ce texte prévoit en matière d'accès aux droits et aux prestations pour nos concitoyens. Je concentrerai donc mon propos sur les équilibres généraux et les articles relatifs aux recettes.
Disons-le d'emblée, la question de la non-compensation de certaines exonérations de cotisations sociales cristallisera certainement les critiques et, sans doute, une part des oppositions qui pourront s'exprimer sur ce texte. J'y reviendrai bien évidemment ; nous aurons ce débat lors de la discussion de l'article 3.
Néanmoins, pour avoir bien suivi les travaux de la commission des affaires sociales du Sénat et échangé avec elle le 15 octobre dernier, je crois aussi pouvoir souligner, en ouverture de cette discussion, que les points d'accord sont souvent plus importants que ceux sur lesquels nous sommes divisés.
Je souhaiterais, pour commencer, mettre l'accent sur ces points de convergence, avant de revenir sur la question de la compensation.
C'est d'abord un objectif, dont je sais qu'il est partagé sur ces bancs : poursuivre la maîtrise des dépenses sociales afin d'en assurer la soutenabilité financière tout en permettant la protection des plus vulnérables. Cet objectif se retrouve dans le solde de la sécurité sociale pour 2020, plus dégradé que prévu, puisque le déficit s'élève à 5,1 milliards d'euros.
Vous savez que deux éléments expliquent ce résultat : d'abord, des hypothèses macroéconomiques moins favorables, qui affectent principalement les recettes ; ensuite, les réponses d'ampleur apportées par le Gouvernement à l'urgence économique et sociale dont la crise de l'automne et de l'hiver derniers a été le révélateur.
Nous assumons – je l'ai dit devant votre commission – le fait que la réponse à cette crise a conduit à dégrader, temporairement, nos comptes sociaux, mais ce déficit ne signifie nullement que nous ayons abandonné nos objectifs de finances publiques, bien au contraire.
Nous poursuivons la politique budgétaire sérieuse et efficace que nous conduisons depuis deux ans pour soutenir la croissance et l'emploi, car cette politique a permis d'obtenir des résultats.
Si l'on considère l'ensemble du champ des administrations publiques, nous sommes parvenus à la fois à maîtriser la dépense publique dans son ensemble – 40 milliards d'euros de dépenses ont été évités depuis 2017, soit autant d'économies tendancielles –, à réduire les déficits de 20 milliards d'euros entre 2019 et 2020, pour atteindre en 2020 le déficit le plus bas depuis 2001, et à baisser les prélèvements obligatoires de 40 milliards d'euros sur l'ensemble du quinquennat, dont 27 milliards d'euros en faveur des ménages, tout en stabilisant notre endettement, ce qui n'était pas arrivé depuis plusieurs années.
La sécurité sociale a pris sa part à cet effort et continuera bien évidemment de le faire : ses dépenses demeurent maîtrisées et des efforts sont demandés à tous pour permettre à la sécurité sociale de revenir à l'équilibre d'ici à 2023. Ces efforts sont notamment demandés aux entreprises : ainsi, en 2020, elles connaîtront un encadrement de la déduction forfaitaire spécifique, qui est un dispositif ancien aux effets mal maîtrisés, puisqu'il amplifie le gain des allégements généraux. Cette déduction sera plafonnée à 130% des allégements généraux de droit commun, ce qui contribuera au financement de nouvelles mesures en faveur du pouvoir d'achat.
Par ailleurs la dette sociale portée par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) sera apurée d'ici à 2024. En 2019, deux tiers de cette dette auront déjà été apurés, soit 171 milliards d'euros sur un total de 260 milliards.
Dans ce contexte, vous comprendrez que le Gouvernement émette un avis défavorable sur l'ensemble des amendements qui visent à étendre ou à renforcer des niches sociales nouvelles.
Il en sera ainsi de la proposition visant à encourager les employeurs à prendre en charge les abonnements de transports publics de leurs salariés, ou d'autres qui tendent à créer des niches catégorielles. Toutes ces propositions procèdent de préoccupations qui sont légitimes – la question ne porte pas sur cette légitimité –, mais elles partent de l'idée que la baisse des prélèvements serait la seule solution à tous les problèmes. Surtout, elles ont un coût que nous ne pouvons pas assumer à ce stade. Ces mesures ne sont en effet pas financées et sont par ailleurs contradictoires avec la volonté de limiter au maximum les niches fiscales et sociales.
Ce texte comporte également un certain nombre de dispositions importantes sur lesquelles nous devrions nous retrouver.
Nous reconduisons en 2020 la prime exceptionnelle entièrement désocialisée et défiscalisée que le Sénat avait adoptée l'année dernière. En 2019, cette prime a permis de distribuer 2,2 milliards d'euros de pouvoir d'achat à 5 millions de salariés ; son montant moyen s'élève à environ 400 euros. Pour 2020, son versement sera conditionné à la négociation ou à la conclusion d'un accord d'intéressement dans l'entreprise ; les conditions seront assouplies pour les TPE. En effet, nous voulons encourager le partage de la valeur au sein de l'entreprise, entre les travailleurs et les employeurs.
J'ai bien noté, monsieur le rapporteur général, votre vigilance : vous souhaitez que cette prime, qui est une mesure de pouvoir d'achat, demeure exceptionnelle. Ce souci est partagé par le Gouvernement : si cette prime devait perdurer, cela créerait le risque d'une substitution de la prime au salaire, ce qui ne serait pas profitable pour les salariés en fin de compte, mais serait dangereux pour nos comptes sociaux.
C'est pourquoi nous avons inscrit ce dispositif dans la continuité de l'action que nous avons entamée au travers de la loi Pacte pour favoriser, de manière durable, le partage de la valeur dans l'entreprise grâce aux accords d'intéressement.
Le volet « simplification » de ce PLFSS rejoint également les travaux du Sénat et, en particulier, ceux qu'il a menés en faveur des travailleurs indépendants.
Dans le prolongement de nos engagements pris lors de la suppression du régime social des indépendants (RSI) en matière de simplification du recouvrement des cotisations sociales, nous allons, d'ici à 2021, fusionner les déclarations fiscales et sociales des travailleurs indépendants. Ils pourront ainsi effectuer en une seule formalité trois déclarations qu'ils adressent aujourd'hui à des interlocuteurs différents et à des dates distinctes. Cette mesure rejoint une proposition formulée de longue date par le président de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat, M. Jean-Noël Cardoux, et par M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
Nous proposons également de mener à son terme l'unification du recouvrement social autour des Urssaf pour que notre action publique soit plus efficace et que les entreprises n'aient plus qu'un seul interlocuteur pour leurs cotisations. Ce chantier fait écho à celui que nous conduisons dans le champ fiscal et qui sera discuté dans le projet de loi de finances pour 2020.
Un autre point d'accord, me semble-t-il, concernera la simplification de l'accès aux droits, grâce à la contemporanéisation du crédit d'impôt et des aides financières, pour les personnes dépendantes et les personnes handicapées.
Grâce à une expérimentation menée à Paris et dans le Nord, 1,1 million de personnes bénéficieront à terme de cette mesure de simplification et de pouvoir d'achat pour l'accès à des services essentiels.
Il en sera de même pour l'exonération de cotisations sociales de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle dans la fonction publique, rupture créée par la loi du 6 août 2019. Cette exonération permet d'aligner le régime social de la fonction publique sur celui du secteur privé. Le Gouvernement est très attaché à ce que la mobilité soit favorisée au sein la fonction publique, mais aussi entre le secteur public et le secteur privé. Cette mesure de cohérence doit y contribuer.
Tels sont donc les points de convergence sur lesquels nous devrions nous retrouver ; vous pouvez constater qu'ils sont importants. Ils participent, à mon sens, à une large amélioration de notre système de protection sociale.
J'en viens maintenant au débat relatif à la compensation des exonérations de cotisations sociales.
Plusieurs mesures sont concernées, au premier rang desquelles l'exonération des heures supplémentaires que la loi portant mesures d'urgence économiques et sociales a avancé du 1er septembre au 1er janvier 2019.
Nous avions eu un premier débat, l'année dernière, lors de l'examen du PLFSS pour 2019, au sujet du choix de la non-compensation ; ce débat s'était poursuivi lors de l'examen de ces mesures d'urgence. L'article 3 du présent PLFSS prolonge le choix fait par le Gouvernement et adopté par l'Assemblée nationale, choix qui figurait déjà dans le programme de stabilité que nous avons présenté au printemps et qui a déjà fait l'objet de débats parlementaires.
Sur la question de principe, les termes du débat sont connus. Ils peuvent paraître byzantins aux non-initiés.
Du point de vue du contribuable, il n'y a pas, d'un côté, des impôts et des taxes d'État et, de l'autre, des impôts et cotisations : il y a seulement ce que l'État demande à chacun au bénéfice de la collectivité. Il en va de même s'agissant des dépenses : pour les Français, une dépense est une dépense, qu'elle relève du budget de l'État ou de celui de la sécurité sociale.
D'ailleurs, je tiens à préciser d'emblée que, sur les 16,8 milliards d'euros auxquels est estimé le coût des mesures d'urgence économiques et sociales, 14 milliards d'euros sont à la charge du budget de l'État, contre 2,8 milliards d'euros à la charge du budget de la sécurité sociale, ce qui démontre que celle-ci n'est pas mise à contribution pour financer l'intégralité des mesures, comme on peut le lire parfois.
M. Yves Daudigny. Heureusement !
Mme Laurence Rossignol. Le Gouvernement est trop bon !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Plus largement, nous avons collectivement souhaité que la rénovation des relations financières entre l'État et la sécurité sociale passe par une clarification et une responsabilisation de chaque sphère.
Cette clarification est d'autant plus nécessaire que ce n'est pas la première fois que des mesures décidées par le Gouvernement et par le Parlement et financées par la sécurité sociale ne sont pas compensées.
Je rappelle enfin que toutes les administrations publiques sont engagées dans un effort pour redresser nos comptes, nous désendetter et redonner aux Français les fruits de leur travail. Par conséquent, la sécurité sociale n'est évidemment pas le seul secteur pour lequel l'équilibre compte : nous gardons de cela une vision globale.
L'essentiel me paraît par ailleurs préservé puisque, avec ou sans compensation, ce PLFSS contient des mesures fortes en faveur des Français, mesures que Mme Agnès Buzyn vous a présentées il y a un instant. Je pense notamment au soutien au pouvoir d'achat des retraités, avec la réindexation sur l'inflation des pensions inférieures à 2 000 euros par mois, ce qui concernera 77% des retraités, à la protection des Français contre les nouveaux risques, avec l'indemnisation du congé de proche aidant et la création d'un fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques, ou encore aux engagements déjà pris par Mme la ministre lors de l'examen de ce texte à l'Assemblée nationale concernant l'hôpital et, notamment, à la visibilité pluriannuelle que nous voulons donner aux établissements.
Cette liste de mesures traduit la volonté du Gouvernement de répondre à la demande de justice sociale, de protection des plus vulnérables et de prise en compte des nouveaux risques.
Ce texte s'inscrit dans la continuité de la politique que nous menons pour baisser les impôts et soutenir le pouvoir d'achat des Français. Si nous vous le présentons, c'est parce qu'il nous paraît responsable et cohérent avec nos objectifs de finances publiques et de redressement des comptes sociaux.
N'oublions pas cette réalité : seuls des comptes sociaux maîtrisés dans le cadre d'une soutenabilité financière permettent de préparer l'avenir et de préserver la force de notre modèle social.
Je partage évidemment l'intégralité des propos de Mme la ministre concernant la motion de renvoi à la commission déposée au nom de votre commission des affaires sociales, et je forme à mon tour, dans le respect du Parlement, le souhait que nous puissions, au cours des prochaines heures et des prochains jours, discuter des mesures que nous vous présentons et des propositions d'amélioration que vous nous soumettrez. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – Mme Évelyne Perrot applaudit également.)
(…)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Je vais essayer d'apporter quelques éléments de réponse aux différentes interventions, notamment sur les questions de compensation financière, de relations financières entre l'État et la sécurité sociale, ainsi que sur les questions d'endettement, avant que Mme la ministre ne revienne sur ce qui est le coeur du PLFSS, à savoir les prestations servies à nos concitoyens et l'amélioration du système de protection sociale.
Concernant les compensations – je sais que nous aurons de nouveau ce débat à l'article 3 –, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne marque pas une rupture. Nombreux sont celles et ceux qui ont évoqué la loi Veil, en rappelant le principe de compensation des exonérations accordées par l'État. Ce principe n'a pas toujours été respecté, c'est le moins que l'on puisse dire, puisque, année après année, sur une période longue, quasiment depuis le vote de cette loi, de nombreuses mesures n'ont pas été compensées. Avec la loi de programmation et le PLFSS de l'an dernier, nous avons fait en sorte de revenir à ce principe, que l'on qualifie parfois, de manière un peu familière, de « chacun chez soi ».
Pour faire écho à l'intervention de Mme Cohen lors de la défense de la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité, je souligne qu'il ne faudrait pas laisser penser – je ne pense pas que tel soit votre objectif, madame la sénatrice – que l'État ne compenserait absolument aucune exonération. Certes, le train de mesures est évalué à 2,8 milliards d'euros, mais d'autres mesures d'allégement font l'objet d'une compensation intégrale. Les allégements généraux, que vous avez cités à plusieurs reprises et qui représentent plus de 51 milliards d'euros, font, eux, l'objet d'une compensation intégrale par l'État grâce à un transfert de TVA.
Vous avez été nombreux à pointer que le contexte a changé. En 2019, nous avons constaté un déficit de 5,4 milliards d'euros, dont 2,8 milliards d'euros liés aux mesures d'urgence économiques et sociales. Reste que, pour une part non négligeable, à savoir un peu plus de la moitié, ce déficit est lié à une dégradation des hypothèses macroéconomiques. Nous en tenons compte dans ce PLFSS. Ainsi, nous supprimons les transferts qui avaient été prévus vers la Cades et vers l'État à compter de 2020. Il s'agit donc de 3 milliards d'euros qui vont rester dans les caisses de la sécurité sociale pour tenir compte de ce contexte et participer au redressement des comptes sociaux.
Je voudrais souligner que les mesures prises au titre de l'urgence économique et sociale bénéficient principalement à ceux de nos concitoyens qui en ont le plus besoin. Je pense notamment à l'exonération fiscale et sociale sur les heures supplémentaires, qui se traduit par un gain moyen de pouvoir d'achat de 450 euros par an. Il faut avoir en tête que les deux tiers des ouvriers et 46% des employés réalisent des heures supplémentaires, contre seulement, si je puis dire, 20% des cadres. Je vous rappelle que cette mesure a aussi été étendue aux agents publics, qu'ils soient titulaires ou contractuels.
Nous avons pris la décision de réindexer les pensions de moins de 2 000 euros sur l'inflation. Concrètement, un retraité qui perçoit une pension de 1 500 euros par mois retrouve ainsi 338 euros de pouvoir d'achat ; un retraité qui perçoit une pension de 1 900 euros retrouve, lui, un pouvoir d'achat de 428 euros.
Au total, je l'ai dit, ces mesures représentent un peu moins de 17 milliards d'euros. Le budget de l'État en porte plus de 14 milliards, et, effectivement, 2,8 milliards sont portés par la sécurité sociale. Nous avons souhaité ainsi répartir l'effort en fonction de la nature des mesures, en ayant en tête, aussi, que le budget de l'État présente un déficit qui tangente les 100 milliards d'euros. Nous serons, pour l'année 2019, à environ 97 milliards d'euros, annonce faite la semaine dernière en commission des finances à l'occasion du premier examen de la loi de finances rectificative. Pour la sécurité sociale, nous avons une prévision à 5,1 milliards d'euros, soit un peu moins que le niveau constaté en 2017.
Vous avez également soulevé trois interrogations auxquelles je souhaite répondre.
Les principes d'autonomie financière de la sécurité sociale et d'affectation de recettes spécifiques, à savoir les cotisations, à la sécurité sociale sont la base du système d'assurance collective et solidaire.
Le premier principe est respecté. Le budget autonome de la sécurité sociale est examiné dans un seul et même texte, distinct du budget de l'État : le PLFSS dont nous débattons à partir de ce jour. Si, effectivement, il y a eu un certain nombre de débats pour évoquer la fusion de ces deux textes, il n'est en plus question. Les choses sont claires : le PLFSS détermine le budget de la sécurité sociale et a vocation à continuer à le faire.
S'agissant du second principe, c'est-à-dire les ressources affectées à la sécurité sociale, permettez-moi de souligner, peut-être pour relativiser ou nuancer les affirmations que j'ai pu entendre, qu'il n'est plus respecté depuis plusieurs années pour une part non négligeable des recettes. Cela étant, j'ai déjà évoqué les 50 milliards d'euros de compensation des allégements généraux, auxquels il faut y ajouter non seulement 5 milliards d'euros de crédits budgétaires compensant des exonérations ciblées, mais aussi quelques milliards de fiscalité affectés à la sécurité sociale au titre de tel ou tel dispositif.
Je termine par les deux autres questions.
S'agissant de la dette sociale, que M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales a évoquée en commission et aujourd'hui, en séance publique, je voudrais rappeler que les deux tiers ont été à ce jour apurés, alors que la dette publique se stabilise autour de 98%. Il importe de le souligner, car cela garantit, à terme, la soutenabilité de notre système de protection sociale.
La résorption de la dette sociale est une priorité, car nous refusons de léguer aux générations futures un système déséquilibré. À court terme, j'y insiste, il n'y a pas de difficulté pour la gestion de la dette par l'Acoss. Elle a été financée en 2018, avec un taux moyen annuel négatif de 0,65%, et nos perspectives pour 2019, comme pour 2020, sont favorables, puisque nous anticipons encore des taux légèrement négatifs, ce qui est rassurant, car de nature à garantir à l'Acoss un traitement tout à fait soutenable de cette dette. Le plafond maximal d'emprunt de cet organisme n'augmenterait que de 1 milliard d'euros en 2020, malgré un déficit de plus de 5 milliards d'euros, grâce à l'optimisation de la gestion de trésorerie.
Par ailleurs, la Cades aura remboursé 16 milliards d'euros de dette en 2019 et 16,7 milliards d'euros en 2020, alors que le déficit est prévu à hauteur de 5 milliards d'euros sur les deux années. Il y a donc un effort de désendettement trois fois plus important que les déficits. Nous pouvons nous en féliciter, car c'est un gage de respect de sa trajectoire d'apurement.
Je me retrouve dans les affirmations d'un certain nombre d'entre vous, à savoir que la dette de l'Acoss devrait s'élever, d'ici à 2022, à 40 milliards d'euros. Je le répète, elle est soutenable, mais nous devons la financer et veiller à son apurement. Pour ce faire, nous pourrions envisager son transfert à la Cades, comme c'est parfois préconisé, mais il ne pourra se faire que par une disposition de loi organique. Nous pourrions aussi, et c'est une option que le ministère de l'action et des comptes publics porte évidemment en priorité, faire en sorte de travailler à des économies pour permettre le financement et la résorption de cette dette.
Nous allons avoir ce débat, que nous devons faire en sorte d'articuler avec les nouvelles perspectives que le Conseil d'orientation des retraites devra nous donner. En effet, vous le savez, le Gouvernement a saisi ce conseil pour qu'il puisse travailler sur différentes hypothèses et, ainsi, nous accompagner dans la préparation de la réforme systémique qui a été évoquée à plusieurs reprises.
Veuillez me pardonner, mesdames, messieurs les sénateurs, le caractère un peu décousu de mes propos, mais je veux terminer par une précision à l'attention de M. le rapporteur Joyandet et d'autres sénatrices et sénateurs. À plusieurs reprises a été évoquée la question des niches sociales. Nous sommes évidemment ouverts à un travail d'optimisation, d'amélioration et d'évaluation de l'efficacité des niches sociales. Nous aurons l'occasion de nous exprimer à ce sujet pendant le débat.
J'ai entendu dans la bouche de plusieurs d'entre vous le montant de 90 milliards d'euros. J'appelle votre attention sur le fait que cette somme correspond à l'estimation que fait la Cour des comptes du total des niches sociales, qui comprend les taux réduits de CSG. Or je pense que personne ici n'a pour objectif de revenir sur ce dispositif. Si nous défalquons le montant correspondant aux taux réduits de la CSG des niches sociales identifiées par la Cour des comptes, nous sommes non pas à 90 milliards d'euros, mais à un peu plus de 60 milliards d'euros. Certes, c'est une somme considérable, mais il faut la ramener à sa juste mesure par rapport à la somme communément avancée par les uns et par les autres.
source http://www.senat.fr, le 25 novembre 2019