Texte intégral
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne (projet n° 440, texte de la commission n° 454, rapport n° 453, avis nos 444 et 451).
Notre séance se déroule dans les conditions de respect des règles sanitaires mises en place depuis le mois de mars.
Je rappelle que l'hémicycle fait l'objet d'un nettoyage et d'une désinfection avant et après chaque séance. Il en est de même pour les micros après chaque intervention. J'invite chacune et chacun à veiller au respect des distances de sécurité. Les entrées et les sorties de la salle des séances, pour les sénateurs, devront exclusivement s'effectuer par les portes situées au pourtour de l'hémicycle.
Je rappelle également que tous les orateurs, y compris le Gouvernement, s'exprimeront depuis leur place, sans monter à la tribune.
Enfin, monsieur le ministre, mes chers collègues, afin de limiter la circulation de documents, vous êtes invités à utiliser vos tablettes et la fonctionnalité « En séance » sur notre site internet pour prendre connaissance du dérouleur et des amendements, même si ces documents demeurent à votre disposition.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, voilà maintenant un peu plus de deux semaines que la France sort progressivement du confinement.
Pendant longtemps, nos concitoyens ont attendu avec inquiétude ou espoir, parfois même les deux, la date fatidique du 11 mai. Ils sont désormais dans l'attente des futures étapes de ce déconfinement.
Nombreux sont ceux qui veulent savoir si les restrictions apportées à la liberté de circulation seront levées ou allégées, si les bars, les cafés, les restaurants rouvriront leurs portes et s'ils pourront partir en vacances cet été. Retrouver ce qui fait au fond le sel de la vie sociale, reprendre une vie plus normale, tel est aujourd'hui le souhait de nos concitoyens.
Nous devons nous réjouir de ces impatiences qui manifestent un puissant désir de retrouver le vivre ensemble. Dans le même temps, nous ne pouvons pas ignorer que cette période est source de contraintes, voire d'angoisses. Il est vrai que, pour un certain nombre de nos concitoyens, le confinement a pu paraître protecteur à bien des égards : d'un point de vue économique, puisqu'un salarié sur deux a été placé en chômage partiel ; d'un point de vue social, puisque d'importants filets de sécurité ont été mis en place pour accompagner les plus fragiles ; et d'un point de vue sanitaire enfin, puisque chacun était appelé à rester chez soi, loin du virus.
Au désir de se retrouver répond donc l'inquiétude du jour d'après. Y aura-t-il une seconde vague ? Les entreprises seront-elles suffisamment résilientes ? Les emplois seront-ils préservés ? La sécurité de tous sera-t-elle toujours assurée ?
Face à ce paradoxe auquel chacun d'entre nous est confronté, nous devons avancer sur une ligne de crête, ajuster les dispositifs et faire preuve d'agilité. Souvenons-nous que se précipiter signifie étymologiquement tomber la tête en avant. Faisons preuve de prudence, c'est ce que souhaite le Gouvernement, et de pragmatisme. Telle est la philosophie de ce projet de loi. Il vise à répondre à une multitude de questions et d'impératifs, ce qui explique son caractère singulièrement protéiforme.
Il s'agit tout d'abord d'un projet de loi qui vise à garantir la continuité du service public. Tel est le sens des mesures tendant au maintien en service d'un certain nombre de militaires ou encore de l'augmentation du plafond de jours de mobilisation des réservistes de la police nationale. Je pourrais aussi citer la possibilité d'engagement de la réserve civique auprès des entreprises chargées d'une mission de service public.
Ce projet de loi contient aussi des mesures destinées à permettre à l'administration de mener à bien des réformes que vous avez votées. Vous ne l'ignorez pas, l'administration a dû suspendre un certain nombre de ses activités en raison du confinement, parce qu'elle a notamment réorienté ses moyens vers la gestion de la crise sanitaire. Je pense ici au ministère des solidarités et de la santé.
C'est la raison pour laquelle certaines réformes telles que celles du divorce, du versement des pensions alimentaires ou encore de la justice pénale des mineurs doivent être reportées pour être mises en œuvre dans de bonnes conditions. Il en va de même pour certaines réformes intéressant Mayotte, la Martinique et la Guadeloupe, mais aussi la Polynésie française. Je sais que la ministre des outre-mer s'en est expliquée.
Par ailleurs, ce projet de loi a pour objectif de faciliter la reprise de notre vie économique et sociale, tout en s'attachant à maintenir les droits des salariés. Tel est le sens des mesures visant à simplifier le recours au prêt de main-d'œuvre ou encore la possibilité pour les travailleurs saisonniers de demeurer trois mois supplémentaires sur le sol national.
La commission des affaires sociales a également adopté des amendements visant à limiter dans le temps les dispositifs dérogatoires tendant à assouplir les règles relatives au contrat d'insertion, aux contrats aidés ou aux contrats courts.
C'est cette même logique de protection qui avait conduit le Gouvernement à rendre possible la validation de droits à la retraite de base au titre de l'activité partielle ou encore l'intéressement dans les entreprises de moins de onze salariés, de même que le maintien des garanties de protection sociale complémentaire pour les salariés en chômage partiel pour une durée pouvant aller jusqu'à six mois après la fin de l'état d'urgence sanitaire. La commission des affaires sociales du Sénat a introduit dans la loi la possibilité de déroger aux règles de cumul emploi-retraite que pratiquent les caisses de retraite en faveur des personnels soignants pendant la période épidémique. Le Gouvernement est favorable à cette mesure.
Certaines dispositions dont l'urgence n'est pas totalement décorrélée de la crise du Covid-19 ont été placées au sein de l'article 2, ou transformées en articles additionnels, à l'Assemblée nationale ou au Sénat en commission. Elles sont relatives à l'indemnisation des victimes d'essais nucléaires, au statut des volontaires internationaux en ambassade ou encore à la gestion des fonds européens par les régions.
Les incertitudes pesant sur le calendrier parlementaire nous ont conduits à privilégier ce vecteur pour vous les présenter. L'ordre du jour du mois de juin est particulièrement contraint. Il est soumis à l'évolution de la situation sanitaire. Des projets de loi électoraux vous seront vraisemblablement soumis, de même qu'un troisième PLFR qui comprendra d'importantes mesures de relance. Enfin, à l'automne, vous le savez comme moi, il n'y a guère de temps à consacrer à autre chose qu'au budget. Nous saisissons donc l'occasion de ce vecteur pour un nombre limité de mesures dont nous avons besoin.
En outre, certaines de ces mesures avaient déjà été examinées par le Sénat au moment de la discussion du projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique (ASAP). Je pense au Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen), ou au seuil de revente à perte.
L'article 3 visait à habiliter le Gouvernement à prescrire la centralisation du dépôt sur le compte du Trésor des disponibilités des personnes morales soumises aux règles de la comptabilité publique et d'organismes privés chargés d'une mission de service public. Malgré la précision introduite par les groupes LaREM, MoDem et Les républicains à l'Assemblée nationale, qui a exclu de ce dispositif les organismes gérant un des régimes de retraite, la commission des finances du Sénat a supprimé cet article.
M. André Reichardt. Eh oui !
M. Marc Fesneau, ministre. Je comprends qu'il s'agit là avant tout d'une opposition à la méthode retenue par le Gouvernement plus qu'au fond de la mesure. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement propose que cet article soit rétabli.
L'article 4 du projet de loi concerne le Brexit. Des explications plus approfondies vous seront données par ma collègue Amélie de Montchalin.
Enfin, l'article 5 vise à prévoir un mécanisme de contrôle parlementaire des mesures réglementaires prises sur le fondement des habilitations prévues dans ce projet de loi.
Après ces explications sur le fond des mesures présentées dans ce projet de loi, permettez-moi de dire quelques mots sur la méthode.
Vous l'aurez compris, ce projet de loi concerne un très grand nombre de périmètres ministériels, ce qui n'était pas arrivé depuis les lois Warsmann de simplification du droit. C'est donc une chose assez rare et qui me permet, même si plusieurs de mes collègues nous rejoindront au cours des débats, de répondre au nom du Gouvernement à vos questions et à vos amendements.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Nous y sommes sensibles !
M. Marc Fesneau, ministre. Certains se sont émus et regretteront encore que ce projet de loi soit un texte « fourre-tout », selon l'expression qui a été utilisée en commission des lois. Mais je ne suis pas sûr que le dépôt de seize textes particuliers, soit autant de projets de loi que de périmètres ministériels, eût été préférable en termes de lisibilité !
De plus, et je m'exprime en tant que ministre chargé des relations avec le Parlement, organiser le calendrier d'examen de seize textes par l'Assemblée nationale et le Sénat eût été pour moi une véritable gageure !
S'agissant du recours aux habilitations, je n'ignore pas la sensibilité particulière qui s'attache au recours à l'article 38 de la Constitution. Je la comprends d'autant mieux que j'étais parlementaire – il pourrait m'advenir de le redevenir –, mais ce recours aux ordonnances est pleinement justifié par l'incertitude entourant l'évolution de la situation économique, sociale, sanitaire et administrative de notre pays à court terme. C'est sur ce fondement que le Conseil d'État, dans son avis rendu public, a validé le procédé.
Le Gouvernement aurait pu se contenter, d'ailleurs, de mettre « en dur » les habilitations portant sur des dispositions législatives brèves et dont la rédaction est simple ou déjà avancée, comme l'y invitait le Conseil d'État. Il a pourtant veillé à aller plus loin, comme il s'y était engagé.
Sur les 40 habilitations à légiférer par ordonnances, 16 ont été mises « en clair », si vous me permettez cette expression, à l'Assemblée nationale. Au stade de l'examen en commission, le Sénat a poursuivi ce travail précieux, puisque le projet de loi ne comporte plus que 10 habilitations, certes au prix de quelques suppressions, s'agissant par exemple de l'article 3. Nous allons continuer ce travail en séance avec la transformation de l'habilitation sur la réserve civique, les instances consultatives des agences régionales de santé (ARS), le droit au chômage partiel des intermittents du spectacle, ou encore le maintien des garanties collectives de protection sociale complémentaire pour les salariés placés en position d'activité partielle.
Le Gouvernement, conscient de la nécessité de préserver les droits du Parlement pendant la période de l'habilitation à légiférer par ordonnances, ne s'est pas opposé à la mise en place d'un dispositif ad hoc de contrôle à l'article 5 du projet de loi.
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Quel orateur !
M. Marc Fesneau, ministre. Certes, il demande que le délai prévu pour prendre les ordonnances prévues aux articles 1er et 2 soit à nouveau de six mois, et non pas de trois mois, comme vous le proposez. Ce délai est justifié, là encore, par l'incertitude entourant l'évolution économique dans les prochains mois et par le calendrier de négociation du futur budget européen. Je ne doute pas que nous aurons l'occasion de revenir plus précisément sur un certain nombre de ces points.
Enfin, je n'ignore pas que ce projet de loi suscite des divergences entre le Gouvernement et votre assemblée. C'est d'ailleurs la vertu du débat parlementaire, auquel je suis, comme vous, très attaché.
Je me réjouis de la qualité des travaux menés par vos commissions. Je voudrais saluer en particulier les trois rapporteurs, Mme Jourda, MM. Savary et de Montgolfier, qui ont chacun permis d'enrichir le texte et de confirmer sans les modifier plus de 13 dispositions votées par l'Assemblée nationale. Je forme donc le vœu que les débats soient l'occasion de trouver un compromis sur un certain nombre de dispositions restant en suspens.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi qui vous est soumis comporte des dispositions visant, comme vient de le dire Marc Fesneau, à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnances diverses mesures nécessaires pour tirer les conséquences de la fin de la période de transition dans le contexte de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne.
Avant d'en venir au détail des dispositions, je souhaiterais rappeler d'où nous venons et où nous souhaitons aller, car j'ai bien conscience de la difficulté que nous éprouvons tous à suivre le feuilleton du Brexit, qui dure maintenant depuis plus de trois ans.
L'accord sur le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, entré en vigueur le 1er février dernier, marque l'aboutissement de plus de deux ans de négociations difficiles conduites par le négociateur en chef au nom de l'Union, Michel Barnier. Cet accord préserve en particulier les droits acquis des citoyens britanniques et européens, notamment leurs conditions de séjour et de travail. C'était la première de nos priorités.
Les citoyens français qui résidaient au Royaume-Uni avant la fin de la période de transition pourront continuer à y vivre, travailler et étudier dans les mêmes conditions que celles qui prévalent actuellement. Réciproquement, les citoyens britanniques qui résidaient déjà sur le territoire français bénéficieront des mêmes droits qu'aujourd'hui.
Notre mobilisation est totale pour la construction du futur partenariat avec le Royaume-Uni. Nous avons engagé le 2 mars dernier, toujours sous l'égide de Michel Barnier, une nouvelle négociation qui doit aboutir d'ici à la fin de la période de transition prévue par l'accord de retrait. Celle-ci doit s'achever le 31 décembre, mais elle peut être prolongée, à la demande du Royaume-Uni et avec l'accord de l'Union, d'un an ou de deux ans.
Durant cette période de transition, l'accord de retrait prévoit que le droit de l'Union continue de s'appliquer au Royaume-Uni dans sa quasi-totalité. C'est un élément important de protection pour nos entreprises et nos concitoyens, qui permet de se préparer à une situation nécessairement différente de celle d'aujourd'hui. À la fin de cette période, seuls continueront en effet à s'appliquer l'accord de retrait et, si la négociation aboutit, l'accord sur la relation future.
Notre objectif dans cette négociation est clair : nous souhaitons conclure avec le Royaume-Uni un accord ambitieux et équilibré qui couvre un vaste champ – entre autres, le commerce, la pêche, les transports ou la sécurité –, tout en préservant les principes et les intérêts de l'Union.
Construire une telle relation ambitieuse et équilibrée prend du temps, nécessite des compromis et comporte son lot d'incertitudes et de difficultés. Je me dois de vous dire à ce jour que, si notre mobilisation est totale et si les Vingt-Sept sont unis, les incertitudes n'ont jamais été aussi grandes, et d'abord sur le calendrier.
Les Britanniques nous placent face à une contrainte de temps inédite pour négocier et ratifier l'ensemble du futur partenariat. Il nous reste désormais six mois de discussions, si nous devons nous en tenir à la fin prévue de la période de transition, laquelle doit s'achever le 31 décembre. Le refus, à ce stade, de toute prolongation de la période de transition n'est pas de notre fait, mais bien de celui des Britanniques.
Le défi est majeur, tant les sujets sont complexes et nombreux. À cela s'ajoute l'épidémie du coronavirus, qui nous a fait perdre un temps de négociation précieux, puisque les sessions ont été suspendues pendant près de deux mois. Elles ont repris depuis quelques semaines, mais uniquement par vidéoconférences, dans des conditions très différentes de celles qui prévalent en ce genre de circonstances ; mais les contraintes sanitaires s'imposent à tous. Ce n'est pas sans conséquence sur le rythme des négociations.
Le deuxième bloc d'incertitudes concerne le fond du dossier. Ces négociations sont d'autant plus difficiles à mener que les points de départ étaient éloignés. Les échanges de ces dernières semaines entre l'équipe de négociation dirigée par Michel Barnier et les Britanniques ont été peu constructifs – et je le dis en termes diplomatiques…
Les Britanniques ont en effet rendu publiques la semaine dernière leurs propositions précises, qui sont par de nombreux aspects très éloignées du mandat que nous avons confié à Michel Barnier. Les sujets de divergences sont toujours la pêche, la gouvernance de l'accord et les conditions de concurrence équitable.
L'objectif demeure, Michel Barnier l'a confirmé, de tout faire pour défendre le mandat que les États membres lui ont confié le 25 février. Il est, selon nous, absolument inacceptable et hors de question de céder à l'approche sélective des Britanniques. Nous voulons nous assurer, au contraire, que les négociations progressent au même rythme sur tous les sujets, et pas uniquement sur ceux qui relèvent des seuls intérêts des Britanniques.
Je vous le dis clairement, nous ne pouvons pas sacrifier les intérêts de nos pêcheurs, de nos agriculteurs, de nos entreprises, de nos concitoyens, sous prétexte de trouver un accord dans les délais et aux conditions imposés par les Britanniques. C'est pourquoi il est plus que jamais de notre devoir de nous préparer, comme nous l'avions fait pendant la phase de négociation de l'accord de retrait, à tous les scénarios et en particulier à une absence d'accord à la fin de la période de transition. Tel est l'objet de la demande d'habilitation présentée par le Gouvernement à l'article 4 du présent projet de loi.
Avant d'en venir au contenu des dispositions, je souhaite vous présenter l'approche que le Gouvernement a retenue pour cette demande d'habilitation.
En premier lieu, le dispositif proposé se fonde sur le modèle, que vous connaissez, de ce que nous avions prévu dans le cadre de la loi d'habilitation de janvier 2019 pour préparer l'hypothèse d'une sortie sans accord.
L'habilitation que nous demandons aujourd'hui tient bien évidemment compte de l'évolution du contexte, qui n'est plus le même, et des différences tenant principalement à l'entrée en vigueur de l'accord de retrait.
Les dispositions qui vous sont proposées à l'article 4 permettent de traiter trois types de situations : d'abord, celles qui ne sont pas couvertes par l'accord de retrait ; ensuite, celles qui apparaîtraient en cas d'absence d'accord sur la relation future à l'issue de la période de transition, et qui sont du domaine bilatéral ; enfin, les situations particulières qui n'ont pas été identifiées jusqu'à présent, mais pourraient se présenter, et que nous envisageons par précaution dans le but de protéger nos concitoyens et les personnes qui se trouvent aujourd'hui sur notre sol.
En tout état de cause, je tiens à le rappeler, la démarche de la France est pleinement respectueuse des compétences et des actions de l'Union européenne, dans le cadre de la négociation conduite au niveau européen. Les échanges que nous avons avec Michel Barnier sur ces dispositions sont, bien entendu, positifs, et nous n'entravons en rien sa capacité à négocier en notre nom.
Certains sur ces travées – j'ai pu suivre vos échanges en commission – s'interrogent sur la nécessité de légiférer par ordonnances sur certaines de ces dispositions. Je veux leur dire que l'habilitation est nécessaire, car il convient d'adopter rapidement les mesures qui s'imposent dans un contexte très incertain, évoluant rapidement, notamment compte tenu des contraintes qui pèsent sur le déroulement de la négociation. Une incertitude pèse ainsi sur la date de fin de la période de transition.
Nous répétons souvent, à l'heure actuelle, que gouverner c'est prévoir. Or prévoir, c'est aussi anticiper. Le Gouvernement se doit donc d'être en mesure de protéger sans délai les personnes et les entreprises qui pourraient pâtir de l'effet couperet de la fin de la période de transition. Personne, je crois, ne peut contester ce besoin de protection.
Le Parlement aura, bien sûr, l'occasion d'exercer son contrôle et continuera d'être très régulièrement informé de l'état des négociations avec le Royaume-Uni. Je fais cet effort en me rendant disponible, aussi souvent qu'il est nécessaire, afin d'être auditionnée au sein des différentes commissions et en particulier à votre invitation, monsieur le président Bizet.
La durée de l'habilitation a fait l'objet d'un long débat, il y a une dizaine de jours, à l'Assemblée nationale. Je le dis très solennellement, car j'ai moi-même été parlementaire, à l'instar de Marc Fesneau : je sais combien il importe au Parlement de ne pas être dessaisi de ses prérogatives, auxquelles vous connaissez mon attachement. Vous savez aussi quelle importance j'accorde au travail parlementaire et à nos échanges. Vous connaissez enfin mon engagement à défendre les intérêts de tous les Français dans cette négociation. Mais on ne saurait passer de bon accord dans la précipitation !
Nous préférons signer un bon accord dans dix-huit ou trente mois, plutôt que conclure un accord à tout prix, coûte que coûte, à la fin de l'année. Si nous agissions de la sorte, vous pourriez légitimement nous interroger sur le rôle que nous avons tenu pour protéger les pêcheurs, les agriculteurs et les entrepreneurs des départements dont vous êtes originaires.
Vous le savez, le choix d'étendre la période de transition revient aux Britanniques. Compte tenu de l'état d'avancement de la négociation, et en dépit du fait que les Britanniques s'y refusent pour le moment, personne ne peut exclure que cette période sera allongée. Il s'agit de trouver un juste équilibre entre les deux objectifs du Gouvernement : d'une part, limiter au maximum la période d'habilitation dans un esprit de consensus avec le Parlement et, d'autre part, maintenir une cohérence entre la négociation et la durée de la période de transition.
Dans cet esprit de compromis, j'avais proposé, lors de la première lecture du texte à l'Assemblée nationale, que le Gouvernement bénéficie d'une habilitation pour une durée de dix-huit mois, jusqu'au 31 décembre 2021. Les députés ont décidé de réduire cette période à quinze mois. Ce compromis me semble répondre aux exigences parlementaires et préserver en partie l'hypothèse d'une première extension limitée de la transition, qui est le principal message politique que nous devons envoyer aujourd'hui aux Britanniques, avec le soutien unanime du Parlement français.
L'habilitation doit en effet permettre d'anticiper dès à présent les mesures nécessaires dans la perspective d'une fin de période de transition repoussée, mais aussi de réagir à d'éventuelles nouvelles problématiques ou à des situations inédites. Je vous propose d'approuver ce compromis, adopté dans une démarche qui se voulait constructive et attentive aux inquiétudes du Parlement.
J'en viens aux dispositions de l'article 4.
Elles concernent, premièrement, la circulation des personnes et des marchandises. Nous souhaitons en particulier nous assurer, quelles que soient les conditions retenues, que le tunnel sous la Manche continue de fonctionner et qu'il ne ferme pas.
Le deuxième point s'attache à la continuité de la circulation de certains matériels de défense exportés vers le Royaume-Uni, qui sont soumis à une autorisation préalable. La fin de la période de transition nous obligera, en vertu du droit de l'Union européenne, à transformer nos licences dites « de transfert » en licences d'exportation. Nous vous proposons de l'autoriser dans un délai raisonnable.
Troisième point, nous vous demandons de nous permettre d'anticiper des problématiques ciblées dans une perspective de stabilité financière et de protection des assurés et des épargnants, et pour la bonne exécution des contrats en cours, notamment en matière d'assurance vie et de gestion des plans d'épargne en actions (PEA), pour lesquels est imposée une certaine proportion d'actifs de l'Union européenne. Il serait dommageable pour les épargnants de devoir liquider rapidement ces actifs souvent illiquides, en particulier s'agissant des PEA-PME.
Enfin, le projet de loi prévoit des dispositions protectrices pour les ressortissants britanniques qui vivent en France, afin de leur permettre de poursuivre leurs activités dans notre pays. Or la suppression de cet alinéa a été votée par la commission. Je veux y revenir, très brièvement.
La rédaction de ces dispositions, qui s'inspire de celle retenue pour la loi d'habilitation de janvier 2019, permet de couvrir des situations qui n'ont pas encore été identifiées. En effet, même si nous avons fait un énorme travail afin que la grande majorité des sujets soient traités dans l'accord de retrait ou bien, nous l'espérons, dans le cadre de l'accord sur la relation future, nous ne pouvons pas exclure aujourd'hui l'émergence de sujets résiduels, qui pourraient nécessiter une intervention au niveau national, mais qui, par définition, ne sont pas encore connus.
Cette habilitation permettra, par exemple, à certaines professions soumises à des conditions d'exercice liées à l'appartenance à l'Union – avocats, experts-comptables, architectes, médecins – de poursuivre leur activité si l'accord trouvé n'était pas assez protecteur pour elles ou s'il n'y avait pas d'accord. Ladite habilitation doit être considérée non comme un blanc-seing accordé au Gouvernement, mais comme l'application d'un principe de prudence.
Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes engagés dans une négociation sans précédent. Grâce à nos efforts collectifs et à votre soutien, nous avons franchi une première étape, celle de la sortie ordonnée du Royaume-Uni de l'Union européenne.
Le Gouvernement n'a pas eu besoin de faire usage de l'habilitation que vous lui aviez confiée en janvier 2019. Avec vous, je forme le vœu que nous puissions de nouveau trouver un accord ambitieux avec le Royaume-Uni d'ici à la fin de la période de transition, et que nous n'ayons pas à faire usage de l'habilitation que je vous demande de nous accorder aujourd'hui.
Je le dis très solennellement, il faut nous préparer à toutes les éventualités et notamment à protéger les Français face à l'incertitude du Brexit. Le Gouvernement rendra compte devant le Sénat. Vous le savez, je suis prête à venir devant vous aussi souvent que vous le jugerez utile pour vous tenir informés de l'état d'avancement de ces négociations.
(…)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je ferai quelques réponses rapides avant d'entamer l'examen des articles.
Monsieur Marie, vous avez dit de ce texte qu'il était profondément antisocial. Il s'agit pourtant de prolonger un certain nombre de mesures de protection des salariés, notamment au travers du dispositif de chômage partiel. J'avoue être quelque peu étonné de cet argument.
Par ailleurs, vous dites que l'article 3 viserait à faire main basse sur l'argent de je ne sais quelle structure. Comme l'a souligné le rapporteur général, cela fait une vingtaine d'années que les collectivités locales participent à un dispositif de ce type, à hauteur de 130 milliards d'euros. Et je réponds aussi en cela à Mme Herzog. Nous ne faisons pas main basse sur l'argent de qui que ce soit. N'employons pas de mots qui fassent peur. Aucune collectivité n'est jamais venue se plaindre de ce dispositif. J'ai été maire et je vous prie de croire que je l'aurais fait si tel avait été le cas.
Madame Assassi, je ne crois pas que nous profitions de l'état d'urgence sanitaire. Personne n'en profite et personne ne peut s'en réjouir – ce n'est d'ailleurs pas votre cas. Nous essayons d'adapter des dispositifs en fonction de notre situation sanitaire, qui est aussi celle de la plupart des pays du monde.
Il est d'ailleurs paradoxal que vous reconnaissiez que certaines de ces mesures sont intéressantes tout en souhaitant le rejet global de ce texte. Nous aurons l'occasion d'en reparler au cours du débat. Vous voudriez aller plus loin sur certains sujets, mais ce n'est pas une raison pour occulter ceux que nous essayons de résoudre étape par étape.
Enfin, madame Assassi, vous connaissant, je ne crois pas qu'il y ait le moindre risque pour que la démocratie soit bâillonnée et j'ai plutôt tendance à m'en réjouir.
Monsieur Mohamed Soilihi, je remercie votre groupe de son soutien constant et de votre vigilance sur certains sujets, en particulier l'outre-mer. Nous aurons l'occasion d'en débattre.
Monsieur Menonville, vous avez souligné les questions de l'intéressement et du statut des salariés à temps partiel et vous nous avez invités à nous mobiliser sur la relance. Muriel Pénicaud, qui nous a rejoints, et moi-même ne manquerons pas d'y revenir lors de la discussion de l'article concerné. Je tiens à redire l'importance du débat parlementaire.
Monsieur Hervé, vous avez rappelé à juste titre que ce projet de loi visait à prolonger un certain nombre de dispositifs votés en mars dernier. Vous appelez à la vigilance, comme tous les orateurs, sur les projets de loi d'habilitation. Mais nous y avons déjà répondu, d'une certaine façon, au travers de ce qu'a souhaité le Gouvernement et de ce qu'ont souhaité l'Assemblée nationale et la Haute Assemblée. Tout cela me paraît aller dans le bon sens et je tiens à vous remercier de vos mots.
Madame Costes, vous avez appelé à la vigilance de votre groupe et précisé que vous vous détermineriez à l'issue du débat, ce qui est une lourde charge à assumer pour nous tous. J'espère que votre vote sera un bon juge de paix de la qualité de nos échanges. Je comprends votre appel à la vigilance, rien de plus normal dans un débat parlementaire.
Madame Di Folco, il s'agit effectivement d'un texte qui aborde pêle-mêle beaucoup de sujets et j'ai apprécié la mesure de vos propos. Je n'ai d'ailleurs pas essayé d'éluder la question.
Si nous avons devant nous autant de sujets, c'est que la crise emporte des conséquences sur l'ensemble du tissu social et économique de la société et sur son organisation. Elle est non pas sectorielle, mais totale, d'où le côté pêle-mêle de ce texte. Je comprends les difficultés que cela peut représenter en termes de lisibilité pour nos concitoyens. Le président Bas a dit qu'il s'agissait, pour l'essentiel, de dispositions techniques. Nos compatriotes ont besoin qu'on réponde à leurs sollicitations, notamment ceux d'entre eux qui sont en CDD et voient leurs contrats arriver à leur terme sans solution, ceux qui sont en situation de chômage partiel ou ceux qui s'inquiètent pour l'avenir de leur entreprise ou de telle ou telle structure.
Nous devons répondre concrètement à ces interrogations immédiates. Je comprends votre logique et la nécessité d'une vision plus globale, mais il s'agit de l'étape suivante, celle du plan de relance, qui sera aussi celle de la grande visibilité.
Au travers du présent projet de loi, nous nous efforçons de répondre très concrètement aux sujets évoqués par les uns et par les autres.
Madame Lubin, je voudrais vous remercier de votre regard plutôt « acceptable » sur ce texte, notamment grâce au travail du Sénat que je tiens à saluer.
Vous avez dit de ce projet de loi qu'il allait accroître la précarité. Nous en débattrons dès l'article 1er, mais je crois au contraire que ce texte permet de limiter la précarité. J'aurais aimé, même si rien n'est jamais parfait, que vous saluiez les mesures prises dans la loi du 23 mars dernier. Il s'agit ici de les prolonger sous d'autres formes. C'est bien un gage de notre volonté collective de préserver les plus fragiles. Ces dispositions visent toutes à limiter les conséquences économiques, et donc sociales, de cette crise qui est encore pleinement devant nous.
Monsieur Poniatowski, je laisserai Amélie de Montchalin vous répondre sur la question européenne, n'étant pas un éminent spécialiste du sujet.
Vous avez souligné, comme d'autres, que la crise sanitaire ne justifiait pas tout, y compris en termes de procédure parlementaire. Nous partageons d'autant plus volontiers votre point de vue que nous avons inscrit le maximum de dispositions en dur. Mais la crise nécessite beaucoup de choses et notamment d'avancer clairement sur un certain nombre de sujets. Je ne préjuge pas de l'article 4, dont nous débattrons.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite à mon tour répondre à certaines de vos allusions et interventions.
Monsieur Marie, vous auriez souhaité un débat dédié après le 1er juillet. Mais la crise sanitaire nous empêche d'organiser les débats parlementaires comme nous le souhaiterions. En outre, le calendrier est souvent particulièrement chargé à l'automne. Dès lors, il nous semblait dangereux de ne pas prendre certaines des dispositions que nous pouvions prendre dès maintenant et qui visent à protéger nos concitoyens. Les questions d'assurance vie, d'épargne ou celles qui sont liées au tunnel sous la Manche inquiètent les acteurs et les épargnants.
Il nous semblait difficile, alors que le contexte financier n'est pas bon, de pousser les épargnants à liquider dans les pires conditions leur épargne, par manque de visibilité sur la protection que nous pourrions leur apporter. C'est pourquoi il était pour nous important d'agir maintenant sur ce sujet. Certes, nous y verrons sans doute un peu plus clair le 1er juillet, je vous le concède. Pour autant, je ne suis pas sûre que nous aurions le temps, entre le 1er juillet et le 31 décembre, de prendre toutes les dispositions que nous vous présentons.
Madame Costes, vous m'avez demandé pourquoi le Gouvernement voulait légiférer par ordonnances s'agissant du tunnel sous la Manche et des ressortissants britanniques.
Pour ce qui concerne le tunnel sous la Manche, nous ne souhaitons pas arriver à la conclusion qu'il faudrait deux autorités ferroviaires dans le tunnel. Nous cherchons à négocier avec les Britanniques, pour justement conserver le caractère dual, mais unifié, de la commission intergouvernementale sur la sécurité ferroviaire. L'ordonnance n'interviendrait qu'en dernier recours, c'est-à-dire si tout échoue. Il paraît donc nécessaire de pouvoir légiférer par ordonnances « au cas où ».
La réduction du délai d'habilitation à sept mois ne me paraît pas satisfaisante. Selon moi, nous avons intérêt, politiquement, en tant que Parlement uni derrière le Gouvernement, à indiquer aux Britanniques que nous sommes prêts à négocier douze mois de plus, s'ils souhaitent aller dans cette voie. Nous devons faire preuve d'une grande ouverture, parce que, je le répète, un accord coûte que coûte n'est pas ce que nous cherchons.
Madame Assassi, vous avez parlé de « désinvolture », soulignant qu'il n'y avait pas d'urgence. Or, s'il y a un sujet sur lequel nous ne sommes pas désinvoltes et où il y a urgence, c'est bien le Brexit.
Mme Éliane Assassi. Je n'en ai pas parlé !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État. Nous ne pouvons pas laisser penser aux entreprises, aux pêcheurs ou aux agriculteurs que nous serions prêts à leur faire subir une double peine, celle de la crise économique et sociale qui s'annonce et celle du choc du Brexit. Le fait de présenter au Parlement un texte nous permettant d'anticiper, de prévoir et de protéger est l'opposé d'une attitude désinvolte !
Mme Éliane Assassi. C'est vous qui êtes désinvolte, je n'ai pas parlé du Brexit !
Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État. Monsieur Hervé, vous avez considéré comme opportuniste le fait d'introduire les problématiques du Brexit dans ce texte. Je le répète, il y a urgence à rassurer, à protéger et à amener tous les Français à se préparer, comme l'a dit M. Ladislas Poniatowski.
Ce texte montre que le Gouvernement prévoit un certain nombre de choses, mais que, pour autant, de nombreux aspects ne dépendent pas de nous. Ainsi, accord ou pas, la situation sera différente après le Brexit, pour ce qui concerne les contrôles et les procédures, que nous souhaitons les moins invasifs possible. J'y insiste, un accord de libre-échange ne signifie pas « zéro contrôle ». D'ailleurs, nos entrepreneurs, nos agriculteurs et nos pêcheurs nous demandent de contrôler ce qui entrera sur le territoire du marché intérieur, parce qu'il y va de la crédibilité européenne.
Monsieur Poniatowski, selon vous, une habilitation de quinze mois est trop longue. Vous incitez ainsi à la vigilance sur les mesures « balai ». Entre l'accord de retrait et le large accord commercial auxquels nous travaillons, nous voyons apparaître des angles morts. Je pense notamment aux conditions d'exercice d'un certain nombre de professions libérales, qui ne seront peut-être pas couvertes par l'accord commercial et qui ne sont pas concernées par l'accord de retrait.
Certains pourraient vous dire que nous n'avons pas besoin de texte. Je préfère, au nom du Gouvernement, donner aux personnes concernées une sécurité juridique absolue sur le fait qu'elles pourront continuer à exercer leurs activités. C'est un sujet que nous sommes aujourd'hui capables d'identifier.
Ces sujets d'angle mort ou de frottement apparaîtront si l'accord commercial ne couvre pas tout le champ permettant de préserver la capacité des ressortissants britanniques à exercer leurs activités chez nous. Nous devons être capables de leur dire que nous ne mettrons pas de barrières à la poursuite de leur activité en France : c'est un signal politique fort, que vous souhaitez également envoyer.
Permettez-moi de revenir sur la question du délai de quinze mois. Si vous pensez que nous sommes en capacité d'avoir un bon accord dans sept mois, je vous suis et le délai d'habilitation de quinze mois n'est effectivement plus opportun. Mais Michel Barnier le dit avec insistance, nous n'avons pas, aujourd'hui, réuni les conditions d'une bonne négociation nous permettant de préserver nos intérêts, y compris après avoir fait du chemin, et de nous assurer que, sur la gouvernance, la pêche et des conditions de concurrence équitables, cet accord nous permet, pour les dix ou vingt ans à venir, d'envisager les choses avec confiance.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement, pour ne pas revenir devant vous avec la même disposition dans six mois, vous propose de nous faire confiance pour les quinze prochains mois, sur les quatre sujets dont nous parlons.
Bien sûr, nous souhaiterions pouvoir négocier douze mois de plus avec les Britanniques. Ni Michel Barnier ni moi-même n'avons aujourd'hui le pouvoir d'imposer ce point de vue. Il est donc important que le Parlement envoie un signal politique fort.
Au fond, il y a deux discussions parallèles : comment le Gouvernement français échange-t-il avec son Parlement ? quel signal le Parlement envoie-t-il à son Gouvernement en termes de confiance ? Il s'agit de nous donner douze mois de plus pour trouver un meilleur accord que ce que les Britanniques veulent nous proposer sous la contrainte du temps. C'est un débat utile, qui permettra d'envoyer un signal diplomatique. Je le concède, il n'est pas de même nature que les demandes d'habilitation traditionnelles, ce qui rend peut-être les choses plus difficilement lisibles.
Je suis ici parfaitement honnête en vous disant qu'il y a là non pas une manigance, mais la volonté de nous mettre tous ensemble dans une position de force face aux Britanniques, pour soutenir Michel Barnier.
M. Ladislas Poniatowski. Et sur la quarantaine décidée par les Britanniques, madame la secrétaire d'État ?
M. le président. La discussion générale est close.
http://www.senat.fr, le 3 juin 2020