Texte intégral
DAÏC AUDOUIT
Bonjour Madame.
BRIGITTE BOURGUIGNON
Bonjour.
DAÏC AUDOUIT
Merci d'être avec nous. Est-ce que le gouvernement français est en train de rater la campagne de vaccination contre la Covid-19 en France ?
BRIGITTE BOURGUIGNON
Eh bien écoutez, non, bien sûr, elle vient de commencer cette campagne de vaccination, elle commence vraiment cette semaine, nous avons d'abord eu une semaine plus symbolique qu'un démarrage réel, puisque ça n'était prévu d'ailleurs dans le calendrier qu'à partir de maintenant, je pense que les établissements auxquels s'adresse d'abord la première vague de vaccinations sont désormais prêts, ils ont le guide de vaccination qui leur est arrivé avant Noël, et maintenant, je crois qu'on peut se dire que la logistique suivra.
DAÏC AUDOUIT
Vous dites que c'était le calendrier prévu, mais on a cru comprendre qu'Emmanuel MACRON a poussé quand même un cri de colère contre les lenteurs injustifiées, donc c'est que tout n'était pas bien quand même ?
BRIGITTE BOURGUIGNON
Il est dans son rôle, lorsqu'il dit que rien ne doit se mettre en travers de cette route de la campagne de vaccination en cours.
DAÏC AUDOUIT
Mais c'est un constat que ça n'allait pas bien quand même ?
BRIGITTE BOURGUIGNON
Il veut que ça accélère, et l'accélération est en train de se produire d'ailleurs.
DAÏC AUDOUIT
Mais est-ce qu'il ne doit pas être en colère contre lui-même, parce qu'il n'a pas découvert, là, cette campagne de vaccination, il en est à l'origine ?
BRIGITTE BOURGUIGNON
Bien sûr, et le ministre de la Santé d'ailleurs a tout de suite fait preuve de réactivité, je pense qu'on peut s'en féliciter, je pense qu'il y a de la réactivité, il y a de l'adaptabilité aussi, et aujourd'hui, nous avons élargi, là, le 2 janvier, aux personnels soignants d'ailleurs de plus de 50 ans ou qui présentent des pathologies susceptibles d'être dangereuses pour ce virus. Donc je pense que la réactivité est au rendez-vous et que maintenant, cette campagne commence.
DAÏC AUDOUIT
Est-ce que ce n'est pas l'aveu que vous avez été trop prudent pour notamment ménager les anti-vaccins ou les sceptiques, et que c'est eux qui ont imprimé le ton de la campagne de communication autour de cette campagne de vaccination ?
BRIGITTE BOURGUIGNON
Je pense que, qu'est-ce qu'on aurait dit d'ailleurs si nous n'étions pas prudents, je pense que le pays a fait preuve effectivement de prudence, nous, on aime la sécurité, c'est le difficile équilibre qu'il faut avoir entre une sécurité et l'efficacité ; aujourd'hui, nous sommes dans cet équilibre difficile parfois à réaliser, et je crois que nous serons au rendez-vous, chaque citoyen français peut être assuré qu'il sera vacciné de manière gratuite et de façon éclairée.
DAÏC AUDOUIT
Oui, mais la question, ce n'est pas chaque citoyen français, c'est à quel moment, or on voit qu'il y a une pression pour que ça soit le plus rapidement possible, notamment des 40 % de Français qui veulent se faire vacciner, est-ce que l'accélération qui commence aujourd'hui, c'est une légère inflexion, ou elle est telle que c'est un changement de doctrine et de stratégie, et on va vers une vaccination de masse qui ne dit pas son nom ?
BRIGITTE BOURGUIGNON
Pour l'instant, le choix stratégique qui a été fait, qui a été recommandé par la Haute autorité de santé, vous le savez, et le Conseil national d'éthique, était de commencer par les personnes les plus vulnérables en établissement, c'est ce choix stratégique qui continue d'être respecté, et qui va vous démontrer, cela concerne déjà un million de personnes dans tous ces établissements et donc cette première phase…
DAÏC AUDOUIT
D'ici la fin du mois…
BRIGITTE BOURGUIGNON
D'ici la fin du mois, et 14 millions ensuite…
DAÏC AUDOUIT
Sauf que quand cette stratégie a été établie, il n'y avait pas le virus mutant, anglais qui va arriver en France, il y a déjà quelques cas, qui va peut-être se développer, et qui est plus contagieux, et donc plus dangereux. Il y a une course contre la montre qui s'engage…
BRIGITTE BOURGUIGNON
Alors, la course contre la montre pour moi n'est pas de taper sur le gouvernement en ce moment, mais serait plutôt de convaincre les Français de l'utilité du vaccin, et je crois qu'on devrait plutôt s'employer dans cette période où chacun devrait avoir un peu d'humilité et se dire que nous sommes devant un phénomène mondial, que d'autres pays se trouvent par exemple à court de vaccins aujourd'hui, tout le monde devrait se dire que cette stratégie, d'ailleurs, les Français, dans leur grande raison, ont donné raison au gouvernement, on sait très bien que cette campagne de vaccination va se dérouler sur plusieurs semaines et plusieurs mois.
DAÏC AUDOUIT
Sondage ODOXA pour France Info, 53 % des Français en effet soutiennent la politique du gouvernement, des questions qui ont été posées, il y a quelques jours déjà. Mais néanmoins, est-ce qu'il faut lutter contre ce virus mutant, il faut absolument vacciner tout le monde maintenant ?
BRIGITTE BOURGUIGNON
Alors, ça, c'est une…
DAÏC AUDOUIT
C'est ça le débat en ce moment…
BRIGITTE BOURGUIGNON
Bien sûr, je pense que tout le monde a envie d'en finir avec cette page, et tout le monde a envie d'en finir avec ce virus, rien ne démontre aujourd'hui que le vaccin vous protégera de tout, il faudra continuer à avoir les gestes barrières et les réflexes que nous avons aujourd'hui adoptés en grande majorité chez les Français, avec sagesse, donc je crois qu'il ne faut pas tout mélanger, et que cette campagne de vaccination vient à point nommé, qu'elle va se dérouler telle qu'elle est prévue avec les choix stratégiques qui nous sont conseillés par les scientifiques, avec un scientifique qui mène un peu la danse aussi au milieu de ce Conseil de défense, et tout ça doit être respecté.
DAÏC AUDOUIT
Justement, ces scientifiques qui mènent la danse selon vous, ceux qui s'occupent des enfants sont assez inquiets aussi du fait que le virus, un nouveau, mutant, venant d'Angleterre, peut-être frappe plus facilement les enfants, le gouvernement français a maintenu la rentrée des classes aujourd'hui, contrairement à d'autres pays européens qui l'ont repoussée. Il prend des risques le gouvernement français ?
BRIGITTE BOURGUIGNON
Alors, jamais le gouvernement ne prendrait des risques avec les enfants. Ce que nous savons, ce problème s'était déjà posé au deuxième confinement, où la question s'était posée réellement de savoir si on maintenait, je crois qu'à l'heure actuelle…
DAÏC AUDOUIT
Oui, mais à l'époque du deuxième confinement, excusez-moi, Madame, il n'y avait pas ce virus mutant anglais, on sait qu'il est plus contagieux et qu'il touche a priori plus les enfants que le virus précédent.
BRIGITTE BOURGUIGNON
Je pense que les autorités sanitaires et le gouvernement seront extrêmement vigilants dans la phase qui va suivre, évidemment, et nous ne mettrons jamais en danger les enfants sciemment. Mais je pense aussi qu'il est vital que les enfants soient scolarisés, je pense que même socialement parlant, c'est très important qu'ils le soient, et que pour l'instant, rien ne démontrait le contraire, et que le second confinement, le problème s'était posé aussi avec ce virus qui mute, certes…
DAÏC AUDOUIT
Quel bilan on peut tirer de la première semaine de vaccination dans les EHPAD, qui est votre domaine, non pas de prédilection, mais que vous traitez, est-ce qu'il y a des enseignements à tirer, est-ce que ça a été bien en termes de logistique, est-ce qu'il n'y a pas eu de rupture, de vaccins gâchés, en raison de rupture du froid ?
BRIGITTE BOURGUIGNON
Non, il n'y a pas eu de… justement, c'est ce qu'on nous reproche, et à la fois, cette précision est très importante, pour éviter le gâchis, et donc, il y a un travail qui est finement mené avec les fédérations des EHPAD et des domiciles actuellement, nous avons une visioconférence chaque semaine avec ces fédérations qui ont eu ce guide de vaccination tout de suite, au moment des fêtes de Noël, vous comprenez bien que ça ne fait jamais qu'une semaine, et qu'on ne peut pas juger une campagne là-dessus, 606 EHPAD ont fait l'objet de… 606 patients, pardon, ont fait l'objet d'une vaccination, aujourd'hui, cette vague va continuer, et elle va concerner un million de personnes dans ces établissements. Le consentement que nous avons souhaité éclairé…
DAÏC AUDOUIT
Mais on dit beaucoup qu'il faut accélérer les procédures…
BRIGITTE BOURGUIGNON
Bien sûr, alors la procédure, moi, je ne veux pas entendre que c'est une procédure qui ralentisse quoi que ce soit, c'est tout à fait normal que des personnes âgées, qui sont des citoyens à part entière, soient informées à la fois des risques encourus parfois ou en tout cas, avec une pré-consultation vaccinale, qui est normale, et qui n'impose pas non plus de délai entre cette pré-consultation, si j'ose dire, et la vaccination, elle peut être simultanée, mais elle est tout à fait normale…
DAÏC AUDOUIT
Vous dites, c'est pour s'organiser, on prévoit…
BRIGITTE BOURGUIGNON
Bien sûr,
DAÏC AUDOUIT
Juste un mot parce que cette épidémie a révélé, on le savait déjà, mais la solitude des personnes âgées, quand l'épidémie se terminera, cette finitude continuera, c'est l'un de vos axes de votre ministère, vous lancez une étude, une consultation ?
BRIGITTE BOURGUIGNON
Oui, je lance une consultation et même un comité un peu stratégique national contre l'isolement, je pense que c'est un phénomène auquel on ne s'attache pas suffisamment dans notre société, on juge un peu une société finalement au regard qu'elle porte sur les personnes âgées et je pense que, ici, en France, on a tendance à les mettre un peu de côté, et elles vivent mal les choses, 6 millions de personnes sont isolées, et c'est à chaque crise sanitaire qu'on s'aperçoit qu'il y a des personnes isolées, qu'il faut recourir à des aides avec de la solidarité qui se met toujours en place, et c'est à saluer…
DAÏC AUDOUIT
Et qu'est-ce que vous pouvez proposer, en trente secondes, de nouveau par rapport à ce qui existe déjà ?
BRIGITTE BOURGUIGNON
Eh bien, il faut que ce comité recense un peu toutes les initiatives, essaie de les institutionnaliser, entre guillemets, parce que rien n'est mieux que la force associative parfois sur les territoires. Nous avons déjà travaillé avec la ministre Jacqueline GOURAULT, avec les associations d'élus pour faire un vade-mecum un peu à destination des collectivités, leur donner des idées pour lutter contre l'isolement, mais il faut travailler sur l'intergénérationnel, etc. Et c'est un beau chantier en tout cas.
DAÏC AUDOUIT
Oui, et rendez-vous en février pour ce chantier-là. Il y a un autre chantier, c'est la réforme de la dépendance, mais là, qui est repoussé à plus tard, qui est aussi votre chantier. Merci Madame d'avoir été avec nous, bonne journée à vous.
BRIGITTE BOURGUIGNON
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 janvier 2021