Interview de M. Roland Lescure, ministre chargé de l'industrie, à RTL le 28 octobre 2022, sur les aides de l'État aux entreprises et collectivités pour faire face à la hausse des prix de l'énergie.

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Média : RTL

Texte intégral

JEROME FLORIN
Bonjour Roland LESCURE.

ROLAND LESCURE
Bonjour.

JEROME FLORIN
Ministre délégué chargé de l’Industrie, merci d'être avec nous ce matin sur RTL.

ROLAND LESCURE
Merci à vous.

JEROME FLORIN
Le gouvernement débloque 12 milliards d'euros d'aides supplémentaires pour les entreprises et les collectivités pour les aider à faire face à l'envolée des prix de l'énergie, 150.000 entreprises sont aujourd'hui en danger de mort nous disait hier le patron de la CPME, la Confédération des petites et moyennes entreprises, qu'est-ce que vous leur dites ce matin à ces entreprises, elles sont sauvées ?

ROLAND LESCURE
Eh bien on fait tout pour en tout cas, on fait tout pour amortir ce choc. C’est un choc extrêmement fort, il n’y a pas de secret, si on ne dépendait pas du carbone, on n’aurait pas à faire face à ce choc, donc la priorité des priorités, à moyen terme, c'est quand même de décarboner notre industrie, mais c'est vrai qu'à court terme il y a le feu, il faut le reconnaître, il y a beaucoup d'entreprises qui font face à des factures qui explosent, fois 5, fois 10, et nous on amortit ce choc. On ne peut pas tout prendre, vous l'avez dit c'est 12 milliards de plus, l'Etat français il a déjà dépensé 50 milliards, donc on en rajoute 12, l'essentiel de ces 50 milliards c'était pour protéger les ménages et les toutes petites entreprises, qui elles ne sont pas concernées par les hausses, on met le paquet à la fois sur les PME et sur les grandes entreprises, et sur les entreprises de taille intermédiaire, en fait on met le paquet pour tout le monde.

JEROME FLORIN
« Amortisseur », vous l'avez dit, c’est le nom du dispositif, " Amortisseur électricité " pour les TPE, les PME, qui ne bénéficient pas du bouclier tarifaire, l'Etat va prendre en charge une partie de la facture, combien, en fonction de quoi, ça va marcher comment, est-ce que ces entreprises devront faire des démarches pour avoir accès à ce dispositif ?

ROLAND LESCURE
Oui, mais ça va être très simple. Donc, il y a deux systèmes, un système pour l'électricité TPE-PME, c’est un airbag, qui permet d'amortir le choc, aujourd'hui, quand vous êtes une PME, un boulanger par exemple, vous avez une facture de 100, il y en a 50 qui est à prix coûtant EDF, 42 euros, il y en a 50 qui sont au prix de marché, eh bien ces 50-là on les coupe en deux, on garantit la moitié de cette facture au prix de marché à à peu près 300 euros, donc c’est plus de 40, mais c'est beaucoup moins que le prix de marché aujourd'hui, donc on amortit le choc, ils vont en payer 25% prix de marché, nous allons en payer 25%, à peu près 300 euros, ils vont continuer à en payer 50% à un prix très peu cher, 40 euros.

JEROME FLORIN
Et ça se fera automatiquement ?

ROLAND LESCURE
Oui, alors ça se fera sur les factures énergétiques, donc ça ce sera très simple, ce sont les distributeurs énergétiques qui vont, je dirais prendre la facture, qui vont nous la renvoyer et qui mettront ça directement sur la facture du client. Pour le gaz, et pour les grandes entreprises, là on fait du cas par cas, c'est un guichet, donc il y aura un site Internet, là aussi très simple, sur le site des impôts, DGFIP.FR, les entreprises le connaissent parce que c'est le site qu'ils ont utilisé pendant la Covid, vous mettrez vos factures, en gros, si votre facture a beaucoup augmenté, on en prendra une partie directement, et on fera des acomptes, ça c’est très important.

JEROME FLORIN
Et là ça sera du cas par cas, situation par situation, entreprise par entreprise.

ROLAND LESCURE
Oui, et ça va concerner des dizaines de milliers d’entreprises, évidemment, mais aujourd'hui il y a des entreprises dont la facture n'a pas beaucoup augmenté parce qu'elles sont couvertes, il y a des entreprises qui tout simplement consomment peu de gaz, il y a des entreprises aussi, il faut le savoir, on le sait quand on fait nos courses, l'inflation monte, il y a des entreprises qui augmentent leurs prix, donc qui peuvent passer la hausse de la facture dans leurs prix de vente, donc on doit tenir compte des entreprises au cas par cas, mais on le fait de manière extrêmement industrielle, c’est le cas de le dire.

JEROME FLORIN
Est-ce que c’est un plan qui est suffisant, parce que vous parliez des boulangers, écoutez ce boulanger parisien qu'a rencontré notre reporter Nathan BOCARD, il s'appelle Lionel BONNAMY, il a 10 salariés et il a fait les comptes.

(…)

JEROME FLORIN
Il va y avoir de la casse ?

ROLAND LESCURE
En tout cas je comprends qu’il ne soit pas content, si vous voulez, on ne peut pas tout amortir, on fait face à un choc historique, l'Etat en prend une part, donc je ne sais pas, sans l’Etat son 50.000 si ça aurait été 60 ou 70.000, c’est quand même l’ordre de grandeur de l’aide qu’on va faire, mais c'est vrai que, aujourd'hui, on fait face à un choc, on a une douloureuse de à peu près 100 milliards d'euros pour la France, on en prend la moitié, et malheureusement, les ménages un peu, les entreprises aussi, vont en prendre une partie. Le prix du pain augmente quand même, la baguette n’est pas à 2 euros, mais on sait quand on fait nos courses qu'aujourd'hui les pains spéciaux augmentent, etc., donc il y a un partage de la douleur, si je peux dire, on en prend une bonne part, les entreprises et les ménages malheureusement aussi.

JEROME FLORIN
Roland LESCURE, pourquoi annoncer ces aides maintenant, alors que ça fait des semaines, voire des mois, qu'on sait que ce mur des prix va arriver, est-ce que vous ne vous réveillez pas un peu tard quand même, je pense notamment à l'entreprise DURALEX, pour être très concret, le célèbre fabricant de verre, qui va arrêter sa production pendant quatre mois, est-ce qu'avec ces aides vous lui dites " non, vous reprendre finalement " ?

ROLAND LESCURE
Non, mais DURALEX c’est très particulier, moi j’étais chez DURALEX il y a trois semaines, DURALEX la facture c'était 12 millions d'euros l'année dernière, on sera à plus de 100 millions l'année prochaine, donc évidemment ils ne peuvent pas survivent, le verre ça consomme énormément de gaz, donc ce qu’on fait pour des entreprises comme DURALEX, là c'est vraiment du cas par cas, du sur-mesure, on les aide à passer l'hiver en les accompagnant, notamment du côté de l'activité partielle, parce que malheureusement ils doivent fermer leurs fours. Donc, pour les entreprises qui sont très très, ce qu'on appelle énergo-intensives, qui consomment beaucoup d'électricité, beaucoup de gaz, ce qu'on veut c'est préserver l'outil de travail, moi j'ai rencontré les organisations syndicales de DURALEX, les dirigeants, l'actionnaire, tout le monde est aligné pour que l’entreprise passe l'hiver, et puis une fois que cette mauvaise passe soit passée on puisse reprendre l'activité, on ne va pas doubler ou tripler le prix du verre, IKEA continue à les acheter pas très chers.

JEROME FLORIN
Oui, sauf que cette mauvaise passe on ne sait pas combien de temps elle va durer.

ROLAND LESCURE
Oui mais, quand même, on met le paquet pour s'assurer qu'elle ne dure pas trop longtemps, diplomatiquement, au niveau européen aussi, pour baisser les prix de l'énergie, c'est quand même ça qui compte.

JEROME FLORIN
Roland LESCURE, ministre déléguée chargé de l’Industrie, les crises que nous traversons ces dernières années ont révélé notre dépendance vis-à-vis de grands pays, comme la Chine par exemple, Jean CASTEX avait annoncé l'an dernier une Agence innovation santé, ça en est où ?

ROLAND LESCURE
Eh bien on l’installe aujourd'hui, on a recruté une directrice, Lise ALTER, avec Sylvie RETAILLEAU, ministre de la Recherche, et François BRAUN, ministre de la Santé, nous l'installons aujourd'hui. Aujourd'hui on importe 95 % de nos bio-médicaments, moi je veux changer ça, et ça on le fera par l'intelligence, par l'innovation, en coordonnant tous les efforts, recherche privée, recherche publique, les laboratoires, les universités, et on va le faire avec une vraie capitaine de l'équipe de France de l'innovation santé, on a aussi de l'argent, le président en juin 2021 a annoncé un grand plan, 7,5 milliards d’euros, on souhaite que la France… là encore on retrouve l'Histoire, si on veut être devant, si on veut réindustrialiser la France, ce sera par l'innovation, ce sera par l’intelligence, et notamment dans la santé.

JEROME FLORIN
Donc ce sera un guichet unique.

ROLAND LESCURE
Oui, qui va coordonner le travail de recherche pour que la France soit à la pointe de l'innovation dans la santé.

JEROME FLORIN
Roland LESCURE, ministre délégué chargé de l'Industrie, merci beaucoup.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 2 novembre 2022