Texte intégral
LAURENCE FERRARI
Bonjour Monsieur le ministre.
CLEMENT BEAUNE
Bonjour Laurence FERRARI.
LAURENCE FERRARI
Bienvenue dans la matinale de CNews. Le Président se rend aujourd’hui dans le Bas-Rhin, demain dans l’Hérault, ce seront des voyages Potemkine, c’est-à-dire qu’il va être complètement isolé de peur que l’on entende de trop près les manifestants ou que l’on tente encore une fois de s’approcher trop près de lui ?
CLEMENT BEAUNE
Non, je ne crois pas du tout. Il y a évidemment une question de sécurité pour le président de la République, c’est évident, et dans une période de tensions les choses se surveillent, mais le Président, s’il voulait rester enfermé il n’irait pas deux jours de suite sur le terrain. Il se rend en Alsace, il rencontrera les salariés, des vrais, ce n’est pas Potemkine, il ira au contact, peut-être que d’ailleurs il y a des gens qui protesteront…
LAURENCE FERRARI
Parce qu’il y a des faux salariés qui manifestent selon vous ?
CLEMENT BEAUNE
Pas du tout, je n’ai pas dit ça.
LAURENCE FERRARI
Si, vous venez de parler de salariés…
CLEMENT BEAUNE
Potemkine, pour ceux qui nous écoutent, c’est un décor…
LAURENCE FERRARI
Oui, bien sûr.
CLEMENT BEAUNE
Donc il n’est pas dans un décor, il rencontre les gens qui travaillent dans cette usine, ils travaillent, je crois, notamment pour les Jeux olympiques, donc je veux dire ce sont des rencontres, qui s’organisent évidemment, mais qui sont avec des salariés, pour certains peut-être l’interpelleront, protesteront, c’est notre démocratie. On ne peut pas dire à la fois c’est Potemkine, vous ne vous déplacez plus, et puis s’étonner qu’il y ait parfois, quand un ministre, quand une autorité publique se déplace, quand le président de la République lui-même est interpellé, des gens qui protestent, c’est aussi notre démocratie, tant que ça reste non violent.
LAURENCE FERRARI
Ça fait partie du jeu, c’est ce que vous dites, du jeu démocratique ?
CLEMENT BEAUNE
Tant que les choses restent dans un cadre démocratique, c’est-à-dire non violentes, c’est-à-dire respectueuses, chacun peut s’exprimer, et dans les échanges… vous savez ce n’est pas toujours ce qui fait le plus de buzz qui est le plus important, quand le Président était aux Pays-Bas on a beaucoup parlé d’interruptions de quelques individus, mais il a échangé à cette occasion, j’étais avec lui, avec par exemple des milliers d’étudiants, et ça s’est, pour une immense majorité d’entre eux, bien passé.
LAURENCE FERRARI
Ce n’était pas en France.
CLEMENT BEAUNE
Non, mais ça sera le même sujet, on échange, et puis il y a toujours évidemment ceux qui s’expriment.
LAURENCE FERRARI
Mais est-ce que les ministres ont peur, est-ce que vous avez peur d’aller sur le terrain…
CLEMENT BEAUNE
Non.
LAURENCE FERRARI
Deux de vos collègues hier sont restés bloqués plus d’une heure et demie dans une caisse d’allocations familiales à Paris, ils ont dû sortir sous l’escorte policier, il y a quand même une tension.
CLEMENT BEAUNE
Non, mais je ne vais pas vous dire qu’il n’y a pas de tension, qu’il n’y a pas eu de protestations, et qu’il n’y a pas eu aussi, minoritairement heureusement, des actions violentes, dont on parle beaucoup, parce qu’elles sont souvent plus spectaculaires, mais moi j’étais en déplacement hier justement à Strasbourg, j’étais vendredi dans le Val-d’Oise, beaucoup de mes collègues font la même chose, il faut faire attention, mais il ne s’agit pas de rester dans un cocon, il ne s’agit pas de rester enfermé et il ne s’agit pas de refuser le contact, parfois il y a des risques, mais on le fait parce que c’est évidemment nécessaire d’entendre, d’écouter, d’échanger, et je vais vous dire, moi tout au long de cette période de grève dans un secteur comme les transports publics, toutes les semaines j’étais au contact d’agents de la RATP ou de la SNCF, sans caméra, mais pour échanger, et ça s’est très largement bien passé, il faut le dire aussi.
LAURENCE FERRARI
Absolument. Est-ce que les manifestations qui sont prévues dès demain, notamment à la SNCF, vont impacter fortement le trafic ?
CLEMENT BEAUNE
Ecoutez, normalement assez peu, la prévision aujourd’hui de la SNCF, qui est solide, c’est d’avoir 4 trains sur 5 sur le TGV, 4 trains sur 5 sur le TER, qui est souvent le transport du quotidien pour beaucoup de salariés, et d’avoir malheureusement un trafic un peu moins bon sur les Intercités, on sera sans doute un peu en-dessous de 50%, mais on a aujourd’hui une situation qui, à la SNCF, est globalement une bonne situation de trafic, on ne connaît pas du tout les perturbations qu’on a pu connaître il y a encore quelques semaines, je souhaite que cela reste comme ça, par le dialogue aussi.
LAURENCE FERRARI
Pour le 1er mai, ce sera pareil, vous avez déjà des anticipations de ce qui peut se passer, puisque les syndicats, je le rappelle, vraiment demandent à ce qu’il y ait une mobilisation record ?
CLEMENT BEAUNE
Oui, écoutez, c’est trop tôt pour le dire, on donnera évidemment toutes les informations à ceux qui attendent, pour les vacances ou déplacements professionnels, ces précisions sur le trafic, c’est trop tôt pour le dire, parce que la mobilisation ce n’est pas forcément la grève, on a vu parfois des manifestations importantes et des taux de grève relativement faibles.
LAURENCE FERRARI
Vous avez bon espoir que les syndicats finissent par revenir à l'Elysée, après un délai de décence, comme l'a dit Laurent BERGER, c'est-à-dire après le 1er mai et la grande mobilisation qu’ils souhaitent ?
CLEMENT BEAUNE
Ecoutez, oui, je pense que le dialogue se renouera, je pense que c'est notre responsabilité de montrer qu'on y est ouvert, la Première ministre l'a fait en recevant l'intersyndicale, ça n'a pas permis immédiatement d'aboutir sur les discussions concrètes, mais je note par exemple que Laurent BERGER, pour la CFDT, avait dit à ce moment-là " on veut parler retraites ", avec un désaccord qu'on connaît, " mais on veut aussi parler travail, conditions de travail. " Moi j'ai vu dans un secteur comme le mien, où il y a aussi le transport routier, qu’on a réussi, même pendant cette période, à trouver un accord sur les fins de carrière et sur l'accompagnement des personnes qui sont fatiguées, qui sont âgées, dans les carrières professionnelles, en mettant syndicats, patronat et Etat autour de la table, donc peut-être que ça prendra un peu de temps, peut-être qu’il faut se voir plusieurs fois pour que les choses se renouent, mais on doit le faire d'abord, et je crois que…
LAURENCE FERRARI
Avec de l’humilité, un peu, un peu moins d’arrogance ?
CLEMENT BEAUNE
Bien sûr avec de l’humilité…
LAURENCE FERRARI
Je ne parle pas pour vous.
CLEMENT BEAUNE
Non, non, mais avec de l’humilité bien sûr, avec surtout la volonté de mettre des sujets concrets sur la table. Le Président, il a été précis, il a parlé des conditions de travail, il a parlé de l'emploi des seniors, il a parlé de la pénibilité ou des conditions de travail, difficiles en particulier, il a parlé des salaires, donc tous ces sujets-là on est prêt, secteur par secteur, branche par branche, ou de manière plus générale, à les ouvrir, je sais que les syndicats ont à coeur, surtout les syndicats qu'on appelle réformistes, d'apporter des réponses concrètes aux salariés, c'est ça leur nature, leur ADN, donc je pense qu’il faudra trouver les moyens, mais ça se fera, et le dialogue se renouera, je suis confiant là-dessus.
LAURENCE FERRARI
Pour vous la page des retraites elle est complètement fermée, il y a un groupe indépendant à l'Assemblée nationale, le groupe LIOT, qui veut à nouveau faire une proposition pour abroger réforme, c'est terminé, page terminée pour vous ?
CLEMENT BEAUNE
Je n’aime pas dire que la page est tournée parce que ça donnerait l'impression que c'est « circulez, il n’y a rien à voir. » Bien sûr les mobilisations exprimaient des choses et des oppositions contre les retraites, mais je crois qu'elles ont levé beaucoup d'autres sujets, notamment les fins de carrière, les inégalités femmes-hommes, les rémunérations, qui ont été beaucoup évoquées, tout ça on dont les traiter dans une loi sur le travail, et que des groupes politiques, parfois les mêmes qui nous ont reproché d'être sans écoute, sans dialogue, saisissent encore le Parlement, c'est leur droit, de nouveau projet de loi sur ce sujet, ça montre bien que notre démocratie parlementaire n’est pas bloquée, que les oppositions peuvent s'exprimer, peuvent proposer des choses, y compris sur ce sujet.
LAURENCE FERRARI
Ça on n’a jamais eu de doute sur le fait que les opposants puissent s’exprimer.
CLEMENT BEAUNE
Voilà, mais c’est quand même important de le redire.
LAURENCE FERRARI
C’était plus la question de la majorité à pouvoir proposer quoi que ce soit qui…
CLEMENT BEAUNE
Mais la majorité elle va proposer encore d’autres sujets, je parlais d’une loi travail, il y aura des choses sur l'écologie et sur la fin de vie, il y a plein de sujets qui vont continuer à avancer au Parlement, heureusement.
LAURENCE FERRARI
Le Président a aussi parlé, et ça ne vous a évidemment pas échappé, de la lutte contre les fraudes sociales et fiscales. Bruno LE MAIRE, ministre de l'Economie et des Finances, qui quand même doit connaître son dossier, a estimé hier que " nos compatriotes »", je le cite, " en ont ras-le-bol de la fraude, ils n'ont aucune envie de voir que des personnes peuvent en bénéficier ", il parle des prestations sociales, " les renvoyer au Maghreb ou ailleurs alors qu'ils n’y ont pas droit ", c'est à droite toute pour vous, ça vous va ?
CLEMENT BEAUNE
Ecoutez, je ne crois pas. On peut revenir sur ces sujets droite et gauche, mais le ministre des Finances…
LAURENCE FERRARI
Non, non, mais est-ce que les propos de Bruno LE MAIRE, le ministre des Finances comme vous le rappelez, a raison de dire ça ?
CLEMENT BEAUNE
Mais, que le ministre des Finances veuille lutter contre la fraude sociale c'est normal, la fraude sociale par définition c'est qu'on ne respecte pas les règles, que les ministères fassent appliquer les règles et contrôlent davantage je pense qu'en effet c’est une question d’adhésion, à l'impôt, à la contribution publique. J’ajoute aussi que dans le plan que présentera le Gouvernement, que le président de la République a lui-même évoqué, il y a la fraude sociale, il y a la fraude fiscale, donc il y a ce qu’on appelle parfois " une fraude d'en bas ", quand on ne respecte pas les règles sur des petites prestations, mais il a aussi, plus important sans doute, une fraude fiscale, " d’en haut " si je puis dire, qu'on optimise…
LAURENCE FERRARI
Et le prisme de gauche vous pousse à parler de fraude fiscale, je vous parle de fraude sociale.
CLEMENT BEAUNE
Non mais bien sûr, vous voyez comme quoi on ne se refait pas.
LAURENCE FERRARI
Est-ce que le fait d’envoyer l’argent au Maghreb, comme le dit le ministre, est un problème ?
CLEMENT BEAUNE
Mais Bruno LE MAIRE, je crois, a eu l’occasion de préciser, puisque le Maghreb était dans la question, il n’a pas stigmatisé, on ne doit pas stigmatiser…
LAURENCE FERRARI
Attendez, c’est la faute de la journaliste qui a posé la question ?
CLEMENT BEAUNE
Non, pas du tout, j’essaie d’expliquer le contexte, je n’étais pas dans l'interview, mais je l'ai relue, qui a été celui de l'expression de Bruno LE MAIRE, ce que je vous dis c’est qu’il y a eu cette expression, elle ne résume pas tout, le ministre des Finances il portera aussi, avec le ministre du Budget, un plan sur les fraudes fiscales, sur les fraudes sociales, ça en fait partie, je l'assume, dans cet équilibre, et vous aurez noté que l'expression du Président, qui nous donne le cap, c’est fraudes fiscale et sociale.
LAURENCE FERRARI
D’accord. Jean-Luc MELENCHON estime que les compatriotes musulmans, ou originaires, comme lui dit-il, du Maghreb, sont montrés du doigt ?
CLEMENT BEAUNE
Est-ce que Bruno LE MAIRE a parlé des musulmans, est-ce que Bruno LE MAIRE a eu cette expression ? il faut arrêter ! Jean-Luc MELENCHON, ça ne m'étonne pas beaucoup, cherche à enflammer et à caricaturer les débats, il y a un plan fraudes, fiscale et sociale, assumé, il sera présenté en mai, attendons peut-être les mesures pour en discuter plus en détail.
LAURENCE FERRARI
Mais ça vous gêne quand même cette histoire de fraude sociale !
CLEMENT BEAUNE
Mais non, ça ne me gêne pas, pourquoi vous voulez que ça me gêne ?
LAURENCE FERRARI
Si, on le sent, voilà !
CLEMENT BEAUNE
Eh bien écoutez, c’est votre interprétation, moi non, je pense que, qu’on lutte contre la fraude sociale, c'est normal, parce que quand il y a des règles il faut que tout le monde les respecte, ce n’est pas un tabou, et je crois que ça fait partie, ce n’est pas une question d'être de gauche ou de droite, c'est l'ordre républicain dans nos impôts, moi je suis fier qu'on ait un modèle social où on paye beaucoup d'impôts et on a droit à beaucoup de prestations, il y a des règles pour les obtenir, on les fait appliquer, et c'est pareil pour ceux qui échappent à l'impôt, on fait appliquer aussi ces règles.
LAURENCE FERRARI
Et c’est les plus gros qui échappent à l’impôt selon vous, les plus riches ?
CLEMENT BEAUNE
Oui, ça arrive, on sait bien qu’il y a de l'optimisation fiscale, qui n’est pas tout à fait la même chose, mais les entreprises qui ont des stratégies pour échapper à l'impôt. Je le dis aussi, j’ai porté ce combat avec le président de la République, on a lutté, y compris avec Bruno LE MAIRE, contre les stratégies d'optimisation fiscale avec des entreprises qui parfois bénéficient de règles très favorables à l'étranger pour ne pas payer d'impôts en France, on a fait payer aux GAFA, aux grandes entreprises du numérique, des impôts en France, parce qu'elles ne payaient pas du tout avant, donc c'est cette justice sociale d'ensemble qu’on applique et que je défends.
LAURENCE FERRARI
Est-ce que c’est pour ça que vous voulez taxer un peu plus les jets privés qui ont symbolisé une partie de la haine anti-riches dans notre pays ?
CLEMENT BEAUNE
Moi je ne suis pas dans une haine anti-riches, j'essaye d'être efficace. Oui, je pense que les jets privés c'est parfois une pratique, au moment où on demande à tous les Français de faire des efforts sur leur chauffage, sur leur lave-linge, sur leur climatisation, les petits gestes du quotidien, ceux qui polluent beaucoup plus doivent faire un peu plus d'efforts, tout simplement, et on augmente la taxation sur les jets privés, on continuera de le faire dans la loi de finances prochaine. Pourquoi ? Parce que ça permet aussi, pour être efficace, de financer la transition écologique, l'investissement par exemple dans le ferroviaire ou la décarbonation de l'aviation, je pense que c'est ça une forme de justice sociale aussi.
LAURENCE FERRARI
C’est très polluant d'utiliser des jets privés, ça pèse moins de 0,1% du total des émissions de gaz à effet de serre en France ?
CLEMENT BEAUNE
Oui, absolument, c’est une petite contribution à l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre, évidemment ça a un aspect symbolique, il faut le dire, et individuellement l'émission par passager est 20 à 50 fois supérieure, quand vous êtes dans un jet privé, à ce que vous avez dans un avion, ou évidemment dans un train, ou même dans une voiture individuelle, donc je pense que faire tous ensemble un effort, proportionné à ce qu'on peut contribuer, financièrement ou écologiquement, c'est bien et c'est ça aussi qui embarque tout le monde. Je ne résume pas l'écologie à cette seule mesure, on va surtout investir 100 milliards d'euros le train, mais on a besoin de tout cet équilibre.
LAURENCE FERRARI
Vous êtes à gauche, est-ce que vous ne vous sentez pas un peu seul au gouvernement, on a évoqué les propos de Bruno LE MAIRE, ceux de Gérald DARMANIN, vous vous lancez un appel à la gauche, vous dites " il faut relancer le quinquennat ", visiblement les Républicains ne sont pas prêts à un pacte de gouvernement, il faut ouvrir à gauche, c'est ce que vous dites ?
CLEMENT BEAUNE
Je dis il faut dialoguer avec ceux qui sont prêts à gouverner, pas au sens rentrer dans un gouvernement, mais voter des textes de loi et s'entendre sur certains projets, et oui je crois, je veux croire, qu'il y a dans notre démocratie parlementaire, dans ce moment que l'on vit, une gauche de gouvernement qui s'est enfermée, je le regrette, dans la stratégie de Jean-Luc MELENCHON, qui est une stratégie d'excès, d'outrances, de caricatures, et parfois de violences, parlementaire et politique, mais cette gauche n’a pas disparu, elle existe au Parlement, elle a d’ailleurs voté certains textes, sur les énergies renouvelables le Parti socialiste a voté le texte que le gouvernement a proposé, donc ce n'est pas impossible, la preuve, ces derniers mois, et on doit, quand on est une force centrale, comme la nôtre, qu'on n'a pas la majorité tout seul, il faut le dire humblement aussi, trouver des partenaires, qui ne trahissent pas leurs convictions, mais qui essayent de travailler avec nous sur certains projets. Sur l'écologie, sur la fin de vie, qui est un grand droit supplémentaire qu'on peut garantir à nos concitoyens, pour leurs familles et leurs proches, est-ce qu'on peut travailler aussi avec des partis de gauche qui ne sont pas dans la caricature et qui veulent faire bien et faire avancer le pays ? Je crois, j'ai cette sensibilité, vous l'avez rappelé par mon histoire, c'est comme ça, le dépassement n'est pas l'effacement, mais travailler avec ces partis-là, je crois qu'on doit le faire, et d'ailleurs la Première ministre a dit encore samedi « il faut qu’on travaille avec tous ceux, toutes celles et tous ceux, qui veulent bien travailler de manière responsable.
LAURENCE FERRARI
Mais elle n’a pas réussi, dans la mission que lui avait confié le Président, c’est-à-dire d’élargir sa majorité, on est bien d’accord ?
CLEMENT BEAUNE
Mais ça on le verra texte par texte, parce qu’on va voter…
LAURENCE FERRARI
Mais vous pensez que ça va tenir jusqu’à quand cet espèce d’équilibre un tout petit peu instable pour faire voter les textes ?
CLEMENT BEAUNE
Mais il ne faut pas avoir l’air désolé, ou ce n’est pas un vertige, on a le Parlement que les Français nous ont donné, c’est ça la démocratie, ils nous ont mis…
LAURENCE FERRARI
Il ne faut pas les faire revoter les Français d’ailleurs, leur redonner la parole ?
CLEMENT BEAUNE
Mais je trouve que… d’ailleurs c’est le Président qui décide de la dissolution…
LAURENCE FERRARI
C’est des propositions, référendum, dissolution.
CLEMENT BEAUNE
Oui enfin, par exemple, je vais prendre l’exemple de la dissolution, si j’en crois les sondages ça n’amènerait pas un déblocage du Parlement avec des majorités beaucoup plus claires, et surtout moi j'ai été élu député, il y a moins d'un an, comme tous ceux qui siègent aujourd'hui…
LAURENCE FERRARI
Vous n’avez pas envie de refaire campagne ?
CLEMENT BEAUNE
Ce n’est pas ça la question, c'est qu'il y a moins d'un an, les Français, ils ont voté, ils ont voté, ils savent que c'est pour 5 ans, et ils ont donné cette donne politique, ça serait quand même bizarre qu'on n'accepte pas de respecter, en quelque sorte, le mandat qu'à tous nous ont confié les Français, ils ont dit, il y a un groupe qui est le plus important, c'est le nôtre, il faut l'entendre, c'est ce qu'on appelle une majorité relative, et ce groupe doit trouver des partenaires, soit de manière stable, ça ne marche pas très bien, soit au cas par cas, et on y est arrivé sur plus de 20 textes aujourd'hui, la loi olympique, les énergies renouvelables, etc. Et donc, ce qu'a dit la Première ministre, c'est : on va continuer, mais il faut être deux pour travailler ensemble, donc il faut aussi que la droite républicaine et la gauche de gouvernement acceptent texte par texte, parfois ensemble, à voter avec nous certains sujets, moi, j'ai fait voter un texte sur le report de l'ouverture à la concurrence des bus à Paris, c'est une proposition de loi communiste. Elle a été votée en partie par des LR et modifiée par la majorité…
LAURENCE FERRARI
C’est consensuel Monsieur le Ministre…
CLEMENT BEAUNE
Ce n’était pas si facile que ça…
LAURENCE FERRARI
Vous imaginez sur toutes les réformes clivantes, ça va être beaucoup plus difficile…
CLEMENT BEAUNE
Les retraites étaient sans doute une réforme particulièrement complexe, particulièrement difficile, elles ne seront pas toutes de la même…
LAURENCE FERRARI
Particulièrement mal comprise et jugée injuste par les Français…
CLEMENT BEAUNE
On ne refait pas tout le film…
LAURENCE FERRARI
Vous le savez…
CLEMENT BEAUNE
Mais elle a suscité des oppositions, le Président lui-même l'a dit, mais toutes les réformes ne seront pas de la même nature, et encore une fois, sur l'écologie, sur le budget qui va arriver, sur la fin de vie, sur l'école, est-ce qu'on peut trouver…
LAURENCE FERRARI
Ce sont encore une fois des grandes mesures sur lesquelles, il y aura un consensus, oui, évidemment…
CLEMENT BEAUNE
Mais un consensus, je ne sais pas, mais des compromis et la capacité à trouver une majorité, je vais vous dire tout simplement, on le devra, parce que c'est quoi l'autre option, c'est que le Parlement ne vote plus rien, je ne crois pas que ce soit le mandat qu’ont confié à qui que ce soit les Français, il y a moins d'un an, donc notre boulot, c'est de trouver sa majorité.
LAURENCE FERRARI
Est-ce que vous ne craignez pas une radicalisation du mouvement dans la rue, on le voit, avec des manifestations sauvages, des accueils de ministres mouvementés, en permanence, des actions un peu plus violentes, c'est le risque quand même pour les mois à venir, c'est long 4 ans ?
CLEMENT BEAUNE
Oui, c'est toujours un risque, vous savez, il ne faut pas non plus penser que les choses ne peuvent pas évoluer, on a vécu des crises très différentes comme celle des gilets jaunes, où il y a eu de la violence très différente de celle des manifestations…
LAURENCE FERRARI
Oui, il y a eu de l’argent débloqué…
CLEMENT BEAUNE
Oui, d'accord, mais ça n'est pas d'abord la réponse à tout, on peut dire aussi de la période que l'on vit sur l'inflation, même si c'est difficile pour les Français, l’État a beaucoup accompagné par des chèques sur l'énergie notamment, donc ce que je veux dire, c'est qu’il ne faut pas non plus être dans une espèce de vertige où on se dirait : la radicalité est vouée à durer éternellement, la violence est la réponse à tout. On a des manifestations qui ont été très importantes, qui ont été dans l'immense majorité respectueuses et respectables, c'est ça que je retiens aussi de cette mobilisation, qui ont exprimé beaucoup d'autres choses que la question des retraites, et il faut y répondre. Et puis, à côté de ça, c'est différent, vous ne pouvez pas malheureusement dans nos sociétés empêcher parfois quelques individus d'avoir des actions plus radicales, voire plus violentes, et ça, il faut être très clair, les condamner, parce que c'est une atteinte à l'ordre public.
LAURENCE FERRARI
Condamner au sens pénal du terme, on est bien d’accord ?
CLEMENT BEAUNE
Parfois, il y a des actes, j'ai vécu par exemple dans le secteur que je connais le mieux, les transports, il y a des actes de malveillance, qui n'ont rien à voir avec des manifestations et des actions syndicales sur le réseau de la SNCF, on mène des enquêtes, et on sanctionnera les coupables évidemment.
LAURENCE FERRARI
Clément BEAUNE était l'invité de La Matinale de CNews. Merci beaucoup d’être venu.
CLEMENT BEAUNE
Merci à vous.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 21 avril 2023