Interview de M. Gabriel Attal, secrétaire d'État, porte-parole du gouvernement, à France Inter le 16 novembre 2021, sur la situation sanitaire et sociale en Guadeloupe, la 5e vague de Covid et le rappel de vaccination.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Gabriel Attal - Secrétaire d'État, porte-parole du gouvernement

Média : France Inter

Texte intégral

NICOLAS DEMORAND
Bonjour et bienvenue Gabriel ATTAL.

GABRIEL ATTAL
Bonjour.

LEA SALAME
Bonjour.

NICOLAS DEMORAND
Avant d'en venir aux derniers chiffres de l'épidémie de Covid, un point sur la situation tendue en Guadeloupe où pendant la première journée d'une grève générale illimitée contre l'obligation vaccinale et le pass sanitaire, des échauffourées ont opposé pompiers grévistes et gendarmes, il y a deux blessés chez les pompiers. Redoutez-vous ce matin que la situation dégénère ?

GABRIEL ATTAL
En Guadeloupe on revient de loin, s'agissant de la vaccination. Je rappelle qu'il y a plusieurs mois on faisait état d'un gros problème, c'était une très faible vaccination, d'une manière générale, et chez les soignants en particulier. Il y a depuis le début certaines personnes qui instrumentalisent cette question et qui veulent empêcher, convaincre, des soignants notamment, de ne pas se faire vacciner. Il y a eu un énorme travail qui a été mené par nos services sur place, par les professionnels de santé, pour convaincre. Aujourd'hui on est à plus de 70% des soignants, en Guadeloupe, qui sont vaccinés, c'est un progrès colossal, et donc, qu'est-ce qui se passe ? La petite minorité qui essaye d'instrumentaliser cette situation, finalement elle augmente la pression, et face à ça il faut être très ferme, on n'acceptera pas qu'on empêche des personnes d'aller se faire soigner à l'hôpital, on n'acceptera pas qu'il y ait de la pression qui soit mises sur des personnes qui ont fait le choix, ou qui vont faire le choix, de se faire vacciner.

LEA SALAME
Ça veut dire quoi très ferme ?

GABRIEL ATTAL
Ça veut dire qu'il faut que nos services hospitaliers puissent fonctionner, qu'il faut que les personnes qui ont besoin d'être soignées soient soignées, qu'il faut que les personnes qui veulent être vaccinées puissent être vaccinées.

LEA SALAME
Mais redoutez-vous que le ras-le-bol qui s'exprime en Guadeloupe fasse tâche d'huile, qu'il arrive en métropole également ?

GABRIEL ATTAL
Non mais, moi, vous savez, je crois qu'il y avait surtout un ras-le-bol sur l'épidémie et ses conséquences, parce que c'est quand même très dur ce qui a été vécu, en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, et on est en train de sortir de cette situation La situation s'est améliorée, elle reste tendue, la vaccination a progressé, et c'est ça qu'il faut regarder, et moi je suis convaincu que la grande majorité des Guadeloupéens, comme la grande majorité des Français, ils veulent en sortir, et en sortir ça passe par la vaccination, et encore une fois on a des progrès en Guadeloupe.

NICOLAS DEMORAND
Venons-en donc à l'épidémie maintenant. Le taux d'incidence est un tout petit peu au-dessus de 100 depuis hier, plus de 12 000 nouveaux cas ont été enregistrés, hier toujours, dans le pays, on est loin des 50 000 cas quotidiens de l'Allemagne, mais est-ce qu'on en prend le chemin ?

GABRIEL ATTAL
On est en état d'alerte, il y a une incidence, un nombre de contaminations, qui a augmenté très fortement encore la dernière semaine, quasiment +50%, il y a encore une bonne dizaine de jours le virus prenait l'escalier, aujourd'hui il est dans l'ascenseur, on part de plus bas que nos voisins, on a une situation qui est moins dégradée que nos voisins, l'incidence elle est quatre fois moins importante qu'aux Pays-Bas, elle est neuf moins importante qu'en Autriche, mais évidemment qu'il y a une vigilance absolue. On a réussi à tenir cet été, on peut traverser l'hiver, grâce notamment à deux choses, la couverture vaccinale qui est très élevée, qui est plus élevée que chez nos voisins, on a une couverture vaccinale plus importante, de 12 points plus importante qu'en Autriche, plus importante qu'aux Pays-Bas, plus importante qu'en Allemagne, et parce qu'on a le pass sanitaire qu'on a mis en place très tôt, la plupart des pays européens nous ont suivi. Ça nous a permis de tenir cet été et on va pouvoir travers l'hiver précisément grâce à ces mesures et aux efforts des Français.

LEA SALAME
Mais la cinquième vague elle est là ou pas, pour vous, en France ?

GABRIEL ATTAL
Olivier VERAN a dit qu'on voyait ce qui ressemblait au début d'une cinquième vague, vous savez…

LEA SALAME
On y est encore, ou là maintenant avec…

GABRIEL ATTAL
Moi je laisse les scientifiques et le ministère de la Santé décréter la situation, ce qu'on voit c'est une augmentation très forte et très rapide, encore une fois entre 40 et 50% d'augmentation sur une semaine, c'est beaucoup.

LEA SALAME
Oui, mais sur les hospitalisations, Gabriel ATTAL…

GABRIEL ATTAL
Vous avez raison, sur les hospitalisations on voit une légère augmentation, certains parlent de frémissement, mais on n'est pas dans un déferlement de vague à l'hôpital. Pourquoi ? parce qu'on part de bas encore une fois, ensuite parce que grâce au vaccin, vous savez qu'il y a moins de contaminations qui se transforment en cas graves ou en décès, et c'est tant mieux, et donc la réalité c'est que ce qui sera le juge de paix, ce qui est le juge de paix, c'est la situation à l'hôpital, et donc il faut protéger l'hôpital.

LEA SALAME
Et aujourd'hui 7 000 malades sont hospitalisés pour Covid, à l'hôpital, 1 200 en réanimation, c'est maîtrisé…

GABRIEL ATTAL
Il y a une augmentation, de l'ordre de 6 à 10% sur une semaine, donc ça augmente, il ne faut pas attendre que ça explose pour s'inquiéter, il faut d'ores et déjà aujourd'hui faire très attention. Ça veut dire quoi ? ça veut dire dans notre quotidien les gestes barrières, le port du masque, l'aération, alors on va vers l'hiver, donc c'est sûr que c'est plus compliqué, mais un bon coup d'aération dans une salle de réunion ou dans son logement si on reçoit des gens, je peux vous dire, les scientifiques le disent, c'est très utile, et ça veut dire continuer sur la vaccination. On a érigé une muraille grâce au vaccin, il faut éviter qu'elle se fissure, et ça veut dire quoi qu'elle se fissure ? Ça veut dire que des personnes, notamment fragiles, âgées, qui sont vaccinées depuis plus de six mois, on sait que l'immunité conférée par le vaccin peut baisser si elles ne font pas un rappel de vaccination, et donc il faut qu'elles fassent leur rappel.

NICOLAS DEMORAND
Mais ce matin on vous entend rassurant, rassuré, Gabriel ATTAL, ou pas ?

GABRIEL ATTAL
On a des raisons d'être confiant, parce qu'on a, encore une fois…

NICOLAS DEMORAND
Vous ne sonnez pas l'alarme, donc vous êtes rassurant ?

GABRIEL ATTAL
J'ai dit qu'on était dans une situation d'alerte, quand même, parce qu'on regarde ce qui se passe chez nos voisins, ça peut aussi être un avertissement, mais, encore une fois, on a des voisins qui sont moins vaccinés que nous, qui, pour la plupart d'entre eux n'avaient pas vécu de premières vagues aussi fortes que les nôtres, donc qui avaient moins d'immunité naturelle, tout ça on le regarde évidemment, maintenant il ne faut pas attendre de se retrouver dans la même situation qu'eux pour réagir, donc il faut faire aujourd'hui très attention et il faut que les personnes qui sont éligibles au rappel de vaccination fassent leur rappel de vaccination. Je le redis, si vous avez plus de 65 ans, et à partir de décembre si vous avez plus de 50 ans, si vous avez une fragilité médicale qui vous rend plus exposé vis-à-vis du Covid, c'est-à-dire obésité, maladie cardiovasculaire, maladie respiratoire, cancer, il faut absolument faire votre rappel de vaccination.

LEA SALAME
Où on en est de la troisième dose depuis une semaine, depuis l'allocution d'Emmanuel MACRON sur les prises de rendez-vous ?

GABRIEL ATTAL
Aujourd'hui on est à quasiment 4,5 millions de personnes qui ont fait un rappel, depuis l'annonce de l'allocution du président de la République il y a plus de 810 000 personnes qui ont pris rendez-vous sur le site Doctolib, il y a d'autres moyens de prendre rendez-vous, donc c'est un critère, et donc ça progresse, elle est passée à la vitesse supérieure, la campagne de rappel, depuis l'allocution du président de la République, mais il faut poursuivre, il faut aller plus loin.

NICOLAS DEMORAND
Samedi soir sur France 2 vous avez dit que l'hypothèse d'un reconfinement ne pouvait pas être exclue, qu'elle était donc sur la table potentiellement, est-ce que vous le redite ce matin ?

GABRIEL ATTAL
Moi ce que je redis, ce que j'ai dit, ce que j'ai toujours dis, c'est que ce que m'ont appris 18 mois de crise sanitaire et de porte-parolat du gouvernement, c'est qu'il ne faut jamais rien exclure par principe. Maintenant, je vais vous le redire très clairement, il n'y a absolument aucun confinement qui est prévu aujourd'hui, ni de près, ni de loin, encore une fois parce qu'on a vu cet été…

LEA SALAME
Oui, parce que ça a mis le feu aux poudres votre déclaration samedi soir, c'est-à-dire que toute la journée ça a été le cas autrichien, c'est-à-dire un reconfinement uniquement des personnes non vaccinées est sur la table, un scénario de reconfinement est à l'examen, donc ce matin vous voulez, rassurer on va dire.

GABRIEL ATTAL
Moi ce que je considère comme étant ma mission de porte-parole c'est d'être transparent, c'est de dire les choses, moi je ne suis pas là pour raconter des histoires, donc ce que je dis c'est que, par définition, on n'exclut rien par principe, ce que je dis, ensuite, c'est qu'aujourd'hui il n'est pas prévu, ni de près, ni de loin, de reconfiner. Encore une fois, cet été on a eu des très hauts niveaux d'incidence et on a pu tenir la situation, même si ça a été difficile et éprouvant pour les soignants, à l'hôpital, grâce à la vaccination, mais pour ça il faut que l'immunité conférée par le vaccin se poursuive et donc que les Français éligibles fassent leur rappel de vaccination.

LEA SALAME
Ce qui s'est passé en Autriche, la décision de l'Autriche de ne reconfiner que les personnes non vaccinées, on pourrait l'étudier ? Xavier BERTRAND et Valérie PECRESSE, dimanche soir, ont dit qu'ils n'étaient pas contre cette option-là, est-ce que c'est quelque chose que vous excluez absolument ou non ?

GABRIEL ATTAL
D'abord moi j'entends ce qu'ils disent, on aurait aimé les entendre cet été quand on a mis en place le pass sanitaire et la vaccination obligatoire des soignants, on n'a pas entendu beaucoup de soutien, à l'époque, venant des oppositions. Ce que je dis c'est que depuis cet été la logique de nos mesures c'est de faire peser la contrainte sur les non vaccinés plutôt que sur les vaccinés, c'est quand même ça le pass sanitaire, la logique du pass sanitaire c'est de dire qu'on fait peser les contraintes sur ceux qui ont fait le choix de ne pas se faire vacciner. On est les premiers à l'avoir fait, on a d'ailleurs été critiqués par une partie des oppositions à l'époque, qu'est-ce qu'on constate depuis ? Que l'essentiel des pays qui nous entourent nous ont suivis, ils ont adopté cette mesure, et si on est dans une situation, aujourd'hui, moins dégradée que nos voisins, c'est parce que très tôt le président de la République a eu le courage de prendre cette décision, de prendre cette mesure, ce qui nous a permis de contrôler les choses.

NICOLAS DEMORAND
Gabriel ATTAL, à partir du 15 décembre le pass sanitaire, vous l'avez dit, sera donc conditionné à la troisième dose pour les plus de 65 ans et les populations que vous avez décrites, et pour les autres, est-ce que vous allez étendre cette conditionnalité à d'autres classes d'âge ?

GABRIEL ATTAL
D'abord, à partir du mois de décembre, ceux qui ont plus de 50 ans peuvent faire leur rappel, on attend l'avis de la Haute autorité de santé, mais a priori c'est ce qui se fera, il y aurait une logique à ce que les personnes pour qui le rappel est ouvert, à partir d'un certain moment, voient aussi cette troisième dose, ce rappel vaccinal, intégré au pass sanitaire, ce serait la logique…

NICOLAS DEMORAND
Quand ?

GABRIEL ATTAL
Je ne peux pas vous dire quand. On a toujours fonctionné en étapes, on a toujours dit d'abord on fait le choix de la responsabilité des Français, de la confiance dans leur responsabilité, et ensuite on passe à une phase d'incitation. Si on passe le 15 décembre à l'intégration de cette troisième dose dans le pass pour les plus de 65 ans, c'est parce que la campagne de rappel elle leur est ouverte quand même depuis début septembre, donc on passe à une nouvelle étape.

NICOLAS DEMORAND
Donc pour les plus de 50 ans ça va arriver ?

GABRIEL ATTAL
Ça démarre début décembre, il n'y a pas d'intégration dans le pass sanitaire, mais je vous le redis, il y aura une logique à ce qu'à partir d'un certain moment ça rentre dans le pass sanitaire.

NICOLAS DEMORAND
Au Royaume-Uni le Comité vaccin qui éclaire l'action du gouvernement recommande d'ouvrir la troisième dose aux plus de 40 ans, à quelle date ce sera le cas en France ?

GABRIEL ATTAL
Nous on se fonde aussi sur ce que nous disent les autorités sanitaires. Aujourd'hui il n'y a pas de recommandation qui nous dit il faut ouvrir à tout le monde, ou aux plus de 40 ans. Encore une fois, ce que nous montrent aujourd'hui les études scientifiques c'est que l'immunité conférée par le vaccin elle baisse au bout de six mois, surtout chez les personnes les plus fragiles, c'est-à-dire les plus âgées ou les personnes qui sont malades, et donc c'est vers elles qu'on dirige en priorité l'appel au rappel.

LEA SALAME
La fin de la gratuité des tests n'aura duré qu'un mois en Allemagne, d'octobre à novembre, si l'épidémie venait à reprendre de l'ampleur en France est-ce que vous reviendrez aussi sur la fin de la gratuité des tests, on est passé, juste pour donner un ordre d'idée, de 800 000 tests par jour en août quand ils étaient gratuits, à 300 000 aujourd'hui, est-ce qu'il faut revenir à ça ?

GABRIEL ATTAL
Ce n'est pas prévu aujourd'hui, encore une fois il y a une grande majorité des Français aujourd'hui qui ont accès aux tests pris en charge par la Sécurité sociale, puisqu'ils restent pris en charge par la Sécurité sociale, pour les personnes qui sont vaccinées, pour les personnes qui sont cas contact de cas positifs et pour les personnes qui ont une prescription médicale, ce qui est quand même assez large. Maintenant on a toujours été très clair, pour les personnes qui font le choix délibéré, en conscience, de ne pas se faire vacciner, il n'y a pas de raison que les Français, avec leurs impôts, financent des tests qui visent à aller au restaurant, qui visent à aller au concert, qui visent à aller au cinéma.

LEA SALAME
L'Autriche a réglé le problème en passant d'un pass sanitaire à un pass vaccinal, c'est-à-dire qu'on ne peut plus… est-ce que vous réfléchissez à cette option-là, de faire un pass vaccinal ? C'est-à-dire, vous allez au restaurant et il faut montrer que vous êtes vacciné, pas seulement vous avez un test négatif, ça ne marche plus.

GABRIEL ATTAL
Moi je vais vous refaire la même réponse générique que je fais toujours, c'est-à-dire que rien n'est exclu par principe, maintenant si votre question c'est, est-ce que c'est une piste sur laquelle on travaille, qui a été discutée en Conseil de défense ou dans les réunions, à ce stade non.

LEA SALAME
Dernière question, les Français doivent-ils s'inquiéter pour le réveillon et les fêtes de Noël, vont-ils passer les fêtes en famille ou il y a des options de jauge comme on l'a connu il y a 1 an ?

GABRIEL ATTAL
Aujourd'hui il n'y a pas de raison de penser l'inverse, encore une fois, moi je me souviens l'an dernier. D'abord ça montre aussi qu'on a progressé, l'an dernier, à cette période-là, on était confiné, on avait plusieurs dizaines de milliers de cas par jour, on avait 30 000 personnes à l'hôpital, effectivement se posait la question des fêtes, et d'ailleurs à l'époque, souvenez-vous, il y a beaucoup de personnes qui nous avaient dit "vous êtes irresponsables, le gouvernement, de laisser les Français aller passer les fêtes en famille", etc., et nous on avait tenu en disant "mais on fait confiance à la responsabilité des Français", et on a eu raison, parce qu'il n'y a pas eu de reprise épidémique, après les fêtes, comme certains nous le prédisaient. Donc, encore une fois, moi je crois que les Français ils ont fait beaucoup d'efforts, qu'ils connaissent maintenant ce virus, qu'ils savent comment il se transmet, qu'ils font très attention, notamment quand ils sont avec des personnes fragiles et vulnérables, et j'ai toute confiance aussi dans leur responsabilité dans les semaines et les mois qui viennent.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 17 novembre 2021