Texte intégral
APOLLINE DE MALHERBE
Bonjour Olivier DUSSOPT !
OLIVIER DUSSOPT
Bonjour !
APOLLINE DE MALHERBE
Olivier DUSSOPT, vous êtes le ministre du Travail, du Plein Emploi de l'Insertion et c'est surtout le ministre des retraites puisque cette réforme c'est la vôtre. Quel échec !
OLIVIER DUSSOPT
Je ne crois pas !
APOLLINE DE MALHERBE
Ah non ?
OLIVIER DUSSOPT
Non, je ne crois parce que ce serait un échec s'il n'y avait pas de texte. Or, il y a un texte, il y a un texte qui a été examiné, adopté par le Sénat qui a été examiné et adopté par la commission mixte paritaire qui a une majorité au Sénat à deux reprises en première lecture lorsqu'il a fallu adopter les conclusions et effectivement, il n'y a pas eu de de majorité à l'Assemblée nationale parce qu'un certain nombre de membres du groupe des Républicains n'ont pas répondu présent et n'ont pas suivi la position qui avait été arrêtée par leur parti mais ça n'est pas un échec puisqu'il y a un texte et ce texte sera, si la motion de censure est rejetée, mis en œuvre.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc vous estimez honnêtement ce matin que ce n'est pas un échec de pas avoir réussi à ce qu'il y ait un vote parce que vous dites "il n'y a pas une majorité"
OLIVIER DUSSOPT
Ah, c'est différent !
APOLLINE DE MALHERBE
…Mais il n'y a même pas eu de tentation de vote, il n'y a même pas eu du tout, c'est la première fois d'ailleurs qu'un texte passerait sous la Ve République sans jamais avoir été soumis à quel que vote que ce soit à l'Assemblée nationale !
OLIVIER DUSSOPT
Avec des votes au Sénat, il faut le rappeler.
APOLLINE DE MALHERBE
Non mais à l'Assemblée nationale zéro vote !
OLIVIER DUSSOPT
Mais je réponds à votre question dans son intégralité : il y a eu deux votes au Sénat, deux votes majoritaires et l'Assemblée nationale n'a pas pu voter. Pourquoi l'Assemblée nationale n'a pas pu voter ? Il faut le rappeler, ceux qui aujourd'hui à gauche vous disent "rendez-vous compte"…
APOLLINE DE MALHERBE
Ce n'est pas parce que vous avez choisi le 49.3 ?
OLIVIER DUSSOPT
Pardon mais rappelez-vous de la première lecture. Qui a déposé 20 000 amendements ? Qui a organisé l'obstruction ? Qui a tout fait pour que l'Assemblée ne vote pas ? C'est l'opposition de gauche et ceux qui aujourd'hui disent "nous aurions préféré voter" sont ceux qui en première lecture ont tout fait pour qu'il n'y ait pas de vote.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc là, c'est la faute des LR. Avant, c'était la faute des LFI !
OLIVIER DUSSOPT
Si votre question est de dire est-ce que vous auriez préféré qu'il y ait un vote ? Oui et nous avons tout fait pour qu'il y ait un vote et je suis parlementaire depuis 2007, j'ai été député pendant plus de 10 ans avant de rentrer au Gouvernement, je sais qu'un député ça vote, ça aime voter et un député, c'est fait pour voter ; c'est le rôle du député. En première lecture les oppositions ont voulu empêcher, nier le rôle du Parlement qui est un rôle de vote et de délibération.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous avez aussi votre part de responsabilité ? Enfin, on ne va pas refaire l'une histoire mais enfin Olivier DUSSOPT vous avez choisi un cadre législatif qui vous permettait des procédures accélérées ; il y a eu quand même une procédure expresse à l'Assemblée, il y a eu un vote bloqué au Sénat, est-ce que tout cela est satisfaisant ?
OLIVIER DUSSOPT
D'abord, je répète, si vous me dites "est-ce que vous préféré un vote" ? Oui. Nous avons tout fait pour jusqu'à la dernière minute, nous avons regardé, compté avec la Première ministre, avec le président de la République et nous avons pris la décision collectivement de constater, nous avons fait le constat qu'il n'y avait pas suffisamment de garanties pour un texte aussi important et que la zone de risque était trop importante pour un texte qui, je le répète, avait fait l'objet d'une adoption en commission mixte paritaire.
APOLLINE DE MALHERBE
C'est quoi la "zone de risque", il vos manquait combien de voix ?
OLIVIER DUSSOPT
C'est lorsque les choses sont très proches l'une de l'autre !
APOLLINE DE MALHERBE
Est-ce que vous confirmez le chiffre de 3 ? Il manquait 3 voix.
OLIVIER DUSSOPT
Vous savez quand vous faites des évaluations, des pointages, disent certains sur 577 députés, un coup c'est 3, un coup, c'est 5, les choses bougent.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais c'était autour de 3, 4.
OLIVIER DUSSOPT
Mais je reviens sur ce que vous avez dit ; vous dites que vous avez choisi une procédure qui allait vite. Au total quand on regarde le temps de débat à l'Assemblée, le temps de débat au Sénat, on arrive au total à 175 heures, c'est plus que les 2 dernières réformes des retraites réunies ; c'est le total des 2 dernières réformes. Il n'y a pas eu moins de débat sur cette réforme que sur les autres. Le Sénat a vu l'intégralité du texte article par article. Vous dites "il y a eu un vote unique" et figurez-vous que je regardais les archives, les 3 dernières réformes des retraites avant celle-ci ont toutes fait l'objet de vote unique soit au Sénat soit à l'Assemblée nationale. La réforme de Marisol TOURAINE en 2013, vote unique à l'Assemblée nationale ; la réforme Fillon de 2010, vote unique au Sénat. Ça n'est pas une rareté en la matière ; pourquoi ? Parce que les réformes des retraites ont toujours été difficiles dans notre pays.
APOLLINE DE MALHERBE
Je vais vous dire, Olivier DUSSOPT, que je suis assez surprise ce matin et je ne sais pas si les gens le ressentent face à leur télévision ou derrière leur poste de radio mais j'ai presque l'impression et pourtant ce n'est pas la première fois que vous venez ici depuis le début de l'examen de ce texte que vous êtes soulagé, voire même plus conquérant que jamais ! Je vous imaginais défait ce matin et j'ai face à moi quelqu'un qui me dit "mais non, ça va très bien, ce n'est pas un échec" et même j'ai l'impression que vous avez repris du poil de la bête.
OLIVIER DUSSOPT
Il faut dire que la dernière fois que vous …
APOLLINE DE MALHERBE
Avouez que c'est surprenant !
OLIVIER DUSSOPT
…la dernière fois que vous m'avez reçu, j'étais "malade comme un chien" pardon pour l'expression !
APOLLINE DE MALHERBE
Non mais vous êtes plus souriant, plus conquérant ….
OLIVIER DUSSOPT
Mais pourquoi voulez-vous que l'on soit abattu ? On est abattu quand …
APOLLINE DE MALHERBE
Il fallait voir la tête de vos députés quand ils sont rentrés dans l'Assemblée, honnêtement, ils étaient abattus, on avait l'impression qu'ils allaient à un enterrement.
OLIVIER DUSSOPT
Reprenons les choses les unes après les autres. Est-ce que c'est satisfaisant d'être d'avoir recours au 49.3 ? C'est toujours un crève-cœur et nous aurions préféré qu'il y ait un vote et les députés de la majorité souhaitaient un vote parce que la majorité a été unie de bout en bout, voulait faire avancer cette réforme et s'est battue pour que cette réforme soit améliorée tout au long du débat parlementaire, ça a été le cas. Est-ce que nous avons un texte ? Oui nous avons un texte et un texte qui a été amélioré par le débat parlementaire, je le répète ; donc je ne vous dis pas que tout est parfait parce que ça serait d'abord une forme de mensonges et on peut toujours faire mieux et j'aurais évidemment …
APOLLINE DE MALHERBE
Peut-être que vous soyez juste content que ce soit fini, quoi !
OLIVIER DUSSOPT
Mais attendez, ce n'est pas fini !
APOLLINE DE MALHERBE
J'essaye de comprendre !
OLIVIER DUSSOPT
Mais ce n'est pas fini !
APOLLINE DE MALHERBE
Mais enfin le débat …Oui il va y avoir la motion de censure et on va voir !
OLIVIER DUSSOPT
Mais au-delà de ça, si les motions de censure sont rejetées, vous croyez qu'une réforme, ça s'arrête au moment où c'est voté ? Une réforme ça se met en œuvre, ça se travaille, il y a des décrets à prendre ; il y a tout un travail de mise …et c'est vrai pour une réforme des retraites comme pour toutes les autres donc si vous vous attendiez que je vienne sur votre plateau en étant abattu, en étant défait, certainement pas !
APOLLINE DE MALHERBE
Non mais je vous trouve très fier pour un truc dont on peut se dire qu'il n'y a pas forcément de quoi être fier !
OLIVIER DUSSOPT
Vous confondez - pardon de de le dire comme ça -, mais vous confondez la fierté et la détermination et moi, je pense que quand on est dans un moment de difficulté parce que c'est un moment de difficulté quand on est dans un moment où la vie politique est chahutée parce qu'un 49.3, ça chahute mais au-delà du 49.3, il faut avoir en tête la manière dont les débats se sont passés, avec énormément de violence. Moi, je n'ai jamais connu un hémicycle où la haine prend autant de pas sur la raison, il y a eu des invectives hier toute la journée toute la séance l'après-midi …
APOLLINE DE MALHERBE
Je vous propose qu'on réécoute justement ce brouhaha, cette ambiance dans l'assemblée lorsque la Première ministre est rentrée.
OLIVIER DUSSOPT
Quand c'est compliqué, il faut être déterminé parce que l'État doit être tenu.
APOLLINE DE MALHERBE
On entend ces huées alors qu'Élisabeth BORNE se dirigeait vers le pupitre ; elle n'a d'ailleurs pas pu faire sa déclaration dans un premier temps ; elle a été obligée de sortir de l'hémicycle, il y a eu une suspension de séance avant qu'elle ne revienne et que malgré le bruit qui couvrait sa voix, elle finisse par invoquer le 49.3. A ce moment-là, qu'est-ce que vous vous ressentez ?
OLIVIER DUSSOPT
Je ressens beaucoup de tristesse pour l'Assemblée nationale beaucoup de tristesse parce que ce qui s'est passé hier au moment où la première ministre s'est exprimée quand la Première ministre s'est exprimée, la violence des propos et la violence des comportements c'est ce que j'ai vu pendant tout le débat sur les retraites à l'Assemblée nationale et beaucoup de tristesse non pas pour moi, pour les débats vécus et pas plus pour elle, c'est du soutien que je lui apporte. C'est de la tristesse pour l'Assemblée parce que cette institution est une belle institution c'est là où les lois sont votées et c'est là où la nation s'exprime et cela fait des semaines des mois que nous avons des oppositions en particulier, la France insoumise qui ne cherchent qu'une chose : c'est bloquer, c'est abîmer et la violence et la contestation finalement sont dans leur ADN.
APOLLINE DE MALHERBE
Certains députés ont évoqué l'émotion, voire même les larmes d'Élisabeth BORNE lorsqu'elle est sortie de l'Assemblée après avoir tenu son discours et qu'elle s'est retrouvée dans ce qu'on appelle la salle Colbert qui est cette salle où tous les députés de la majorité l'ont entourée, est-ce que vous confirmez ?
OLIVIER DUSSOPT
C'est un moment d'émotion mais vous savez la Première ministre est solide, elle l'a montré hier, elle est très solide et pour revenir à ce que l'on se disait avant que vous passiez l'extrait d'hier …
APOLLINE DE MALHERBE
Elle est solide mais il y a eu des larmes !
OLIVIER DUSSOPT
Non, la Première ministre ne pleure pas.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc les larmes évoquées par certains députés, non, ce n'était pas …
OLIVIER DUSSOPT
Non, c'est de l'émotion, c'est de l'émotion parce que effectivement la majorité lui apportait un soutien aussi uni que le soutien apporté à la réforme mais je reviens à ce que l'on disait tout à l'heure, quand ça chahute, quand les institutions sont d'une certaine manière remises en cause, quand la politique devient aussi violente et quand on a l'honneur de servir l'État et pour ce qui me concerne, c'est à la fois un honneur, servir l'État, de participer au gouvernement et une fierté de le faire sous l'autorité du président de la République et de la Première ministre, oui il faut être solide et il faut tenir la barre.
APOLLINE DE MALHERBE
Et il y a eu ce moment, vous dites que vous soutenez la Première ministre, il y en un qui a voulu manifester, y compris dans ses gestes, le soutien qu'il avait à votre endroit, c'est Éric DUPOND-MORETTI, il était assis derrière vous à l'Assemblée et il a eu ce geste, on peut le voir sur BFM TV, ce geste de la main sur votre épaule, regardez. Et ce geste comment vous l'avez ressenti, vous ?
OLIVIER DUSSOPT
C'est de l'amitié. On cherche parfois des explications très compliquées à des choses qui sont très simples ; c'est de l'amitié et ce geste intervient au moment où la Première ministre a des mots aimables et salue le travail que j'ai fait sur la réforme. Vous savez un Gouvernement, c'est d'un collectif d'hommes et de femmes et il y a des liens d'amitié. C'est aussi simple que ça.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous continuez à dire qu'il y a de la fierté à servir, à avoir déposé ce texte, on va regarder d'ailleurs concrètement ce qu'il y a dans ce texte mais on va faire un petit détour par la rue et par la réaction d'hier. Mais tout de même cette question, quand il n'y a pas de majorité dans l'opinion et ça, on l'a vu sondage après sondage, quand il n'y a pas de majorité dans l'assemblée politique, à aucun moment, vous ne vous êtes retourné en vous disant "on est un peu seul" ?
OLIVIER DUSSOPT
Non parce que parce qu'il y a de la détermination et il y a une nécessité.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais à aucun moment vous ne vous êtes posé la question "sommes-nous légitimes ?".
OLIVIER DUSSOPT
Nous sommes légitimes parce que nous n'opposons pas, et je crois qu'il ne faut pas opposer la légitimité du Parlement et d'une majorité relative, mais qui existe, sans majorité alternative, il n'y a pas d'autre majorité que celle que nous avons, à moins que la France insoumise et le Front national gouvernent ensemble, mais je ne crois pas que ce soit prévu. Et c'est mieux pour la France. Par contre, nous avons une nécessité qu'il y est de mener cette réforme, pour préserver, pour sauver le système par répartition. Il faut le rappeler, parce que parfois le chahut emmène les chiffres. Mais 2027 c'est dans 4 ans, et en 2027 notre système, si nous ne faisons rien, ce sera 12,5 milliards de déficit par an, ce sera en 20 milliards en…
APOLLINE DE MALHERBE
Et on va revenir sur le fond, sur ce qui y a finalement dans ce texte…
OLIVIER DUSSOPT
Et juste d'une phrase, mais ceux qui nous disent "il ne faut pas le faire, il ne faut pas avancer", ils imaginent que parce qu'on met la réforme en pause, ça met le déficit en pause ? Pas du tout, le déficit continue à se creuser.
APOLLINE DE MALHERBE
Olivier DUSSOPT, vous avez regardé évidemment les réactions, d'abord immédiates aux abords de la place de la Concorde, le chahut hier dans plusieurs villes de France, dont effectivement le centre de Paris avec notamment ces poubelles qui ont été dispersées dans les rues, puisqu'elles étaient de toute façon là, les feux parfois, les interpellations, plusieurs dizaines voire même autour de 300 interpellations disait ce matin le ministre de l'Intérieur. Ce matin, le périphérique parisien bloqué, des actions qui sont annoncées ici et là. Vous n'avez pas le sentiment d'avoir mis feu aux poudres ?
OLIVIER DUSSOPT
D'abord, c'est l'occasion pour moi votre question, de saluer le travail des forces de police, qui font un travail remarquable, ça a été le cas hier à Paris, ça a été le cas hier dans d'autres villes. Et de dire aussi que certaines actions ne sont pas justes finalement. Vous parlez du blocage du périph, mais qui est gêné par le blocage du périph ? Qui est gêné par un blocage du périph entre 07h00 et 08h00 ou autour de 08h00 ? Les gens qui sont dans leur voiture et qui viennent travailler. Et donc l'expression d'opposition, l'expression de différences, c'est légitime, c'est la démocratie, nous avons l'immense chance de vivre dans un pays où exprimer son opposition est possible, parce que nous sommes justement dans une démocratie. Mais entre l'expression d'une opposition, un bloc et un blocage, il y a une différence. Et puis si l'expression une opposition c'est empêcher d'accéder à leur emploi celles et ceux qui en ont besoin, je ne suis pas sûr que ça ne soit ni juste ni efficace.
APOLLINE DE MALHERBE
Si on regarde sur le fond, j'essaie de me mettre dans la peau d'Olivier DUSSOPT, et je me dis : honnêtement quel gâchis. Parce que si ce texte-là, ce n'était pas vous le texte de l'équilibre financier, c'était pour vous le texte qui allait permettre un certain nombre d'avancées à vos yeux, il a été quand même très très très largement transformé, au gré des concessions que vous avez faites à LR, tout ça pour finalement ne pas à avoir les voix de LR. Alors, regardons quand même ce qu'il y a dans le fond…
OLIVIER DUSSOPT
Juste une correction, il nous a manqué des voix de LR à l'Assemblée nationale, pas toutes, mais il nous en a manqué, il ne nous en a pas manqué au Sénat. Le texte a été adopté au Sénat, notamment parce que la majorité sénatoriale a soutenu ce texte. Et ce que…
APOLLINE DE MALHERBE
Oui, mais enfin, c'est quand même un texte de droite aujourd'hui.
OLIVIER DUSSOPT
Non. Et ce que vous appelez, c'est un texte nécessaire, et c'est un texte équilibré…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous ne diriez plus que c'est un texte de gauche, comme disiez au début.
OLIVIER DUSSOPT
Ce que j'ai dit au début, c'est que les gouvernements sociaux-démocrates qui nous entourent auraient pu prendre la même réforme. Mais c'est un texte équilibré. Vous parlez de concessions. Quelles sont les principales concessions, pour reprendre ce terme, qui ont été…
APOLLINE DE MALHERBE
Alors, allez-y justement, qui restent dans les textes adoptés par la Commission mixte paritaire, qui est donc le texte qui, s'il arrive à dépasser les motions de censure, sera le texte adopté.
OLIVIER DUSSOPT
La retraite minimum, la revalorisation des petites retraites, avec cet objectif d'une retraite à 1 200 € pour ceux qui ont fait toute leur carrière au niveau du smic. C'est dans le texte. La meilleure prise en compte de la situation des mères de famille, c'est ce que vous appelez une concession, ça a été travaillé au Sénat, c'est une bonne mesure, c'est dans le texte. La meilleure prise en compte de la pénibilité, la mise en place d'un fonds d'investissement pour prévenir l'usure professionnelle et notamment le port de charges, les vibrations, les postures pénibles, c'est dans le texte aussi. L'index pour les séniors, c'est dans le texte.
APOLLINE DE MALHERBE
Oui mais ça, personne n'est dupe, on a bien compris que cet index seniors, c'était pour faire genre, parce qu'il va sauter au Conseil constitutionnel.
OLIVIER DUSSOPT
Mais d'abord, ne prenons pas les décisions du Conseil constitutionnel à sa place.
APOLLINE DE MALHERBE
Non mais vous le savez vous-même.
OLIVIER DUSSOPT
Mais je pense que c'est, je l'ai expliqué…
APOLLINE DE MALHERBE
Non mais je trouve que c'est important de le dire quand même à ceux qui nous écoutent.
OLIVIER DUSSOPT
Mais j'ai expliqué au Sénat, que si nous avons inscrit l'index dans ce texte financier, c'est parce que les premières pénalités interviendront à la fin de l'année 2023, et qu'en ce sens ça a un impact sur les comptes sociaux de l'année 2023. Nous verrons ce que le Conseil constitutionnel en dit, mais nous considérons que ce cet index, cet outil, c'est un outil parmi d'autres pour l'emploi des seniors, a sa place dans le texte. Nous avons fait, je reprends votre terme même si je ne le partage pas, vous l'avez compris, nous avons travaillé avec le Sénat, nous avons accepté une demande du Sénat qui est de prévoir la création d'un contrat de travail spécifique pour les demandeurs d'emploi de plus de 60 ans. C'est dans le texte. Nous avons fait en sorte, toujours en travaillant avec le Sénat, que toutes les demandes que portait la majorité présidentielle à l'Assemblée nationale, soient intégrées. Faciliter les rachats de trimestres pour les étudiants, pour les stagiaires. Mieux protéger, mieux accompagner les sapeurs-pompiers…
APOLLINE DE MALHERBE
Arrêtons-nous un instant sur cette histoire de la facilitation des rachats de trimestres, parce que…
OLIVIER DUSSOPT
Pardon, mais…
APOLLINE DE MALHERBE
Allez-y.
OLIVIER DUSSOPT
Faire en sorte d'améliorer la pension de réversion pour les orphelins, faire en sorte de prendre en compte les indemnités journalières des femmes en congé maternité, avant 2012, qui n'étaient pas retenues. Il y a une liste d'avancées, de points et d'amélioration du texte, qui ont tous été intégrés au texte.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais, au-delà des mots, j'aimerais bien savoir comment ça se traduit. Il y a cette question, vous l'évoquiez à l'instant, du rachat des trimestres. Il y a un certain nombre d'anciens apprentis qui ont commencé à travailler du coup très jeunes, dans cet apprentissage, cette période de pré-travail, qui réalisent que, alors qu'ils ont commencé à bosser à 15 ans comme apprenti, ont des années, les premières années, qui ne seront pas comptabilisées, puisque quand on était apprenti avant 2014, on ne cotisait pas. Vous avez dit, et plusieurs d'entre vous de la majorité, ont dit : non non, mais on s'engage sur cette histoire, on va faciliter le rachat. Ça veut dire quoi ? Ça va leur coûter combien et ça va marcher comment ?
OLIVIER DUSSOPT
Alors, c'est un peu technique.
APOLLINE DE MALHERBE
Au-delà des mots.
OLIVIER DUSSOPT
C'est un peu technique, mais si vous me laissez-le temps de faire trois phrases, je vous l'explique.
APOLLINE DE MALHERBE
Allez-y.
OLIVIER DUSSOPT
Tout l'apprentissage, à partir de 2014, compte pour les retraites, c'est un des acquis la réforme de 2013 et c'est lié aussi à la revalorisation de la rémunération des apprentis. Avant 2014, pour que les trimestres comptent, il fallait en apprentissage gagner suffisamment, être assujetti à cotisations. Quand on parle de trimestres d'apprentissage qui ne comptent pas aujourd'hui, on parle de personnes qui ont été apprenti il y a longtemps, à une période où soit il n'y avait pas de cotisation, soit des rémunérations liées à l'apprentissage qui étaient très très basses. Qu'avons-nous fait ? Jusqu'à présent, lorsque vous aviez été apprenti dans ces conditions, vous pouviez racheter des trimestres, comme on peut racheter des trimestres de stages, et tout assuré, c'est peu connu mais tout assuré peut racheter des trimestres. Ça coûte assez cher. Ça coûte assez cher…
APOLLINE DE MALHERBE
Ça veut dire quoi "assez cher" ?
OLIVIER DUSSOPT
Ça veut dire ce que si vous rachetez vos trimestres très tard dans votre carrière, après 50 ans, après 55 ans…
APOLLINE DE MALHERBE
Enfin, au moment où on commence à se poser la question.
OLIVIER DUSSOPT
Ça peut coûter jusqu'à 4 500, 5 000 euros le trimestre. Ce n'est pas nous qui l'avons créé, c'est l'état du droit…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais, allez-vous améliorer cette situation ?
OLIVIER DUSSOPT
J'y viens, et vous m'avez promis de me laisser les 3 phrases pour compléter.
APOLLINE DE MALHERBE
C'est plus que 3, là.
OLIVIER DUSSOPT
C'est plus que 3, mais je déborde toujours un peu.
APOLLINE DE MALHERBE
Allez-y.
OLIVIER DUSSOPT
Donc c'est très cher, et plus on attend, parce que c'est un système qu'on appelle un système actuaire, c'est le terme technique, plus on attend plus c'est cher. Nous avons prévu que les trimestres d'apprentissage puissent être rachetés pour des montants forfaitaires autour de 1 500 euros. Ça reste beaucoup d'argent, mais vous conviendrez que c'est beaucoup moins cher que le tarif normal.
APOLLINE DE MALHERBE
Et à tout moment, ça ne sera pas progressif en prix ?
OLIVIER DUSSOPT
C'est un rachat forfaitaire, donc c'est quelque chose de protecteur par rapport aux autres systèmes de rachat. Et nous avons adopté une disposition au Sénat, justement, qui est importante, mais qui est très technique : en général, quand vous rachetez des trimestres, ces trimestres ne comptent pas pour savoir si vous êtes éligible ou pas, si vous avez droit ou pas à un départ anticipé pour carrière longue. Nous avons voté avec le Sénat, le Sénat a voté, pardon, et nous aurons soutenu le fait que ces trimestres rachetés pour l'apprentissage, puissent compter, dès lors qu'ils ont été rachetés au tarif avantageux que j'ai dit, pour le départ en carrière longue. C'est très technique, mais c'est ça qui va changer la donne.
APOLLINE DE MALHERBE
Et qui va changer la donne donc peut-être pour ceux qui découvrent ou redécouvrent, parce qu'ils se posent à nouveau la question à la faveur de cette loi, qu'ils ont commencé à travailler tôt et que ça n'était pas pris en compte jusqu'à présent.
OLIVIER DUSSOPT
Vous savez, il y a plein de choses que les gens…Il y a plein de choses que l'on ne sait pas. Peut-être que vous avez fait des stages pendant vos études, je suis assez convaincu que si vous aviez fait des stages, des stages longs, personne ne vous a dit que vous aviez la possibilité de racheter vos trimestres de stages. On est en train de changer la règle aussi, mais jusqu'à présent, pour racheter un trimestre de stage, il fallait le faire dans les 2 ans qui suivent le stage. En général vous étiez encore étudiants ou étudiante.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc on n'y pensait pas.
OLIVIER DUSSOPT
Là, on a dit : c'est valable jusqu'à 25 ans, donc quand vous avez fini vos études.
APOLLINE DE MALHERBE
Olivier DUSSOPT, il y a une motion de censure qui pourrait aboutir, c'est celle du groupe LIOT. La France insoumise a annoncé que finalement elle ne déposerait pas sa propre motion de censure pour mettre tous ses œufs dans le panier de cette motion de censure là.
OLIVIER DUSSOPT
Petite correction, ça n'est pas la France insoumise, c'est monsieur MÉLENCHON qui l'a annoncé, et donc on est dans une situation assez fantastique, où monsieur MÉLENCHON, qui n'est pas député, décide de ce que vont faire les députés de la France insoumise, du Parti socialiste, des Verts, du Parti communiste, comme s'il…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais il n'est pas légitime pour dire ce que va faire la France insoumise ?
OLIVIER DUSSOPT
Mais il est légitime à dire, pour la France insoumise, mais je suis assez frappé de voir quelqu'un qui n'est pas député, décide pour les autres.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc vous donnez des cours de démocratie à Jean-Luc MÉLENCHON ?
OLIVIER DUSSOPT
Je pense qu'il n'a pas besoin de moi pour cela.
APOLLINE DE MALHERBE
Olivier DUSSOPT, malgré tout sur le fond, cette motion de censure, vous la redoutez ?
OLIVIER DUSSOPT
Pour qu'une motion de censure soit adoptée, il faut donc qu'il y ait une majorité alternative, qu'il y ait une coalition suffisamment large, qui implique que la gauche, que l'intégralité de la gauche, que l'intégralité du groupe indépendant vous avez cité, que l'intégralité du Front national, que la moitié des Républicains vote tous ensemble. Nous verrons si tous ces groupes, tous ces députés qui ont des couleurs politiques très différentes, considèrent qu'ils peuvent former une majorité pour faire face au gouvernement et remplacer celle que nous avons.
APOLLINE DE MALHERBE
Est-ce qu'à vos yeux aujourd'hui, vous êtes toujours légitimes…
OLIVIER DUSSOPT
Bien sûr.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous…
OLIVIER DUSSOPT
Bien sûr.
APOLLINE DE MALHERBE
Bien sûr.
OLIVIER DUSSOPT
Bien sûr, parce que d'abord il n'y a pas de conflit entre la légitimité du Parlement et de la démocratie représentative, et la légitimité ou l'expression de la rue. Certains ont…
APOLLINE DE MALHERBE
Et Élisabeth BORNE ?
OLIVIER DUSSOPT
Certains ont voulu jouer la rue contre le Parlement, ce n'est pas comme ça que fonctionnent nos institutions.
APOLLINE DE MALHERBE
Elisabeth BORNE qui a d'elle-même dit qu'elle acceptait en quelque sorte le rôle de fusible.
OLIVIER DUSSOPT
Elle a le soutien de la majorité et la confiance du président.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous avez presque moins de doutes aujourd'hui que vous n'en aviez il y a quelques semaines.
OLIVIER DUSSOPT
Il y a quelques semaines nous étions au cœur d'un débat, souvent mon violent, âpre, difficile, mais avec la volonté d'avancer. Et aujourd'hui nous avons un texte. Ce texte… est-ce que ce texte est bon, nous considérons que oui. Est-ce que la situation politique pourrait être meilleure ? Je considère aussi que oui, nous considérons que oui. Je ne suis pas dans un déni des difficultés. Je dis que dans un moment où les choses bougent, il faut à la fois de garder son calme, être solide et garder le cap fixé par le président de la République.
APOLLINE DE MALHERBE
Olivier DUSSOPT, ministre du Travail, merci d'avoir répondu à mes questions ce matin.
OLIVIER DUSSOPT
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 mars 2023