Texte intégral
RENAUD BLANC
Bonjour Élisabeth BORNE.
ÉlisaBETH BORNE
Bonjour.
RENAUD BLANC
Ministre de la Transition écologique et solidaire. "Le déconfinement ce n'est pas pour demain matin", la petite phrase hier du Premier ministre chez nos confrères de TF1. Élisabeth BORNE, ce déconfinement, il semble vous inquiéter autant que la crise qui nous frappe actuellement.
ÉlisaBETH BORNE
Eh bien écoutez, on a mis en place un confinement avec un objectif absolu qui est de ralentir la propagation de l'épidémie, pour permettre à nos soignants, dans les hôpitaux, de faire face, et évidemment, la phase suivante il faut l'aborder avec beaucoup, beaucoup de méthode, en écoutant les scientifiques, il ne s'agit évidemment pas que d'épidémie reparte, et donc le travail est en cours, et on prendra évidemment l'avis de tous les scientifiques pour agir au mieux sur la phase suivante.
RENAUD BLANC
On a loupé un petit peu l'arrivée du virus, et notamment la question du dépistage, on veut réussir absolument la sortie, le redémarrage ?
ÉlisaBETH BORNE
Ecoutez, ce que je peux vous dire c'est que, on peut dire que tout n'a pas été fait, enfin, il y a beaucoup de gens pour donner des leçons, moi je note aujourd'hui, en tout cas aujourd'hui on a mis en place ce confinement, pendant le confinement nos soignants sont au front, les services essentiels de notre pays tiennent, moi je suis particulièrement concernée, voyez dans mon ministère, il y a de l'eau dans les robinets, on collecte les déchets, il y a l'énergie, la logistique s'adapte en permanence, et évidemment on veut préparer en ordre la sortie du confinement et on prendra tous les avis scientifiques pour que ça se passe au mieux.
RENAUD BLANC
Ce sont des scientifiques qui disaient qu'effectivement le démarrage avait été très difficile et que le dépistage n'était pas au rendez-vous, alors qu'il l'était en Allemagne. Ce que nous dit hier le Premier ministre, Élisabeth BORNE, c'est qu'on ne sait pas tout et que l'on doit finalement accepter de naviguer à vue pratiquement.
ÉlisaBETH BORNE
On est face à une épidémie, enfin qui est un phénomène absolument sans précédent, qui touche toute la planète, je crois qu'il faut faire preuve de beaucoup de modestie, il faut écouter les scientifiques, qui n'ont pas aussi toutes les certitudes au début de la crise, et donc il faut agir au mieux en fonction des données que les scientifiques nous communiquent, et pendant ce temps faire tenir le pays, ça passe par la mobilisation de salariés, dans beaucoup de secteurs, et notamment, moi je vous dis, les secteurs qui sont essentiels à la vie du pays, dont j'ai la responsabilité.
RENAUD BLANC
Élisabeth BORNE, les vacances scolaires débutent ce soir pour la zone C, le Premier ministre a été très clair, pas de départs sur les routes ou en train, il n'y aura pas de trains qui vont circuler ce soir, ni demain, ni ce week-end ?
ÉlisaBETH BORNE
Non, mais bien sûr, pendant le confinement il ne s'agit pas de partir en vacances, l'objectif, je le redis, c'est de ralentir la propagation de l'épidémie, donc on voit bien qu'il ne s'agit pas de partir à l'autre bout de la France. L'offre, notamment sur les TGV, a été réduite au minimum, on doit avoir aujourd'hui 6% d'une offre normale, pour permettre à ceux qui ont besoin de se déplacer, par exemple les soignants qui pourraient rejoindre une autre région, de se déplacer, mais évidemment chacun doit rester chez soi, et il ne s'agit pas, je vous dis, de faire des trajets de longue distance et d'aller propager l'épidémie dans d'autres régions.
RENAUD BLANC
Alors, je voudrais rester sur la question des transports avec vous, et évoquer ce qu'on pourrait appeler les transports sanitaires. L'Ile-de-France et le Grand-Est sont sous l'eau, allez-vous, dans les heures, dans les jours qui viennent, multiplier les déplacements de patients atteints par le coronavirus dans ces deux régions, vers l'Ouest, des déplacements en train, des déplacements en avion ?
ÉlisaBETH BORNE
Vous avez vu que les transferts de malades ils se font, autant que de besoin, pour éviter la pression dans les régions qui subissent la vague d'épidémie, et effectivement ça se fait avec l'appui, notamment de l'armée, ça se fait aussi en utilisant des TGV médicaux, et là aussi je voudrais rendre hommage à tous ceux qui rendent possible ces transferts, pour permettre aux soignants, qui sont en première ligne, de ne pas être submergés par la vague de cette épidémie.
RENAUD BLANC
Mais on va les multiplier dans les heures qui viennent, ce week-end notamment ?
ÉlisaBETH BORNE
Les transferts sont adaptés en tenant compte de la pression qui s'exerce dans les régions qui sont les plus touchées, vous avez mentionné la région Grand-Est et l'Ile-de-France, et ils se font, autant que nécessaire, en tirant parti de la solidarité nationale, et puis vous avez vu qu'il y a aussi une solidarité européenne, avec un certain nombre de transferts qui sont faits en Allemagne, en Suisse et au Luxembourg.
RENAUD BLANC
Élisabeth BORNE, les routiers sont aujourd'hui un élément essentiel de la chaîne économique, mais ils estiment que leur sécurité sanitaire n'est pas garantie, beaucoup veulent faire jouer leur droit de retrait, où en êtes-vous très concrètement avec notamment les syndicats des routiers ?
ÉlisaBETH BORNE
Ecoutez, on travaille en permanence, avec Jean-Baptiste DJEBBARI, avec les organisations professionnelles du secteur, c'est vrai que ces routiers font partie des salariés qui sont sur le terrain, qui permettent à notre pays de continuer à fonctionner. Au début du confinement, quand on a fermé les commerces, ils se sont retrouvés en difficulté, avec des stations-service fermées, avec des difficultés à trouver des sanitaires, à trouer la nourriture dont ils ont besoin quand ils sont en déplacement, on fait rouvrir systématiquement les aires de service, les aires de repos pour les routiers, et puis on travaille avec les organisations professionnelles à un guide de bonnes pratiques pour que les bons gestes soient appliqués, dans ce secteur comme dans les autres secteurs, donc le travail est en cours et je peux vous assurer, qu'avec Jean-Baptiste DJEBBARI, c'est un des secteurs qu'on suit vraiment avec beaucoup d'attention, parce que nos routiers sont au travail et ils permettent à notre pays de tourner, c'est grâce à eux qu'on a notamment des produits dans nos supermarchés, qu'on peut acheminer des masques dans les hôpitaux, donc ils font partie de ces salariés qui sont essentiels à la vie de notre pays.
RENAUD BLANC
Vous parlez d'un guide de bonnes pratiques, c'est-à-dire qu'est-ce qu'on peut y trouver pour les entreprises, qu'est-ce qu'on doit y trouver ?
ÉlisaBETH BORNE
Eh bien écoutez, secteur par secteur, les entreprises adaptent leur organisation de travail, les grandes entreprises notamment, vous savez, ce qu'on appelle les opérateurs d'importance vitale, je pense, dans mon domaine, à des entreprises comme EDF, avaient des plans de continuité d'activité, où elles avaient anticipé sur des organisations de travail à mettre en place, notamment dans une crise telle que celle que l'on connaît, et dans chacun des secteurs qui n'en disposaient pas, avec le ministère du Travail, avec le ministère de la Santé, on accompagne les employeurs pour qu'ils définissent la bonne façon d'appliquer les gestes barrières, de se laver les mains régulièrement, par exemple pour les routiers, si on y revient, on impose maintenant d'avoir une capacité pour se laver les mains, par exemple avec du gel hydro-alcoolique, ou bien avec l'accès à un point d'eau sur tous les lieux de chargement et de déchargement. On a aussi imposé, dans les transports, une désinfection, tous les jours, des bus, des cars, des rames de métro, et donc c'est toutes ces pratiques qu'on définit, secteur par secteur, pour que les activités essentielles puissent se poursuivre, mais que, évidemment, la sécurité des salariés soit assurée. Et on vient de terminer avec les Fédération du bâtiment et des travaux publics, un guide de ce type, qui a été publié hier, et qui va permettre aux chantiers, qui sont urgents, essentiels, de pouvoir redémarrer.
RENAUD BLANC
Alors justement, ce guide, ces guides seront contraignants, c'est-à-dire que vous avez les moyens de faire pression sur les entreprises, de les sanctionner éventuellement si elles ne jouent pas le jeu ?
ÉlisaBETH BORNE
Ces guides, qui s'imposent à toutes les entreprises, ils ont été discutés, je vous dis, avec les organisations professionnelles et les syndicats, et les salariés savent que ce sont les bonnes règles à mettre en place, dans chacune des entreprises.
RENAUD BLANC
Élisabeth BORNE, vous parliez justement du BTP, la reprise de l'activité est imminente ?
ÉlisaBETH BORNE
Je pense qu'avec le guide qui a été publié hier, qui a fait l'objet d'un travail, depuis le début de la période de confinement, avec les organisations professionnelles, on a maintenant les bonnes règles pour permettre aux chantiers, importants, urgents, de reprendre, vous savez, il ne s'agit pas de vouloir faire repartir tous les chantiers, on va dire un peu de confort, mais il faut être conscient, et moi je le vois dans mon secteur, qu'il faut qu'on soit capable de réparer des lignes électriques si elles sont endommagées, par exemple par une tempête, qu'on a un certain nombre d'infrastructures, je pense par exemple à deux lignes ferrées en Ile-de-France, qui sont interrompues, c'est important qu'elles puissent reprendre, on a une route nationale, par exemple, qui avait été coupée par les intempéries dans les Pyrénées-Orientales, on a besoin de travaux de maintenance, sur nos réseaux d'eau, de gaz, et donc c'est important qu'on puisse avoir ce guide, pour que ces chantiers, qui sont essentiels à la continuité de ces activités, dans le secteur de l'eau, des déchets, de d'énergie, du transport, puisse se poursuivre.
RENAUD BLANC
Les éboueurs, les routiers, et d'autres salariés d'autres secteurs, vous réclament des masques Élisabeth BORNE, qu'est-ce que vous répondez ?
ÉlisaBETH BORNE
Je réponds que précisément, secteur par secteur, on regarde comment on doit adapter l'organisation du travail, par exemple pour la collecte des déchets, vous savez qu'habituellement il y a trois personnes, un conducteur et puis deux salariés qui ramassent les poubelles, on a revu les organisations de travail avec désormais un chauffeur et un seul agent qui ramasse les poubelles, pour qu'ils ne soient pas à trois dans la cabine, donc on adapte l'organisation de travail pour qu'on puisse continuer, en toute sécurité. Moi j'entends les attentes aussi des salariés qui souhaiteraient avoir en plus des masques, ce qui est important c'est qu'on applique bien tous ces gestes barrières, et puis vous savez qu'on a développé des capacités de production pour des nouveaux masques, notamment des masques en tissu, qui sont produits par notre industrie textile, et qui pourront être, voilà, plus largement diffusés dans tous les secteurs. Mais en tout cas, ce que je peux garantir aux salariés, c'est que ces guides de bonnes pratiques, qui sont vraiment mis au point avec les ministères du Travail et de la Santé, permet d'appliquer les bons gestes et donc permet aux salariés d'assurer leur métier en sécurité.
RENAUD BLANC
Donc pas de masques dans l'immédiat, si je vous comprends bien. Élisabeth BORNE, je reste dans le domaine des transports, question sur AIR FRANCE, qui est en très très grandes difficultés, faut-il, à terme, nationaliser la compagnie aérienne ?
ÉlisaBETH BORNE
Vous savez ce qu'on a dit c'est qu'on veut absolument préserver nos entreprises, préserver nos emplois, c'est bien le sens de toutes les mesures qui sont mises en place par le gouvernement, à la fois en soutien de trésorerie, la mise en place de l'activité partielle, et puis, pour des entreprises qui sont très fragilisées, comme AIR FRANCE, on a clairement indiqué qu'on ne laisserait pas tomber AIR FRANCE, donc on fera le nécessaire. C'est trop tôt aujourd'hui pour dire quelle sera la bonne réponse, mais en tout cas on fera le nécessaire pour protéger AIR FRANCE.
RENAUD BLANC
Les chèques énergie, ces chèques qui permettent à 5,5 millions de Français de payer leurs factures d'énergie, ces chèques vont bien arriver, Élisabeth BORNE, vous nous le confirmez ?
ÉlisaBETH BORNE
Alors, je vous confirme qu'on maintient bien sûr cette aide importante pendant la période de confinement, cette année ce sont 5,5 millions de ménages qui vont recevoir ce chèque, d'un montant moyen de 150 euros, sans avoir de démarches à faire, et pour ceux qui veulent utiliser ce chèque, donc ils peuvent utiliser ce chèque pour payer des factures, en le transmettant aux fournisseurs d'énergie, là, compte tenu de la période, les envois vont être un peu plus lents que d'habitude, ils ont démarré cette semaine, et on s'assurera que tous les chèques arrivent bien à destination, et puis on donne aussi de la souplesse sur les conditions d'utilisation de ces chèques, par exemple ceux de l'année 2019 pourront être utilisés, non pas jusqu'à fin mars, mais jusqu'au mois d'août, et le cas échéant plus longtemps. Donc, vraiment, ma préoccupation, c'est que ces chèques, qui sont importants pour des Français modestes, pour payer leurs factures d'énergie, que chacun le reçoive cette année, et vraiment je peux vous assurer qu'on assurera cet acheminement de tous les chèques, avec un peu plus de délai, mais chacun pourra bénéficier de ce chèque énergie.
RENAUD BLANC
Question à la ministre de la Transition écologique, Élisabeth BORNE, question qui peut peut-être vous paraître saugrenue, mais est-ce que l'eau que nous buvons aujourd'hui, avec l'épidémie, est-ce que cette eau est sans risque ?
ÉlisaBETH BORNE
Ah mais je vous confirme que nos entreprises, dans le domaine de l'eau, sont très mobilisées, vous savez, les traitements qui sont faits toute l'année permettent de traiter tous les virus, toutes les bactéries, et donc ces traitements sont très efficaces et ils sont appliqués avec beaucoup de rigueur dans la crise que l'on connaît, moi je voudrais rendre hommage là aussi, aux entreprises du secteur de l'eau, à leurs salariés, et on peut garantir effectivement que l'eau que qui arrive dans nos robinet est une eau de qualité et qu'elle a bien fait l'objet de tous les traitements nécessaires.
RENAUD BLANC
Élisabeth BORNE, la COP26, qui devait avoir lieu à Glasgow en novembre, a été reportée en 2021, on la présentait comme la COP la plus importante depuis celle de Paris, on devait prendre de nouveaux engagements, on va donc prendre de nouveau du retard dans la lutte contre le réchauffement climatique ?
ÉlisaBETH BORNE
Ecoutez, c'est un rendez-vous très important cette COP26, comme vous l'avez souligné, puisque tous les Etats doivent revoir leurs ambitions, rehausser leurs ambitions, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, malgré la crise sanitaire, vous savez, malheureusement la crise climatique continue, et je pense qu'aujourd'hui tous les pays, tous les gouvernements, sont très mobilisés, avec une priorité absolue qui est de lutter contre la crise sanitaire, je pense que c'est raisonnable d'attendre un moment où on aura pu rediscuter ensemble, retravailler, pour que cette COP soit une réussite, et je pense que c'est vraiment ce qui est important.
RENAUD BLANC
Merci beaucoup Élisabeth BORNE d'avoir été ce matin sur l'antenne de Radio Classique, la ministre de la Transition écologique et solidaire.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 avril 2020