Interview de Mme Nadia Hai, ministre de la ville, à Public Sénat le 9 Novembre 2020, sur les aides aux quartiers défavorisés en matière d'emploi et d'éducation pendant la crise sanitaire et la lutte contre les "séparatismes.

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Média : Public Sénat

Texte intégral

ORIANE MANCINI
Et notre invitée politique ce matin c'est Nadia HAI. Bonjour.

NADIA HAI
Bonjour.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'être avec nous. Ministre déléguée chargée de la Ville, on est ensemble pendant 20 minutes pour une interview en partenariat avec la presse quotidienne régionale représentée par Pascal JALABERT.

PASCAL JALABERT
Bonjour.

ORIANE MANCINI
Bonjour Pascal, du groupe EBRA, ce sont les journaux régionaux de l'Est de la France. On va commencer bien sûr avec cette crise sanitaire. Il y a un frémissement, mais il est trop tôt pour juger, c'est en gros le message délivré hier par Olivier VERAN, et, on le voit, des hôpitaux qui sont saturés dans cette certaines régions de France, il y aura des annonces du Premier ministre a priori jeudi, le 12 novembre, puisqu'il a parlé d'une clause de revoyure au bout de 15 jours. Est-ce que, quand même, il faut que les Français se préparent à passer un Noël confinés ?

NADIA HAI
C'est très difficile à dire, d'ailleurs le Premier ministre et le ministre de la Santé s'exprimeront dans quelques jours pour parler justement, pour faire un premier point d'étape dans la période de confinement, donc je pense qu'il est vraiment trop tôt de parler de renouveler le confinement ou de l'arrêter, le point d'étape nous en révélera un petit peu plus sur la situation de la crise, en tout cas toujours est-il que nous…

ORIANE MANCINI
Jeudi il y aura de nouvelles mesures annoncées ?

NADIA HAI
A voir en fonction de l'état de la situation, oui. Evidemment, si la situation ne s'améliore pas, il y aura des décisions qui seront prises, soit ce jeudi, soit les jours qui viennent, mais en tout cas nous prenons très très au sérieux l'évolution des indicateurs.

PASCAL JALABERT
Oui, quand on regarde un peu la carte de la prévalence du virus, c'est à dire la circulation, la Seine-Saint-Denis, Roubaix, Saint-Etienne, Saint-Chamond, à chaque fois ce sont des quartiers pauvres qui sont les plus touchés. D'abord, comment l'expliquez-vous, et que peut-on faire pour éviter cette circulation dans ces zones déjà paupérisées ?

NADIA HAI
Eh bien déjà l'accès aux soins dans les quartiers prioritaires, comme dans les zones rurales, est un vrai sujet maintenant depuis plusieurs années, et d'ailleurs même la prévention à la santé ne se fait pas non plus dans les mêmes conditions que sur le reste du territoire, que dans ces territoires fragiles, donc évidemment c'est un sujet que nous prenons très au sérieux. D'ailleurs, en tant que ministre de la Ville je travaille beaucoup avec des associations, tel que Banlieues Santé, qui eux font ce travail justement de prévention, et permettent aussi parfois de pallier le manque de services de santé, donc effectivement c'est un vrai sujet et nous nous attelons avec beaucoup de force puisque nous souhaitons vraiment développer ces Maisons de santé partout sur les territoires, là où il y a un manque.

ORIANE MANCINI
Mais vous nous confirmez ces inégalités territoriales de la crise sanitaire, et vous nous confirmez que les quartiers populaires sont plus touchés par le virus ?

NADIA HAI
Ils sont… là où il y a des territoires fragiles, là où il y a de la désertification médicale, il y a effectivement un impact beaucoup plus fort.

ORIANE MANCINI
Vous avez des chiffres, une proportion ?

NADIA HAI
Alors, je n'ai pas de chiffres à proprement parler, mais en tout cas en taux de mortalité sur la Seine-Saint-Denis c'est vrai qu'il y a un taux de mortalité plus élevé que sur le reste du territoire, et c'est par les faits que je viens de vous exposer, mais c'est vrai que nous nous y attelons, encore une fois, avec beaucoup de force.

PASCAL JALABERT
On a vu pendant le premier confinement que c'est aussi dans ces quartiers qu'il y avait plus de décrochage scolaire, qu'il y avait également le plus de travailleurs précaires qui avaient perdu leur emploi. Faut-il aujourd'hui des mesures sociales plus fortes pour aider ces populations ?

NADIA HAI
Alors, je tiens juste, effectivement, par rapport au fait que vous venez d'évoquer sur la continuité éducative, et notamment le premier confinement de ce printemps, qui a eu des effets assez importants, conséquents en tout cas sur la poursuite scolaire des enfants qui étaient dans des milieux défavorisés, par manque de matériel, par manque d'accompagnement aussi à la scolarité, de la part des familles, et donc là aussi nous nous y attelons avec beaucoup de force puisque nous avons cet été mis en place cette opération des "Vacances apprenantes" qui a su, enfin qui a montré des effets, puisque, à la rentrée scolaire, nous n'avons pas remarqué un taux de décrochage supérieur aux années précédentes, donc c'est que l'opération que nous avons mis en place sur cet été a fonctionné et, là aussi, au retour de l'été j'ai annoncé, pour les vacances de Toussaint, la poursuite de l'opération « Quartiers d'été », en "Quartiers d'automne", pour justement permettre de raccrocher ceux qui n'étaient pas, les enfants, en tout cas, qui étaient restés un petit peu en deçà du niveau scolaire, et là encore les premiers retours sont excellents, sont très très bons, donc tout nous porte à croire que l'opération que nous avons menée cet été, et poursuivie pendant les vacances de la Toussaint, a porté ses fruits.

ORIANE MANCINI
Sur les "Cités éducatives", il y a des "Cités éducatives" aussi qui sont mises en place, est-ce que vous pouvez nous expliquer le principe ?

NADIA HAI
Alors, les "Cités éducatives" c'est, nous sortons en fait d'une logique de dispositif scolaire, donc nous rentrons dans un dispositif de parcours de l'enfant, c'est-à-dire qu'on va réunir tout l'environnement qui aujourd'hui est autour de l'enfant et le mettre autour d'une table pour qu'on puisse apporter des solutions, donc ça va effectivement des parents, parce que les parents sont pleinement intégrés au dispositif, bien évidemment l'Education nationale parce qu'ils sont au coeur aussi de l'action scolaire, et puis les associations qui peuvent intervenir soit au moment d'un décrochage scolaire, soit même intervenir si l'environnement familial ne prête pas à la poursuite scolaire de l'enfant, donc ça peut être des violences intrafamiliales, en tout cas toutes les associations qui oeuvrent aujourd'hui pour soutenir les enfants, quelles que soient leurs difficultés, et donc les « Cités éducatives » c'est un dispositif qui prend en charge l'enfant dès la maternelle, dès ses 3 ans, jusqu'à l'insertion professionnelle, donc quel que soit l'âge à laquelle intervient cette insertion, mais c'est au maximum à 25 ans.

ORIANE MANCINI
Il y en a combien aujourd'hui de « Cités éducatives » ?

NADIA HAI
Aujourd'hui il y en a 80, qui ont été labellisées, qui ont montré d'ailleurs leur efficacité pendant le confinement, puisque la distribution des tablettes a pu se faire dans de très bonnes conditions, l'accompagnement scolaire également, puisque les associations, et les parents, et l'école, savent travailler en mode « projet », comme on l'appelle aujourd'hui, et donc en 2021 nous en aurons 40, puisque ça a été voté hier à l'Assemblée nationale, je ne doute pas que ce sera voté au Sénat, donc 40 cités supplémentaires, donc nous porterons à 120 en 2021 le nombre de ces cités.

ORIANE MANCINI
Un mot pour finir sur l'éducation, puisqu'on imagine que vous travaillez beaucoup avec Jean-Michel BLANQUER évidemment, sur ces sujets, comment vous aidez les professeurs qui sont dans ces écoles, dans ces quartiers prioritaires, qui sont en plus, souvent, les jeunes professeurs qui sont envoyés là-bas au début de leur carrière ?

NADIA HAI
Alors déjà, la majorité du corps enseignant est très content d'intervenir dans ces quartiers et d'enseigner dans ces quartiers parce qu'il y a vraiment le sens de l'utilité générale. Ensuite il y a effectivement certains qui peuvent être en difficulté, eh bien c'est tout l'intérêt de faire travailler tout le monde ensemble pour pouvoir se soutenir mutuellement dans des situations qui peuvent paraître compliquées. Vous savez, quand on est face à une situation d'un élève, soit en échec, soit en grande précarité, eh bien on est parfois démuni face à cette situation, l'idée des « Cités éducatives » c'est que tout le monde puisse intervenir pour raccrocher cet élève au système scolaire, effectivement je travaille beaucoup avec Jean-Michel BLANQUER, avec Nathalie ELIMAS, qui est secrétaire générale à l'Education prioritaire, pour que nous fassions en sorte que, aucun enfant ne soit laissé au bord de la route, et que chacun puisse poursuivre sa scolarité et trouver une solution de sortie.

ORIANE MANCINI
On va revenir à la crise sociale, Pascal.

PASCAL JALABERT
Oui, pour revenir aussi aux quartiers. Ce week-end mes collègues du Progrès ont fait état de situations très tendues, voire d'émeutes, dans le département de l'Ain, Bourg-en-Bresse, Oyonnax, qui sont des cités de moyenne importance. Vous craignez une flambée de violence, et comment vous expliquez que dans des petites villes comme ça il y ait ces tensions ?

NADIA HAI
Alors, je n'ai pas l'origine de la tension, mais en tout cas, tout ce qu'on peut constater aujourd'hui, c'est qu'effectivement la violence dans notre pays c'est quelque part banalisée, et a augmenté dans les violences, ce qu'on appelle les violences urbaines, ou des rixes entre gangs, donc là je pense qu'il ne faut absolument pas hésiter à intervenir avec la force, parce que, en tant que ministre de la Ville je suis extrêmement attachée à l'ordre républicain, à la sécurité, parce que les premières victimes de l'insécurité sont les habitants qui résident dans ces quartiers, donc je suis attachée à l'ordre, et il faut agir avec beaucoup de force pour ramener la sécurité et la sérénité dans les quartiers, et à côté de ça réfléchir effectivement aux maux de ces quartiers et apporter une réponse très claire sur l'égalité des chances, nous avons parlé d'éducation, nous y mettons les moyens, nous pouvons parler aussi de l'insertion professionnelle, pour encore, une fois, raccrocher tous ces jeunes à un espoir et à une vie…

ORIANE MANCINI
On va en parler, mais est-ce que, vu le contexte social, la crise sociale, la crise économique, vous redoutez de nouvelles émeutes dans les banlieues ?

NADIA HAI
Nous sommes extrêmement attentifs à la situation dans les quartiers, je ne redoute pas les émeutes, parce que quand je vais dans des quartiers, je ne me sens pas en insécurité, je crois que notre système de sécurité tient, et surtout que les habitants aujourd'hui veulent une seule chose, c'est d'avoir, de pouvoir vivre sereinement, tranquillement, avec… et pouvoir subvenir à leurs besoins, donc là nous mettons effectivement tout ce qu'il faut, les moyens pour pouvoir les accompagner, appeler cette société d'émancipation pour tous. Maintenant, effectivement, il faut rester extrêmement vigilant sur les points de tension…

ORIANE MANCINI
Ça veut dire qu'il y a des signaux d'alarme qui remontent au ministère ?

NADIA HAI
Non, il n'y a pas de signaux particuliers d'alarme, maintenant c'est vrai qu'il y a une détresse dans notre pays, qui se fait de plus en plus ressentir par l'effet de la crise sanitaire qui a donné lieu à cette crise économique, et qui se transforme évidemment en crise sociale, donc là aussi il faut vraiment être très vigilant par rapport à ce qui se passe et apporter les réponses, si elles doivent être sécuritaires pour ramener l'ordre parce que les trafics augmentent, eh bien là je crois que mon collègue Gérald DARMANIN est à la tâche, sur la question d'offrir aussi un avenir et des perspectives aux habitants des quartiers, et aux jeunes en particulier, eh bien là c'est l'ensemble du gouvernement qui est à la tâche aussi.

ORIANE MANCINI
Et justement, puisque la réponse elle n'est pas que sécuritaire, elle est aussi sociale, puisqu'évidement il y a une crise sociale, comme partout en France, est-ce que le gouvernement en fait suffisamment pour aider ces quartiers populaires et leurs habitants ?

NADIA HAI
En tout cas nous le faisons avec beaucoup de détermination, encore une fois, et nous essayons d'apporter la réponse là où elle est, en tout cas là où le besoin s'en fait sentir. Les inégalités, vous savez, existent depuis maintenant des décennies, moi je suis une enfant des quartiers, j'y ai passé une très grande partie de ma vie, et les inégalités ne datent pas d'hier, et à chaque crise économique, ou crise sociale, nous voyons que ce sont les premiers territoires qui sont impactés, alors nous agissons sur plusieurs leviers. La question de l'emploi elle est essentielle, c'est la première des priorités, parce que nous savons que si les habitants ont un emploi, eh bien quelque part l'impact social est d'autant plus réduit, donc là aussi nous faisons beaucoup de choses pour maintenir les entreprises et donc maintenir l'emploi, le chômage partiel a eu cet effet aussi de maintenir à flot le revenu de nos concitoyens, et notamment aussi des ménages les plus fragiles, et à côté de ça, sur la question sociale, et donc répondre au chômage qui se profile pour ces habitants des quartiers, eh bien là aussi nous y répondons, avec Elisabeth BORNE, sur différentes thématiques, sur les jeunes nous avons le plan « Un jeune, une solution », sur les habitants des quartiers qui sont éloignés de l'emploi nous essayons de travailler sur des « Cités de l'emploi », à l'instar de ce qui a été fait sur les « Cités éducatives », donc là aussi c'est le ministère de la Ville qui est en pilote sur ce projet, pour que là aussi chaque habitant puisse trouver une solution, qu'on rentre dans un dispositif de parcours de l'habitant, et qu'on puisse apporter une solution, encore une fois de sortie….

ORIANE MANCINI
Une mise en place de prime aussi pour aider les entrepreneurs des quartiers notamment.

NADIA HAI
Exactement, tout à fait, alors ça c'est le deuxième volet, donc il y a le maintien de l'emploi, éviter le chômage, et puis il y a la question de l'entreprenariat et des chefs d'entreprise, j'ai annoncé il y a quelques jours, en plus de tous les dispositifs qui sont mis en place par Bruno LE MAIRE sur la question de l'accompagnement des chefs d'entreprise, j'ai instauré une prime de 1500 euros pour venir abonder les trésoreries des entrepreneurs de nos quartiers, nous avons pour ambition d'en viser 5000 d'entre eux, donc ça aussi c'est une mesure…

ORIANE MANCINI
Et comment on fait pour en bénéficier, pour ceux qui nous regardent et qui pourraient en bénéficier ?

NADIA HAI
Il y a différents réseaux d'accompagnement des entreprises, je pense notamment à l'ADIE, mais pas que, donc il y a des réseaux d'accompagnement aux entreprises, donc ce sont eux qui seront chargés de distribuer cette prime en fonction des entreprises qui sont accompagnées. Je tiens juste à rappeler que celles qui ne le sont pas, mais qui désirent être accompagnées, pourront aussi prétendre à cette prime.

ORIANE MANCINI
On va parler du budget, puisque le budget est actuellement examiné au Parlement, c'est un budget qui est en hausse, en hausse de 10%, le budget de la ville ça concerne plus de 1500 quartiers prioritaires, ça concerne plus de 5 millions d'habitants, ce n'est pas rien, en hausse de plus de 10%, qui vont aller vers où, qu'elles seront les priorités cette année ?

NADIA HAI
Alors, on a parlé des "Cités éducatives", donc 17 millions pour les "Cités éducatives" pour permettre la labellisation des 40 prochaines cités, il y a aussi 10 millions qui seront consacrés, toujours sur le volet emploi, sur les postes adultes-relais, les postes adultes-relais ce sont souvent des médiateurs sociaux ou des salariés des associations, donc c'est une façon aussi d'accompagner les associations, mais sur le volet cette fois-ci humain, les postes adultes-relais, pour ceux qui ne le savent pas, c'est une prise en charge de 20.000 euros du revenu de la personne qui est embauchée, et donc nous avons pour ambition d'embaucher 1500 postes adultes-relais sur l'année 2021, donc 10 millions seront consacrés. 4 millions pour les établissements d'insertion professionnelle, donc ça aussi ce sont en général les publics assez éloignés, les jeunes assez éloignés du milieu scolaire, on essaye de les raccrocher, donc le ministère de la Ville portera à 32 millions, avec cette augmentation de 4 millions, sa participation. Et enfin le volet renouvellement urbain, puisque l'Etat souhaite maintenir sa participation sur le volet de l'ANRU, donc de la rénovation urbaine…

ORIANE MANCINI
L'Agence nationale de la rénovation urbaine.

NADIA HAI
Exactement, même si effectivement la trésorerie de l'Agence permet de pouvoir faire face aux appels de fonds, nous avons souhaité que l'Etat reste bien évidemment engagé dans les travaux de rénovation urbaine.

ORIANE MANCINI
On va parler de cette rénovation urbaine, Pascal.

PASCAL JALABERT
Oui, cette rénovation urbaine, est-ce que ça va passer de nouveau par des destructions d'immeubles, des reconstructions, et puis des brassages de populations, comment y parvenir, on a tendance à dire que tous ces quartiers sont ghettoïsés, comment brasser davantage et comment rendre l'habitat « plus agréable » ?

NADIA HAI
Alors, pour créer de la mixité sociale, puisque c'est ça dont il est question, parce que c'est vrai que là aussi on a vu depuis… enfin pour faire face aussi à un afflux de vagues migratoires, il y a eu la création de ces cités et de ces quartiers qui ont cumulé aussi une certaine détresse et une certaine précarité, et ce que nous avons observé ces dernières années c'est qu'à chaque famille qui arrivait à s'en sortir et quittait le quartier, c'était une famille beaucoup plus pauvre qui venait occuper le logement, c'est ce qui fait qu'on a créé cette ghettoïsation. Donc, je crois qu'aujourd'hui on un très bel outil pour créer cette mixité sociale, c'est évidemment l'ANRU, l'Agence nationale de la rénovation urbaine, qui quand elle démolit, et quand elle est en phase de reconstruction, crée effectivement cette mixité en développant le type de logements, donc ça je pense que c'est un très bel outil. Et on peut agir, sur la question de la démolition-construction, on peut également agir sur la politique d'attribution, où là effectivement on peut, sur des logements sociaux, intégrer des ménages qui ont des revenus un peu plus importants, et puis à l'inverse, les ménages qui y sont un peu plus précaires, peut-être les intégrer dans des logements de type intermédiaires pour qu'on créé ici de la mixité. Donc, deux modes d'intervention, politique d'offre, donc construction-démolition, et puis une politique d'attribution des logements.

ORIANE MANCINI
Au début de l'année Jean-Louis BORLOO était auditionné ici au Sénat, notamment sur son plan qu'il vous a présenté, vous allez nous dire ce qu'il va devenir, et Jean-Louis BORLOO il jugeait que la politique de rénovation urbaine était totalement arrêtée. Qu'est ce que vous dites, est-ce que vous dites que le gouvernement a trop tardé à la mettre en place cette politique de rénovation urbaine ?

NADIA HAI
Alors, il a juste publié de préciser que nous passions du premier programme de renouvellement urbain au deuxième programme de renouvellement urbain, donc, forcément, quand vous passez de l'un à l'autre, il y a les dispositifs législatifs, le temps que tout se mette en place, mais la réalité des choses c'est qu'aujourd'hui il y a plus de 300 dossiers qui ont été validés, plus de 10 milliards qui ont été engagés, et plus de 200 chantiers qui ont commencé. Donc, la rénovation urbaine n'est plus du tout à l'arrêt, bien au contraire, quand nous sommes arrivés en responsabilité nous avons doublé l'engagement financier pour les opérations de renouvellement urbain, nous sommes passés de 5 milliards à 10 milliards d'euros, donc on a montré effectivement notre volonté, notre capacité à redémarrer ce programme, auquel nous croyons beaucoup, pour les raisons qu'on vient d'évoquer à l'instant sur la question de la mixité…

ORIANE MANCINI
Et sur son plan, sur son plan de Jean-Louis BORLOO, qu'est-ce que vous allez en faire, est-ce que c'est définitivement à la poubelle, ou est-ce que vous dites non, on va faire un suivi…

NADIA HAI
Non, non, pas du tout…

ORIANE MANCINI
On va faire quelque chose avec ce plan ?

NADIA HAI
Ah mais complètement, quand on parle des « Cités éducatives » c'est très concrètement tiré du rapport Borloo. Nous sommes de créer, avec Cédric O, les Ecoles du numérique dans les quartiers, c'est ce qui correspond aux Campus du numérique du plan Borloo, nous avons en fait 85% aujourd'hui du plan Borloo qui est, soit engagé, soit déjà terminé. Donc, ce que nous avons fait, en fait, en 2018, à la remise de son rapport, nous avons créé une feuille de route, de mobilisation des habitants des quartiers, dans laquelle nous reprenons évidemment la quasi-totalité des recommandations du rapport Borloo, plus celles qui ont été enrichies également d'autres rapports qui ont été réalisés. Donc, le rapport Borloo a été intégré dans cette feuille de route, et aujourd'hui nous y travaillons, et je vais installer dans quelques jours un comité de suivi et d'évaluation de l'ensemble des mesures que nous avons portées, puisque c'est un plan interministériel et qui mobilise l'ensemble du gouvernement.

ORIANE MANCINI
Il est composé de qui ce comité de suivi ?

NADIA HAI
Alors, il y aura des élus, donc des parlementaires et des maires, il y aura des membres du Conseil présidentiel des villes, il y aura des citoyens, il y aura des présidents d'associations, donc nous y retrouverons en fait l'ensemble de la population qui oeuvre au quotidien dans…

ORIANE MANCINI
Et présidé par qui ?

NADIA HAI
Alors aujourd'hui, il sera certainement présidé par un parlementaire et un membre du Conseil présidentiel des villes.

PASCAL JALABERT
Nadia HAI, ces quartiers ont été confrontés, et sont confrontés, à la montée de l'islam politique, diriez-vous, comme certains de vos collègues, que certains élus locaux, certains partis politiques, ont été trop laxistes, voire complaisants, et comment gagner cette bataille, comment la République peut gagner cette bataille ?

NADIA HAI
Je pense qu'il faut rester extrêmement humble sur la lutte que nous avons à mener sur l'islamisme et sur toutes formes de séparatisme, c'est des situations qui sont très complexes, c'est une idéologie, aujourd'hui, qui parfois conduit à une idéologie mortifère, puisque nous avons vu malheureusement ces dramatiques événements que nous avons connus, et donc on doit lutter par différents leviers. Je pense que le discours du président de la République aux Mureaux, je pense, a montré le cap, et il a été salué par l'ensemble de la classe politique, je tiens à le préciser, que ça aille des communistes jusqu'aux républicains, parce que, là aussi, il agit avec détermination sur deux sujets principaux. Le premier c'est la lutte contre le séparatisme islamiste parce qu'il faut lutter avec beaucoup de force et donc y mettre les moyens…

ORIANE MANCINI
Il y aura des propositions de votre ministère dans ce projet de loi ?

NADIA HAI
Nous avons été associés effectivement au projet de loi, évidemment.

ORIANE MANCINI
Dans quels domaines plus particulièrement ?

NADIA HAI
Alors sur différents domaines, c'était assez ouvert sur la façon dont on pouvait participer…

PASCAL JALABERT
Est-ce qu'avant de donner des subventions à certaines associations il faut aller regarder qui est derrière ?

NADIA HAI
Mais ça c'est déjà le cas, mais juste pour finir, effectivement il y a lutter contre les séparatismes, donc le financement, l'éducation nationale, donc tout le monde a été associé effectivement pour lutter contre l'idéologie, contre ce qui fait en fait le nid des séparatistes, et tout le volet égalité des chances pour pouvoir justement occuper l'espace et ne pas laisser ces séparatistes prendre le dessus et que la République revienne avec force. Il y a des associations effectivement aujourd'hui…

ORIANE MANCINI
Ça veut dire, quand vous dites la République revienne avec force, ça veut dire que dans certains quartiers la République elle n'est plus là ?

NADIA HAI
Oui, oui. Vous savez, quand vous n'avez plus beaucoup de services publics, voire pas du tout, quand vous avez, dans certaines communes, et notamment celles du Front national, enfin du Rassemblement national, où les subventions, justement des associations, ont complètement fondu comme neige au soleil, eh bien là aussi on se dit que la République s'est désengagée, et donc soit par des faits effectivement des services publics, soit par des faits d'élus locaux qui n'ont pas justement mené ce qu'il fallait en termes de politique pour accompagner des familles et ceux qui pouvaient se retrouver en détresse, et là où on a observé ce recul, eh bien les idées séparatistes ont eu le temps d'acheminer et d'occuper l'espace, et donc ce qu'il faut c'est aujourd'hui récupérer cet espace pour dire que la République aime tous ses enfants et donc elle investit ce qu'il faut pour les récupérer, surtout ne pas les laisser en proie à ces séparatistes. Sur la question des associations, il y a effectivement certaines associations qui ne devraient pas être financées par la République, en tout cas tout ce que nous faisons, et dans mon ministère je suis extrêmement regardante sur les associations qui sont financées par mon ministère, d'ailleurs dans les contrats de subventions il y a un article qui permet et qui nous donne la possibilité de nous désengager, donc de dénoncer la subvention, pour toutes celles qui ne respectent pas les valeurs de la République et la laïcité, à tel point que nous avons également une formation sur les valeurs de la République et la laïcité avec le centre national, la fonction des agents territoriaux, donc financée par ce centre-là, financé également par le ministère de la Ville, eh bien sur la partie financement du ministère de la Ville j'ai annoncé il y a quelques jours le doublement du financement pour permettre de former le maximum de personnes aujourd'hui, que ce soit du milieu associatif, des élus, beaucoup d'élus m'ont demandé à participer à cette formation, pour pouvoir faire face justement à des situations compliquées, soit où le vivre ensemble est mis à mal, soit où les valeurs de la République et la laïcité sont mis à mal, eh bien c'est de pouvoir outiller tous ces agents pour y répondre de manière très, sûrs d'eux et avec les outils dont ils ont besoin pour faire face à ces situations.

ORIANE MANCINI
Et dernière question sur la manière dont vous travaillez avec les collectivités, Pascal.

PASCAL JALABERT
Comment faites-vous pour contractualiser les collectivités, que ce soit avec les associations, ou dans le travail quotidien ?

NADIA HAI
Alors moi je suis en relation permanente avec les maires, et notamment les maires de banlieue, que ce soit l'association Ville et Banlieue, que ce soit tous les maires qui ont participé au Pacte de Dijon, ou même nous avons intégré d'autres maires qui n'étaient pas dans les discussions jusque-là, donc je les vois une fois par semaine, aujourd'hui en visio dans le cadre du confinement, et sinon nus nous réunissions une fois par mois, voire une fois toutes les trois semaines, donc j'ai vraiment une concertation permanente avec les élus, quelle que soit leur couleur politique, pour essayer justement d'avoir, enfin pour avoir ces remontées de terrain et pour pouvoir prendre des décisions qui s'imposent. Beaucoup de décisions que j'ai prises, notamment la reconduite de « Quartiers d'automne », c'était à la suite d'une concertation avec les maires, une concertation avec le milieu associatif, là aussi c'est une fois tous les 15 jours avec ce milieu associatif, et pendant le confinement c'est une fois toutes les semaines, et avec les parlementaires également, qui sont pleinement associés aussi à ces concertations, parce que, là aussi, pour pouvoir prendre des décisions qui soient efficaces je pense que la première des règles c'est la concertation, c'est les remontées de terrain, pour que, une, nos décisions soient prises et qu'elles correspondent à une réalité, et que deux elles soient aussi bien comprises par l'ensemble de nos élus sur le terrain.

ORIANE MANCINI
Et merci beaucoup, merci Nadia HAI d'avoir été avec nous ce matin.

NADIA HAI
Merci à vous.

ORIANE MANCINI
Merci Pascal JALABERT.