Texte intégral
AMANDINE BEGOT
Dans un instant, c'est le porte-parole du gouvernement, Olivier VERAN, qui est notre invité. Bonjour Olivier VERAN.
OLIVIER VERAN
Bonjour.
AMANDINE BEGOT
On l'a appris, il y a moins d'une heure, Emmanuel MACRON prendra donc la parole demain à 13h. Vous dites quoi, enfin, il était temps ?
OLIVIER VERAN
Moi, je dis que le président de la République a respecté les institutions, il y avait le temps du débat parlementaire, la séparation des pouvoirs, qui faisaient que le président attendait que les débats se terminent pour pouvoir intervenir, comme il l'avait fait en se rendant à Rungis au moment où le texte avait quitté l'Assemblée, et avant qu'il n'atteigne le Sénat.
AMANDINE BEGOT
Alors la question maintenant, c'est qu'est-ce qu'il va dire demain, on vous pose la question dans un instant. Olivier VERAN, on l'a appris, il y a moins d'une heure, Emmanuel MACRON va donc prendre la parole demain à 13h. Interview annoncée sur TF1 et France 2. Il ne pouvait pas ne pas parler ?
OLIVIER VERAN
Il avait toujours dit qu'il aurait l'occasion de s'exprimer lorsque le moment serait venu, et je le redis, il y a le moment du Parlement, ce moment s'est terminé hier avec un vote, celles et ceux qui disaient qu'il n'y avait pas de vote parce qu'il y avait un 49.3, je les ai écoutés hier soir en commentaire, disaient que le vote avait été serré à leurs yeux, signe qu'il y a bien eu vote. J'écoutais monsieur MELENCHON, madame LE PEN qui disaient : à 9 voix près, est-ce qu'on peut dire que c'est… oui…
AMANDINE BEGOT
Ça s'est joué à 9 voix près, on est d'accord, vous attendiez quand même sans doute un écart un peu plus grand, non ?
OLIVIER VERAN
Vous savez, je regarde dans les tablettes de la 5ème République, parce que là, c'est le 100ème 49.3, personne n'aime utiliser le 49.3, moi, pas davantage que les autres…
AMANDINE BEGOT
Mais d'habitude, pour Elisabeth BORNE, on était sur une cinquantaine de voix…
OLIVIER VERAN
Mais sur cent 49.3, il est arrivé que l'écart de voix au moment d'une motion de censure soit plus petit que celui qu'on a constaté hier. Michel ROCARD, lorsqu'il crée la CSG ne l'emporte que de seulement 5 voix, et ce qui lui manque à l'époque, c'est des voix de sa majorité…
AMANDINE BEGOT
Sauf que pour les précédentes, pardon, motions de censure contre le gouvernement d'Elisabeth BORNE, on était plutôt sur une cinquantaine de voix, là, quelque chose a changé quand même, non ?
OLIVIER VERAN
Eh bien, il n'aura échappé à personne que là où les députés républicains, pour certains d'entre eux d'ailleurs, se sont engagés en disant : on votera ce texte en cohérence, puisque nous l'avons porté nous-mêmes dans notre campagne, et puisque des accords ont été trouvés avec la majorité présidentielle, pendant des semaines, pendant des mois, un certain nombre d'entre eux se sont échappés au dernier moment, et ont considéré que, finalement, ils préféreraient renier leurs propres idées…
AMANDINE BEGOT
Vous parlez des Républicains…
OLIVIER VERAN
Bien sûr, de certains Républicains, leurs propres idées et leurs propres propositions de campagne plutôt que d'aller conforter le gouvernement, je dirais peu importe, encore une fois, quand Michel ROCARD crée la CSG, il y a 5 voix d'écart, Pierre BEREGOVOY, il y a 3 voix d'écart, donc l'écart…
AMANDINE BEGOT
Donc vous dites : il n'y a pas de problème ce matin ?
OLIVIER VERAN
Je dis juste que ce n'est pas… personne ne dit qu'il n'y a pas de problème, je vous dis que nous nous étions engagés à ce qu'il y ait un examen de ce texte au Parlement, nous nous étions engagés à ce que d'une manière ou d'une autre, il y ait un vote des parlementaires sur ce texte, ce vote, il s'est traduit à travers le 49.3 par une motion de censure qui a été déposée, la Première ministre s'était engagée à remettre sa responsabilité devant le Parlement, et qu'elle a été, de cette manière-là, confortée par le Parlement, c'est un point qui est important, et je le redis, parce que, monsieur MELENCHON…
AMANDINE BEGOT
Elle est confortée ce matin, elle n'est pas affaiblie, Elisabeth BORNE ?
OLIVIER VERAN
Monsieur MELENCHON et madame LE PEN qui disaient : il n'y a pas de vote, ont constaté hier soir qu'en fait, il y avait eu un vote, puisqu'ils constataient eux-mêmes que ce vote avait été à leurs yeux serré.
AMANDINE BEGOT
Vous nous dites, elle n'est pas affaiblie la Première ministre ce matin, vous pensiez quand même que ça se jouerait à plus que 9 voix, non ?
OLIVIER VERAN
Mais je vous dis que dans le contexte politique d'hier qui échappe, pardonnez-moi, aux fondamentaux idéologiques, s'agissant de la droite, où vous avez quand même, pardon, une motion qui est déposée par un député de centre droit…
AMANDINE BEGOT
D'accord, mais elle n'est pas affaiblie, c'est ma question ?
OLIVIER VERAN
Je voudrais juste terminer là-dessus parce que c'est important de savoir ce qui s'est joué, est-ce que ce qui s'est joué hier, c'est un jugement porté sur une politique ou une Première ministre, ou est-ce que ce qui s'est joué hier, c'est une espèce d'alliance de circonstance de personnes qui ne pourraient pas gouverner ensemble, parce que, ce qui est important, c'est, est-ce qu'il existe une majorité alternative avec le Parlement actuel, la réponse, elle est non, hier, vous avez eu l'alliance de tous les amis de monsieur MELENCHON et de tous les amis de madame LE PEN, qui ont voté ensemble, et qui se sont soutenus, et qui ont voté une motion déposée par un député de centre-droit qui dit depuis 20 ans qu'il faut porter l'âge de départ de la retraite à 65 ans, donc vous voyez qu'il s'est joué quelque chose hier qui portait moins sur le texte en tant que tel que sur la volonté de faire tomber le gouvernement avec…
AMANDINE BEGOT
Elle n'est pas affaiblie, je vous repose la question ?
OLIVIER VERAN
Eh bien, la Première ministre est la seule, mais, une autre majorité, est la seule à pouvoir aujourd'hui porter un projet de gouvernement, sauf à considérer, et vous l'avez même vu, que même lorsque l'extrême gauche s'associe à l'extrême droite, comme ils l'ont fait hier, ils n'ont pas de majorité.
AMANDINE BEGOT
Donc demain, Emmanuel MACRON n'annoncera pas qu'il changera…
OLIVIER VERAN
Et la Première ministre…
AMANDINE BEGOT
N'annoncera pas qu'il va changer de Première ministre…
OLIVIER VERAN
Et la Première ministre, ce matin, sera, je serai à côté d'elle d'ailleurs, à l'Elysée, auprès du président de la République, participera aux réunions des groupes de la majorité, à midi, recevra l'ensemble des ministres, et j'y serai également, à Matignon, et ce soir, le président de la République recevra aussi les parlementaires, après avoir reçu le président du Sénat, la présidente de l'Assemblée nationale, pour porter notre soutien aux institutions qui ont pu et qui peuvent encore parfois être malmenées, non pas par les textes ou les processus législatifs, mais par l'attitude de certains.
AMANDINE BEGOT
Je reviens à cette prise de parole annoncée pour demain, il ne peut pas parler pour ne rien dire, sans rien annoncer ?
OLIVIER VERAN
Mais d'abord, la parole du président est toujours très attendue, et elle l'est en particulier dans ce contexte, la preuve est que vous avez ouvert votre interview avec cette intervention de demain, il fait d'abord le choix d'être interviewé et de ne pas faire une allocution, ça veut dire qu'il y aura un contradicteur en face de lui, ensuite, il fait le choix symbolique du 13h, dont on dit que ce sont les journaux des territoires, pour parler au maximum de Français, et il le fera de manière évidemment solennelle, puisqu'il le fera depuis l'Elysée, donc il pourra être interrogé, il aura vocation à répondre aux questions qui lui seront posées, en matière de réforme des retraites, mais aussi sans doute pour commencer à esquisser ce qui va se passer désormais, sachant que le cheminement du texte des retraites, s'il s'est arrêté hier au Parlement avec ce vote, et donc le texte a été adopté, la Première ministre a fait le choix de saisir elle-même le Conseil constitutionnel pour vérifier que tout est valide sur la forme et sur le fond, et conforme à notre Constitution…
AMANDINE BEGOT
C'est quoi, un moyen d'accélérer les choses, essayer de tourner la page ?
OLIVIER VERAN
Elle n'était pas obligée de le faire, elle a pris la décision de le faire, et donc, dans un délai d'un mois maximum, le Conseil constitutionnel nous dira si oui ou non l'ensemble du texte ou tout ou partie du texte est conforme aux règles constitutionnelles.
AMANDINE BEGOT
Olivier VERAN, je vais vous citer quelques hypothèses sur ce qui peut se passer ou pas dans les semaines qui viennent, ce que réclament notamment les oppositions, d'abord, que le gouvernement renonce à cette réforme, ça, c'est impossible ?
OLIVIER VERAN
Mais, pourquoi nous faisons cette réforme, c'est ça en fait la question qu'il faut poser, je comprends parfaitement, et j'entends, et je reçois, j'ai aussi des amis en dehors de la politique et qui s'intéressent…
AMANDINE BEGOT
Il y a des députés Renaissance, Patrick VIGNAL, par exemple, hier, qui dit : il faudrait peut-être suspendre cette réforme, c'est possible ça ou pas ?
OLIVIER VERAN
Mais, vous me posez une question, je ne vais pas répondre en parlant d'un député ou d'une intervention d'une personne, mais de manière plus générale, je comprends qu'il y ait des gens qui ne soient pas d'accord avec ce que nous faisons, et je le respecte, et je comprends qu'il y ait des gens qui soient déçus ou en colère qu'on ait eu recours au 49.3, je le comprends, et je le respecte, j'aurais souhaité aussi que nous puissions aller au vote, mais les conditions du vote, les conditions d'un vote n'étaient pas réunies sous la forme classique, mais les conditions du vote ont été réunies sous la forme du 49.3, et ça, vraiment, c'est le message que je porte ce matin, c'est qu'il y a bien eu, il y a bien eu ce vote. Ensuite, nous faisons cette réforme des retraites, parce que sinon, nous ne pouvons pas payer le système des retraites dans la durée. C'est que chaque année, nous empruntons sur les marchés financiers l'argent nécessaire pour combler le déficit creusé du fait que la population vieillit. Et que chaque Français peut comprendre que s'il était obligé d'emprunter chaque mois auprès de sa banque de l'argent pour payer ses courses, au bout d'un moment, la banque lui dirait stop, là, on ne parle pas de banque en l'occurrence, on parle de notre modèle social, on parle de ce qui fait sens dans la société, et on a besoin de l'équilibrer, et donc travailler progressivement un petit peu plus longtemps…
AMANDINE BEGOT
Donc, si je vous comprends, pas question de renoncer à cette réforme, le référendum, oui ou non, c'est une possibilité ou non ?
OLIVIER VERAN
Mais la loi vient d'être adoptée, elle sera promulguée, et nous attendons sa validation par le Conseil constitutionnel…
AMANDINE BEGOT
La dissolution, oui ou non ?
OLIVIER VERAN
Mais vous avez eu un vote hier, encore une fois, du Parlement, je veux dire, on n'a pas de majorité absolue au Parlement, ça veut dire que sur le papier, il y a plus de députés qui auraient pu être amenés à nous dire : vous partez, que de députés qui auraient pu être amenés à nous dire : vous restez, et dans le contexte particulièrement difficile d'un 49.3 sur un texte particulièrement difficile, comme la réforme des retraites, alors que nous n'avons pas la majorité absolue au Parlement, une majorité absolue de députés ont décidé de ne pas demander à la Première ministre de partir, on respecte aussi ce choix du Parlement.
AMANDINE BEGOT
Olivier VERAN, en attendant cette prise de parole demain, les mobilisations se poursuivent, ces grèves aussi, avant la grande mobilisation annoncée par les syndicats jeudi, j'imagine que ce n'est pas non plus anodin que le président prenne la parole juste avant. Ce matin, il y a 37 % des stations-services à sec dans les Bouches-du-Rhône, vous avez annoncé des réquisitions du personnel pétrolier de Fos-sur-Mer…
OLIVIER VERAN
Elles sont en cours…
AMANDINE BEGOT
Elles sont en cours, là, en ce moment même ?
OLIVIER VERAN
Depuis hier soir, depuis hier soir, sur Fos, des réquisitions sont en cours, quand on constate qu'il y a des stations qui sont à sec, et que la mobilité des Français est gênée par des blocages, les blocages sont levés…
AMANDINE BEGOT
Il y en aura d'autres des réquisitions ?
OLIVIER VERAN
Il y en aura d'autres.
AMANDINE BEGOT
D'autres où ?
OLIVIER VERAN
Il y en aura partout où c'est nécessaire, à chaque fois qu'on constatera que les blocages des raffineries ou des centres des dépôts empêchent d'alimenter les stations-services, et donc empêchent les Français d'évoluer, de travailler et d'emmener leurs enfants à l'école.
AMANDINE BEGOT
Vous n'avez pas peur que ça ajoute de la colère à la colère ?
OLIVIER VERAN
Mais on respecte et on différencie le mouvement social encadré par les syndicats, avec les manifestations par exemple, des blocages ou des scènes de tensions auxquels on a pu assister encore hier soir, avec une dizaine de policiers qui ont été blessés dans les rues de Paris, ce n'est pas la même chose, je fais vraiment le distinguo entre les deux, et donc manifester, faire grève, c'est un droit constitutionnel, et qu'on respecte, bloquer, casser et aller hurler dans les rues de Paris : « tout le monde déteste la police », ça n'est pas complètement la même chose. Et ça, pour ça, là-dessus, nous sommes extrêmement fermes.
AMANDINE BEGOT
D'un mot, quand vous entendez Jean-Luc MELENCHON hier soir appeler à la censure populaire, vous lui répondez quoi ?
OLIVIER VERAN
Mais Jean-Luc MELENCHON, vous savez, il s'est présenté à la présidentielle, ensuite, il a dit qu'il ne voulait pu être président de la République, mais Premier ministre, ensuite, il a perdu les législatives, il a dit quoi qu'il arrive, le troisième tour, il sera social et dans la rue, donc il attend son moment année après année, mois après mois, occasion après occasion, je vous dis juste que, occasion après occasion, les faits ne lui donnent pas raison. Et la France n'est pas…
AMANDINE BEGOT
On n'est pas dans le troisième tour social…
OLIVIER VERAN
La France n'est pas politiquement un pays d'extrême-gauche, voilà.
AMANDINE BEGOT
Merci beaucoup Olivier VERAN.
YVES CALVI
La Première ministre est la seule à pouvoir porter un projet de gouvernement, vient de nous dire notamment Olivier VERAN, qui annonce par ailleurs des réquisitions pour nos stations d'essence.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 22 mars 2023