Texte intégral
ELIZABETH MARTICHOUX
Bonjour Agnès BUZYN.
AGNES BUZYN
Bonjour Elizabeth MARTICHOUX.
ELIZABETH MARTICHOUX
Merci beaucoup d'être avec nous ce matin sur LCI, 48 heures à peine après la présentation de votre plan de refondation, que le collectif des urgences hier a rejeté, les leaders de la contestation affirment que le compte n'y est pas, c'est votre 3ème plan en 3 mois, sauf erreur, en tout cas c'est la 3ème fois que vous revenez avec des propositions dans le cadre de cette crise des urgences, est-ce que c'est votre dernier mot ?
AGNES BUZYN
Alors nous avons vraiment fait un travail de fond, en réalité pour que tout le monde comprenne bien la crise est aux urgences, mais le problème se situe ailleurs et donc ce que je propose, c'est un plan qui vise à régler le problème partout où il se trouve, c'est-à-dire en aval des urgences, au niveau des urgences dans l'hôpital et, pardon en amont au sein de l'hôpital et en aval des urgences. Et donc en réalité Le collectif souhaiterait que la solution ne s'adresse qu'aux urgentistes et qu'eux seuls or je considère que le problème aujourd'hui doit être partagé entre tous les acteurs. Tous les acteurs du monde de la santé détiennent une partie de la solution et donc évidemment j'entends leur problématique de surcroît de travail, de conditions de travail et j'y réponds. J'y réponds notamment par une prime de risque qui a été mise en oeuvre dès le mois de juillet. J'y réponds parce qu'ils demandent de réouverture de lits et je le dis oui, nous ré ouvrirons des lits, nous ouvrirons des lits là où c'est nécessaire.
ELIZABETH MARTICHOUX
Alors attendez, c'est un point, un des points de friction sur lesquels j'aimerais qu'on s'y arrête parce que c'est important. Effectivement le collectif Inter Urgences dit dans ce plan il n'y a pas de réouverture des lits, ce qui a été fermé ne sera pas rouvert.
AGNES BUZYN
C'est faux, c'est-à-dire qu'aujourd'hui clairement le plan identifie 12 mesures, on en parlera, des mesures d'amont notamment sur les personnes âgées pour éviter que les personnes âgées n'attendent aux urgences, un service d'accès aux soins qui sera un service pour rendre plus lisible l'offre de soins.
ELIZABETH MARTICHOUX
On y reviendra tout à l'heure.
AGNES BUZYN
Et sur les lits, j'ai clairement dit et c'est la dernière mesure d'ailleurs que là où nous devons ouvrir des lits, nous le ferons. C'est-à-dire qu'il n'a aucun…
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, mais du coup, pardon Madame la Ministre, du coup, ça n'est pas très clair et ça demande des éclaircissements, ça veut dire quoi là où il y aura des besoins, on ouvrira des lits, des nouveaux lits, des créations de lits, des lits qui ont été fermés qui seront rouverts ou des lits qui ne sont pas mobilisés et qui le seront pour les urgences, quelle est la réponse ?
AGNES BUZYN
Tout cela, en fait tout cela, c'est-à-dire des lits qui ont dû être fermés par le passé qui peuvent être ré ouverts. Il peut y avoir des créations de lit notamment il y a maintenant des services qu'on appelle de post-urgence pour coucher les gens en fait dans un lit pour des périodes assez courtes, notamment des postes urgence de gériatrie pour les personnes âgées ou des postes urgence très polyvalents pour éviter que les gens aillent dans des services ultra-spécialisés et pour attendre des résultats d'examens, ce sont des durées de séjour très courtes, ces unités existent dans certains hôpitaux, on peut les créer là où il n'y en a besoin. Il y a aussi énormément d'hôpitaux où les lits sont disponibles et ne sont pas utilisés ou alors les urgentistes passent énormément de temps à appeler dans les services pour savoir s'il y a un lit vide et ça c'est ce qu'on appelle des gestionnaires de lits, les hôpitaux où il y a eu des gestionnaires de lits, dont c'est le métier de trouver des lits dans l'hôpital ont considérablement soulager le travail des soignants aux urgences. Toutes ces solutions existent.
ELIZABETH MARTICHOUX
La difficulté, c'est que quand vous venez avec votre plan et vos 12 mesures, il n'y a pas un moment où vous dites, voilà, il y a tant de lits, on va rouvrir et du coup ça crée effectivement cette incompréhension. Ecoutez Patrick PELLOUX, le président de l'Association des urgentistes de France.
PATRICK PELLOUX, LE PRESIDENT DE L'ASSOCIATION DES URGENTISTES DE FRANCE.
Je suis très déçu et il y a une très grande incompréhension entre ce qui se passe au ministère de la santé et la réalité.
ELIZABETH MARTICHOUX
Sur ce sujet encore, mais il y en a d'autres, on va les voir, est-ce qu'un éclaircissement, une précision, des précisions ne seraient pas indispensables ?
AGNES BUZYN
Je ne suis pas sûre qu'il soit déçu uniquement sur cette question.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais moi je vous pose cette question là-dessus et puis on va voir ce qu'il veut dire après.
AGNES BUZYN
Il faut que nos concitoyens comprennent qu'il n'y a pas une décision de fermeture des lits au sein du ministère de la Santé, en réalité c'est un mouvement international qui fait que les durées de séjour des malades, le temps qu'on passe à l'hôpital est en train de se réduire partout dans le monde. Ça aboutit à des réorganisations. Il y a aussi des endroits où on ouvre des lits parce que la population augmente et donc il n'y a pas en réalité une décision univoque, uniforme de fermeture de lit en France. Il y a des endroits où il y a moins besoin de lits, d'autres où il y en a plus besoin. Ce que je dis aujourd'hui c'est que dans les villes où les services d'urgences sont saturés, où il n'y a pas un volet de lits disponibles comme on peut en trouver dans certains hôpitaux, il sera nécessaire de rouvrir des lits, ou d'ouvrir des unités de postes urgents, il n'y a aucun dogmatisme là-dessus.
ELIZABETH MARTICHOUX
A quel horizon se sera nécessaire ?
AGNES BUZYN
Dès qu'on identifie des besoins, je veux que les hôpitaux, les soignants se mettent autour de la table avec l'agence régionale de santé, qu'on identifie le besoin s'il existe et qu'on s'organise pour ouvrir ces lits. Il n'y a aucun dogmatisme là-dessus. Donc il y a un budget non négligeable avec 80 % de ce budget qui est dédié au recrutement de personnes.
ELIZABETH MARTICHOUX
Notamment pour créer le service d'accès aux soins en particulier.
AGNES BUZYN
Mais pas seulement.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais pas seulement.
AGNES BUZYN
Ça peut être des personnes qui vont être recrutées pour ce service d'accès aux soins, ça peut être des personnes recrutées dans les SAMU pour la visio-assistance que je souhaite mettre en place pour savoir qui nous devons emmener aux urgences et qui peut aller voir un médecin libéral. Et notamment ce service de visio-assistance sera très utile dans les EHPAD, pour aider le personnel lorsqu'une personne âgée chute la nuit ^par exemple, pour montrer la plaie, savoir s'il est nécessaire qu'elle se déplace. Donc ça, ça peut être aussi des personnels recrutés. Des personnels recrutés pour la gestion de lits, là où ça a été mis en place, quand les urgentistes n'ont pas à passer une heure par jour à téléphoner à leurs collègues au sein de l'hôpital pour trouver un lit, ça détend déjà l'atmosphère. Ces gestionnaires de lits, ils ont des logiciels qui les aident à gérer pour savoir quand est-ce qu'un patient sort, quand est-ce qu'il est programmé pour une sortie et permet en fait de fluidifier complètement les passages aux urgences. Donc ce sera des personnels aussi aux urgences si c'est nécessaire.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous dites 750 millions, 80 % de recrutements, d'accord, mais ça c'est un point de friction aussi, Agnès BUZYN, cette enveloppe, est-ce qu'elle est à budget constant ou est-ce que c'est de l'argent qui… ce sont en fait des mesures qui sont financées par des économies sur l'hôpital. Ecoutez ce qu'en disait Jean-Paul HAMON, ce matin, le président de la Fédération des Médecins, il était l'invité de Pascale de LA TOUR DU PIN tout à l'heure dans la matinale.
JEAN-PAUL HAMON, PRESIDENT DE LA FEDERATION DES MEDECINS
C'est 750 millions, qui ne sont pas 750 millions de plus, c'est juste une répartition histoire de faire 750 millions. On a déshabillé Paul pour habiller Pierre etc. Franchement ça ne fera pas l'affaire.
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça c'est un gros sujet d'incompréhension, ces 750 millions, ils existaient déjà, vous les prenez et vous les affectez à l'hôpital, c'est une réaffectation oui ou non ?
AGNES BUZYN
Je vais être très claire, pour cette année les 150 millions prévus pour 2020 sont issus de budgets qu'on avait mis de côté en réserve pour des opérations qui ont pris du retard. Et donc nous savons que ces opérations ne vont pas se faire et ces 150 millions ne prennent pas d'argent sur l'hôpital, ne prennent pas de l'argent sur le secteur libéral, en fait on ne prend à personne, c'est du retard pris dans des opérations qui va être réutilisés, réaffectés aux urgences pour cette année. Pour les années suivantes, on l'intégrera dans le budget évidement de la Sécurité sociale…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça veut dire quoi, on l'intégrera, ça veut dire quoi ?
AGNES BUZYN
Ça veut dire qu'on construira un budget et il est hors de question et je le dis vraiment pour les hospitaliers comme pour le secteur libéral, nous ne prendrons cet argent absolument à personne, ce n'est pas de l'argent qui est pris sur les tarifs…
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est simple, est-ce que c'est un argent en plus que le gouvernement débloque ou est-ce que c'est dans l'enveloppe initiale ?
AGNES BUZYN
Dans l'enveloppe initiale il y a budgets, dans les enveloppes générales de la Sécurité sociale pour l'assurance maladie, il y a les budgets qui vont aux hôpitaux, il y a les budgets qui vont au secteur libéral, qui sont liés aux tarifs, à l'activité et il y a des budgets qui sont liés à des opérations immobilières, il se trouve qu'un certain nombre d'opérations ont pris du retard pour 2020…
ELIZABETH MARTICHOUX
Là vous parlez des opérations immobilières ?
AGNES BUZYN
Oui, par exemple, et donc ces opérations où cet argent ne sera pas dépensé en 2020, nous le savons, parce qu'il y a du retard, cet argent là va être réaffecté à l'hôpital et au secteur libéral pour le plan.
ELIZABETH MARTICHOUX
Certains pourraient dire on rénove moins les hôpitaux et en revanche on va pouvoir aider un peu, mettre un peu d'huile dans les tuyaux de l'hôpital.
AGNES BUZYN
Vous savez n'importe qui, qui a construit un budget sait que de temps en temps il y a un retard dans la façon dont on dépense l'argent. Il peut arriver qu'on ait besoin d'argent en plus de façon urgente et parfois il est possible aussi que l'argent ne soit pas utilisé parce que ce qu'on avait prévu de dépenser ne l'est pas.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais vous savez il y a un objectif de santé, vous le savez bien…
AGNES BUZYN
Je rappelle Madame MARTICHOUX, pardon qu'il s'agit là pour 2020 de 150 millions, c'est un budget qui par rapport au budget global dont dispose la Sécurité sociale peut totalement s'expliquer par des retards d'opérations.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais plus globalement Agnès BUZYN, puisqu'on parle beaucoup des comptes publics, il y a un objectif de dépenses de santé annuel qui est fixé, il s'appelle l'Ondam, dans le jargon, il est en baisse cet objectif en 2020 par rapport à 2019, sauf erreur, vous me corrigez mais moi d'après ce que j'ai compris 2,3 % en 2020 contre 2,5 % en 2019.
AGNES BUZYN
Alors non, ce n'est absolument pas un budget en baisse, c'est un budget en hausse, c'est-à-dire que chaque année le budget alloué à l'Assurance maladie augmente, parce que la population vieillit et parce que les besoins en santé augmentent, parce que le prix des soins augmente. Donc l'année dernière il a augmenté de 2,5 % et cette année il augmente encore d'une marche supplémentaire, comme tous les ans, cette augmentation n'est pas de 2,5 mais de 2,3 %, mais c'est une augmentation chaque année du budget, 2,5 puis 2,3, donc ce n'est pas un budget en baisse, c'est bien un budget en hausse.
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est un objectif de dépense de santé annuelle qui passe de 2,5 à 2,3, on peut le dire.
AGNES BUZYN
Non, non c'est l'augmentation du budget.
ELIZABETH MARTICHOUX
Ce que je voudrais vous demander quand même, ce que disent les médecins parce que c'est compliqué d'utiliser les chiffres, ce que disent les médecins malgré tout, c'est que compte tenu du retard qui est pris depuis 10 ans, compte tenu des régimes successifs qu'on a quand même fait subir à l'hôpital, est-ce qu'il ne serait pas temps de desserrer les cordons de la bourse, est-ce que vous êtes prêt dans le gouvernement, susceptible en tout cas attentif au compte public, mais est-ce qu'il ne serait pas temps de faire un effort supplémentaire Madame la Ministre ?
AGNES BUZYN
C'est ce qu'on a fait l'année dernière. En réalité… non, mais je vous explique en quoi…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ce n'est pas ce que ressentent les médecins et les personnels…
AGNES BUZYN
Bien sûr, mais je vais vous expliquer pourquoi ce qu'on a fait l'année dernière a un impact sur cette année. L'année dernière nous avons voulu pour augmenter, pour accompagner la restructuration du système de santé dans son ensemble, augmenter l'ONDAM, non pas de 2,3 %, mais de 2,5 %, c'est 400 millions en plus.
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est l'objectif annuel de santé, on le répète, de dépenses de santé.
AGNES BUZYN
Ces 400 millions, ils sont donc intégrés, depuis cette année, dans le budget de la Sécurité sociale, et ils se renouvellent chaque année, c'est-à-dire que depuis l'année dernière l'ONDAM a d'ores et déjà intégré 400 millions d'euros supplémentaires, qui sont en permanence dans l'ONDAM. Et là, cette année, au-delà de ces 400 millions supplémentaires, nous rajoutons 2,3 % d'augmentation. Et donc…
ELIZABETH MARTICHOUX
Et l'hôpital, il en profite ?
AGNES BUZYN
Et donc l'hôpital…
ELIZABETH MARTICHOUX
Et l'hôpital, en profite-t-il ?
AGNES BUZYN
Est le premier poste qui en profite, car, l'année dernière j'ai pu dégeler la totalité du gel que nous faisons en début d'année, j'ai redistribué à l'hôpital tout ce qui avait été gelé, c'est la première fois depuis 10 ans que nous avons aussi augmenté le budget alloué à l'hôpital, ce qu'on appelle les tarifs hospitaliers. Je voudrais dire quand même que depuis, d'abord depuis 10 ans, l'ONDAM n'a jamais été aussi élevé, dans le quinquennat précédent il était inférieur à 2 %, c'est-à-dire qu'on n'augmentait jamais au-delà de 2 %, je vais augmenter de 2,3, puis de 2,5 %. L'année dernière, depuis 10 ans, c'était la première fois que les budgets hospitaliers, non seulement arrêtaient de descendre, mais ré augmentaient, parce que je tiens compte de la difficulté des soignants, et cette année je mettrai tout en oeuvre pour que les tarifs soient au moins équivalents à ceux de l'année dernière. Je crois que les hospitaliers savent ce que veut dire une baisse des tarifs ou une augmentation des tarifs.
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce que, quand vous entendez des grévistes dire on veut 10.000 emplois supplémentaires, on veut des hausses de salaire de 300 euros, nets, vous dites quoi, démagogie ?
AGNES BUZYN
Ecoutez, 300 euros nets c'est 15 % d'augmentation de salaire, aujourd'hui…
ELIZABETH MARTICHOUX
Il y a de la démagogie, il y a des va-t-en-guerre dans ce mouvement ?
AGNES BUZYN
Non, ils expriment des difficultés et sincèrement, je les ai prises en compte, j'ai tout de suite, dès le mois de juillet, décidé de tenir compte de leurs conditions de travail, c'est-à-dire de leurs prises de risques…
ELIZABETH MARTICHOUX
On dit que vous vous y êtes prise trop tard, Madame la ministre, que c'était déjà trop tard pour réagir et répondre à cette crise des urgences.
AGNES BUZYN
Non, j'avais demandé à chaque hôpital de trouver une solution locale, parce qu'en réalité, les difficultés dans les urgences sont éminemment différentes d'un service à l'autre.
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc vous n'entendez pas cette critique ?
AGNES BUZYN
Laquelle ?
ELIZABETH MARTICHOUX
Sur la vitesse de réaction, sur le fait que vous avez réagi trop tard.
AGNES BUZYN
J'étais en train de transformer le système de santé, j'étais en train de faire voter la loi Santé, à la fin de l'année dernière, c'est-à-dire au mois de juin. Et qu'est-ce qu'elle a comme objectif la loi Santé ? de desserrer la pression sur l'hôpital, elle a pour objectif de mieux répartir la tâche entre les médecins et les autres professions de santé, entre le secteur libéral, le secteur hospitalier, donc toute la loi vise à améliorer la condition des soignants, notamment à l'hôpital, le secteur libéral aussi d'ailleurs.
ELIZABETH MARTICHOUX
Elle dure depuis six mois cette crise, Madame BUZYN, est-ce que, quand même, vous dites aujourd'hui je n'irai pas plus loin, ou est-ce que, si ça continue, comme le Collectif des urgences annonce une grève des urgences qui continue, est-ce que vous dites on peut en reparler ? Est-ce que vous dites c'est mon dernier mot - c'était ma première question tout à l'heure – ou est-ce que vous pouvez aller plus loin ?
AGNES BUZYN
Ecoutez, je suis toujours prête à discuter. Aujourd'hui ce que je propose c'est un plan global qui va régler le problème partout où il se trouve…
ELIZABETH MARTICHOUX
Alors, que dites-vous ce matin à ceux qui disent le compte n'y est pas, vous leur dites quoi ?
AGNES BUZYN
Non mais, ils veulent, ils expriment leurs difficultés, et je les entends, en termes d'ouvertures de lits, en termes… ils veulent une augmentation de salaire, ils ont eu une prime de risque qui identifiait, en réalité, la différence qu'il y a entre travailler aux urgences et travailler dans d'autres services hospitaliers où il n'y a pas cette pression permanente. Je rappelle quand même que c'est une prime de 100 euros nets par mois.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous l'avez dit, vous l'avez redit…
AGNES BUZYN
Ils l'ont reçue déjà, tous les personnels aux urgences ont reçu…
ELIZABETH MARTICHOUX
Et donc vous dites quoi, regardez ce que vous avez ?
AGNES BUZYN
Non, pas du tout, et je dis que je veux que leurs compétences soient valorisées, et donc je propose qu'ils aient des infirmiers de pratique avancée, qu'ils puissent s'inscrire dans des pratiques nouvelles, qui vont être revalorisées avec des salaires adéquats, puisque quand on fera infirmier de pratique avancée on n'aura pas le même salaire qu'un infirmier qui n'aura pas fait un grade master, et j'ai rajouté une prime de coopération, c'est-à-dire que quand ils permettent aux médecins urgentistes…
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais moi je pense qu'ils l'ont entendu, qu'ils l'ont même vu sur leur feuille de salaire, Madame BUZYN, ce que vous dites…
AGNES BUZYN
Oui, ils l'ont vu sur leur feuille de…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ils disent ça ne suffit pas, qu'est-ce que vous leur dites ?
AGNES BUZYN
Non, mais ils veulent une solution qui ne s'applique qu'aux urgences, et je n'arrête pas d'essayer d'expliquer qu'une solution qui ne s'applique qu'aux urgences, ça va faire baisser la fièvre, mais ça ne règle pas la maladie de fond, c'est-à-dire un problème qui est partagé par tous les soignants, le secteur libéral, les malades parfois, qui vont parfois aux urgences parce qu'ils n'ont pas envie d'attendre un rendez-vous chez le médecin, d'attendre deux, trois jours, on sait bien aussi que le comportement des usagers du système de santé a changé, et donc chacun détient sa part de solution pour éviter cette pression qui repose sur les urgences.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous voulez les recevoir, vous souhaitez…
AGNES BUZYN
Je les reçois régulièrement, comme les syndicats d'ailleurs.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais vous avez un rendez-vous là, pour, à nouveau, vendre votre plan ?
AGNES BUZYN
La semaine prochaine je lance les différents chantiers, je lance le chantier notamment sur l'accueil des personnes âgées sans passage aux urgences, j'accueille – pardon, j'accueille – je démarre le chantier sur les pratiques avancées et les délégations de tâches entre professionnels, et donc tous ces chantiers démarrent la semaine prochaine, je les lancerai, les syndicats sont évidemment invités, tous les professionnels qui sont concernés sont invités, et donc on va continuer à travailler ensemble tout le long de ce mois d'octobre.
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce qu'on peut se permettre, déjà six mois de crise des urgences, est-ce qu'on peut se permettre que ça continue encore des semaines ?
AGNES BUZYN
Ecoutez, je ne le souhaite pas, je souhaite que mes solutions soient comprises, qu'elles soient entendues, beaucoup des personnes qui étaient autour de la table lundi étaient très favorables…
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous êtes optimiste ce matin ?
AGNES BUZYN
Oui, je suis optimiste parce que, d'abord les fédérations hospitalières trouvent que les solutions sont les bonnes, c'est-à-dire qu'on va essayer de desserrer l'étau sur les urgences, les associations de malades considèrent que le service d'accès aux soins, le SAS, qui permettra d'orienter les malades, c'est une bonne solution, les médecins libéraux sont d'accord pour prendre leur part dans l'accès à des consultations sans rendez-vous…
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc vous, vous avez des indicateurs qui vous font dire que…
AGNES BUZYN
C'est-à-dire qu'en dehors du collectif lui-même…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça pourrait dénouer la situation ?
AGNES BUZYN
Oui, je pense que beaucoup des acteurs autour de la table, qu'ils soient hospitaliers, ou qu'ils soient libéraux, ont exprimé – et les usagers du système de santé, les associations de patients, ou leurs représentants – ont estimé que les solutions étaient des solutions opportunes, utiles, et que ça allait fonctionner. Donc, il faut qu'on les mette en oeuvre, et maintenant l'urgence pour moi c'est que ça se mette en oeuvre sur le terrain, partout en France, le plus vite possible.
ELIZABETH MARTICHOUX
Et vous ne reviendrez pas avec une copie alimentée d'un nouveau budget par exemple ?
AGNES BUZYN
Je crois que, 750 millions d'euros, c'est l'argent des Français, je crois que les Français savent que c'est un budget considérable, et que 80% de cette somme va être alloué au recrutement de personnels…
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous l'avez dit déjà…
AGNES BUZYN
Oui, et donc ce n'est pas rien.
ELIZABETH MARTICHOUX
Parce que vous avez l'impression que ce n'est pas assez dit, donc vous l'avez répété. Merci beaucoup Agnès BUZYN d'avoir été ce matin sur LCI pour expliquer les raisons et puis surtout les objectifs de votre plan de refondation pour les urgences.
AGNES BUZYN
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 septembre 2019