Texte intégral
Madame la déléguée interministérielle, chère Alexandra,
Mesdames et Messieurs les directeurs et directrices d'administration centrale,
Madame la Haute fonctionnaire à l'égalité femmes-hommes,
Mesdames et messieurs les représentants des ministères,
Mesdames et Messieurs les présidents et représentants de fédération d'aide aux victimes,
d'associations d'aide aux victimes et de victimes,
Mesdames et Messieurs,
Le sujet du colloque que vous organisez aujourd'hui chère Alexandra, est un sujet difficile, douloureux et bien plus important qu'il n'y parait à première vue.
Je reçois en effet de très nombreux courriers de Françaises et de Français, désespérés de la manière dont on leur a annoncé le décès soudain d'un proche et désemparés face à la montagne administrative qu'ils ont à gravir à la suite de ce décès.
Très récemment, sur un plateau de télévision, le chef étoilé Yannick Alleno qui a connu le drame le plus immense d'un père, celui de perdre son fils, a exprimé lui aussi le désarroi qui l'avait saisi face aux démarches à accomplir à la suite du décès de son enfant.
Qu'il s'agisse d'attentats, d'accidents collectifs ou de toutes autres infractions graves, il ressort des témoignages recueillis auprès des proches des victimes auxquels un décès est annoncé que ce moment est crucial, comme ses suites immédiates.
Nous devons donc y apporter une attention extrême, tant les conséquences qui en découlent peuvent marquer toute l'existence. Il nous faut être attentif à ce qu'à la brutalité des faits, à savoir le décès d'un proche, ne s'ajoute pas la maladresse de l'annonce institutionnelle.
Force est de constater qu'il n'existait en France aucun texte régulant les modalités d'annonce des décès.
Il était donc plus que nécessaire d'harmoniser les pratiques développées dans les différents territoires et dans les différentes administrations, afin de tendre à un cadre général commun.
En octobre 2019, Madame Élisabeth PELSEZ, déléguée interministérielle à l'aide aux victimes remettait à la ministre Nicole Belloubet, le rapport "comment améliorer l'annonce des décès ?", qui établissait une liste de 18 recommandations visant à mieux accompagner les familles de proches endeuillés à la suite d'une mort brutale.
Lors du comité interministériel à l'aide aux victimes en date du 18 novembre 2019, le premier ministre confiait à la Délégation Interministérielle à l'aide aux victimes la mise en œuvre de ces recommandations.
De nombreux travaux interministériels se sont déployés afin de dessiner des pistes concrètes pour l'ensemble des préconisations.
Je tiens à remercier chaleureusement l'ensemble des autres ministères (santé, armées, intérieur et MEAE), ainsi que les partenaires institutionnels et associatifs qui se sont mobilisés pour faire aboutir ces travaux.
Ce travail se concrétise aujourd'hui par la circulaire que mes collègues ministres de l'intérieur, des affaires étrangères, des armées, de la santé, et moi-même avons tout juste signée et au sujet de laquelle vous échangez depuis ce matin.
Cette circulaire vise à encadrer, en contexte judiciaire, les conditions et les modalités d'annonce de décès aux familles et proches de victimes, ainsi que les différentes étapes procédurales auxquels ces derniers sont confrontés.
En effet, je l'ai dit, ces familles endeuillées rencontrent de multiples situations qui peuvent susciter de l'incompréhension, alors qu'elles sont déjà en grande souffrance. Le but de cette circulaire est d'anticiper le parcours de ces familles afin d'éviter toute difficultés et souffrance supplémentaire.
Où se trouve le corps de mon enfant ? Comment va se dérouler l'autopsie ? Quand ses affaires pourront-elles m'être rendues ? À qui puis-je poser toutes ces questions ?
La circulaire vient préciser qui sont les autorités en charge de l'annonce, et cela en fonction du contexte du décès.
Elle vise aussi à encadrer les différentes étapes qui suivent l'annonce, mais également à garantir le droit à l'information des familles et le respect dû au défunt : la répartition des rôles des différents professionnels doit par exemple être clairement énoncée afin que les familles n'aient pas à répéter ou à entendre plusieurs fois les mêmes informations. L'explication des délais et des procédures d'identification est également indispensable.
Elle veille également à assurer l'accompagnement des proches en lien avec les associations d'aide aux victimes, et ce, jusqu'à l'issue de la procédure judiciaire.
Elle intègre notamment les avancées les plus récentes, adoptées par voie de décrets :
- En matière de rapatriement du corps depuis l'étranger, dans le respect des dernières volontés du défunt,
- En matière de prise en charge au titre des frais de justice du nettoyage de scènes de crimes
L'objectif est clair : il s'agit de renforcer la prise en compte de l'intérêt des victimes dans le cadre de la procédure pénale.
Nous pouvons collectivement être satisfaits de ces évolutions positives en faveur des victimes et de leurs proches, sans jamais oublier qu'elles ont été rendues possible par l'expression de leurs souffrances intimes.
Aujourd'hui, il nous appartient de rester engagés pour veiller à la mise en œuvre de ces pratiques professionnelles, à la fois exigeantes mais indispensables pour les personnes subissant ces deuils.
Si chaque situation est singulière, les attentes sont communes et nous nous devions d'y répondre.
Pour cette raison, je suis très honoré de pouvoir aujourd'hui ouvrir cette après-midi d'échanges, au cours de laquelle vous évoquerez notamment les aspects médico-légaux, dont l'incidence est forte sur les familles concernées.
Cela me permet également de saluer l'engagement des acteurs de terrain, en première ligne dans ces situations éprouvantes et sensibles, y compris pour eux-mêmes. A ce titre, nous devrons rester particulièrement attentifs aux actions de formation des professionnels en charge de l'annonce et en contact avec les familles endeuillées.
C'est enfin pour moi l'occasion de vous présenter avec grand plaisir Madame Alexandra LOUIS, nouvelle déléguée interministérielle à l'aide aux victimes, qui a pris ses fonctions il y a maintenant un mois. j'ai eu l'occasion de travailler avec elle lorsqu'elle était députée notamment sur la loi du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l'inceste. Je connais son implication qui ne date pas d'hier pour aider les plus fragiles et notamment les victimes. Elle l'a démontré par les causes qu'elle a défendues avec acharnement à l'Assemblée.
Je sais qu'elle s'assurera de mettre la victime au cœur du processus judiciaire et des dispositifs d'accompagnement, et ce, notamment à travers la coordination des comités locaux d'aide aux victimes, instances essentielles à la déclinaison de la politique publique d'aide aux victimes au niveau territorial.
Pour elle, comme pour chacun d'entre vous, il s'agit de ne jamais perdre de vue, au cours de vos travaux, que vos actions doivent bénéficier directement et concrètement aux victimes.
Je remercie vivement les partenaires de ce colloque, au premier rang desquels la fédération France Victimes ainsi que le Centre National de Ressources et de Résilience.
Ce rassemblement est un temps fort, tout ensachant qu'il reste des pas à franchir afin de consolider et de pérenniser les améliorations en faveur de l'accompagnement des victimes.
Je comprends que vos échanges ce matin ont été fructueux, je suis persuadé qu'ils le seront tout autant, voire plus, cette après-midi et c'est en tous cas tout ce que je vous souhaite !
Source http://www.justice.gouv.fr, le 6 décembre 2022