Déclaration de M. Jean-Noël Barrot, ministre chargé de la transition numérique et des télécommunications, sur les aides de l'État face à l'augmentation de la facture énergétique, à l'Assemblée nationale le 11 janvier 2023.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Jean-Noël Barrot - Ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications

Circonstance : Questions à l'Assemblée nationale sur les oubliés du bouclier énergétique

Texte intégral

Mme la présidente.
L'ordre du jour appelle les questions sur les oubliés du bouclier énergétique. La conférence des présidents a fixé à deux minutes la durée maximale de chaque question et de chaque réponse.
La parole est à M. Vincent Rolland.

M. Vincent Rolland (LR).
L'augmentation folle des prix de l'électricité continue de toucher nos concitoyens et nos entreprises. Tous le savent, notre production d'électricité historiquement faible fait suite à l'abandon, depuis dix ans, de la filière nucléaire française. Résultat : alors que nous devrions exporter notre électricité à prix d'or, nous payons un prix absurde.

Mme Émilie Bonnivard.
Très bien !

M. Vincent Rolland.
Quoi qu'il en soit, nous sommes désormais confrontés aux conséquences de cette erreur stratégique et le bouclier énergétique demeure, à court et moyen termes, indispensable.
Or les principaux acteurs concernés déplorent la complexité et l'insuffisance des aides qui ont été instaurées, qu'il s'agisse des formalités administratives ou des seuils retenus pour en bénéficier. La situation devient même critique pour nos industries électro-intensives. Il est désormais plus rentable d'arrêter nos fours de fusion et d'importer des produits de Chine.

Mme Émilie Bonnivard.
Eh oui !

M. Vincent Rolland.
C'est navrant pour l'emploi, pour la situation économique et, vous en conviendrez, pour notre bilan carbone !
Comme autre exemple, j'évoquerai les spécificités du secteur de la montagne. L'État a adossé le bouclier tarifaire sur l'exercice 2021, mais pour les acteurs de ce secteur, il s'agit d'un non-sens, car la saison 2020-2021 a été blanche en raison de la fermeture des remontées mécaniques, qui a entraîné une forte baisse de l'activité. Et je ne parle même pas de cet hôtel de ma circonscription qui a réduit de moitié sa consommation énergétique et qui, en parallèle, a vu sa facture multipliée par 4,5 alors qu'il doit rembourser un PGE – prêt garanti par l'État.
Comptez-vous donc changer les règles d'octroi des aides pour les entreprises ?

Mme Émilie Bonnivard.
Très bien !

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.
S'agissant du prix de l'énergie en Europe, comme vous le savez, le Gouvernement est mobilisé pour découpler les prix du gaz et de l'électricité, afin que nous puissions enfin bénéficier de prix correspondant aux coûts de production de l'électricité dans notre pays.

Mme Émilie Bonnivard.
Enfin ! On a perdu six mois !

M. Jean-Pierre Vigier.
C'est une bonne chose !

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
En ce qui concerne la complexité des aides, vous savez également que le Gouvernement a beaucoup travaillé pour simplifier les dispositifs, de même que pour faciliter l'accès de tous les entrepreneurs à leurs interlocuteurs que sont les conseillers départementaux à la sortie de crise, qui peuvent désormais être joints sur un numéro fixe, ainsi qu'un numéro de portable. Cette mesure s'ajoute à toutes les autres destinées à faciliter l'accès des entreprises aux aides – qui couvrent l'ensemble du spectre économique –, avec une protection encore plus appuyée pour les plus petites structures.
Quant aux entreprises du secteur de la montagne, à l'instar de celles créées après 2021 et qui ne disposent donc pas d'un bilan pour cet exercice, ces points ont bien été identifiés. Le Gouvernement échange et entend progresser avec les fédérations professionnelles concernées.

Mme la présidente.
La parole est à Mme Valérie Bazin-Malgras.

Mme Valérie Bazin-Malgras (LR).
Je souhaite évidemment revenir sur les aides que vous avez instaurées pour accompagner nos boulangers, qui subissent une hausse exceptionnelle, voire spéculative, du coût de l'énergie – hausse qui causera la perte de nombre d'entre eux.
Vous avez simplifié et renforcé ces aides, mais elles demeurent insuffisantes pour de nombreux boulangers, que l'on peut dès lors compter parmi les oubliés du bouclier énergétique.
Nous avons tous des exemples dans nos circonscriptions.

M. Pierre Cordier.
Eh oui !

Mme Valérie Bazin-Malgras.
J'évoquerai pour ma part la boulangerie Aux saveurs des Écrevolles à Pont-Sainte-Marie, au nom de laquelle j'ai contacté vos services, et qui subit une double peine. En effet, la facture d'électricité de cet artisan a été multipliée par quatre, passant de 3 000 à 12 000 euros, tandis que, malchance pour lui, c'est en 2022 qu'il a, avec son épouse, repris avec audace et courage l'entreprise dont il était salarié.
Ainsi, malheureusement, ce couple paye plein pot leur audace d'entreprendre et leur courage de créer de la richesse et des emplois, étant donné qu'il n'est pas éligible à la totalité des aides que vous avez instaurées. Ces personnes ne savent pas comment elles pourront payer leurs factures, ou plutôt si, elles le savent : elles vont être contraintes de réduire leur activité pour rester sous la barre fatidique des 36 kilovoltampères et ainsi bénéficier du tarif réglementé,…

M. Vincent Rolland.
Eh oui !

Mme Valérie Bazin-Malgras.
…ou de vendre leurs baguettes de pain à plus de 4 euros pièce. Est-ce bien raisonnable ?
Mes questions sont simples : quand allez-vous supprimer le critère de l'année de référence pour soutenir les créateurs et repreneurs d'entreprises artisanales ? Quand allez-vous mettre en place un moyen législatif ou réglementaire afin que toutes les très petites entreprises (TPE) entrent dans les tarifs réglementés de l'énergie, même si elles dépassent 36 kilovoltampères de puissance ? Il y va de la survie de 30 % de nos boulangeries.

Mme Émilie Bonnivard.
Très bien !

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Il aurait été trop complexe et trop long d'inclure les TPE dépassant 36 kilovoltampères dans le dispositif du tarif réglementé. C'est la raison pour laquelle, vous le savez, nous avons conçu et mis en place celui de l'amortisseur. Malheureusement, ce dispositif n'est pas suffisant pour protéger nos boulangers. Vous avez cité le cas d'une entreprise de votre circonscription. Je pourrais citer celui d'une boulangerie située dans la circonscription dans laquelle j'ai été élu – la maison Bourgogne, à Viroflay – qui connaît des difficultés semblables. Le Gouvernement a donc annoncé la semaine dernière la mise en place d'un plafond garanti de 280 euros par mégawattheure en moyenne sur l'année 2023 pour les boulangers. Cette garantie leur sera offerte sous la forme d'une renégociation de leur contrat. Il est important que chacun prenne sa part et, en particulier, les énergéticiens.

Mme Valérie Bazin-Malgras.
Vous n'avez pas répondu à ma question sur l'année de référence.

Mme la présidente.
Chère collègue, je suis navrée, il ne peut y avoir de réplique. Je vous suggère d'en discuter en dehors de l'hémicycle.
La parole est à M. Vincent Descoeur.

M. Vincent Descoeur (LR).
La remise sur le carburant accordée par l'État, qui était de 10 centimes par litre depuis le 16 novembre, a pris fin brutalement le 31 décembre et, avec elle, la ristourne de 10 centimes opérée par Total. Cela s'est immédiatement traduit par une hausse des prix à la pompe, qui atteignent, en ce début d'année, un niveau record, alors même que le prix du baril n'est pas au plus haut. Cette hausse a été de 13 centimes pour le gazole et de 17 centimes en moyenne pour le sans-plomb. Je rappelle, pour le déplorer, que la hausse a été bien supérieure dans les stations-services des zones rurales. Ainsi, dans le Cantal, dont je suis l'élu, le prix du gazole dépasse les 2 euros.
Le groupe Les Républicains aurait souhaité l'augmentation de cette remise afin de limiter le prix du carburant à 1,50 euro mais le Gouvernement a préféré la remplacer par une indemnité carburant sous la forme d'un chèque de 100 euros destiné aux 10 millions de travailleurs les plus modestes, pour reprendre l'expression de Mme la Première ministre. Cette aide, bien moins intéressante qu'une remise à la pompe, n'est pas suffisante à l'heure où le prix du carburant atteint des niveaux records. Plus ennuyeux encore, puisqu'elle ne bénéficie qu'à 10 des 40 millions d'automobilistes, elle laisse sur le bord de la route un grand nombre de Français qui n'ont pas d'autre solution que d'utiliser leur véhicule. Ainsi, de nombreux salariés, mais aussi des retraités, des bénévoles, des artisans et des PME, pourtant propriétaires de nombreux véhicules, ne pourront pas bénéficier de cette aide, ce qui est, à nos yeux, injuste. Le chèque carburant et ses critères d'attribution qui excluent une majorité de nos concitoyens ne constituent donc pas un réel bouclier tarifaire.
Quelle réponse comptez-vous apporter aux nombreux automobilistes laissés-pour-compte alors que le prix des carburants bat des records et pourrait continuer de grimper ? Cette sombre perspective demande une réponse plus forte pour l'ensemble des automobilistes.

M. Jean-Pierre Vigier.
Très bien !

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Madame Bazin-Malgras, l'année de référence pour le guichet est un critère imposé par le cadre européen, ce qui peut poser problème aux stations de montagne pour lesquelles l'année 2021 n'a pas été une année de référence, ainsi qu'aux entreprises créées après 2021. Le Gouvernement travaille actuellement sur ces problèmes avec les fédérations.
Monsieur Descoeur, vous avez raison de souligner que la ristourne sur le prix à la pompe et ses versions successives ont permis, au cours de l'année 2022, d'amortir l'impact de la hausse des prix des carburants sur nos concitoyens. C'est une des raisons pour lesquelles la France figure parmi les pays dans lesquels l'inflation a été la plus faible en 2022.
L'indemnité carburant pour les grands rouleurs que vous citez est l'un des éléments venant se substituer à la ristourne. Le guichet sera mis en place à partir du 16 janvier et permettra d'alléger la facture. En complément, bien qu'ils ne ciblent pas spécifiquement les automobilistes, d'autres dispositifs de soutien aux particuliers ont été mis en place : le chèque énergie exceptionnel pour 12 millions de ménages modestes, à partir de décembre 2022 ; le chèque exceptionnel de 100 ou 200 euros pour les ménages modestes chauffés au fioul ; le chèque destiné aux ménages se chauffant au bois, mis en place depuis fin décembre 2022, et dont le montant varie entre 50 et 200 euros en fonction du mode de chauffage et des revenus du ménage.

M. Pierre Cordier.
Des chèques, encore des chèques !

M. Vincent Descoeur.
Ce qu'il faut, c'est réduire les taxes !

Mme la présidente.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine.

Mme Emmanuelle Anthoine (LR).
L'inflation énergétique alarmante que nous vivons actuellement affecte tous les Français mais nombre de nos compatriotes restent exclus du bénéfice des mesures de soutien correspondant à l'impact qu'ils subissent.
Pour compléter les interventions de mes collègues, je souhaiterais tout d'abord évoquer les artisans du secteur de l'alimentaire au détail. Nous avons obtenu des mesures supplémentaires pour les boulangers. Si elles restent insuffisantes, elles représentent tout de même une avancée dont d'autres artisans devraient pouvoir bénéficier. Les bouchers-charcutiers, les pâtissiers et les fromagers devraient eux aussi pouvoir renégocier leur contrat d'électricité en cas de montants abusifs. Ces artisans subissent l'envolée de leur facture énergétique et, en même temps, la hausse de 12 % des prix de leurs matières premières alimentaires. Ils ne peuvent répercuter ces surcoûts sur les prix de leurs produits au risque de voir leur clientèle disparaître. Fragilisés par l'inflation, les artisans aux plus faibles trésoreries ne peuvent investir pour remplacer leurs équipements les plus énergivores.
Actuellement, 40 % des bouchers-charcutiers restent exclus du bouclier tarifaire et beaucoup ont dû, comme les boulangers, signer leurs contrats à la hâte. Rien ne justifie qu'ils restent privés du soutien de la puissance publique pour survivre à cette crise énergétique. Je pense également aux restaurateurs, qui sont nombreux à connaître une situation identique et, dans un tout autre registre, aux établissements d'enseignement. L'université de Strasbourg a ainsi dû garder ses portes fermées deux semaines cet hiver, pour faire face à l'inflation énergétique. De nombreux établissements scolaires privés ne bénéficient d'aucune mesure de soutien alors qu'ils doivent eux aussi assurer, au quotidien, l'accueil des élèves dans les meilleures conditions. Tout cela nécessite du chauffage et de l'électricité avec un coût difficile à supporter pour leurs budgets.
Allez-vous enfin inclure ces oubliés dans les dispositifs d'aide auxquels ils ont légitimement droit ?

M. Vincent Descoeur.
Très bien !

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Notre intention est de couvrir l'ensemble des entreprises : les TPE dont les compteurs électriques ont une puissance inférieure à 36 kilovoltampères bénéficient du tarif réglementé, les TPE et PME dont les compteurs ont une puissance supérieure à 36 kilovoltampères bénéficient du dispositif de l'amortisseur, et les entreprises plus importantes bénéficient des aides du guichet simplifié, vers lequel peuvent également se tourner les TPE et les PME.
Pour certaines TPE, notamment les boulangeries, l'amortisseur s'est révélé insuffisant. Le Gouvernement a donc annoncé la semaine dernière la mise en place d'un plafond garanti de 280 euros par mégawattheure en moyenne sur l'année 2023, qui englobera donc tous les artisans répondant aux critères de taille des TPE. J'ajoute qu'un pacte a été signé avec les acteurs de la grande distribution par lequel ceux-ci s'engagent vis-à-vis des artisans qui les fournissent à ne pas négocier, dans leur prix d'achat, les hausses de prix demandées du fait de la hausse des coûts de l'énergie.
Les universités, comme tout établissement public, ont accès au dispositif d'amortisseur. À la suite de la fermeture temporaire de l'université de Strasbourg que vous avez évoquée, un plan de 250 millions a été déployé pour soutenir ces établissements, qui subissent de plein fouet la hausse des prix de l'énergie.

Mme la présidente.
La parole est à M. Jean-Pierre Vigier.

M. Jean-Pierre Vigier (LR).
Les inquiétudes grandissent partout dans nos circonscriptions. Le Gouvernement semble sourd aux témoignages désespérés d'artisans, de commerçants et de chefs d'entreprise. Ni les reports de charges ni l'amortisseur électricité ne constituent de vraies réponses durables. Ce sont des palliatifs qui ne feront que retarder les faillites de milliers de TPE et de PME. Les dispositifs prévus manquent encore cruellement de clarté et donnent le sentiment qu'il est trop difficile d'y être éligible. N'oubliez pas que les chefs d'entreprise n'ont pas de temps à perdre avec d'interminables démarches administratives. Je pense aussi à nos collectivités territoriales, qui souffrent de la situation actuelle. Le filet de sécurité mis en place apparaît beaucoup trop restrictif.
Les parlementaires du groupe Les Républicains ont formulé des propositions ambitieuses pour simplifier et élargir ces aides, comme celle d'un fond de sauvegarde énergie doté de 150 millions d'euros. Il aurait permis à l'État d'apporter une aide d'urgence aux communes qui n'arriveraient pas à faire face à l'augmentation du coût de l'énergie en 2023 mais vous avez fait le choix de la repousser.
Les Français attendent de vraies solutions pérennes – d'abord en sortant de quinze ans de renoncements successifs à une réelle stratégie nucléaire française. Mais l'urgence, nous vous le répétons, c'est d'agir au niveau européen. À l'instar du Portugal et de l'Espagne, mettons fin à l'aberrante indexation du prix de l'électricité sur celui du gaz !

Pouvez-vous répondre sans tarder à ces défis majeurs pour l'avenir de nos territoires, de notre économie et de notre indépendance énergétique ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Le Gouvernement ne reste pas sourd à la situation des entreprises puisqu'il a déployé l'un des plans les plus protecteurs en Europe. Ce plan comprend, pour les PME, des subventions, sous la forme du dispositif de l'amortisseur, et des reports de charges, mesure de trésorerie demandée par les représentants des entreprises.
Vous avez raison de parler de la question de l'accès à ces mesures de soutien. Il vous appartient, mesdames et messieurs les députés, de rappeler aux entrepreneurs de vos territoires de ne pas hésiter à contacter les conseillers départementaux à la sortie de crise, dont les numéros sont disponibles sur le site impots.gouv.fr, et, pour les reports de charges de cotisation, les conseillers de l'Urssaf.
Je rappelle que 2,5 milliards ont été déployés pour soutenir les collectivités au titre de l'amortisseur et du filet de sécurité. Vous avez raison de souligner qu'elles sont durement éprouvées par la crise de l'énergie. Ces mesures viennent s'ajouter à la baisse de la TICFE – taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité – et au mécanisme de l'Arenh – accès régulé à l'électricité nucléaire historique.
Ensemble, toutes ces mesures doivent permettre d'amortir une partie de ce choc.

Mme la présidente.
La parole est à M. Pascal Lecamp.

M. Pascal Lecamp (Dem).
L'explosion des prix de l'énergie est la préoccupation majeure de nos concitoyens et entrepreneurs, comme nous l'avons tous martelé dans les différents débats d'hier et d'aujourd'hui. Nous avons réagi dès l'été avec la mise en œuvre du bouclier énergétique, qui a été prolongé, comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre délégué. Cette solution mise en œuvre par le Gouvernement est un succès dans sa vocation protectrice, comme l'affirmaient sans détour les économistes de l'Institut des politiques publiques dès novembre. On ne le dira jamais assez : le bouclier énergétique a permis à la France d'avoir la plus faible inflation de la zone euro. Nous devons nous en féliciter.
Néanmoins, l'ampleur de la spirale inflationniste est telle que le bouclier ne protège pas tout le monde, en particulier tous ceux qui en auraient besoin. Le monde agricole, notamment, qui représente l'essentiel de l'activité économique de ma circonscription rurale, subit cette année de plein fouet l'augmentation du coût des intrants – de près de 30 % en un an – et les pertes de production liées à un climat instable, fait de sécheresse, de grêle et de gel, certes anticipées dans le budget du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. À cela s'ajoute l'explosion des factures énergétiques. Le secteur des fruits et légumes, par exemple, a besoin de machines très énergivores pour la réfrigération et la conservation des récoltes. De même, dans l'élevage, on utilise par exemple des trayeurs, indispensables pour la traite de vaches. Des mesures spécifiques sont-elles envisagées et des concertations ont-elles été engagées avec les énergéticiens pour protéger les agricultrices et les agriculteurs ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Vous soulignez à raison l'impact de l'inflation, notamment celle des prix de l'énergie, sur la situation des agriculteurs. Je le rappelle, comme tous les entrepreneurs, ceux-ci sont éligibles aux dispositifs de droit commun – le bouclier tarifaire, l'amortisseur électricité ou le guichet de l'aide, selon les critères qu'ils remplissent.
Vous évoquez également les aléas climatiques et l'inflation du prix des matières premières, qui constituent une double peine pour les agriculteurs et aggravent leur situation. Le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a présenté en 2022 un plan de résilience d'un montant très significatif, prévoyant 480 millions d'euros d'aides pour l'alimentation animale et 150 millions d'euros de prise en charge des cotisations. Il permettra d'amortir les effets particuliers de la crise pour les agriculteurs.

Mme la présidente.
La parole est à Mme Sophie Mette.

Mme Sophie Mette (Dem).
En septembre, l'Insee confirmait l'efficacité des mesures de l'État visant à atténuer l'effet de l'inflation des prix du gaz, de l'électricité et du carburant. Le bouclier tarifaire a réduit de moitié l'impact de la flambée des prix de l'énergie. La hausse globale des prix à la consommation a aussi ralenti pour s'établir à 5,9 % en un an.
Avant d'en chercher les failles, il nous faut donc nous féliciter que le bouclier contribue à notre stratégie économique. Toutes les TPE qui ne sont pas protégées par le bouclier tarifaire et toutes les PME bénéficient en outre d'un nouveau dispositif, l'amortisseur électricité. Les boulangers, subissant la hausse des matières premières en plus de celle de l'énergie, sont désormais spécifiquement accompagnés. Les efforts ont été salués par M. Anract lui-même. Il faut être lucide et l'admettre, sans tomber dans l'autosatisfaction : la politique du bouclier tarifaire est un succès. En tant qu'élus, nous devons toutefois vous demander comment faire mieux pour la nation, même lorsque nous réussissons.
Si l'Institut des politiques publiques a confirmé les bons résultats du bouclier, il note que la flambée des prix de l'énergie pèse davantage sur le niveau de vie de ceux qui résident en dehors des aires urbaines, ou dans des aires urbaines de moins de 500 000 habitants, que sur celui du reste de la population. À revenus identiques, un ménage habitant en zone rurale, dans un pavillon chauffé au fioul et très dépendant de sa voiture, est nettement plus frappé par l'inflation qu'une famille urbaine résidant dans un habitat collectif et ayant accès aux transports publics.
Enfin, les associations, notamment sportives, subissent de plein fouet le poids de l'inflation, par exemple lors des déplacements que leurs membres doivent effectuer. En tant qu'élue de la ruralité attachée à la vie associative de ces territoires, je considère nécessaire d'agir. Comment servir mieux encore nos concitoyens ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Je précise que l'indemnité sur le carburant pour les travailleurs évoquée dans la première partie de votre question concernera 10 millions de travailleurs et que son montant sera de 100 euros, soit l'équivalent du gain permis par la ristourne sur le carburant après une vingtaine de pleins, quand celle-ci était en vigueur. S'y ajoutent les dispositifs que j'ai déjà évoqués – le chèque énergie exceptionnel, ainsi les chèques énergie destinés aux ménages utilisant le fioul ou le bois.
Je précise en outre que les associations sont bien couvertes par les aides en matière d'énergie. Les associations de droit privé employant moins de 250 personnes et dont le chiffre d'affaires n'excède pas 50 millions d'euros ont droit à l'amortisseur électricité, au même titre que les PME et les associations de droit public ou privé dont les recettes provenant de financements publics, de dons ou de cotisations sont supérieures à 50 % des recettes totales. Dans les autres cas, les associations ont droit au guichet de l'aide "gaz et électricité", notamment si elles sont assujetties aux impôts commerciaux ou emploient un salarié au moins. N'hésitez évidemment pas à nous faire connaître des cas qui vous paraîtraient ne pas entrer dans ces différents critères.

Mme la présidente.
La parole est à Mme Claudia Rouaux.

Mme Claudia Rouaux (SOC).
J'associe Mme Untermaier à ma question. À l'occasion de la renégociation du contrat d'électricité avec leur fournisseur, les boulangers se retrouvent confrontés à une hausse vertigineuse des tarifs, ceux-ci passant dans certains cas de 120 à 580 euros le mégawattheure, soit une augmentation de 400 % environ.
Le bouclier tarifaire, qui limite la hausse du prix de l'électricité à 15 % en 2023 et dont le bénéfice est subordonné à la puissance du compteur électrique, exclut environ 80 % des boulangers. En effet, la majorité des boulangers disposent d'un compteur électrique d'une puissance supérieure à 36 kilovoltampères.

Mme Emmanuelle Anthoine.
Voilà !

Mme Claudia Rouaux.
Certes, d'autres dispositifs sont prévus pour les boulangers exclus – je pense à l'amortisseur électricité, au guichet de l'aide au paiement des factures d'électricité et de gaz et au plafonnement récent du prix du mégawattheure à 280 euros pour l'année 2023. La hausse de la facture sera ainsi limitée et se situera, selon les cas, entre 20 et 40 %. Malgré tout, ces aides, moins protectrices que le bouclier tarifaire, ne permettront pas aux boulangers de faire face à la hausse du coût de l'électricité et des boulangeries risquent de fermer. Nous rencontrons les boulangers dans nos circonscriptions : ils sont extrêmement préoccupés.
Nous réitérons donc notre demande d'appliquer en 2023 le bouclier tarifaire à toutes les boulangeries payant l'électricité au tarif réglementé, indépendamment de la puissance de leur compteur électrique. Les entreprises gagneraient en sérénité à une telle simplification, alors que les dispositifs actuels, avouons-le, sont complètement inintelligibles pour les professionnels comme les particuliers. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Le Gouvernement partage votre inquiétude s'agissant de la situation des boulangers. Vous avez rappelé les dispositifs dont ils bénéficient : le bouclier tarifaire, pour ceux dont le compteur est d'une puissance inférieure à 36 kilovoltampères ; l'amortisseur électricité, si sa puissance est supérieure à ce chiffre. Nous avons en outre récemment garanti que le prix moyen du mégawattheure ne dépassera pas 280 euros.
Selon vous, ces mesures ne suffiraient pas nécessairement à assurer la pérennité de certaines boulangeries de notre pays. Il convient que les entrepreneurs concernés prennent contact avec les conseillers départementaux à la sortie de crise. J'ajoute, comme m'y invite votre question, que notre démarche est également proactive. Alors que les chambres de commerce et d'industrie ont commencé à contacter 20 000 entreprises pour les informer au mieux sur les aides, les chambres de métiers et de l'artisanat appelleront les 33 000 boulangeries de notre pays – elles en ont déjà appelé 11 000 –, pour s'assurer que chacune utilise bien toutes les mesures à sa disposition.

Mme la présidente.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC).
Monsieur le ministre délégué, après avoir interrogé hier le ministre délégué chargé de l'industrie sur la situation des bouchers, boulangers, artisans, TPE et collectivités ainsi que sur l'opportunité d'un retour aux tarifs réglementés de vente de l'électricité (TRV) pour tous, je souhaite aujourd'hui vous alerter sur la situation des copropriétés. Les dispositifs prévus pour leurs résidents sont beaucoup moins favorables que ceux destinés à d'autres consommateurs.
Selon les chiffres de l'Anah – Agence nationale de l'habitat –, 180 000 copropriétés, représentant 2,3 millions de logements étaient déjà en situation de fragilité avant la crise de l'énergie. Dans les copropriétés, les charges ne sont pas payées à flux tendu, mais à l'issue d'un vote en assemblée générale, souvent annuel, éventuellement bisannuel. La plupart de leurs résidents ne percevront dont les effets de la hausse des prix que très tardivement et le coup de bambou lors des régularisations sera parfois violent, alors que bon nombre d'entre eux sont des retraités et des locataires modestes aux situations d'endettement compliquées, qui accumulent les impayés et, par ricochet, mettent en difficulté les copropriétés déjà fragilisées en les forçant à assumer les impayés en question.
Comptez-vous instaurer un dispositif complémentaire pour couvrir cet angle mort ? Il faut identifier les copropriétés fragiles, les accompagner et éviter leur décrochage. Leurs résidents sont impuissants car ils ont peu de contrôle sur le type d'offre d'électricité retenu et ne peuvent parfois choisir les TRV, au contraire de nos autres concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

M. Joël Giraud.
Très bonne question !

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Vous l'avez rappelé, trois décrets relatifs à l'application du bouclier tarifaire en habitat collectif ont été publiés le 30 décembre 2022. Ils concernent l'application du bouclier tarifaire collectif sur l'électricité au titre du second semestre 2022, ainsi que l'application des boucliers tarifaires collectifs sur le gaz et l'électricité en 2023.
Ces dispositifs n'étant pas tout à fait suffisants, ils ont été renforcés pour couvrir efficacement le chauffage collectif, qu'il soit électrique ou au gaz. Ainsi, les structures ayant dû contractualiser à des prix extrêmement hauts au cours du second semestre 2022 bénéficieront d'une aide spécifique complémentaire à la compensation au titre du bouclier tarifaire sur le gaz et l'électricité. Le Gouvernement rencontre les représentants des copropriétés chaque semaine : ils ont globalement réservé un accueil positif à cette mesure complémentaire voire s'y sont montrés très réceptifs.
Quant à la question des impayés que vous citez, le fonds de solidarité pour le logement doit y répondre.

Mme la présidente.
La parole est à Mme Béatrice Bellamy.

Mme Béatrice Bellamy (HOR).
Ma question s'inscrit dans la continuité de la précédente. Depuis plusieurs mois, l'envolée des prix de l'énergie inquiète certains de nos concitoyens, conscients que cette crise de l'énergie nous oblige à repenser notre consommation, car elle affecte grandement les ménages, en alourdissant leurs dépenses. Les nombreux plans d'aides ont permis de contenir une partie de la hausse des coûts supportée par les particuliers, entreprises et autres structures collectives. À ce titre, nous saluons le travail du Gouvernement, car nous sommes conscients que sans l'intervention de l'État, les tarifs auraient été plus élevés.
Cependant, certains bénéficiaires des aides sont encore trop lourdement affectés. Je pense à ceux résidant dans des habitats collectifs qui sont équipés de chaudières à gaz – dans ma circonscription, en Vendée, c'est le cas des 72 résidences, comptant en tout 6 500 logements, de l'un des principaux offices publics de l'habitat.
Les locataires font face à une situation difficilement acceptable, malgré le bouclier instauré par l'État. Les charges mensuelles ont parfois été multipliées par quatre depuis le mois de mai, passant de 35 euros à 140 euros, comme je l'ai constaté lundi dernier, au cours d'un rendez-vous dans ma circonscription. Les températures sont parfois abaissées à 17 degrés la nuit, afin de limiter l'impact financier. Alors que la situation a évolué ces dernières semaines notamment grâce au décret du 30 décembre 2022, pouvez-vous nous rappeler les dispositifs prévus pour ces situations et nous indiquer s'ils vous semblent suffisants ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Comme je l'ai déjà indiqué, trois décrets concernant directement l'habitat collectif ont été pris récemment. Ils ont été rédigés en concertation avec les acteurs – notamment celui que vous citez en Vendée. Nous avons renforcé le bouclier, ce top up qui permet de diminuer la charge des offices publics de l'habitat (OPH) afin d'éviter des transferts de charges qui grèveraient le pouvoir d'achat de nos concitoyens. En outre, le Gouvernement contacte chaque semaine les acteurs de l'habitat collectif et des copropriétés pour s'assurer qu'aucune augmentation de prix trop importante ne reste non corrigée à la suite de ses décisions.

Mme la présidente.
La parole est à M. Philippe Pradal.

M. Philippe Pradal (HOR).
Ces dernières semaines, à l'issue d'intenses consultations, le Gouvernement a annoncé des mesures de soutien importantes pour les très petites entreprises (TPE) et petites et moyennes entreprises (PME), notamment artisanales. Je tiens à le saluer. Semaine après semaine, il répond aux demandes des différents secteurs et il est au rendez-vous pour soutenir les Français et les entreprises qui en ont besoin. Début décembre 2022, dans le cadre de la campagne en faveur de la sobriété énergétique, il a fait des annonces concernant les Ehpad et les structures sociales et médico-sociales, y compris les associations à but non lucratif et les établissements publics opérant dans le secteur concurrentiel.
Comment évaluez-vous l'exécution de ces dispositifs au 31 décembre 2022, notamment en ce qui concerne la diffusion de l'information et le taux de réponse des structures ?
Je souhaiterais également appeler votre attention sur le secteur du logement accompagné. Frappé comme l'ensemble des acteurs par la hausse des coûts de l'énergie, il est dans l'impossibilité de la répercuter – même partiellement – en raison de la fixation administrative des redevances demandées aux occupants. Du fait de son rôle social et de l'importance du logement dans le parcours d'inclusion, un dispositif spécifique est-il envisagé pour le logement accompagné, ou est-il déjà couvert par ceux existants ?
Enfin, la communication du Gouvernement indiquait que les dispositions pour 2023 seraient arrêtées fin 2022. Les dispositifs annoncés fin 2022 se poursuivront-ils en 2023 ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Bien sûr, nous souhaiterions toujours que les dispositifs soient déployés plus rapidement. C'est pourquoi le Gouvernement a beaucoup réfléchi à la simplification de l'accès aux aides. Comme je l'ai indiqué, il a confié aux chambres de commerce et d'industrie (CCI) le soin de contacter 20 000 entreprises et aux chambres de métiers et de l'artisanat (CMA) celui de contacter toutes les boulangeries.
Vous m'avez également interrogé concernant les résidences sociales et le logement accompagné. Les structures – plutôt que les résidents – pourront bénéficier de l'amortisseur et du chèque énergie, ce qui freinera l'incidence de la crise de l'énergie.

Mme la présidente.
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

Mme Sophie Taillé-Polian (Écolo-NUPES).
Certaines thématiques, et non uniquement certains publics, sont les oubliées du bouclier tarifaire : vision à long terme, sobriété et justice sociale. Pour notre groupe, le bouclier tarifaire est insuffisant. En effet, l'inflation touche aussi les produits de première nécessité et l'alimentation. Les Français les plus modestes en sont réduits à opérer des arbitrages entre fin du monde et fin du mois. Les dispositifs de rénovation thermique sont également insuffisants. Dans le parc public, comme privé, les travaux ne sont donc pas au rendez-vous et les investissements sont en recul dans les collectivités, les universités, etc. Certes, il faut parer au plus pressé, mais il faut aussi préparer l'avenir.
Qu'en est-il de la justice sociale et de la sobriété ? Le bouclier tarifaire, mesure d'urgence, a permis de contenir une partie de la hausse des factures d'énergie, mais sans différencier les consommations essentielles – auxquelles se limitent les familles modestes – et les consommations superflues, par exemple celles des très grands logements ou des résidences secondaires. En appliquant le bouclier à l'intégralité des consommations, on n'atteint ni la justice sociale, ni la sobriété, qui vise à consommer uniquement ce qui est vraiment indispensable et à diminuer la consommation de ce qui l'est moins. Nous devons nous interroger sur ces aspects.

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Votre question me permet de rappeler que l'Assemblée nationale vient d'adopter en première lecture le projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, qui vise à simplifier leur installation et qui traduit notre vision à long terme : il s'agit de sortir des énergies fossiles, en renforçant notre parc nucléaire et en augmentant très significativement notre capacité de production d'énergies renouvelables.
De leur côté, les mesures de soutien visaient à répondre, dans l'urgence, à la crise énergétique provoquée par la guerre déclenchée par la Russie en Ukraine. C'est toujours le cas – le texte adopté hier aborde le sujet.
Vous m'interpellez sur la question sociale. Mais, au cours de l'année 2022, le bouclier tarifaire a été l'un des plus protecteurs en Europe, ce qui nous a permis de mieux protéger qu'ailleurs nos concitoyens de la hausse des prix, et plus généralement de l'inflation. Le bouclier est maintenu en 2023 et, pour les ménages modestes, il est complété par des chèques énergie et par une indemnité exceptionnelle pour les foyers les plus modestes. La protection des plus fragiles est donc au cœur de nos politiques.

Mme la présidente.
La parole est à Mme Soumya Bourouaha.

Mme Soumya Bourouaha (GDR-NUPES).
Je souhaite vous faire part de l'inquiétude des collectivités locales, qui ne bénéficient pas toutes du bouclier tarifaire ni du filet de sécurité. Avec la flambée des coûts de l'énergie, de nombreuses communes dont la situation financière est déjà très fragile doivent s'acquitter de factures dont le montant a doublé, voire plus que triplé, par rapport à l'année précédente.
Face à cette situation exceptionnelle, le soutien de l'État doit être inconditionnel. Pourtant, vous avez choisi d'appliquer le bouclier tarifaire aux seules collectivités comptant moins de dix agents salariés et encaissant moins de 2 millions d'euros de recettes annuelles. Les autres devront se satisfaire de l'amortisseur électricité et du filet de sécurité. Mais les montants débloqués au titre de ce dernier ne seront accessibles aux communes qu'en 2024, et si elles remplissent trois conditions : faible potentiel financier ; baisse de 15 % de leur épargne brute entre 2022 et 2023 et recettes de fonctionnement représentant une lourde charge par rapport aux dépenses d'approvisionnement.
Ce dispositif ne nous paraît pas suffisant : ses conditions d'octroi sont bien trop restrictives, contrairement à ce que nos collègues avaient proposé au Sénat lors de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2023. Monsieur le ministre délégué, la baisse des dotations de l'État a laissé des traces importantes au sein des exécutifs locaux et cette décision vient à nouveau entamer la relation de confiance, déjà altérée, entre les élus locaux et les gouvernements successifs. Les collectivités locales assurent le fonctionnement des services publics indispensables à nos concitoyens : donnez-leur les moyens de remplir leurs missions. Allez-vous mettre en place un dispositif plus favorable aux collectivités afin qu'elles puissent faire face à l'augmentation exceptionnelle de leur facture énergétique ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et Écolo-NUPES.)

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
L'État a déjà apporté des aides aux collectivités en 2022, ce qui leur a permis – en moyenne, bien entendu – de disposer d'une épargne en hausse de 2,1 milliards d'euros, soit + 8 % par rapport à 2021. Vous citez quelques-unes des aides existantes dans votre question ; j'ajouterai celles qui n'y figurent pas. Il s'agit de deux mécanismes généraux : la baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité, la TICFE, de 22,50 à 0,50 euros, et la hausse du volume de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, l'Arenh.
En outre, vous l'avez rappelé, les plus petites communes – soit 30 000 sur 35 000 – ont bénéficié du bouclier tarifaire…

Mme Sophie Taillé-Polian.
Cela ne suffit pas !

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
…qui a limité la hausse des tarifs réglementés de l'électricité à 4 % en moyenne en 2022 et la limitera, à partir du 1er février 2023, à 15 %. Enfin, vous l'avez également rappelé, dès l'été 2022, un filet de sécurité a permis de limiter les conséquences de la hausse des prix de l'énergie pour les collectivités les plus touchées. Ces deux derniers dispositifs représentent environ 2,5 milliards d'euros de soutien de l'État aux collectivités.

Mme Sophie Taillé-Polian.
Cela ne suffit pas !

Mme la présidente.
La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne (GDR-NUPES).
Comment ne pas souligner l'immense paradoxe de ce débat organisé à l'initiative de vos amis du groupe Les Républicains ? Les plus fervents défenseurs de l'ouverture des marchés de l'énergie se font aujourd'hui les hérauts de l'intervention financière de l'État pour étendre le bouclier tarifaire ! Combien d'entre eux ont voté les lois qui nous placent dans le chaos énergétique actuel, notamment la sinistre loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, dite Nome, du gouvernement Fillon en 2010 ?
Ce débat aurait dû être intitulé "les oubliés du néolibéralisme". Car les déterminants de l'explosion des prix du gaz et de l'électricité, nous les connaissons ! C'est l'ouverture des marchés, la destruction minutieuse d'EDF et de GDF – devenu ENGIE – et la remise en cause continue des tarifs réglementés de vente du gaz (TRVG) et de l'électricité (TRVE). Comment aborder un tel débat sans partir de ce constat ? Est-il raisonnable d'élargir chaque semaine les boucliers tarifaires sans aucun contrôle des contrats proposés par les opérateurs ? Est-il responsable de faire financer par l'État – c'est-à-dire par les contribuables – des compensations tarifaires à des groupes qui spéculent à hauteur de 43 milliards d'euros pour la seule année 2023 ? Est-il soutenable de refuser, quoi qu'il en coûte, la seule mesure efficace dans l'urgence – le retour des tarifs réglementés de vente (TRV) pour tous ? Pendant des décennies, ces TRV ont constitué le pilier de la politique tarifaire française et permis l'accès à prix régulé à l'énergie à tous les usagers.
Est-il acceptable de maintenir, quoi qu'il en coûte, l'Arenh et ses cadeaux aux fournisseurs alternatifs, véritable scandale public ruinant EDF ? Est-il responsable de refuser le retour des tarifs réglementés de vente pour toutes les collectivités ? C'était une proposition de loi des sénateurs communistes, que la droite a rejetée au Sénat il y a quelques semaines ! Comment justifier le maintien de l'extinction programmée des tarifs réglementés de vente du gaz prévue par la loi du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat pour tous les particuliers à partir du 1er juillet 2023 ? Monsieur le ministre délégué, j'aimerais vous entendre sur ces différents points. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, SOC et Écolo-NUPES. – M. Benjamin Saint-Huile applaudit aussi.)

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Je regrette très sincèrement que nos amis qui sont à l'origine de ce débat n'aient pas eu la patience d'en attendre le terme. (Sourires.) Je vous remercie pour votre question et vous assure qu'au-delà des mesures de soutien qu'il prend dans l'urgence, le Gouvernement plaide pour des évolutions structurelles du marché européen de l'énergie, auquel nous sommes néanmoins attachés. Il faut améliorer les modalités de fixation du prix de l'électricité,…

M. André Chassaigne.
Les supprimer !

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
…aujourd'hui fondées sur le coût de production de la dernière unité. La France a obtenu de la Commission qu'elle prévoie une réforme du marché européen de l'énergie cette année et la présidente de la Commission a indiqué réfléchir à un découplage entre le gaz et l'électricité. Le Gouvernement appelle de ses vœux une telle réforme, y travaille, tout en souhaitant, je le répète, rester dans le marché européen de l'énergie.

Mme la présidente.
La parole est à M. Guy Bricout.

M. Guy Bricout (LIOT).
Angoisse, perplexité, incompréhension : tel est, résumé en quelques mots, l'état d'esprit de nombreux artisans, industriels, agriculteurs et habitants de nos circonscriptions face à la nébuleuse qu'est le bouclier énergétique.
Dans le Nord, dont je suis élu, j'échange depuis plusieurs semaines avec ceux qui subissent de plein fouet l'escalade des prix de l'énergie. Je pense, parmi d'autres, à ces commerçants dont le budget électricité est passé de 18 000 à 78 000 euros ; je pense aux industriels du textile et aux dentelliers, qui font la fierté du Cambrésis : leur coût de revient est lié au prix de l'électricité. Ils ont besoin d'être soutenus pour continuer à s'imposer sur les marchés mondiaux.
L'angoisse est ainsi celle des entreprises : au mieux, elles se résignent à augmenter leurs prix ; au pire, elles passent en activité partielle, voire licencient. Elle est aussi le lot de nombre de nos concitoyens, encore trop souvent logés dans des passoires thermiques : ils en sont réduits à ne plus beaucoup se chauffer en hiver.
La perplexité naît de l'absence de recours aux aides, trop complexes et trop changeantes. On ne compte plus les chefs d'entreprise, déjà submergés par les efforts à fournir quotidiennement pour maintenir leur affaire à flot, qui renoncent à les demander.
L'incompréhension, enfin, est la conséquence de mesures jugées inéquitables. Des boulangers, par exemple, me disent qu'ils ne remplissent pas toutes les conditions pour bénéficier du bouclier tarifaire. Que dire des bouchers, des fleuristes, des restaurateurs, qui restent au bord du chemin alors qu'ils sont eux aussi à la peine ?
N'est-il pas urgent de simplifier au maximum le recours au bouclier énergétique, afin d'éviter aux chefs d'entreprise de passer des heures à essayer de comprendre s'ils remplissent tous les critères exigés, à réunir les justificatifs et à remplir des formulaires en ligne ?
Les délais accordés posent de trop nombreuses difficultés aux professionnels et aux comptables : comptez-vous y remédier ?
Pouvez-vous garantir que les points d'accueil qui seront installés dans chaque préfecture seront efficaces ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Permettez-moi de réaffirmer que le Gouvernement a bien l'intention de couvrir l'ensemble des Français, qu'il s'agisse des particuliers, des entreprises ou des collectivités locales.
Vous avez mentionné à plusieurs reprises le cas des entreprises : l'idée est bien de toutes les protéger, d'autant mieux qu'elles sont plus petites. Aussi avons-nous instauré un bouclier tarifaire pour les plus petites ; un amortisseur électricité pour celles qui le sont un peu moins ; un guichet d'aide au paiement des factures d'énergie pour celles qui sont plus importantes.
S'agissant de la complexité des dispositifs, le Gouvernement a travaillé cet hiver à en simplifier l'accès, en mettant à disposition des entrepreneurs les numéros de ligne directe et de téléphone portable des conseillers départementaux à la sortie de crise ; ces numéros sont publiés sur le site impots.gouv.fr. Nous avons également sollicité les chambres de commerce et d'industrie et les chambres de métiers et de l'artisanat afin qu'elles contactent directement les entreprises pour les aider à accéder aux aides.
Néanmoins, il est possible que certaines entreprises passent entre les mailles du filet : votre aide pour les identifier est la bienvenue, afin que nous ajustions les dispositifs au fil de l'eau, comme nous l'avons fait pendant la crise liée au covid.

Mme la présidente.
La parole est à M. Benjamin Saint-Huile.

M. Benjamin Saint-Huile (LIOT).
Bonne année, monsieur le ministre délégué ! Si vous assistez aux cérémonies de vœux organisées par les maires, vous rencontrerez des élus inquiets. Dans le prolongement de celle de Mme Bourouaha, ma question est relative à l'accompagnement des collectivités territoriales. Vous le savez, la crise énergétique a sur elles de multiples incidences. Le Gouvernement tente d'y répondre, parfois immédiatement, parfois avec un peu de retard, chacun mesurant l'anticipation à la lumière de son expérience personnelle. Nous pourrions également évoquer le cas des restaurateurs ; ils ont été reçus à Bercy il y a quelques jours pour recevoir des réponses précises à leurs questions.
Vous citez le chiffre de 2,5 milliards, correspondant au bouclier tarifaire, au filet de sécurité et à l'amortisseur. À ce stade, cet argent est théorique – pardonnez-moi l'expression. Nous constaterons à la lumière de la réalité budgétaire de l'année 2022, et surtout de l'année 2023, ce que le Gouvernement aura été capable de faire. Je voudrais que vous nous donniez une photographie du recours exact aux dispositifs à ce jour.
Par le passé, vous avez souhaité faire disparaître la taxe d'habitation (TH) ; plus récemment, sans que personne ne vous l'ait demandé, vous avez décidé de supprimer la CVAE – cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises – ; pour des raisons que l'on peut entendre, mais dont les conséquences sont importantes, vous avez refusé d'indexer la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur l'inflation. Ainsi, les communes sont dans une situation de doute critique – on en parle beaucoup, mais les intercommunalités sont dans le même cas. Or le bloc communal assume une part très significative de l'investissement public : un ralentissement de ce dernier, lié à une dégradation des résultats, est à prévoir. Vous évoquiez l'épargne de 2022 ; étant donné le relèvement à 15 % de la limitation de la hausse des prix, la situation de ces 30 000 communes sera malheureusement beaucoup moins évidente en 2023.
Je vous remercie donc de nous informer de la réalité et du pragmatisme des dispositifs que le Gouvernement a créés.

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Vous avez raison : 2,5 milliards, ce n'est pas assez. Il faut ajouter à ce chiffre les 2 milliards du Fonds vert, les 2 milliards de l'habituelle dotation à l'investissement et les 7 milliards du Fonds de compensation de la TVA (FCTVA), soit 11 milliards supplémentaires. L'ensemble fait progresser de 11 % le soutien à l'investissement des collectivités. C'est évidemment indispensable : nous avons besoin de l'investissement des collectivités pour des raisons économiques, ainsi que pour leur action en faveur de la transition écologique. Nous avons déjà évoqué la question de la rénovation thermique des bâtiments.
S'agissant du guichet d'aide, vous avez raison de signaler qu'il est peut-être insuffisamment utilisé. Une nouvelle fois, j'invite tous les députés à faire connaître les dispositifs de soutien, parallèlement à l'effort que déploient en ce sens les chambres de commerce et les chambres de métiers.
L'amortisseur, enfin, entrera en vigueur le 1er février, sur le fondement des factures de janvier. À ce moment-là, nous pourrons mesurer la connaissance que les entreprises ont du dispositif et la manière dont elles se le sont approprié.

Mme la présidente.
La parole est à Mme Pascale Boyer.

Mme Pascale Boyer (RE).
Ces derniers mois, certains copropriétaires de résidences privées, de gestionnaires d'organismes d'habitat social, de foyers d'accueil médicalisés, d'établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes et de résidences habitat jeunes ont vu leurs factures d'énergie augmenter considérablement, parce que le contrat qu'ils avaient avec leur fournisseur d'énergie arrivait à terme avant la fin de 2022.
De plus, depuis le 1er janvier 2023, les copropriétés qui bénéficient du tarif dit jaune subissent les effets de la suppression du bouclier tarifaire.
Pour les copropriétés de résidences privées, après négociation, les prix d'achat du gaz ont été multipliés par trois, ceux de l'électricité par deux. Des mesures de protection contre l'augmentation du coût du gaz pourraient être adoptées dans les prochains mois. Dans leur majorité, ces copropriétaires ont économisé, ou économisent, pour acquérir leur résidence principale ; nombre d'entre eux n'ont pas les capacités financières pour amortir de telles hausses de charges.
Les gestionnaires d'organismes d'habitat social voient le montant des factures d'énergie se démultiplier, sans pouvoir répercuter la hausse sur leurs locataires ; les foyers d'accueil médicalisés et les Ehpad ne bénéficient d'aucune compensation, alors que l'augmentation du coût de l'énergie ne peut pas non plus être répercutée sur le prix de journée. Les prix des habitats jeunes comprennent les charges, notamment de chauffage. Ces résidences accueillent des jeunes actifs, âgés de 16 à 30 ans, qui perçoivent de faibles revenus. Elles ont un statut associatif et ne bénéficient pas du bouclier tarifaire sur l'électricité, ni des aides d'urgence destinées aux entreprises. Elles bénéficient du bouclier sur le prix du gaz, mais ne peuvent estimer l'incidence sur leur budget de hausses de plus de 900 %. Les bilans d'exploitation de la plupart de ces structures ne seront plus équilibrés, et les risques de défaillance sont très élevés.
Monsieur le ministre délégué, pouvons-nous espérer rapidement des mesures visant à protéger ces oubliés du bouclier énergétique ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Je vous remercie pour votre question très précise. Je vais répondre à certains aspects ; mes services et moi nous tenons à votre disposition pour vous apporter des éclaircissements complémentaires.
S'agissant de l'habitat collectif, trois décrets ont été pris le 31 décembre 2022 ; ils concernent également les casernes, les Ehpad, les logements intermédiaires, les foyers de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) et de l'aide sociale à l'enfance (ASE). Ils contiennent le fameux renforcement de l'aide aux copropriétés, notamment à celles – le quart d'entre elles – qui ont subi les plus fortes hausses du prix de l'énergie.
Comme je l'ai précédemment évoqué, des réunions fréquentes ont été organisées entre les représentants du secteur et le Gouvernement, afin de nous assurer de la bonne diffusion des dispositifs et de prévoir les aménagements nécessaires. Je le répète, je me tiens à votre disposition pour tout complément.

Mme la présidente.
La parole est à M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud (RE).
Il ne faut pas avoir peur de le dire : les Français sont mieux protégés que tous nos voisins européens. En raison de l'ampleur de la crise, de la complexité des dispositifs à déployer et de la diversité des situations des bénéficiaires, il faut toutefois veiller à éviter les omissions. Dans cette perspective, permettez à l'ancien ministre de la cohésion des territoires que je suis de vous parler de l'économie hivernale de la montagne, frappée de plein fouet par la crise énergétique. Je remercie le Gouvernement d'avoir inclus les régies publiques de remontées mécaniques parmi les bénéficiaires de l'amortisseur d'électricité : sans cette mesure, elles auraient été condamnées à fermer à court terme.
Monsieur le ministre délégué, je vous remercie également pour vos propos concernant l'année de référence : pour elles, il ne pourra s'agir de 2021, puisque les remontées mécaniques et la plupart des commerces étaient fermés administrativement.
Je crois néanmoins que les dispositifs doivent être mieux adaptés aux spécificités des territoires. Les remontées mécaniques sont un service public de transport, au sens de la loi d'orientation des transports intérieurs, la Loti ; elles relèvent donc du régime des délégations de service public (DSP), ce qui rend les ajustements tarifaires très difficiles, a fortiori dans un domaine concurrentiel à l'échelle internationale. En outre, leur consommation d'électricité connaît un pic hivernal ; le système d'écrêtement limite leurs droits aux taux d'Arenh, qui s'établissent à 10 à 30 %, contre 50 % pour d'autres secteurs. Les récentes modifications d'EDF font craindre des scénarios plus catastrophiques encore. Ces entreprises sont d'autant plus en difficulté que leurs contrats d'électricité ont été signés sous les fourches caudines, avant l'ouverture de la saison, à des montants prohibitifs, parfois sous la menace des distributeurs, en particulier concernant le taux d'Arenh, et sans aucune clause de revoyure.
Outre la nécessité de faire en sorte qu'à terme les tarifs proposés soient adaptés au rythme saisonnier d'exploitation, si je devais ne formuler aujourd'hui qu'une seule demande, monsieur le ministre délégué, ce serait qu'après la crise inflationniste, et même dès maintenant, vous permettiez la renégociation des contrats, en imposant des clauses de revoyure. Toute l'économie des territoires concernés dépend de votre réponse. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – Mme Marie-Noëlle Battistel applaudit également.)

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Monsieur le député de la montagne (Sourires) , vous avez raison de souligner que les régies publiques bénéficient de l'amortisseur, ou qu'elles y sont éligibles.
S'agissant de l'année de référence, le cadre juridique de l'aide est européen, mais la difficulté a été identifiée et le Gouvernement travaille à la lever. Le problème se pose également pour les entreprises créées après 2021, qui ne disposent pas non plus d'année de référence.
Quant aux opérateurs de stations de ski qui auraient signé des contrats à des prix démesurés, le dispositif du Gouvernement prévoit dans un premier temps de tenter de trouver un terrain d'entente avec les distributeurs, grâce au Médiateur national de l'énergie et aux conseillers départementaux à la sortie de crise.
Le Gouvernement connaît les multiples difficultés auxquelles sont confrontés les acteurs de la montagne : il se tient à votre disposition pour y travailler et trouver une solution.

Mme la présidente.
La parole est à M. Emmanuel Lacresse.

M. Emmanuel Lacresse (RE).
Dans le cadre du programme 345 de la loi de finances pour 2023, Service public de l'énergie , dont je suis le rapporteur spécial, le Gouvernement a plafonné la hausse des tarifs du gaz grâce au bouclier énergétique. En dépit de cette prise en charge, des disparités d'application sont apparues partout en France, en particulier en Meurthe-et-Moselle, notamment à Jarville-la-Malgrange. À l'initiative du maire, un dialogue a été établi ; les services de la préfecture ont établi un chiffrage des immeubles concernés dans l'ensemble du département. La situation était bien connue de l'Union sociale pour l'habitat (USH), avec laquelle j'ai pu entrer en contact grâce à la diligence des services et du cabinet du ministre délégué chargé de la ville – je les en remercie.
Après avoir pris la mesure du problème, le Gouvernement a constaté que ces hausses résultaient de contrats de gaz inappropriés, conclus en août 2022 pour l'année suivante au prix le plus haut, et surtout à prix fixe. Ces contrats ont été souscrits à la hâte, avec le seul énergéticien privé qui avait accepté de répondre à l'appel d'offres. Les gestionnaires de logements sociaux ont été amplement rassurés le 29 novembre dernier, avant les copropriétés collectives le 8 janvier. Cependant, les discussions se poursuivent et certains bailleurs se trouvent toujours engagés par de tels contrats. Par ailleurs, la question de la répartition des rôles entre énergéticiens dans ce type de situations reste posée. Le 18 janvier, la commission des finances auditionnera l'ensemble des acteurs à ce sujet.
Grâce à la diligence de vos services, nous avons pu cerner la nature des contrats souscrits, la façon dont les conseils ont été fournis, ainsi que le mode de prise de décision des gestionnaires de logements sociaux. Il s'agit de clarifier le mécanisme de soutien des contrats, de déterminer pourquoi ils n'ont pas été couverts par le dispositif initial de couloir tarifaire et comment ils le seront, y compris l'an prochain si des tensions nouvelles apparaissaient dans le secteur gazier. En un mot, il convient de répartir le soutien public entre les bailleurs et les énergéticiens, et d'inviter tous les fournisseurs à participer aux appels d'offres. C'est le sens du travail que vous avez engagé, monsieur le ministre délégué, et l'objet de ma question.

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Vous appelez à juste titre l'attention sur une situation qui a été évoquée tout à l'heure par Mme Bellamy, députée de Vendée : des gestionnaires de logements sociaux et des copropriétés collectives ont signé des contrats d'approvisionnement en énergie à des prix prohibitifs. En revenant à 87 euros le mégawattheure au 31 décembre 2022, les prix du gaz ont retrouvé leur niveau de 2021. Cela permet d'espérer qu'au-delà du problème conjoncturel qu'il convient de résoudre, nous pourrons rétablir une situation à peu près normale.
Comme vous l'avez dit, les échanges entre les représentants du secteur, les élus et le Gouvernement ont conduit celui-ci à prendre trois décrets instaurant un dispositif de renforcement de l'aide. Vous avez évoqué l'audition prochaine par la représentation nationale des participants à ces échanges ; sachez que le réseau Batigère est particulièrement suivi par le ministère délégué de la ville et du logement.

Mme la présidente.
La parole est à M. Thomas Rudigoz.

M. Thomas Rudigoz (RE).
En octobre 2021, le Gouvernement a instauré un plafond de 4 % pour l'augmentation des tarifs de l'électricité et du gaz, qui a été renouvelé et fixé à 15 % pour 2023 – nous l'avons voté dans le projet de loi de finances. Des remises sur les prix du carburant ont également été prévues pour soutenir les ménages face à la hausse des coûts énergétiques. Ce bouclier tarifaire, comme nous l'appelons, a permis de réduire de moitié l'impact de la hausse des prix sur l'inflation, ainsi que l'a récemment indiqué l'Insee. Cela fait de la France l'un des pays d'Europe où l'inflation a été la moins élevée.
Cependant, plusieurs structures précédemment évoquées, notamment les copropriétés et les HLM, n'étaient initialement pas couvertes par le bouclier tarifaire. Les ménages concernés ont continué à voir leurs coûts de chauffage collectif, qu'il soit au gaz ou à l'électricité, augmenter de manière importante. Il était donc nécessaire de trouver une solution rapide et adaptée pour les protéger, par le biais du bouclier tarifaire. C'est désormais chose faite grâce aux décrets pris ces dernières semaines.
Toutefois, la procédure peut apparaître relativement complexe pour certains de nos compatriotes, qui ne comprennent pas que le bouclier tarifaire ne s'applique pas de manière immédiate, comme pour ceux disposant de compteurs individuels. Ainsi, pour le gaz, l'aide est reversée par l'intermédiaire des fournisseurs, qui doivent présenter une demande pour le compte et au bénéfice des ménages concernés ; ils reversent ensuite les sommes perçues aux bailleurs, aux syndicats de copropriétaires ou aux régies, qui remboursent alors les copropriétaires ou les locataires des bailleurs sociaux. Cet enchevêtrement de remboursements peut être long et surtout coûteux pour les bénéficiaires, alors que le montant des appels de charges reçus ces dernières semaines a explosé.
Monsieur le ministre délégué, comment le Gouvernement envisage t-il de simplifier les procédures de remboursement et d'en contraindre les délais, afin de ne pas placer nombre de nos concitoyens dans des situations financières tendues ? Un remboursement rétroactif est-il prévu pour les factures d'électricité des chauffages collectifs pour l'année 2022 ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Vous soulignez à juste titre que les aides instaurées en 2022, après avoir été discutées et adoptées par cette assemblée, ont permis de limiter l'impact de l'inflation sur le pouvoir d'achat des Français, de limiter l'inflation elle-même et de placer la France en tête des pays où les prix ont le moins augmenté.
Nous débattons cet après-midi des oubliés du bouclier tarifaire et vous évoquez le cas des copropriétés et des HLM. Après avoir rappelé les mesures prises suite aux échanges entre la profession et le Gouvernement, vous insistez sur un point important : ces aides doivent parvenir le plus vite possible à leurs destinataires.
Je peux d'ores et déjà vous communiquer deux éléments. Très prochainement, il ne sera plus nécessaire pour chaque organisme de se tourner vers l'Agence de services et de paiement (ASP) pour bénéficier de l'aide. Le mécanisme sera inversé : c'est l'ASP qui se rapprochera d'eux pour effectuer les versements. En outre, des avances, représentant 50 % du montant de l'aide au titre du second semestre 2022, pourront être négociées. Ces deux mesures accéléreront les processus et limiteront l'impact de l'attente du versement des aides sur les trésoreries.

Mme la présidente.
La parole est à M. Lionel Vuibert.

M. Lionel Vuibert (RE).
Depuis la fin de la crise sanitaire, l'industrie française a vu sa consommation d'énergie augmenter et dépasser celle de 2019 dans quasiment tous les secteurs. Dans le même temps, les prix de l'énergie ont augmenté de plus de 46 % en 2021. Des mesures importantes ont été instaurées très tôt, comme le bouclier tarifaire pour les particuliers et les TPE ou encore l'amortisseur électricité pour les PME. Citons également le guichet d'aide au paiement des factures de gaz et d'électricité pour les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises. Ces mesures ont été prolongées en 2023.
Toutefois, ces dispositifs peuvent encore être améliorés et je souhaite interroger le Gouvernement à ce sujet. Quelles mesures supplémentaires ont-elles été instaurées pour les entreprises très consommatrices d'énergie, comme les forges et les fonderies ? Certaines d'entre elles ont été obligées d'arrêter leur activité ou de produire la nuit, pendant les heures creuses. Par ailleurs, quelles actions ont-elles été engagées pour les entreprises créées après le 1er décembre 2021, non éligibles à ces aides ?
De nombreux particuliers ne sont pas couverts par les tarifs réglementés et demeurent exclus des mesures de protection. L'Association nationale de défense des consommateurs et usagers demande de repousser de deux ans la fin du tarif réglementé de vente de gaz pour les 2,6 millions de ménages concernés, prévue le 30 juin 2023, en faisant valoir son caractère protecteur dans un marché devenu toxique. De même, les locataires ayant souscrit un abonnement collectif de chauffage ne bénéficient pas des mêmes mesures de protection que ceux disposant d'un abonnement individuel. Enfin, les banques alimentaires, qui ont un statut d'association, ne sont pas éligibles aux aides, au contraire des entreprises, des administrations ou des collectivités territoriales.
Monsieur le ministre délégué, quelles solutions rapides et efficaces peuvent-elles être mises en place pour nos compatriotes exclus des dispositifs de protection en matière énergétique ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Je réaffirme ici que notre intention consiste bien à couvrir l'ensemble des entreprises, en leur apportant une protection d'autant plus grande qu'elles sont petites. Ainsi, nous avons créé le bouclier pour les plus petites d'entre elles, l'amortisseur pour celles qui sont un peu plus grandes et le guichet pour les plus grandes. Ce dernier permet, selon certains critères, d'accéder à une aide plafonnée à 4 millions d'euros, mais aussi à des aides pouvant aller jusqu'à 50 ou 150 millions d'euros pour les entreprises les plus durement touchées par la crise de l'énergie, en particulier les entreprises industrielles et les grandes entreprises.
Pour les particuliers, le bouclier tarifaire limitera l'augmentation des prix du gaz et de l'électricité à 15 % en moyenne pour l'année 2023. S'y ajoutent des chèques visant le chauffage, le carburant et l'inflation plus généralement, pour les foyers les plus modestes. Cela doit permettre d'assurer la meilleure protection à nos concitoyens.
Quant aux associations, je suis prêt à en discuter avec vous à l'issue de cette séance, mais les dispositifs concernant les entreprises s'y appliquent également ; elles devraient en principe y accéder. Si tel n'était pas le cas, je vous remercie de nous le faire savoir.

Mme la présidente.
La parole est à M. Frédéric Falcon.

M. Frédéric Falcon (RN).
La crise énergétique menace de disparition les entreprises françaises, qui ont pourtant survécu à la crise sanitaire. Elles avaient alors été contraintes de s'endetter pour payer leurs charges, avec des prêts garantis par l'État (PGE) que beaucoup d'entre elles ne peuvent plus assumer. Cette crise énergétique est la conséquence de votre politique : la France produit électricité la moins chère d'Europe, qu'elle est contrainte de racheter au prix fort sur le marché européen de l'énergie. Vous avez fait le choix d'indexer le prix de l'électricité sur celui du gaz, alors que nous produisons de l'électricité nucléaire décarbonée à un prix défiant toute concurrence.
C'est sans compter l'ouverture à la concurrence de la distribution d'énergie et la fin des tarifs réglementés, qui ouvrent la porte à la spéculation et aux superprofits d'opérateurs financiers sans scrupules. Cette politique spoliatrice est une déclaration de guerre contre les Français, nos artisans, nos commerçants, nos agriculteurs et nos coopératives viticoles, qui, dans l'Aude, font face à une situation intenable. Elle est maintenue pour assurer la survie des centrales au gaz allemandes, non rentables. L'Allemagne ne supporte pas que la France tire de ses centrales nucléaires un avantage compétitif face au fiasco de choix énergétiques qui l'ont rendue dépendante au gaz russe. Combien d'entreprises françaises seront-elles sacrifiées pour sauver les centrales au gaz allemandes et enrichir un marché de l'énergie excessivement spéculatif ?
Dans votre novlangue habituelle, vous avez créé deux dispositifs : le bouclier tarifaire et le dernier-né, un obscur amortisseur électricité. Autrement dit, vous proposez de prélever des taxes pour distribuer des chèques, alors que les entrepreneurs veulent vivre de leur travail et non de l'assistanat.
Monsieur le ministre délégué, j'ai deux questions à vous poser. Pour parer à l'urgence et redonner confiance aux TPE et aux PME, pourquoi ne pas envisager de supprimer le segment C4 – ex-tarif jaune – et d'appliquer le tarif bleu à toutes les petites entreprises, simplifiant ainsi le traitement, pendant une période de dix-huit mois ? Et quand allez-vous prendre la seule décision sensée et pérenne dans cette crise, à savoir sortir du marché européen de l'énergie, comme l'ont fait l'Espagne et le Portugal ? Il n'y a pas de fatalité à cette crise. L'énergie est un bien collectif et stratégique, qui doit être géré dans le seul intérêt des Français et rester entre les mains d'un État stratège. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Ces dispositifs, qui sont bien dénommés en français et non en novlangue, font partie de l'ensemble des mesures qui ont permis depuis un peu plus d'un an de contenir les effets dramatiques de la hausse des prix de l'énergie sur le pouvoir d'achat des Français. Cette hausse est largement provoquée par la guerre déclenchée par la Russie de Vladimir Poutine contre l'Ukraine.

Un député du groupe RN.
Non, non, non !

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Il ne nous apparaît pas que la solution soit de sortir du marché européen de l'énergie, puisqu'il nous arrive d'exporter, mais aussi d'importer de l'électricité ; nous sommes très interconnectés avec les autres pays européens. En revanche, l'intention du Président de la République et du Gouvernement est ferme : réformer le marché de l'énergie pour découpler les prix du gaz et de l'électricité et faire en sorte de bénéficier de l'électricité à un prix plus proche de son coût de production en France. Par ailleurs, nous avons beaucoup d'ambition pour notre filière nucléaire : nous avons annoncé le déploiement de six EPR – réacteurs pressurisés européens – supplémentaires et la mise à l'étude de huit autres. Nous en débattrons prochainement au Parlement et je ne doute pas que nous pourrons compter sur votre soutien à ce moment-là.

Mme la présidente.
La parole est à M. Jorys Bovet.

M. Jorys Bovet (RN).
Boulangers, bouchers, restaurateurs, très petites entreprises – TPE –, petites et moyennes industries – PMI –, petites et moyennes entreprises – PME –, vous les avez oubliés. Vous les avez plongés dans une détresse totale. Ils ne peuvent plus faire face aux factures d'électricité, multipliées jusqu'à dix, parfois plus. Si vous ne changez rien, l'endettement, les licenciements et les fermetures les attendent.

M. Jorys Bovet.
Je suis allé à la rencontre des boulangers de ma circonscription. Plus qu'une question, c'est une inquiétude qui se répète : "Comment vais-je payer la facture ? Jusqu'à quand vais-je pouvoir tenir ?" Les artisans des petites communes font vivre les territoires et leurs commerces sont souvent les derniers lieux de rencontre des villages. Que se passera-t-il quand votre politique aura eu raison d'eux ? Qu'avez-vous réellement derrière la tête pour malmener les artisans comme vous le faites ?

M. Jorys Bovet.
Vous avez passé les dernières semaines à promettre des ristournes soumises à conditions, mais nombre de personnes ne s'y retrouvent pas. Les artisans n'attendent pas de grands mots ou l'annonce d'un chèque : ce qu'ils veulent, c'est vivre sereinement de leur métier.

M. Jorys Bovet.
Une solution pragmatique consisterait à sortir du système européen du prix de l'électricité, comme l'Espagne et le Portugal. Ma question est simple : quand aurez-vous le courage de vous lever face à l'Allemagne ? Quand défendrez-vous les intérêts de notre pays et de ceux qui font sa richesse ? Monsieur le ministre délégué, la politique de l'autruche, cela suffit ! Assumez vos erreurs et prenez enfin des décisions justes et pérennes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Parmi les décisions justes et pérennes figure l'adoption hier par votre assemblée du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables.

Plusieurs députés du groupe RN.
Non, non !

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Je regrette que vous ne l'ayez pas voté, puisqu'il constitue l'une des réponses structurelles aux problèmes que nous connaissons. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
S'agissant des aides aux artisans et plus généralement aux entreprises, l'intention du Gouvernement est de protéger toutes les entreprises, en protégeant d'autant plus les plus petites d'entre elles – donc les TPE. Pour rappel, les entreprises qui réalisent moins de 2 millions d'euros de chiffre d'affaires et qui emploient moins de dix salariés sont éligibles au bouclier, qui limite la hausse du prix du gaz et de l'électricité à 15 % en moyenne, à condition que leur puissance ne dépasse pas 36 kilovoltampères. Celles dont la puissance est supérieure sont éligibles à l'amortisseur, qui permettra de limiter l'impact des prix de l'énergie.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Le Gouvernement a constaté que le dispositif de l'amortisseur était insuffisant pour nombre d'entreprises, en particulier pour les boulangers. C'est la raison pour laquelle il a obtenu des énergéticiens la garantie que le prix du mégawattheure ne dépasserait pas 280 euros en moyenne pour l'année 2023. Cette protection très forte, qui s'appliquera donc à toutes les TPE, est bienvenue.

Un député du groupe RN.
Bien sûr !

Mme la présidente.
La parole est à Mme Marine Hamelet.

Mme Marine Hamelet (RN).
J'aimerais vous alerter sur deux points. Tout d'abord, la détresse des agriculteurs de mon département, qui ont de nouveau manifesté le 14 décembre parce qu'ils ne bénéficient pas du bouclier tarifaire. Les agriculteurs se sentent totalement abandonnés. Pouvez-vous nous expliquer quels éléments vous ont conduit à leur refuser ce bouclier tarifaire, alors même qu'ils sont ceux qui souffrent le plus de la situation actuelle ? Pour eux, l'augmentation du prix de l'énergie vient s'ajouter à l'inflation du prix des intrants, à l'augmentation du prix de l'alimentation animale, aux nombreuses crises comme la grippe aviaire chez les éleveurs, ou encore à l'alternance d'épisodes de gel et de sécheresse qui ont été particulièrement durs dans le Tarn-et-Garonne.

Mme Marine Hamelet.
Tout à l'heure, vous nous avez dit que les agriculteurs percevaient des aides. Sachez que lorsque le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire est venu au mois de novembre, il a effectivement proposé des aides aux agriculteurs, mais dont le montant était bien en deçà de leurs attentes et de leurs pertes réelles. Ils sont donc doublement oubliés.

Mme Marine Hamelet.
Le second point concerne les modalités de financement du bouclier énergétique. Selon le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, il a déjà coûté 100 milliards d'euros depuis trois ans. Est-ce de la dette ? Combien va-t-il nous coûter encore en 2023 ?

Mme Marine Hamelet.
Mon sentiment est que depuis le confinement, vous n'êtes jamais sortis du "quoi qu'il en coûte". Pourquoi n'avez-vous pas eu le courage de privilégier une solution beaucoup moins chère et beaucoup plus durable, à savoir négocier une dérogation au principe du coût marginal européen, comme le Portugal et l'Espagne ? Voilà des mois que vous devriez avoir invoqué le cas de force majeure. Mais que de courage aurait-il fallu pour entamer le bras de fer nécessaire avec la Commission européenne, qui nous impose d'acheter l'électricité beaucoup plus cher qu'elle ne coûte en réalité à produire !

Mme Marine Hamelet.
Alors, si votre politique est celle du chèque en blanc, dites-le clairement aux Français. Assumez que le bouclier tarifaire est une solution politique bas de gamme qui appauvrit l'État et endette nos enfants. Demain, ce seront eux les grands oubliés du bouclier tarifaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Comme toutes les entreprises de France, les agriculteurs sont éligibles aux aides qui ont été présentées. Lorsqu'elles ne suffisent pas à assurer la pérennité de l'entreprise, la bonne chose à faire est de prendre contact avec le conseiller départemental à la sortie de crise, afin de trouver des solutions, en demandant le report des cotisations et des charges auprès de l'Urssaf. Si des cas particuliers n'ont pas été identifiés, il ne faut pas hésiter à nous les faire remonter.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
À cette réponse aux problèmes liés au prix de l'énergie viennent s'ajouter les aides que j'évoquais tout à l'heure, notamment 480 millions d'euros pour l'aide à l'alimentation animale.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Quant aux aides aux entreprises, qui s'élèvent au total à 12 milliards d'euros, c'est la contribution européenne qui a été demandée aux énergéticiens qui permettra de les financer cette année. Comme vous le savez, elle rapportera en effet au titre de l'année 2023 environ 12 milliards d'euros.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
S'agissant de la sortie du marché européen de l'énergie, je tiens à préciser la réponse que j'ai donnée tout à l'heure. Parmi les bénéfices de l'interconnexion avec les autres pays européens figure la possibilité d'importer de l'électricité provenant d'autres pays européens, comme c'était le cas il y a quelques mois lorsque notre parc rencontrait des difficultés pour produire la quantité d'électricité dont la France avait besoin, mais aussi d'exporter de l'électricité vers d'autres pays dans les mois qui viennent, ce qui contribuera évidemment à la croissance du nôtre.

Mme la présidente.
La parole est à Mme Michèle Martinez.

Mme Michèle Martinez (RN).
La France compte un peu plus de 36 000 communes. Or un peu plus de 25 000 d'entre elles ne sont pas raccordées au gaz de ville. En raison de cette absence de raccordement, près de 600 000 foyers sont contraints de se tourner vers le gaz de pétrole liquéfié – GPL –, tel le propane, pour se chauffer, non par choix mais par nécessité, faute d'équipement adéquat sur leur territoire.

Mme Michèle Martinez.
Au moment même où les prix du GPL enregistrent une hausse de 17 % et alors que la facture de gaz d'un foyer moyen s'élève à près de 2 000 euros par an, leur exclusion du bouclier tarifaire est profondément injuste. Nous parlons de ménages qui vivent en milieu rural, où le taux de pauvreté est supérieur à celui du milieu urbain, et où chauffer son domicile coûte plus cher compte tenu de la vétusté du parc immobilier. Dans ces régions rurales, ce ne sont pas vos chèques qui aideront ces personnes à se chauffer décemment et à sortir de la précarité énergétique.

Mme Michèle Martinez.
Il est temps de mettre en place de vraies mesures pérennes, comme l'a déjà proposé Marine Le Pen : abaisser le taux de TVA à 5,5 % sur les énergies et sortir du marché européen.

Mme Michèle Martinez.
Qu'attendez-vous pour enfin protéger les Français ? Quand cesserez-vous de mettre en œuvre des solutions cache-misère que les contribuables finiront par payer un jour ou l'autre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Non, nous ne croyons pas qu'une baisse de la TVA soit bienvenue ou soit le moyen le plus efficace : la dernière fois que cette mesure a été prise dans notre pays, les prix n'ont pas baissé. C'est la raison pour laquelle nous lui avons préféré l'instauration de boucliers sur les prix du gaz et de l'électricité ainsi que des aides directes aux ménages concernés, en particulier les plus modestes.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
À ce stade de nos débats, je tiens à les rappeler. À compter du mois de décembre 2022, le chèque énergie exceptionnel a été attribué à 12 millions de familles modestes, pour un montant total estimé à 1,8 milliard d'euros. Un chèque exceptionnel de 100 ou 200 euros est versé aux ménages modestes qui se chauffent au fioul – environ la moitié des ménages qui y recourent y sont éligibles –, pour un montant total de 200 millions d'euros. Depuis la fin du mois de décembre, les ménages qui se chauffent au bois bénéficient d'un chèque spécifique d'un montant compris entre 50 et 200 euros, selon le mode de chauffage.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Par ailleurs, des aides sur le carburant ont été allouées. Entre le 1er avril et le 31 décembre 2022, l'aide à la pompe a représenté 7,6 milliards d'euros et une subvention spécifique aux entreprises de transport routier a également été attribuée, en fonction de la taille des entreprises, pour un montant de 400 millions d'euros. Enfin, en 2023, un chèque de 100 euros pour les dépenses de carburant sera distribué aux ménages éligibles pour un montant total de 1 milliard d'euros.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Vous citez l'exemple du gaz de pétrole liquéfié. Ce moyen de chauffage n'a pas fait l'objet d'un chèque spécifique, car son prix est resté très stable sur l'ensemble de cette période. Un soutien particulier n'était donc pas nécessaire. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

Mme la présidente.
La parole est à Mme Martine Étienne.

Mme Martine Etienne (LFI-NUPES).
Le bouclier tarifaire, prolongé en 2023, promettait d'aider les plus précaires à faire face à l'augmentation des coûts de l'énergie. Or la hausse des prix de l'énergie pèse, encore une fois, beaucoup plus sur les citoyens les plus pauvres. Même dans un logement bénéficiant de tarifs réglementés, et donc du bouclier énergétique, il sera question cette année d'une augmentation de la facture de l'ordre de 300 euros par an. C'est clairement intenable.

Mme Martine Étienne.
Pour les citoyens les plus précaires, c'est la double peine. Les ménages les plus pauvres vivent dans les logements les plus vétustes et les moins bien isolés. Pour se chauffer, ils payent en moyenne leur abonnement de gaz 13 % plus cher que les ménages aux revenus moyens, du fait d'équipements moins performants et d'une mauvaise isolation. Certains locataires anticipent les charges de fin d'année et prévoient de ne pas remettre le chauffage en hiver, pour ne pas être défaillants au moment de la régularisation.

Mme Martine Étienne.
Par ailleurs, les hébergements collectifs, les copropriétés et les HLM qui ne bénéficient pas des tarifs réglementés voient leurs factures d'électricité exploser. Or les aides proposées sont loin d'absorber cette hausse. Depuis l'ouverture à la concurrence des marchés de l'électricité et du gaz il y a quelques années, la situation est catastrophique. Ma première question est donc la suivante : à quand le rétablissement des tarifs réglementés pour tous sur la vente de l'énergie ?

Mme Martine Étienne.
Enfin, plusieurs d'entre nous ont reçu des témoignages de copropriétés confrontées à des rappels de charges exorbitants pour 2022 car elles ne bénéficiaient pas du bouclier tarifaire. De la même manière, des bailleurs augmentent drastiquement les charges des locataires de HLM non protégés par le bouclier énergétique, parfois même de 150 % comme à Trappes – depuis des mois, mon groupe vous interpelle sur cette question. Les locataires les plus pauvres subissent de plein fouet la crise énergétique. Les logements collectifs ne sont pas protégés et ce sont les citoyens les plus précaires qui en pâtissent le plus. Que comptez-vous instaurer pour protéger efficacement les logements collectifs de la hausse des prix de l'énergie ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Bien entendu, il faut se soucier des locataires, en particulier des plus modestes d'entre eux. Le Gouvernement a voulu apporter une réponse multidimensionnelle. La première mesure qui a été prise, vous vous en souvenez, est le plafonnement à 3,5 % de l'indice de revalorisation des loyers, qui a permis de contenir l'impact qu'aurait eu l'augmentation naturelle des prix sur les loyers, en particulier sur les ménages les plus modestes, pour lesquels le loyer représente une part importante du budget. Je citais tout à l'heure les divers dispositifs de chèques et d'indemnités qui ont été instaurés depuis l'automne 2021 pour améliorer le pouvoir d'achat, notamment celui des plus modestes.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Selon les instituts de statistiques, s'il existe un écart entre l'impact de la crise de l'énergie sur les foyers les plus modestes et sur les foyers les plus aisés, il est moins important en France qu'ailleurs. Cela étant dit, il faut continuer à essayer de résorber cet écart. Tel est l'objet de notre politique de soutien à la rénovation énergétique des bâtiments, en particulier des logements. Dans ce cadre, nous avons ainsi augmenté le budget de l'Agence nationale de l'habitat – Anah – et affirmé l'ambition de faire progresser le dispositif MaPrimeRénov' pour mettre fin aux passoires thermiques, afin de protéger le pouvoir d'achat des foyers les plus modestes de manière durable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Vous avez évoqué la question de l'habitat collectif. Je l'ai rappelé, des décisions ont été prises en toute fin d'année 2022, en lien étroit avec les acteurs du secteur, pour limiter l'impact des prix et éviter qu'il soit répercuté sur les loyers des locataires concernés.

Mme la présidente.
La parole est à Mme Nadège Abomangoli.

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES).
Les collectivités ne cessent d'alerter le Gouvernement sur les grandes difficultés auxquelles elles font face pour régler leurs factures d'énergie. Elles sont en effet confrontées à un choix cornélien : augmenter les impôts locaux, réduire la qualité des services publics en sabrant dans leurs dépenses ou augmenter les tarifs, excluant ainsi nombre de nos concitoyens de l'accès à ces services publics.
Contraint par les collectivités et les parlementaires, le Gouvernement a fait un geste en étendant le bouclier tarifaire aux petites communes, y compris celles qui ont des contrats en offre de marché. Ce geste est certes positif, mais outre que ce bouclier tarifaire entérine une hausse des prix de 15 %, il ne s'applique pas à l'ensemble des collectivités.
Il existe, me répondrez-vous, le filet de sécurité et l'amortisseur électricité. Mais ce filet de sécurité présente de nombreuses imperfections. Ainsi, ne peuvent en bénéficier que les communes dont l'épargne brute s'est dégradée d'au moins 25 %. Or, leur taux d'épargne brute n'a chuté en moyenne que de 4,4 % en 2022. Les communes qui disposent d'une épargne stable sont ainsi exclues du dispositif.
En multipliant les dispositifs, le Gouvernement ajoute de la complexité à une situation déjà incertaine pour les collectivités. Celles-ci ont besoin de clarté ; elles doivent pouvoir se projeter. Dans ma circonscription, à Aulnay-sous-Bois, à Bondy ou aux Pavillons-sous-Bois, des projets pour la jeunesse ou les familles risquent d'être mis à l'arrêt, voire abandonnés.
Il nous faut donc étendre les tarifs réglementés d'électricité et de gaz à l'ensemble des collectivités, moyennes ou grandes. Des ressources sont disponibles pour cela ; je pense par exemple à la taxation des superdividendes et des superprofits, que vous avez refusée.
Qu'avez-vous prévu pour les collectivités qui ne pourront bénéficier du filet de sécurité au moment où elles en auront le plus besoin ? Comptez-vous revenir sur votre projet de mettre fin aux tarifs réglementés et les étendre à l'ensemble des collectivités ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
Vous avez indiqué que le taux d'épargne brute des collectivités était en chute de 4,4 % ; or, au dernier comptage, il est en hausse de 7,7 % par rapport à 2021. Il s'agit cependant d'une moyenne, qui recouvre des situations très diverses. C'est pourquoi les collectivités ont été rendues éligibles au dispositif amortisseur électricité et le filet de sécurité a été déployé, après avoir été adopté par votre assemblée.
S'ajoutent à ces deux dispositifs des mesures de soutien à l'investissement des collectivités, dont j'ai rappelé l'importance non seulement pour le dynamisme économique de nos territoires, mais aussi pour leur transition écologique. Je pense en particulier au Fonds vert, doté de 2 milliards d'euros, aux dotations d'investissement habituelles, à hauteur de 2 milliards, et au FCTVA, pour un montant de 9 milliards. Au total, le soutien à l'investissement des collectivités est en hausse de 20 % par rapport à 2022.
Les collectivités ont donc de quoi faire. Toutefois, si certaines d'entre elles passent entre les mailles des filets de sécurité déployés par le Gouvernement, il ne faut pas hésiter à nous les signaler.

Mme la présidente.
La parole est à M. Léo Walter.

M. Léo Walter (LFI-NUPES).
Malgré le bouclier tarifaire, les tarifs de l'électricité et du gaz vont augmenter en 2023 de 15 % en moyenne, ce qui représente une charge annuelle supplémentaire de 300 à 600 euros pour les ménages.
Je veux insister à mon tour sur la catégorie de Français pour lesquels cette augmentation, déjà importante, sera bien plus lourde ; je veux parler des travailleurs de la première et de la deuxième ligne – les plus précaires –, à savoir les habitants des logements sociaux, en HLM ou en copropriété, qui ne sont pas concernés par le plafonnement prévu.
En effet, celui-ci ne s'applique qu'aux foyers ayant souscrit un contrat individuel de fourniture d'électricité ou de gaz. Or, de très nombreux syndics de copropriété et bailleurs sociaux souscrivent des contrats collectifs ; ils ne peuvent donc pas bénéficier de tarifs plafonnés et devront acheter leur énergie au prix du marché. Selon l'Union des organismes HLM, la moitié des bailleurs vont renouveler leur contrat cette année et verront donc leurs factures augmenter de 200 % à 300 %. Cela concerne au bas mot 3 millions de familles.
Vous aviez choisi – décision incompréhensible alors que le prix de l'électricité est indexé sur celui du gaz – de n'appliquer le bouclier tarifaire qu'aux logements chauffés au gaz. Vous avez finalement étendu les compensations prévues à tous les types de chauffage ; c'est déjà ça ! Mais le dispositif est illisible, nous disent les bailleurs. Ces derniers, face à l'incertitude, répercutent d'ores et déjà les augmentations attendues sur les charges locatives. Les locataires devront ainsi s'acquitter cette année de charges jusqu'à quatre fois supérieures à celles qu'ils payaient il y a deux ans ou l'an dernier.
Puisque le Gouvernement refuse d'adopter la seule mesure efficace, lisible et pérenne dans ce contexte, à savoir le retour au tarif réglementé pour tout le monde, je souhaiterais savoir ce que vous comptez faire pour accompagner dans l'urgence ces Français qui sont, je le répète, parmi les plus précaires.

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
La protection des familles les plus fragiles est au cœur des dispositifs adoptés en faveur des ménages depuis la hausse des prix constatée l'an dernier. Je pense par exemple à l'allocation exceptionnelle de 100 euros qui a été versée au mois de septembre dernier à 10 millions de foyers, au chèque exceptionnel, dont le montant est compris entre 100 et 200 euros et qui a été perçu au mois de décembre par 12 millions de foyers, et, pour 2023, au chèque énergie, compris entre 70 et 280 euros, qui sera adressé à 3 millions de bénéficiaires au mois d'avril.
En outre, la hausse des loyers a été plafonnée. Cette mesure était en effet indispensable pour éviter que les ménages que vous avez évoqués dans votre question, pour lesquels le loyer constitue une part importante du budget, ne soient étouffés par une augmentation excessive.
Enfin, à la suite des échanges intervenus avec les élus et les représentants du secteur du logement social, de l'habitat collectif et des copropriétés, trois décrets ont été publiés le 31 décembre 2022, qui visent à renforcer la protection pour le quart des foyers le plus durement touché par la hausse des prix de l'énergie. Ce dispositif doit désormais être diffusé. Le Gouvernement rencontre régulièrement les représentants du secteur, et j'invite celles et ceux d'entre vous qui constateraient que la situation n'évolue pas à le faire savoir au Gouvernement.

Mme la présidente.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard (NI).
Bien entendu, lorsque l'on évoque les oubliés du bouclier tarifaire, on pense d'abord aux artisans : nos boulangers, bouchers, fromagers, restaurants, traiteurs, blanchisseries, laveries, sans oublier nos vignerons, bref, tous ceux qui ont signé un mauvais contrat au mauvais moment et qui sont dans une situation insupportable. Mais on pense moins aux collectivités locales, qui se trouvent exactement dans la même situation que les très petites et les petites et moyennes entreprises. Pour celles de nos communes qui ont vu leur contrat de fourniture de gaz ou d'électricité arriver à échéance ces derniers mois – au mauvais moment –, l'addition est salée.
Certes, vous proposez quatre mesures, que vous avez détaillées, en faveur de nos collectivités : la baisse de la part d'accise sur l'électricité, le bouclier tarifaire pour celles qui comptent moins de dix employés, l'amortisseur électricité pour celles qui ne sont pas éligibles au bouclier et le filet de sécurité pour les communes et établissements de coopération intercommunale remplissant certains critères. C'est une bonne chose, même si pour beaucoup, ce ne sera pas suffisant.
Toutes ces mesures, indispensables, coûtent très cher. Mais si nous sommes dans l'obligation de les adopter pour aider notre tissu économique, c'est pour une raison : le marché européen de l'énergie. Ma question est donc simple : quand la France exigera-t-elle de sortir de ce marché, même de façon temporaire, comme l'ont fait l'Espagne et le Portugal ? À défaut d'en sortir, où en sont les négociations pour découpler le prix du gaz et celui de l'électricité ?
Comme l'a dit Bruno Le Maire lui-même lors de ses vœux au monde économique, la France doit refuser "de continuer de payer l'électricité nucléaire décarbonée au prix de l'électricité produite à partir des énergies fossiles". Quand allons-nous enfin nous attaquer à la cause de nos problèmes ?

Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.
La France a fait savoir qu'elle souhaitait un découplage des prix de l'électricité et du gaz au niveau européen, et elle semble avoir emporté la conviction de la présidente de la Commission européenne, qui s'y est déclarée favorable. Mes collègues du Gouvernement, en particulier le ministre de l'économie et des finances et la ministre de la transition énergétique, s'attachent à tracer le chemin d'un consensus au niveau européen.
S'agissant des petites entreprises de votre département, l'Hérault, je rappelle que si la puissance de leur compteur est inférieure à 36 kilovoltampères, elles sont éligibles au bouclier tarifaire, qui limite l'augmentation des tarifs à 15 % pour 2023, les autres étant éligibles à l'amortisseur électricité et au guichet.
Encore une fois, il est important que les entreprises, si elles ont un doute concernant leur éligibilité, se tournent vers le conseiller départemental à la sortie de crise. Pour faciliter le contact avec ces conseillers, le Gouvernement a mis en ligne leurs numéros de téléphone fixe et portable. Ainsi le conseiller départemental à la sortie de crise de l'Hérault est joignable au 06 10 03 97 65. (Sourires.) Ces conseillers sont à l'écoute des entrepreneurs et peuvent leur apporter des solutions.
J'ajoute que des mesures ont été prises pour aller vers ces derniers ; je pense à la mission des chambres de commerce, qui ont appelé 20 000 entreprises, et aux chambres de métiers, qui ont appelé l'ensemble des boulangers de notre pays pour être certains qu'aucune entreprise ne reste au bord du chemin.

Mme la présidente.
Nous avons terminé les questions sur les oubliés du bouclier énergétique.


Source https://www.assemblee-nationale.fr, le 13 janvier 2023