Interview de M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État aux transports, à RTL le 22 juin 2020, sur le déconfinement du transport ferroviaire, le port du masque dans les transports en commun et l'aide de l'État à Air France.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

BENJAMIN SPORTOUCH
Bonjour Jean-Baptiste DJEBBARI.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Bonjour à vous.

BENJAMIN SPORTOUCH
Merci d'être avec nous ce matin en direct sur RTL. Alors, on passe aujourd'hui au stade 3 du déconfinement, d'ici jeudi, la totalité des trains en France, du TER aux TGV, seront remis sur les rails, c'est bien ça, vous nous le confirmez ce matin ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est ça, quasiment 100% du trafic, environ 50% de la fréquentation, donc ça augmente progressivement.

BENJAMIN SPORTOUCH
C'est combien alors aujourd'hui l'état des réservations pour les vacances, parce que c'est la question du moment…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors, c'est un deuxième sujet, mais c'est un sujet important qu'on suit évidemment avec beaucoup d'acuité, on a environ pour le mois de juillet 35% des réservations, c'est 30% de moins que l'année dernière à la même date, mais c'est beaucoup plus que la semaine passée. Et on voit bien qu'il y a une grande sensibilité notamment aux allocutions présidentielles, chaque fois que des paroles déverrouillent un peu les déplacements des Français, alors, les Français s'organisent à nouveau pour leurs vacances, et c'est ce qu'on a vu, c'est ce qu'on a observé en tout cas ces jours passés, et on a des week-ends qui commencent à être assez chargés avec des taux de réservation de l'ordre de 45, 50%. Donc les choses se font progressivement.

BENJAMIN SPORTOUCH
Mais vous anticipez donc que les Français prennent davantage leur voiture cet été ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Il y aura forcément un petit report, c'est ce que nous disent les enquêtes qualitatives sur effectivement le véhicule individuel qui est vu encore – et pour un temps – comme un havre sanitaire…

BENJAMIN SPORTOUCH
De là à diminuer le péage des autoroutes pour privilégier le pouvoir d'achat des Français, est-ce que vous y pensez ou pas cet été… ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
De là à ne pas être démago puisque, vous le savez, les autoroutiers sont tenus… (coupure de son)… par contrat avec l'État, et toute baisse des péages doit être compensée par l'impôt, donc il faudrait peut-être demander aux Français s'ils veulent voir leurs impôts augmenter pour financer certaines politiques de gratuité des présidents de région.

BENJAMIN SPORTOUCH
Donc vous faites allusion à Carole DELGA, qui est présidente de la région Occitanie.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument.

BENJAMIN SPORTOUCH
Il n'y aura donc pas de baisse des péages cet été. Dans le métro parisien, toutes les stations sont ouvertes à nouveau.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
A compter d'aujourd'hui.

BENJAMIN SPORTOUCH
A compter d'aujourd'hui, jusqu'à quand, Jean-Baptiste DJEBBARI, faudra-t-il porter le masque dans les transports en commun ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ecoutez, le consensus scientifique, c'est qu'il le faut le porter jusqu'à ce que le virus ne circule plus activement, nous avons des demandes des opérateurs pour le porter, le faire porter tout l'été. Et je pense qu'il est très probable que le masque soit porté tout l'été, c'est une demande des opérateurs, c'est une demande des citoyens, des voyageurs, des usagers qui prennent qui prennent le métro, le train, les bus, les transports en commun. Et par ailleurs, il est très bien porté ce masque, 85, entre 85 et 90%, et c'est stable, alors c'est un peu mieux le matin et intra-muros que le week-end ou le soir, mais ça reste la pierre angulaire de la protection dans les transports.

BENJAMIN SPORTOUCH
Donc obligatoire encore tout l'été…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est très probable.

BENJAMIN SPORTOUCH
Même en période de grande chaleur, on va en avoir cette semaine, et c'est vrai que c'est compliqué de porter un masque, est-ce qu'il y aura une sorte de tolérance ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je crois qu'il n'y a pas de tolérance face au virus et que, évidemment que les personnes qui se trouveraient à ce moment-là en difficulté, notamment respiratoires peuvent s'adresser aux services sanitaires dans les stations, et tout ça va être organisé avec des brumisateurs, enfin, tout ce qu'on connaît actuellement en période de canicule pour que le confort soit maximal, mais oui, je crois qu'il faut encore rester très vigilant face à ce virus, et que nous savons aujourd'hui que dans les transports en commun, le port du masque reste un outil particulièrement pertinent.

BENJAMIN SPORTOUCH
Donc obligatoire, vous dites l'été, et y compris dans les avions, ce sera la même chose, tout l'été ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je crois qu'il n'y aura pas de différence dans les transports publics, tous les transports en commun, les gens s'y ont fait, et puis, vous savez que nous sommes dans une phase de redémarrage progressive, tant dans les transports en commun que dans les transports aériens, et qu'il me paraît nécessaire de garder un haut niveau de protection sanitaire, et notamment l'usage du port du masque.

BENJAMIN SPORTOUCH
Alors, passons à la convention citoyenne sur le climat, beaucoup de propositions en matière de transports…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
J'ai vu ça…

BENJAMIN SPORTOUCH
Vous avez vu ça, et notamment celle-ci, 110 km/h sur autoroute dès l'an prochain, Jean-Baptiste DJEBBARI, y êtes-vous favorable ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors, d'abord, moi, je veux rappeler que c'est le président de la République qui a eu cette initiative, c'est impulsion politique suite à…

BENJAMIN SPORTOUCH
Pas les 110 km/h, la convention citoyenne…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
La convention citoyenne et que ça me paraît être un débat tout à fait démocratique, tout à fait utile et complémentaire avec la démocratie parlementaire, évidemment. Le président dira ce qu'il entend faire de ces propositions, mais je me rappelle, pour avoir vécu l'épisode des 80 km/h comme député, que, en dehors d'une mesure administrative qui peut être prise par le gouvernement demain, si nous souhaitons, cette mesure, ces restrictions de vitesse ont trait à l'écologie évidemment, ont trait à la sécurité routière, ont trait au rapport qu'ont les Français vis-à-vis de leur liberté, et donc de ce point de vue-là, ce sont des beaux sujets de démocratie, et cette proposition pourrait trouver – si le président en décide ainsi – à s'insérer dans une série de propositions, par exemple soumises à un référendum consultatif, vous savez que le président…

BENJAMIN SPORTOUCH
Et ça sera quand, ça sera quand ce référendum ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument aucune idée…

BENJAMIN SPORTOUCH
Mais il y en aura un, Jean-Baptiste DJEBBARI…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je me souviens qu'en ouverture de la convention, le président de la République s'était exprimé devant les conventionnaires et avait dit qu'il étudiait la possibilité d'avoir recours à un référendum consultatif, vous savez que ça n'existe pas en France, et qu'il était prêt à faire cette innovation démocratique sur une série de propositions qui ne relèvent pas de la loi. Donc je note que les 110 km/h est une proposition qui ne relève pas de la loi, mais qu'elle pourrait trouver à s'insérer dans un beau référendum consultatif.

BENJAMIN SPORTOUCH
Mais est-ce que vous, personnellement, vous y êtes favorable, vous êtes secrétaire d'État aux Transports, Jean-Baptiste DJEBBARI, on veut entendre votre avis ce matin sur cette question…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Moi, je suis citoyen, donc…

BENJAMIN SPORTOUCH
Est-ce que c'est le sens de l'histoire ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais vous savez, c'est un sujet, je ne le dis pas du tout pour botter en touche…

BENJAMIN SPORTOUCH
Un petit peu, là…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, non, vraiment, parce que, c'est ce que j'ai vécu comme député sur les 80 km/h, les gens disaient : c'est une mesure de sécurité routière, certains disaient oui, certains disaient non. Certains disaient : c'est pertinent sur le plan écologique, certains disaient oui, d'autres disaient non, et d'autres disaient : vous restreignez mes libertés, c'est insupportable, d'autres disaient l'inverse, donc c'est un beau sujet de politique, ce n'est pas qu'une mesure administrative. Et c'est pour ça que je pense que c'est un des sujets qui possiblement pourrait trouver à s'insérer dans un référendum.

BENJAMIN SPORTOUCH
Alors qu'en est-il des 50 km/h sur le périphérique parisien, comme Anne HIDALGO le souhaite, là, est-ce que vous serez peut-être plus…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Eh bien, ça relève de la même logique, mais j'ajoute que sur le périphérique, ça concerne essentiellement des Franciliens non parisiens, à 72%, je crois. Et donc quand on a des mesures qui peuvent paraître comme ça posées, de beaux sujets démocratiques, je pense que consulter ou avoir recours à la démocratie locale notamment, me paraît relever d'une bonne hygiène politique…

BENJAMIN SPORTOUCH
Mais on s'achemine de plus en plus vers ce référendum que le président de la République a laissé entendre, pour vous, ça, c'est clair…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Encore une fois, c'est le président de la République qui a lancé cette convention citoyenne, il a dit qu'il en tirait un certain nombre de conséquences, y compris par la voie référendaire, si c'était une demande de la convention, c'en est une, et si ça trouvait écho et si ça avait une pertinence politique, il dira ce qu'il entend faire avec cette convention, je crois qu'il s'exprime devant la convention le 29.

BENJAMIN SPORTOUCH
Le 29 en effet.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Une semaine à tenir Monsieur SPORTOUCH…

BENJAMIN SPORTOUCH
Autre proposition pour les Français surtout, autre proposition de la convention, des prêts à taux 0 pour l'achat de véhicules propres, y êtes-vous favorable ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Assez favorable dans la mesure où d'abord, c'est une proposition qui a été portée depuis quelques années, des banques s'y sont engagées, mais je ne crois pas que c'est beaucoup d'actualité, en revanche, et ça peut très bien d'ailleurs être complémentaire aux primes que nous avons lancées dans le plan de relance, en revanche, ça ne règle pas le problème des ménages les plus modestes qui en général ne sont pas solvables sur le plan bancaire et pour lesquels des dispositifs de microcrédits doivent être envisagés.

BENJAMIN SPORTOUCH
Alors, on passe au dossier AIR FRANCE, parce que, Jean-Baptiste DJEBBARI, on nous annonce, en tous les cas, on parle de 8 000 à 10 000 emplois menacés, c'est-à-dire 15 à 20% des effectifs globaux, est-ce que ce sera bien dans cette fourchette, et quand est-ce que ce sera annoncé aux salariés ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Bon, d'abord, il y a effectivement des rendez-vous, à la fois avec les actionnaires et les salariés fin juin, début juillet, donc les choses seront dites dans le plus grand détail, et en l'état, je ne confirme pas ces chiffres, de même que Bruno LE MAIRE, comme Bruno LE MAIRE a pu le dire la semaine dernière, ce que je constate, c'est que si l'État n'avait pas prêté à AIR FRANCE 7 milliards d'euros, ce sont des dizaines de milliers d'emplois, des dizaines de milliers d'emplois qui seraient aujourd'hui en danger, donc n'inversons pas aujourd'hui la charge de l'administration…

BENJAMIN SPORTOUCH
Ah donc maintenant que vous avez mis 7 milliards sur la table, vous ne pouvez pas dire à AIR FRANCE : ne licenciez pas, pour vous, c'est déjà pas mal si on se contente de 8 à 10.000…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, ce n'est pas du tout ce que je dis, mais je dis : on peut aussi s'aveugler et ne pas voir que 95% de l'activité s'est effondrée pendant plusieurs mois, que la reprise, elle est très progressive, et que donc personne, ni vous ni moi ne savons dire aujourd'hui quel sera l'état du transport aérien dans 6 mois, dans 1 an, dans 18 mois, donc la chose la plus rationnelle à faire, c'est ce que nous avons fait, c'était de sauver AIR FRANCE-KLM, c'est de regarder en transparence et en lucidité ce qui va advenir du transport aérien, et qu'Air France s'ajuste…

BENJAMIN SPORTOUCH
Alors, vous avez demandé à AIR FRANCE justement de s'ajuster, de supprimer plusieurs lignes intérieures où le train peut être une alternative, et sont les Echos aujourd'hui, ce matin, vous voulez contraindre les compagnies low-cost à faire de même pour éviter la concurrence déloyale. Est-ce que c'est le cas, et c'est pour quand, il n'y aura plus de Paris-Bordeaux, de Paris-Lyon ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Le principe, c'est que nous avons demandé dans le cadre effectivement du plan de sauvetage d'AIR FRANCE des conditions environnementales, parmi ces conditions, c'est effectivement qu'AIR FRANCE se retire des lignes, notamment vers Orly, pour lesquelles existe une alternative ferroviaire à moins de 2h30, ce que la compagnie fera. Et il n'est évidemment pas envisageable que des opérateurs, quels qu'ils soient, notamment low-cost, viennent s'y insérer. Donc nous prendrons un arrêté pour des raisons environnementales, compatible évidemment avec le droit européen, de manière à ce qu'il n'y ait pas effectivement ces effets de distorsion de concurrence…

BENJAMIN SPORTOUCH
Ce sera quand cet arrêté ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ça peut être fait très rapidement, nous allons…

BENJAMIN SPORTOUCH
Donc très rapidement, ces lignes peuvent être supprimées, c'est ce que vous nous dites ce matin ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, la prise de l'arrêté. Les lignes, elles seront supprimées en concertation avec les régions…

BENJAMIN SPORTOUCH
Mais dès l'année prochaine ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais ça peut être fait, les discussions vont s'engager notamment au retour de l'été avec les régions qui, comme vous le savez, non seulement, organisent les mobilités dans les territoires, mais souvent, subventionnent les opérateurs, suivant certaines lignes, donc ceux qui, quelque part, doivent être pleinement associés, qui sont souvent les décisionnaires, ce sont les régions, et nous ferons ce travail avec elles.

BENJAMIN SPORTOUCH
Valérie PECRESSE, hier, dans le « Grand Jury » a tiré la sonnette d'alarme, il manque à Ile-de-France Mobilités, qui gère les transports en Ile-de-France, 2,6 milliards d'euros, vous avez annoncé 435 millions d'euros, est-ce qu'il va falloir augmenter le passe Navigo de 20 euros, Jean-Baptiste DJEBBARI ? Sinon, qui va payer ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, et d'ailleurs, je le redis à Valérie PECRESSE, mais j'ai eu l'occasion de discuter avec elle beaucoup ces derniers jours, l'État sera aux côtés d'Ile-de-France Mobilités, de la région Ile-de-France, comme il l'est aux côtés des autres régions…

BENJAMIN SPORTOUCH
Donc vous donnerez 2,6 milliards ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, d'abord, ce sont les chiffres… nous avons confronté les chiffres, et c'est un peu moins que ça, mais nous avons fait ce premier pas de 435 millions, qui est un pas important, de la même façon que nous faisons ce pas avec les autres régions, les transports continueront à rouler en Ile-de-France, et je ne doute pas, et je ne doute pas que nous trouverons une solution intelligente avec madame PECRESSE…

BENJAMIN SPORTOUCH
Tutelle de l'État sur l'Ile-de-France Mobilités, si jamais elle dit que c'est en cessation de paiement ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
En tout cas, ce que je vous dis, c'est que les transports, après…

BENJAMIN SPORTOUCH
Curatelle ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Curatelle… après le 10 juillet, les transports continueront évidemment à rouler en Ile-de-France, c'est impératif pour les Franciliens, vous le savez…

BENJAMIN SPORTOUCH
Une toute dernière question, les lignes 16 et 17 seraient repoussées après 2024, après les JO, est-ce que vous nous confirmez ça ce matin ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, parce que le calendrier est tendu, et vous le savez, était déjà tendu, le Covid décale encore un petit peu le calendrier, et comme le sujet, c'est l'accès aux sites des JO, je vous confirme que l'accès à ces sites ne sera possible qu'avec la ligne 14, dont l'extension est actuellement en cours…

BENJAMIN SPORTOUCH
Donc pas de lignes 16 et 17. Merci beaucoup Jean-Baptiste DJEBBARI, bonne journée à vous.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Merci à vous.

YVES CALVI
100% des trains sur les rails à la fin de la semaine, pas de baisses de tarifs des péages cet été, le masque devrait rester la norme dans les transports publics et privés, quels qu'ils soient jusqu'à la rentrée, enfin, l'État sera aux côtés de l'Ile-de-France, vient de nous dire le secrétaire d'État aux Transports, en plus de ces lignes 16 et 17 dont l'ouverture est remise à… nous verrons…

BENJAMIN SPORTOUCH
Aux calendes grecques peut-être.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 23 juin 2020