Texte intégral
MARC FAUVELLE
Bonjour Christophe CASTANER.
CHRISTOPHE CASTANER
Bonjour.
MARC FAUVELLE
Merci d'être en ligne avec nous. Nous en sommes au 21e jour de confinement, est-ce que vous avez constaté, au vu des PV dressés ces derniers jours, un relâchement des Français ?
CHRISTOPHE CASTANER
Il y avait deux risques le week-end dernier, d'abord la tentation, pour certains, de partir en vacances, parce que nous étions, pour une zone, le moment du départ en vacances, et donc nous avions alerté sur ce risque-là, nous avons pris un certain nombre de mesures, nous avons contrôlé les départs, nous avons contrôlé les routes, nous avons contrôlé les destinations d'arrivées, nous avons constaté que les Français n'ont pas pris ce risque-là. Bien sûr, il y a eu des infractions, il y a quelques comportements toujours imbéciles, et nous avons fait 1,4 million de contrôles depuis vendredi matin, il y a eu, depuis le début des contrôles, près de 480.000 contraventions qui ont été dressées, sur 8,2 millions de contrôles, et donc oui, il y a des contrôles, oui il y a des contraventions, mais ce que je sais, ce que je vois, c'est que les Français font partie, dans le monde entier d'ailleurs, ça a été précisé, de ceux qui respectent le mieux le confinement. Alors, il y a peut-être des endroits où on voit des comportements idiots, j'en ai constatés, j'ai vu aussi, ce matin par exemple en lisant la presse quotidienne régionale, dans « La Provence », que « La Provence » évoquait le fait que, à Marseille, les choses s'étaient bien passées, que les gens avaient respecté, j'ai vu comment sur la côte Atlantique on a respecté le confinement aussi, et puis j'écoutais à l'instant votre reportage qui montre que, si certains utilisent les règles de l'attestation pour sortir un peu, globalement les Français sont attentifs à respecter le confinement parce qu'ils savent qu'il faut le respecter, pour soi-même, pour ses proches…
MARC FAUVELLE
Vous n'avez pas été frappé, Christophe CASTANER, par le nombre de gens qui étaient parfois dans la rue hier ? Est-ce qu'on a le droit de prendre le soleil en période de confinement ?
CHRISTOPHE CASTANER
Bien sûr que non, et vous m'avez toujours entendu dire que le risque c'était le relâchement justement. Vous savez, moi je ne suis pas médecin, mais j'entends les débats sur les masques, sur tel ou tel médicament, mais ce que je sais c'est que la meilleure protection c'est de respecter le confinement.
MARC FAUVELLE
Donc on ne prend pas le soleil dans les jours qui viennent, même si c'est en bas de chez soi ?
CHRISTOPHE CASTANER
Mais, on a le droit de pouvoir sortir promener son chien, j'entendais à l'instant un reportage, voire aller faire ses courses pour l'alimentation, mais il faut limiter au maximum les sorties, et donc ce n'est pas en fonction de la météo que l'on décide de sortir ou pas, c'est en fonction d'un combat, d'un combat que nous menons contre le Covid, et le risque c'est le relâchement.
MARC FAUVELLE
On a vu beaucoup de gens dans les rues hier, y compris en famille parfois, est-ce que vous leur demandez, dans la mesure du possible, de ne pas sortir avec les enfants, quand quelqu'un peut les garder à la maison évidemment ?
CHRISTOPHE CASTANER
Mais faisons le ensemble, vous êtes une radio de service public, je suis ministre, c'est tous ensemble que nous devons porter l'attention de nos concitoyens sur le fait qu'ils font courir un risque à leurs enfants, y compris quand ils sortent comme ça. Je sais que le confinement c'est difficile, et plus encore avec des enfants, c'est encore plus difficile quand vous êtes dans un appartement par rapport à d'autres qui ont la chance d'avoir une maison, un pavillon, un jardin, c'est mon cas, pour ma famille, dans les Alpes-de-Haute- Provence, donc je sais cette différence-là, mais le confinement c'est un combat que nous menons contre le Covid et que nous menons pour nos enfants, et donc je le dis, je suis parent aussi, je suis papa, eh bien non, on ne sort pas avec ses enfants parce qu'on les expose, et quand on rentre ensuite à l'appartement, on leur fait courir…
MARC FAUVELLE
Chez vous les enfants restent à la maison quand vous sortez ?
CHRISTOPHE CASTANER
Mais, mes filles, mais c'est très personnel, ne sont pas sorties depuis 3 semaines, mais elles ont la chance d'habiter à Forcalquier, dans les Alpes-de-Haute-Provence, et d'avoir un jardin, donc je ne dis pas que…
MARC FAUVELLE
Quel âge ont-elles, sans être indiscret ?
CHRISTOPHE CASTANER
17 et 21 ans.
MARC FAUVELLE
C'est plus facile quand elles ont cet âge-là.
CHRISTOPHE CASTANER
Vous avez raison.
MARC FAUVELLE
Christophe CASTANER, Jean-Jérôme BERTOLUS a une question pour vous.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Vous avez indiqué qu'il y a eu 480.000 contraventions dressées depuis le début du confinement, alors est-ce que finalement l'amende de 135 euros est-elle véritablement dissuasive, ne faut-il pas durcir l'application du confinement ?
CHRISTOPHE CASTANER
Mais, ramenez ce chiffre-là à l'ensemble des Français, 65 millions de Français respectent globalement bien le confinement, et l'amende elle est de 135 euros pour le premier contrôle, elle est de 200 euros en cas de récidive, et si vous êtes verbalisé 3 fois en 30 jours ça peut aller jusqu'à 6 mois et 3750 euros d'amende, et je peux vous dire que les magistrats veillent à une application stricte et à une application juste de ces dispositifs-là. Donc c'est plus la responsabilité de chacune et chacun. Moi je ne suis pas pour une société où on respecte l'ordre, où on se protège uniquement parce qu'on a peur d'avoir un procès-verbal.
MARC FAUVELLE
Le montant des amendes, Christophe CASTANER, il sera reversé au budget de l'Etat, ou il aura une destination liée à cette crise sanitaire ?
CHRISTOPHE CASTANER
Vous savez, je crois que l'engagement de l'Etat pour protéger les Français, l'engagement de l'Etat pour redémarrer ensuite, quand nous sortirons le moment venu, et je ne sais pas quel est le moment venu, du confinement et du combat contre le Covid, sera sans commune mesure financièrement avec les recettes des procès-verbaux, mais une chose est sûre c'est que, moi je ne demande pas aux policiers, aux gendarmes, à nos forces de sécurité intérieure, de dresser des procès-verbaux, je demande de se battre pour protéger les Français, et protéger les Français c'est faire en sorte qu'ils respectent le confinement.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Christophe CASTANER, le gouvernement, en particulier Edouard PHILIPPE, n'ont-ils pas parlé trop tôt du déconfinement ? Ecoutez l'interrogation de Damien ABAD, le patron du groupe LR, c'était dimanche sur CNews.
DAMIEN ABAD
Ces derniers jours je trouve que le mot déconfinement a été prononcé trop tôt et qu'on note un relâchement dans ce confinement, et on sait très bien que, d'abord, l'une des réussites, c'est de réussir ce confinement, c'est indispensable pour tout simplement éviter une deuxième vague, et ensuite, bien sûr, viendra la question de cette stratégie de sortie, qui est fondamentale, et qui devrait, en tout cas je l'espère, de retrouver l'espoir et surtout de pouvoir redémarrer notre pays.
MARC FAUVELLE
Est-il exact, Christophe CASTANER, que les ministres ont désormais interdiction d'en parler ?
CHRISTOPHE CASTANER
Mais nous devons travailler, et nous y travaillons depuis le début, sur la question du moment venu où nous devront faire en sorte que le déconfinement soit organisé, et si nous ne le faisions pas, vous pourriez nous le reprocher légitimement, mais j'ai entendu le Premier ministre, à plusieurs reprises la semaine dernière, en aucun cas il a appelé les Français au relâchement, et en aucun cas il a mis une perspective du confinement, il a même annoncé que nous serions au-delà du confinement actuel, mais il a toujours dit la même chose, c'est ce que fait le gouvernement auprès d'Edouard PHILIPPE et auprès du président de la République, c'est en fonction de l'analyse des scientifiques, des professionnels de santé, nous prenons nos décisions. Et donc, nous prendrons les décisions, le moment venu, de gérer le déconfinement, mais en fonction des données scientifiques et médicales qui nous saurons données, c'est notre seule ligne de conduite.
MARC FAUVELLE
Christophe CASTANER, est-ce que vous portez un masque quand vous sortez de chez vous ?
CHRISTOPHE CASTANER
Non, par contre je fais attention à tous les gestes barrières. Pour vous reprendre, juste, je ne sors pas de chez moi parce que je ne me suis pas rendu depuis près de 2 mois…ministère de l'Intérieur.
MARC FAUVELLE
Quand je dis chez vous, pardon, c'était le ministère évidemment. Est-ce que vous vous êtes prêt à le faire, puisque c'est désormais ce que préconise l'Académie de médecine ?
CHRISTOPHE CASTANER
L'Académie de médecine s'est prononcée sans remettre en cause la doctrine actuelle du gouvernement, qui, je le rappelle, est que les masques FFP2 et de type chirurgicaux doivent être totalement engagés, mobilisés, pour protéger nos personnels de santé qui doivent, eux aussi, se protéger pour nous soigner, pour soigner aujourd'hui et pour soigner demain. Et puis il y a un gros travail qui est fait, qu'est animé par des entreprises, piloté aussi par le gouvernement et le ministère de l'Economie et des Finances, pour que nous produisions d'autres types de masques, des masques de type textile, il y a 45 entreprises aujourd'hui qui se sont mises ensemble pour travailler dans la même direction et faire des masques qui donnent des garanties d'un très haut niveau et qui doivent monter en puissance, nous sommes à 500.000 masques produits par jour aujourd'hui, nous avons l'objectif d'être d'ici la fin du mois à 1 million de masques par jour, et donc à ce moment-là, en fonction des préconisations médicales, nous déciderons de le porter, de le faire porter ou non.
MARC FAUVELLE
Y compris vous ?
CHRISTOPHE CASTANER
Ah mais moi, si les préconisations médicales c'est conseiller aux Français de porter le masque à un moment donné, je veillerai à être exemplaire, c'est aussi un devoir qu'ont les femmes et les hommes politiques.
MARC FAUVELLE
On voit que beaucoup de Français, ces derniers jours, vont chercher des modèles sur Internet pour fabriquer eux-mêmes, depuis l'avis de l'Académie de médecine, leurs masques à la maison, est-ce que vous conseillez aux policiers, qui n'en seraient pas encore équipés, de le faire eux aussi ?
CHRISTOPHE CASTANER
D'abord je vous rappelle la doctrine pour les policiers, c'est le fait que, ils doivent avoir à proximité des masques de protection et qu'ils les utilisent de façon systématique dès qu'ils ont la présomption d'être confrontés à une personne qui porte le Covid-19…
MARC FAUVELLE
Et s'ils n'en n'ont pas, est-ce qu'ils peuvent les fabriquer à la maison ?
CHRISTOPHE CASTANER
Non, parce que de toute façon aujourd'hui nous avons déjà mobilisé près de 900.000 masques qui ont été distribués pour justement être à proximité des policiers et des gendarmes quand ils en ont besoin, nous avons reçu 1 million de masques supplémentaires le week-end dernier, qui permettront de redoter les équipages, les commissariats, les casernes, autant que de besoin, et puis à côté de cela je développe aussi des acquisitions, des acquisitions nombreuses, lourdes, pour avoir des lunettes de protection, des visières de protection, parce qu'il est essentiel que nous trouvions la bonne solution et que nous la trouvions ensemble, y compris avec les gendarmes et les policiers.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Donc, vous venez de l'indiquer, 900.000 masques ont déjà été distribués aux forces de police et de gendarmerie, vous en avez reçu 1 million supplémentaires, mais combien de policiers et de gendarmes sont aujourd'hui contaminés ?
CHRISTOPHE CASTANER
Je ne donne pas de chiffres, parce que derrière ces chiffres ce sont des femmes et des hommes, je sais que nous avons perdu un policier, que nous avons perdu un gendarme, qui nous avons perdu un fonctionnaire préfectoral qui n'était pas explosé au public, du Covid, mais aujourd'hui il y a à peu près, sur l'ensemble de nos forces de sécurité intérieure, 15.000 personnes qui, pour des raisons, soit parce qu'ils sont confinés, soit parce qu'ils sont malades, soit parce qu'ils ont des problèmes de garde d'enfants, et ils sont comme tous les Français, ils peuvent en avoir, 15.000 personnes sur 250.000 qui sont aujourd'hui atteints ou immobilisés, et je pense mais donc, des porteurs du Covid il y en a peu, quelques dizaines, au niveau national. Mais je pense aussi aux pompiers, qui sont totalement engagés aussi sur le terrain, et au sein desquels il y a aussi des femmes, des hommes, qui sont atteints du Covid.
MARC FAUVELLE
Christophe CASTANER, la loi de 2010 interdit en théorie de dissimuler son visage en France, est-ce que cette loi est mise de côté pendant toute la durée du confinement ?
CHRISTOPHE CASTANER
Non, parce que le masque ne permet pas de se protéger totalement le visage, donc n'empêche pas la reconnaissance de la personne qui le porte.
MARC FAUVELLE
Ce n'était pas la consigne qui avait été donnée dans les bureaux de vote notamment, d'enlever les masques à l'entrée du bureau ?
CHRISTOPHE CASTANER
Non, la consigne qui a été donnée était de respecter justement ceux qui avaient le masque, et en cas de doute sur l'identité, de pouvoir demander à la personne qui le portait, de l'ôter provisoirement pour que le président du bureau de vote puisse le vérifier.
MARC FAUVELLE
Donc, en cas de contrôle de police ou de gendarmerie, on doit enlever son masque ?
CHRISTOPHE CASTANER
Non, seulement si ça paraît nécessaire pour le policier ou le gendarme qui fait le contrôle et qui a le sentiment que la pièce d'identité et la photo de la pièce d'identité est très éloignée du personnage qu'il contrôle, et donc c'est seulement dans ce cadre-là.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Vendredi Didier LALLEMENT, le préfet de police de Paris, a fait le lien entre les patients admis en réanimation et ceux qui n'ont pas respecté le confinement, des propos qu'il a ensuite regrettés publiquement, mais est-ce qu'il vous a présenté sa démission, et dans ce cas, pourquoi l'avoir refusée ?
CHRISTOPHE CASTANER
Ce n'est pas la question. ce que je sais c'est que les propos du préfet de police étaient inexacts, inopportuns, il les a regrettés, vous l'avez dit, il s'en est excusé publiquement, au moment où je vous parle, et je sais pouvoir compter sur lui, il continue sa mission de faire respecter le confinement à Paris et dans les départements alentours, c'est tout ce que j'attends de lui, et je n'ai pas plus de commentaire à faire, je suis un manager d'hommes, qui sont à responsabilité, et les échanges que j'ai avec eux relèvent d'eux et de moi.
MARC FAUVELLE
Vous diriez que l'incident est clos ?
CHRISTOPHE CASTANER
L'incident est clos, parce qu'il a la responsabilité majeure d'assurer la sécurité sur la plaque parisienne et que je sais qu'il est totalement engagé à cette tâche.
MARC FAUVELLE
Le gouvernement a mis en ligne ce matin une attestation numérique, pour les trois quarts des Français qui possèdent un Smartphone, c'était à 7h00 a priori, est-ce que ça fonctionne tout d'abord ?
CHRISTOPHE CASTANER
Ecoutez, au moment où j'ai pris l'antenne avec vous ça fonctionnait, ça fonctionnait bien, et donc je ne doute pas que ça fonctionne, c'est en complément des attestations papier, qui sont toujours disponibles et valides, que nous avons mis en place cette attestation numérique de déplacement, qui elle aussi, du coup, peut permettre de justifier son déplacement et d'être contrôlé par un policier ou un gendarme.
MARC FAUVELLE
Y a-t-il des données qui sont conservées par vos services, et si oui, lesquelles ?
CHRISTOPHE CASTANER
Aucune. Une fois rempli, le formulaire émet un fichier PDF, avec un QR code, les forces de l'ordre peuvent le scanner à distance, et aucune donnée saisie n'est intégrée dans un fichier, rien n'est stocké, aucun fichier n'est constitué.
MARC FAUVELLE
Seriez-vous favorable à ce que nos téléphones portables servent dans le cadre d'un traçage numérique des malades notamment, pendant la sortie du confinement ?
CHRISTOPHE CASTANER
Ce que je sais c'est que nous sommes dans un combat long, un combat difficile, et qu'il faudra s'appuyer sur toutes les intelligences, et que le numérique peut contribuer à cela. ce que j'observe c'est que de nombreux pays étudient, ou ont lancé des initiatives pour mettre en place des outils numériques afin d'aider à la lutte contre la propagation, et donc aujourd'hui nous travaillons à regarder ce qui se fait et à envisager des mises en place d'outils, à la seule condition, essentielle, c'est que nous ne renoncions jamais aux principes auxquels nous sommes attachés, et la liberté individuelle fait partie de ces principes-là.
MARC FAUVELLE
C'est-à-dire que ça se fera par exemple sur la base du volontariat et uniquement du volontariat ?
CHRISTOPHE CASTANER
Je ne peux pas vous dire parce que le gouvernement est en contact avec l'ensemble des partenaires, pour mieux comprendre les solutions technologiques qui sont mises en place, nous travaillons évidemment avec la CNIL, qui est associée à ces réflexions, et que c'est en fonction de ces réflexions, de ce qui a été fait dans un pays, qui marche bien, de ce qui a été fait dans un autre, qui marche moins bien, que nous allons chercher un outil, mais ce n'est pas un outil de surveillance, c'est un outil de soins, c'est un outil de combat contre le Covid.
MARC FAUVELLE
Est-ce que vous pourriez envisager de demander aux opérateurs téléphoniques de vous fournir certaines données ?
CHRISTOPHE CASTANER
Si la loi l'autorisait, oui, la loi ne l'autorise pas et nous n'en avons pas besoin. on a regardé les données en flux, en volume, par exemple pour les consommations d'électricité ou les consommations de téléphone, pour voir les mouvements de population, tout à l'heure je faisais référence à la qualité du sérieux des Français quand ils respectent le confinement je m'appuyais sur des données qui ont été diffusées par le site de recherche Google, qui a regardé, en masse, et pas en individus, les flux et les mouvements, et donc il a comparé avec l'ensemble des pays du monde, donc ce sont des données globales.
MARC FAUVELLE
Donc Google regarde ces données, mais vous, vous ne le faites pas Christophe CASTANER ?
CHRISTOPHE CASTANER
Non, nous ne le faisons pas parce que ça ne fait pas partie, ni de notre culture, ni des outils dont nous disposons, mais de toute façon nous n'en n'avons pas besoin. Si je veux savoir, en volume, l'évolution de la consommation électrique, ce qui nous a permis de penser que des gens avaient quitté Paris au début du confinement, je m'adresse aux opérateurs, qui nous disent en volume global ce qui s'est passé sur la plaque parisienne, ils nous ont indiqué par exemple que dans les premiers jours du confinement les consommations moyennes ont baissé de 17 %, mais ça ne veut pas dire qu'il y a 17 % des Parisiens qui sont partis, parce que l'activité économique, qui elle-même consomme de l'électricité, était en baisse.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Samedi une attaque au couteau à Romans-sur-Isère a fait donc 2 morts et 5 blessés, dont 2 sont dans un état très grave, le Parquet antiterroriste est saisi, Christophe CASTANER, est-ce que la menace terroriste reste élevée en pleine crise sanitaire ?
CHRISTOPHE CASTANER
C'est un rappel lourds qui montre que même en période de confinement la menace terroriste est là, et je voudrais à nouveau saluer les forces de l'ordre qui sont intervenues extrêmement rapidement, mais vous dire que nous avons intégré ce risque-là, et parmi les services qui aujourd'hui fonctionnent de façon à être toujours mobilisables, la DGSI et les services de police judiciaire font partie de ceux-là, parce que nous savons que contre le terrorisme, mais globalement contre le crime, contre les violences, policiers et gendarmes continuent leur mission, 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, et partout où ça a été nécessaire nous avons réorganisé nos services, comme ceux de la Police judiciaire, mais aussi ceux de la Sécurité publique, ceux de notre Renseignement, pour que la sécurité des Français ne soit pas confinée, elle, nous la devons en garantie à chacun.
MARC FAUVELLE
Est-ce que le caractère terroriste de cette attaque est parfaitement établi désormais ?
CHRISTOPHE CASTANER
Ecoutez, les éléments que le Procureur national antiterroriste avait en sa possession l'ont conduit à qualifier de terroriste, et donc n'ayez pas de doute sur le fait qu'il a pesé au trébuchet chacun des éléments qui sont remontés. Je me suis immédiatement rendu sur place, les témoignages qui nous ont été livrés montraient que nous étions sur un parcours meurtrier et qu'il y avait tous les signes de quelqu'un qui était dans une démarche terroriste, qui voulait tuer des mécréants, comme, hélas, nous avons pu le voir dans certains documents.
MARC FAUVELLE
Est-ce qu'il avait laissé un élément qui s'apparente à une revendication, et si oui, au nom de quel organe ou organisme ?
CHRISTOPHE CASTANER
Je laisserai le procureur RICARD, dans les heures qui viennent, s'exprimer sur ce sujet, au moment où je vous parle lui seul et les enquêteurs de la SDAT, de la DGSI, qui travaillent sous son autorité, ont les éléments sur lesquels vous m'interrogez.
MARC FAUVELLE
Christophe CASTANER, on a vu ces derniers jours en France des infirmières ou des personnels soignants agressés parfois, d'autres escortés par des vigiles pour aller à l'hôpital, est-ce qu'on a les moyens aujourd'hui de renforcer leur sécurité dans ces cas-là ?
CHRISTOPHE CASTANER
Alors d'abord je veux dénoncer le caractère odieux de ce qui se passe et de ces menaces-là, mais ce que je vois, et j'ai demandé expressément à nos directeurs de me faire remonter ces éléments d'analyse, il y a très peu de cas, heureusement. Donc oui, chaque cas est insupportable, et il nous faut protéger celles et ceux qui en sont victimes, mais il ne faut pas croire que les Français chasseraient l'infirmière ou le pompier qui habite dans leur immeuble, c'est vraiment quelques cas et ce qui m'est remonté se compte sur les doigts de nos deux mains.
MARC FAUVELLE
Qu'est-ce que vous pouvez faire dans ces cas-là, quand par exemple quelqu'un qui travaille à l'hôpital est menacé par ses voisins qui ne veulent plus le croiser dans la cage d'escalier ?
CHRISTOPHE CASTANER
D'abord mener l'enquête pour savoir qui est l'auteur de ces lettres anonymes, quand ce sont des lettres anonymes, et puis ensuite, je crois qu'il faut parler avec les gens. Vous savez, je ne suis pas, je suis ministre de l'Intérieur, et je vais vous dire quelque chose, c'est comme la gestion du confinement, elle doit se faire dans le dialogue, il y a des tensions, mais chaque fois que c'est nécessaire priorisons le dialogue, et donc là, j'ai été maire pendant suffisamment longtemps, moi je n'hésiterai pas, si j'étais le commissaire en charge de ce dossier, d'en parler avec le maire et d'aller ensemble voir les voisins pour leur dire « mais ça va pas la tête, redescendons un peu sur terre, redevenons sérieux, redevenons intelligents. »
MARC FAUVELLE
Est-ce que vous avez constaté, ces derniers jours, une hausse des violences conjugales et familiales ? On sait que les chiffres sur les premiers jours du confinement n'étaient pas bons, est-ce que cette tendance, malheureusement, se confirme ?
CHRISTOPHE CASTANER
Hélas la tendance se confirme, on sait que le confinement peut être un facteur aggravant des violences intrafamiliales, tant au sein du couple, que vis-à-vis des enfants, et c'est la raison pour laquelle, avec mes collègues du gouvernement, la garde des Sceaux, Marlène SCHIAPPA, Adrien TAQUE, pour les luttes contre les violences aux femmes pour l'une, et contre les enfants pour l'autre, nous avons mis en place tous les moyens d'alerte, parce que le problème du confinement c'est qu'il peut être le signe de l'impunité, parce que je n'ai pas les moyens de donner l'alerte. Donc, on a mis en place tous les outils pour qu'on puisse sur Internet, par texto, par appel, ou quand je me déplace dans un centre commercial ou dans une pharmacie, je puisse donner l'alerte des violences que je subis au sein de mon couple. Et en parallèle, nous avons ouvert des places d'hébergement, des places d'hôtel, pour que dès la moindre signalisation nous puissions proposer une solution de secours et que nos services interviennent immédiatement. Et j'ai même demandé par circulaire, très tôt, dès le début du mois de mars, aux forces de sécurité, de prendre des initiatives, de faire par exemple des appels d'initiative. Nous savons qu'il y a eu des tensions, mais pas de plainte, pas de procédure dans un couple, eh bien le gendarme va appeler pour prendre des nouvelles, et il va sentir au son de la voix que la personne victime, est victime de violences, et on prend l'initiative d'une visite sur place, et on a déjà interpellé des auteurs de violences intrafamiliales. Je refuse que le confinement soit synonyme d'impunité.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Vous avez ouvert d'ailleurs le 114, la plateforme 114, mercredi dernier, qui permet effectivement d'alerter les forces de police par un simple SMS, combien de SMS avez-vous reçus sur cette plateforme ?
CHRISTOPHE CASTANER
Quelques dizaines pour l'instant, sérieux seulement, et qui ont fait l'objet de signalements, parce qu'il y a aussi des gens qui voyant le 114 l'ont testé, mais l'idée c'est vraiment de faire en sorte que, si je ne peux pas téléphoner, si je n'ai pas accès à Internet parce que le conjoint violent est à proximité, je puisse, en allant aux toilettes, juste envoyer un texto qui est un appel au secours. Nous voulons que tous les moyens soient donnés à ces femmes, ou enfants, victimes, pour donner l'alerte, et c'est une priorité du ministère de la Justice, et du ministère de l'Intérieur, d'intervenir et de sanctionner en cas de violences intrafamiliales.
MARC FAUVELLE
Christophe CASTANER, des incidents ont éclaté ce week-end à Chanteloup-les-Vignes dans les Yvelines, entre des jeunes, semble-t-il, et des forces de l'ordre. Je voudrais d'abord savoir s'ils sont liés, ces affrontements, ou ces incidents, au confinement ?
CHRISTOPHE CASTANER
Non, pas vraiment, en fait c'est au départ un vol de moto, le signalement d'un vol de moto, qui fait qu'un individu a appelé la police, la police est immédiatement intervenue, a arrêté le délinquant qui était sur la moto volée, et à ce moment-là ils ont été pris à partie par une cinquantaine de jeunes qui ont commencé à leur jeter, étaient très hostiles, très mobiles, à leur jeter des projectiles, j'ai 2 policiers qui ont été blessés, 2 voitures étaient là, ont eu une vingtaine d'impacts, et pour se dégager ils ont dû utiliser les moyens de défense dont ils disposent pour partir. Vous vous souvenez à Chanteloup-les-Vignes des violences organisées contre nos forces de l'ordre, c'était au début du mois de novembre, et vous vous souvenez ce cirque qui avait brûlé, et dans ce cadre-là il y a une petite fille qui a été blessée…
MARC FAUVELLE
Une petite fille de 5 ans qui a été grièvement blessée à la tête, et dont la mère dit aujourd'hui qu'elle a, d'après ses dires en tout cas, reçu un tir de LBD, lanceur de balles de défense.
CHRISTOPHE CASTANER
Ecoutez, il y a une enquête qui a été immédiatement ouverte, et tout à l'heure vous m'interrogiez sur l'âge de mes filles, et donc je me sens papa au moment où je pense à cette petite fille de 5 ans, et je suis évidemment très inquiet pour elle, et donc il est normal que nous y voyons clair. Je sais qu'on a eu cette scène de violences urbaines, que cette petite fille, dans ce cadre-là, a été blessée, je ne sais pas comment elle a été blessée, mais nous devons la vérité, non seulement à sa famille, mais à vous et aux Français.
MARC FAUVELLE
Est-ce qu'au moment de cette opération les forces de l'ordre ont tiré des LBD ?
CHRISTOPHE CASTANER
Oui, oui, il y a eu 14 tirs de LBD selon les informations qui m'ont été communiquées, un tir de Cougar, parce que ça a été une scène de grande violence, d'ailleurs quelques fois certains pensent que nous n'allons pas dans les quartiers difficiles en cette période de confinement, c'est bien la preuve que la police maintient son activité partout et quelquefois, ce qui est globalement rare d'ailleurs, les quartiers sont calmes et respectent aussi le confinement, mais quelquefois il y a des violences urbaines de ce type-là, et c'est dans ce cadre-là que, pour se désengager, ils ont dû faire usage de ces armes de défense.
MARC FAUVELLE
Merci à vous Christophe CASTANER, merci infiniment, ministre de l'Intérieur.
CHRISTOPHE CASTANER
Merci.
source : Service d'information du Gouvernement, le 7 avril 2020