Interview de M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des Outre-mer, à France 2 le 24 avril 2023, sur les insultes envers le président de la République, les manifestations contre la réforme des retraites, la fraude sociale, l'immigration et la situation à Mayotte.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : France 2

Texte intégral

THOMAS SOTTO
Bonjour et bienvenu dans " Les 4V ", Gérald DARMANIN.

GERALD DARMANIN
Bonjour.

THOMAS SOTTO
Le pays vit dans un climat particulier, on va dire, depuis plusieurs semaines, et on a appris que trois manifestants seraient jugés au mois de septembre pour avoir fait des bras d’honneur et insulté le président de la République en Alsace, c’était il y a quelques jours. Faut-il vraiment judiciariser la grossièreté et la bêtise ?

GERALD DARMANIN
Les insultes, les actes de diffamation, évidemment qu’il faut bien sûr les sanctionner, qu’ils touchent le président de la République ou qu’ils touchent n’importe que citoyen, on ne peut pas laisser des personnes insulter, comme on l’a vu sur vos images, le président de la République ou n’importe quelle Française ou n’importe quel Français.

THOMAS SOTTO
Ça veut dire que les insultes et les bras d’honneur, ça passe à l’Assemblée mais pas dans la rue. C’est un peu l’impression que ça peut donner.

GERALD DARMANIN
Non, à l'Assemblée il y a une police spéciale qui est la police de l'Assemblée, d'ailleurs la présidence de l'Assemblée elle permet de prendre des sanctions contre les parlementaires, mais…

THOMAS SOTTO
Et ça ne va pas jusqu'à un an de prison et 15 000 € d'amende.

GERALD DARMANIN
Non mais il n'y aura pas un an de prison, j'imagine, et 15 000 € d'amende, vous le savez bien, c'est une peine maximale. On ne peut pas traiter le président de la République des mots qu'on a entendus, ce n’est pas possible. On peut en France en débattre, on ne peut pas en découdre, et lorsque l'invective, lorsque l'insulte remplace l'argument, on est dans une période particulière de la démocratie.

THOMAS SOTTO
C'est un des symptômes de ce que certains appellent la crise de la démocratie, la crise démocratique du moment, ou pas, ça ?

GERALD DARMANIN
Moi, j'ai fait campagne pour Jacques CHIRAC, et on trait Jacques CHIRAC de tous les noms en 2002, lorsque j'étais militant. J'ai connu Nicolas SARKOZY, à ne peut pas dire que tout le mandat de Nicolas SARKOZY ait été pavé de roses, bien au contraire, il y a eu beaucoup d'insultes contre Nicolas SARKOZY. François HOLLANDE, j'ai été parlementaire lorsque le président HOLLANDE était président, on ne peut pas dire qu'il était extrêmement populaire. Donc vous savez, des moments où on s'en prend au pouvoir, on pense que le président de la République, le gouvernement, les politiques sont en responsabilité, et c'est eux qui doivent répondre de ces questions, c'est normal, il n’y a pas de crise démocratique tous les 5 ans dans notre pays.

THOMAS SOTTO
Le chef de l'Etat accorde donc une interview au Parisien ce matin. Ça fait un an qu'il a été réélu. Il dit qu'il veut se réengager dans le débat. On va donc le voir plus. Vous n’avez pas l'impression que beaucoup de Français voudraient plutôt le voir moins que plus, le chef de l'Etat aujourd'hui ?

GERALD DARMANIN
Non, je ne crois pas, je pense que le président de la République, dans une, objectivement une interview, qui permet aux Français je crois de voir où il veut aller, où veut aller le gouvernement, c'était la question qui lui a été posée depuis plusieurs semaines, le président de la République il est élu directement par les français, il doit expliquer où l'on va, et je pense qu'il l'a dit, sur l'immigration, sur l'économie, sur des prix, sur l'école, sur l'écologie, il a fait une longue interview où il explique des choses. Et c’est normal quand on est élu directement par les Français, de pouvoir peut-être encore plus qu'il ne l’a fait jusqu'à présent, expliquer où il veut mener la France, où il veut mener les Français, et créer ainsi de débat démocratique. Peut-être qu’il n’a pas été assez présent, justement…

THOMAS SOTTO
Vous trouvez, vous, qu'il n'a pas été assez présent ?

GERALD DARMANIN
Oui, je pense que le président de la République, au lendemain des élections, de l'élection présidentielle et puis sans doute pendant cette période particulière de la réforme des retraites, qui est une réforme extrêmement difficile, personne n'en disconvient, aurait pu davantage parler, et il le dit lui-même, c'est une très bonne chose que désormais il le fasse.

THOMAS SOTTO
Le rejet de sa personne par une partie de la population, parfois radicalisée, c'est quelque chose qui vous inquiète aujourd'hui ou pas ?

GERALD DARMANIN
Mais comme je vous l'ai dit, ce rejet, comme vous l'appelez, et pour une partie de la population évidemment est palpable. Il touche d'abord tous les politiques. Il n’y a pas que le président de la République qui peut être ici ou là impopulaire, tous les hommes et femmes politiques sont touchés par cette impopularité, ceux qui sont en responsabilité le sont plus que ceux qui sont dans l'opposition, c'est normal, puisque nous prenons des décisions, et à ce titre nous fâchons des personnes, ce qui est bien logique, mais on le fait pour l'intérêt du pays ou pour ce que nous pensons être l'intérêt du pays. Et puis troisièmement il a touché tous les présidents de la République, et Jacques CHIRAC, et Nicolas SARKOZY, et François HOLLANDE ont été touchés par cette impopularité. Donc n’ayons pas une mémoire courte, et constatons que le président de la République il est courageux, il explique, il va devant les Français, il n’est pas planqué ou caché dans son palais à l'Elysée, il est au contact avec les Français, même si cela est parfois difficile ?

THOMAS SOTTO
Gérald DARMANIN, c'est une année qui en tout cas a été marquée par des contestations importantes, à commencer bien sûr par celle des retraites, depuis le mois de janvier. A ce propos, les mobilisations prévues le 1e mai, les manifestations sont-elles un motif d'inquiétude pour le ministre de l'Intérieur que vous êtes ?

GERALD DARMANIN
Alors d’abord, le ministre de l’Intérieur, et les policiers et les gendarmes, les préfets, doit tout faire pour que les gens qui veulent manifester, le font dans de bonnes conditions. Et qu'importe le nombre de ces personnes qui seront là, notamment le 1e mai et n'importe où en France. Donc notre travail, je vois ce matin les préfets, notre travail c'est d'organiser ces manifestations, de mettre un maximum de policiers et de gendarmes, il y aura un maximum de policiers et de gendarmes…

THOMAS SOTTO
Ce sera le même volume, même proportion à peu près que pour les précédentes ?

GERALD DARMANIN
Peut-être même un petit peu plus importante, parce qu’on sait tous que de 1e mai est un moment important de rendez-vous pour les travailleurs, pour ceux qui veulent par ailleurs contester la politique économique ou sociale du gouvernement, et donc nous y travaillerons pour qu'il n'y ait pas de problèmes. Alors en même temps, il faut bien voir que si la manifestation, et c'est logique, est un droit démocratique, constitutionnel, que l'on doit garantir, la manifestation violente n’est pas autorisée. Donc nous travaillons très bien avec les syndicats, et on sait tous qu'il y a quelques centaines de personnes à chaque fois dans ces manifestations, qui viennent non pas pour revendiquer, mais qui viennent pour casser, et ceux-là on doit les interpeller.

THOMAS SOTTO
Vous avez l’impression que le plus dur est passé sur cette réforme des retraites, ou pas encore ?

GERALD DARMANIN
Non, le plus dur évidemment est à venir, pour toutes les Françaises et les Français qui vont travailler davantage. Vous savez, c'est une réforme qui n’est pas facile. Et dire aux Français qu'on doit travailler davantage, ce n’est pas facile. Chez moi à Tourcoing, les ouvriers, les employés, ils savent bien que travailler 2 ans de plus, c'est difficile. Et je ne vais pas être de ceux qui disent " 2 ans de plus ce n’est pas grand-chose ". En revanche, comme l'a fait le président de la République, leur expliquer que ça paie leur retraite, le bien de ceux qui n'en ont pas, ça permet d'investir dans l'école, ça permet de faire la transition écologique que les nouvelles générations attendent. Je pense que c'est un travail qu'on doit faire au quotidien.

THOMAS SOTTO
Vous évoquiez les radicalisés qui viennent perturber les défilés depuis quelques semaines autour de la réforme des retraites, on a aussi redouté le pire dans le Tarn samedi, quand était annoncée une manifestation contre le projet d'autoroute A69, un prolongement qui doit relier Toulouse à Castres d'ici 2025. " Ce lieu sera le prochain objectif de l'ultragauche, nous attendons une centaine d'individus radicaux ", c'est ce que vous disiez, vous. Finalement tout s'est bien passé samedi. Est-ce que crier avant d'avoir mal, c'est la nouvelle méthode de Gérald DARMANIN ?

GERALD DARMANIN
D'abord, il y a eu lors de cet endroit particulier, dans le Tarn, pour la construction d'une autoroute, qui est soutenue par le ministère des Transports, il y a eu beaucoup de monde, quasiment 5 000 personnes. Ensuite il y a eu parmi ces beaucoup de monde, une centaine d'individus radicalisés qui étaient présents, ils s'en sont pris à une ferme, ils ont attaqué des gendarmes…

THOMAS SOTTO
Ce n’était pas Sainte-Soline.

GERALD DARMANIN
... ils ont attaqué des gendarmes. Il y avait énormément de gendarmes sur place, le préfet a fait un excellent travail, et il y a eu aussi, pour la première fois, des drones qui ont pu voler, je rappelle d'ailleurs que la différence avec Sainte-Soline, c'est qu'on a donné les moyens à la police et à la gendarmerie, je parle de la justice, un décret est sorti pour pouvoir faire voler ces drones et avoir ces images…

THOMAS SOTTO
Mais là, c’était un rassemblement autorisé.

GERALD DARMANIN
Et par ailleurs, alors il y a eu un rassemblement autorisé à Sainte-Soline, je rappelle aussi, qui s'est très bien passé, celui qui ne s'est pas bien passé c'est la manifestation interdite. Ce sont des choses extrêmement différentes. Et puis il faut bien avouer que dans ce coin du Tarn, parce que nous avons un certain nombre de menaces qui pèsent sur un certain nombre de groupuscules, que moi je considère comme extrêmement violents, comme les Soulèvements de la terre, sous la menace de la dissolution, peut-être qu'ils ont moins agit violemment. C'est une très bonne chose.

THOMAS SOTTO
La semaine dernière, Bruno LE MAIRE, le ministre de l'Economie, s'est insurgé contre la fraude sociale. J'imagine que vous avez entendu ses propos. " Nos compatriotes en ont ras-le-bol de voir des gens qui peuvent bénéficier de prestations sociales et les renvoyer au Maghreb ". Est-ce que le ministre de l'Intérieur que vous êtes, fait un lien aussi direct entre fraude sociale et immigration ?

GERALD DARMANIN
Non mais Bruno LE MAIRE a eu raison de dire des mots, avec les mots des Français. De quoi parle-t-on ? On parle aujourd'hui de Français qui travaillent, avec qui on va demander 2 ans de plus. Mais on parle aussi d'étrangers qui sont sur notre sol, qui travaillent, à qui on va demander de travailler 2 ans de plus. Et il trouve qu'il y a deux inégalités dans ce que nous proposons, les Français. D'abord vis-à-vis de leur patron, vis-à-vis du capital, il faut mieux répartir entre l'argent du travail, l'argent du capital, et puis vis-à-vis de leurs voisins. Et encore une fois, chez moi à Tourcoing je constate que des gens qui m'expliquent que, eux ils sont prêts peut-être à travailler 2 ans de plus, mais pourquoi, si on charge des cotisations supplémentaires, du travail supplémentaire, on ne force pas celui qui est à côté, qui ne travaille pas, et qui gagne peut-être pas autant que lui, mais quasiment autant que lui ?

THOMAS SOTTO
Autant que lui, oui.

GERALD DARMANIN
Voilà. Et donc notre travail à nous aujourd'hui, c'est de dire à ceux qui ne travaillent pas, pas ceux qui ne peuvent pas travailler parce qu'ils ont un handicap, par exemple, ceux qui ne veulent pas, qui ne veulent pas travailler, eh bien qu’ils doivent toucher moins de prestations sociales, si jamais ils ne vont pas travailler.

THOMAS SOTTO
J'entends votre raisonnement, que beaucoup de Français partagent sans doute, mais ma question c'est : est-ce que vous faites un lien entre l'immigration et la fraude aux… les fraudes sociales ?

GERALD DARMANIN
Mais, il y a une partie de la fraude sociale qui est le fait d'étrangers. Elle n'est pas l'intégralité de la fraude sociale, bien évidemment…

THOMAS SOTTO
Ça veut dire quelle proportion ? Parce que c'est dur de par définition de chiffrer des fraudes.

GERALD DARMANIN
Mais ce qu'a dit le ministre de l'Economie, c'est qu'à partir de cet été et à partir du 1e janvier 2024 pour une autre grande partie des prestations, ça ne sera plus possible. Donc je crois qu'il y a une mission qui a été lancée par le gouvernement, à la demande de Bruno LE MAIRE et de Gabriel ATTAL, elle aura l'occasion de chiffrer, mais on connaît tous des abus, on les connaît tous ces abus, des gens qui restent 6 mois sur le territoire national, et qui vont ailleurs toucher des prestations sociales. Donc il faut être clair, les prestations sociales sont importantes, elles sont normales, nous les avons augmentées, elles ne sont là que pour aider les gens qui sont dans le besoin, pas pour aider les gens à frauder.

THOMAS SOTTO
Il y a un projet qui vous tient particulièrement à coeur, c'est celui sur l'immigration. Quand il arrivera devant le Parlement, soit à l'Assemblée, soit au Sénat, vous avez un calendrier ou pas ?

GERALD DARMANIN
Le président de la République a répété ce matin dans Le Parisien, qu'il fallait ce projet de loi, qui est un projet ferme et qui permet l'intégration des étrangers. La Première ministre discute en ce moment avec les responsables de l'opposition, de la majorité, elle fait une conférence de Presse cette semaine…

THOMAS SOTTO
Et vous, vous souhaitez que ce soit quand ?

GERALD DARMANIN
Moi je souhaite que ce soit le rapidement possible.

THOMAS SOTTO
Ça veut dire quoi ?

GERALD DARMANIN
La session, la fin de session parlementaire est bientôt, c'est la fin du mois de juin…

THOMAS SOTTO
Donc à l’automne, plutôt ?

GERALD DARMANIN
… Mais le plus rapidement possible. Il faut que cette année, nous ayons évidemment un projet de loi, voté par le Parlement.

THOMAS SOTTO
Et alors, un projet de loi ou des projets de loi ? Est-ce que ce texte sera saucissonné pour mieux en faire avaler une partie à la droite et une partie à la gauche, ce sera un texte unique ? Parce que là-dessus Emmanuel MACRON a changé d'avis. Il voulait plusieurs textes quand il a parlé au 13 heures de France 2 et de TF1 le 22 mars, et là dans Le Parisien il dit : " Je veux une loi efficace et juste, en un seul texte tenant cet équilibre ".

GERALD DARMANIN
Vous ne dansez pas le tango tout seul. Il faut être deux. Il y a le gouvernement et le président de la République d'un côté, il y a le Parlement de l'autre. C’est normal, c'est comme ça qu'on fait adopter un projet de loi. Au Parlement…

THOMAS SOTTO
Mais il y en a toujours un qui mène la danse.

GERALD DARMANIN
Au Parlement, oui il me semble que ça doit être le président de la République, ça me paraît assez logique. Bon. Mais au Parlement nous n'avons pas de majorité absolue, ça ne vous aura pas échappé, il faut donc discuter avec forces politiques, il faut que nous apprenions ça en France, accepter de vous dire, eh bien oui, il faut qu'on discute avec les forces politiques et notamment Les Républicains, mais pas seulement, pour nous mettre d'accord sur le calendrier et le contenu du texte.

THOMAS SOTTO
Gérard LARCHER, le président du Sénat, ne veut pas d'une loi à la découpe, il veut un seul texte.

GERALD DARMANIN
Oui, mais nous disons aussi à Gérard LARCHER qu’il nous faut l'inscrire désormais à l'ordre du jour du Sénat et l'Assemblée nationale. Donc voilà, il reste quelques jours…

THOMAS SOTTO
Donc vous dites « ce n’est pas tranché », un texte ou plusieurs textes, ce n’est pas tranché.

GERALD DARMANIN
Nous sommes pour un seul texte, qui permet à la fois la lutte contre la délinquance étrangère. Permettre aux étrangers d'avoir des papiers que si et seulement si, ils parlent français, et en même temps bien intégrer ceux qui sont sur notre sol national. C'est un texte cohérent, c'est un texte difficile, mais c'est un texte que veulent les Français. Les Français, ils veulent qu'on soit plus ferme sur l'intégration, plus ferme sur l'immigration, et je pense qu'on peut s'entendre avec Gérard LARCHER sur ce point.

THOMAS SOTTO
Il faut parfois danser le tango à trois. Il y a Elisabeth BORNE, la Première ministre également, qui est dans l'affaire. Elle a exclu le recours au 49.3 pour les autres textes, hors textes budgétaires. Vous êtes d'accord, ce texte sur l'immigration ne passera pas par le 49.3 ?

GERALD DARMANIN
Alors, par définition, je suis toujours d'accord avec Madame la Première ministre…

THOMAS SOTTO
Oui, c'est la langue de bois obligatoire.

GERALD DARMANIN
Non non, ne ce n’est pas vrai, Madame Elisabeth BORNE est une femme extrêmement courageuse, elle mène son gouvernement, c'est elle qui engage la responsabilité de son gouvernement, et je me range évidemment à sa décision.

THOMAS SOTTO
Donc ça sera son choix, si elle décide qu’il n’y aura pas de 49.3.

GERALD DARMANIN
Ça sera notre choix. Vous savez, le 49.3 il se décide par tout le Conseil des ministres, c'est le gouvernement qui engage sa responsabilité à la demande du Premier ministre, et donc en Conseil des ministres nous donnons notre avis, et mon avis va avec celui de la Première ministre.

THOMAS SOTTO
L'immigration clandestine sujet majeur à Mayotte, où vous avez lancé une vaste opération de démantèlement des bangas, les bidonvilles là-bas. Qu’allez-vous faire des personnes qui seront délogées dans les prochains jours ; dans les prochaines heures ?

GERALD DARMANIN
D'abord, l'opération qui se déroule à Mayotte, où il y a aujourd'hui 1 800 policiers et gendarmes, ça n'a pas de précédent dans l'histoire de la République, vise d'abord à interpeller des délinquants. Il y a une soixantaine de personnes qui sont dans des bandes armées, qui tuent, qui pillent, qui font comme ce week-end, nous avons interpellé des personnes qui font de la prostitution, 4 personnes ont été interpellées ce week-end par des gendarmes pour mettre fin à des réseaux de prostitution. Donc d’abord c'est une opération anti-délinquance, parce qu'à Mayotte, vous en faites assez la Une de vos journaux, il y a beaucoup de délinquance et les Mahorais ne sont pas des sous-Français, ils sont aussi Français que les habitants de Tourcoing ou de Marseille…

THOMAS SOTTO
Il y a aussi beaucoup de clandestins, la moitié de la population est faite de clandestins. Est-ce que votre objectif c'est de renvoyer la moitié de la population de Mayotte ?

GERALD DARMANIN
D’abord, l'opération, c'est une opération anti-délinquance. Ensuite c'est une opération anti-bidonvilles. Parce qu'il y a des bidonvilles à Mayotte, sans eau, sans électricité, sans gaz, avec des bébés, des vieillards, et ça ce n'est pas possible sur le sol de la République. Et puis il y a des personnes qui sont en situation irrégulière, eh bien ces personnes en situation irrégulière, nous les expulsons, si j’ose dire classiquement.

THOMAS SOTTO
Mais c'est la moitié de la population. Votre projet c'est d'expulser la moitié de la population de Mayotte aujourd'hui ?

GERALD DARMANIN
Ce n'est pas ce que je vous ai dit. Ce que je vous ai dit c'est que d'abord c'est une opération anti-délinquance, une opération anti-bidonvilles et puis quotidiennement vous savez, nous expulsons des personnes vers Madagascar, vers l'Afrique des Grands Lacs, c’est 25 000 personnes par an.

THOMAS SOTTO
C’est un peu Sisyphe. C’est 25 000 par an et il y en a toujours autant.

GERALD DARMANIN
Oui, mais quand j'étais maire de ma commune, monsieur, si vous dites à des gens qui viennent vous voir : oh la la, la rue est toujours avec des trous dans le trottoir, ou les voitures sont toujours sont mal garées, et que je dis : ah ben monsieur c'est Sisyphe, c'est toujours comme ça, vous ne réélirez pas votre maire. Le travail des politiques…

THOMAS SOTTO
Mais sauf que les Comores ne veulent pas récupérer leurs ressortissants.

GERALD DARMANIN
C’est tout à fait faux. C'est tout à fait faux. Les Comores ont récupéré 25 000 personnes l'année dernière.

THOMAS SOTTO
Le ministre de l'Intérieur comorien samedi : " Mon gouvernement a clairement affiché sa position : il n'acceptera pas d'expulsions ".

GERALD DARMANIN
Mais ce n’est pas le cas. Hier par exemple un bateau est parti de Mayotte, et il était arrivé aux Comores. Donc entre le discours politique et la réalité du terrain, nous avons un intérêt bien compris avec le gouvernement des Comores, parce que, eux-mêmes les Comores, subissent une immigration qui vient de Madagascar et l'Afrique des Grands Lacs. Il y a à Mayotte une opération d'ordre public, qui n'a jamais existé, et ne nous disons aux Mahorais que nous ne les abandonnons pas. Moi je suis allé une dizaine de fois à Mayotte, c’est un territoire absolument magnifique, ça pourrait être aussi beau et aussi touristique que les Seychelles, pour des raisons de sécurité…

THOMAS SOTTO
Les Seychelles…

GERALD DARMANIN
… Oui mais c’est un territoire magnifique Mayotte, et tout le monde s'en fiche depuis très longtemps, et avec le président de la République nous sommes les premiers à nous en occuper véritablement.

THOMAS SOTTO
Une question sur le terrorisme islamiste, qui a coûté la vie à Samuel PATY. Après son assassinat, un fonds de 2,5 millions a été créé, le Fonds Marianne, par Marlène SCHIAPPA, c'était en 2021. Aujourd'hui il y a des doutes sur l'utilisation de cet argent par quelques associations qui ont pu en percevoir. Est-ce que vous partagez ces doutes ?

GERALD DARMANIN
Alors, d'abord le Fonds Marianne est un fonds important. Il a permis à aider contre l'islamisme radical. Que dans ces 2 millions d'euros, il y a eu des gens qui ont manifestement mal utilisé l'argent public, la justice va le dire. J'ai moi-même saisi la justice avec un article 40 au procureur de la République, et nous avons créé une propre inspection qui va rendre bientôt son rapport. On donnera tous évidemment au Parlement. Moi je veux dire que Marlène SCHIAPPA a été une magnifique ministre auprès de moi, pendant 2 ans…

THOMAS SOTTO
Il n’y a rien à lui reprocher sur ce dossier ?

GERALD DARMANIN
Je ne le crois pas. Je crois qu'elle a fait son travail, elle l'a fait très courageusement. Qu’il y ait après par la suite des dysfonctionnements, dans certaines associations à qui on a donné de l'argent, il faut évidemment dans ces cas-là en tirer des conséquences et sanctionner ces personnes.

THOMAS SOTTO
J'ai une dernière question Gérard DARMANIN. Vous annoncez la fin du retrait de points pour les petits excès de vitesse de moins de 5 km/h. Vous avez fait un mea culpa sur le mariage pour tous qui fête ses 10 ans. " J'étais contre, je me suis trompé, je le reconnais ", avez-vous dit. Est-ce que vous ne seriez pas en train de polir votre image avec quelques arrière-pensées politiques ?

GERALD DARMANIN
Non, je suis quelqu'un de très franc. Et je pense que d’ailleurs on me reproche souvent cette franchise. On me dit parfois " Gérald DARMANIN il est clivant, il est peut-être un peu trop volontaire ". J'ai toujours dit ce que je pensais et…

THOMAS SOTTO
Toujours ?

GERALD DARMANIN
Oui, je pense.

THOMAS SOTTO
Si demain on vous propose Matignon, vous irez ?

GERALD DARMANIN
Mais encore une fois, la question ne se pose pas, parce que je suis ministre de l'Intérieur et à mon poste, et c'est un magnifique travail que d'être ministre de l’Intérieur. Vous savez…

THOMAS SOTTO
Franc mais prudent.

GERALD DARMANIN
Non, parce que quand vous avez 40 ans, j'ai 40 ans, voilà. Je suis le fils d'une femme de ménage, j’ai 40 ans, je suis devant vous, je parle aux Français et je trouve que la République est très belle pour moi.

THOMAS SOTTO
Merci beaucoup Gérald DARMANIN d’être venu dans " Les 4V ".

GERALD DARMANIN
Merci à vous.

THOMAS SOTTO
Merci à vous, bonne journée.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 25 avril 2023