Interview de M. Olivier Véran, ministre délégué, chargé du Renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement, à Europe 1 le 26 mai 2023, sur les violences envers les personnes, la conduite sous l'empire de l'alcool et/ou après usage de stupéfiants, l'immigration.

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Média : Europe 1

Texte intégral

DIMITRI PAVLENKO
Bonjour Olivier VÉRAN.

OLIVIER VÉRAN
Bonjour.

DIMITRI PAVLENKO
Porte-parole du gouvernement, merci d'être avec nous ce matin. Le président de la République visiblement s'inquiète du climat en France, mercredi en conseil des ministres il a évoqué, je le cite, "un processus de décivilisation à l'œuvre dans le pays", alors c'est la bataille politique depuis autour de ce terme qui est très français. Est-ce que vous pouvez nous éclairer, en tant que porte-parole du gouvernement, Olivier VÉRAN, sur ce que voulait dire le président de la République lorsqu'il emploie ce mot de "décivilisation" ?

OLIVIER VÉRAN
La semaine, les semaines, ont été émaillées par des drames, l'assassinat d'une infirmière, la mort accidentelle de policiers, la démission d'un maire, des agressions contre des représentants de l'État. Si je devais résumer je dirais qu'au démarrage il y a eu des incivilités, donc les gens ont commencé à moins bien se parler, dans certains contextes, puis à s'insulter, puis à se menacer. Il y a toujours eu une forme de respect pour les dépositaires de l'autorité de l'État, pour ceux aussi qui étaient là pour prendre soin de nous, assurer notre sécurité, les enseignants, les policiers, les pompiers, les médecins, et aujourd'hui ces barrières-là ont cédé et les incivilités se transforment progressivement en violences.

DIMITRI PAVLENKO
La décivilisation c'est l'ensauvagement ?

OLIVIER VÉRAN
Je ne sais pas, je m'attache peut-être moins à un mot qu'à ce que nous ressentons. Pourquoi on parle de ça ? parce que chacun d'entre nous est aussi victime de cela, d'abord au nom de la République, quand l'un des nôtres se fait agresser, menacer, assassiner, c'est nous tous qui sommes impactés, et ensuite parce que par capillarité ça nuit aussi au bien-être de chacun. Quand on assiste à cette montée de violences, quand on voit que les rapports entre les gens se sont modifiés, se sont transformés…

DIMITRI PAVLENKO
Donc ce diagnostic vous le faites votre Olivier VÉRAN ?

OLIVIER VÉRAN
Quand vous ouvrez un réseau social et que vous voyez que parce que quelqu'un n'est pas d'accord avec un autre il va directement l'insulter, le menacer, le caricaturer à l'excès, voire parfois appeler à la haine, lorsque vous voyez que les barrières sont tombées et que cela touche aussi le monde politique avec une forme de continuum entre la violence dans la parole politique, la violence sociale, la violence constatée dans la société, on est chacun d'entre nous victime, qu'on se rende compte ou non, et donc la différence entre l'État de nature, si on prend un autre concept, et l'État de droit, fait que dans l'État de droit la société est organisée, il y a des règles et les gens les respectent, on peut être en désaccord, mais on est toujours dans le respect de l'un, de l'autre…

DIMITRI PAVLENKO
Donc vous dites la France s'ensauvage, vous faites vôtre ce diagnostic, il y a eu querelles sur ce termes-là il y a quelques mois de cela, aujourd'hui c'est décivilisation, mais vous êtes sur la même ligne qu'Emmanuel MACRON sur ce point-là, Olivier VÉRAN ?

OLIVIER VÉRAN
Pardonnez-moi, vous m'interrogez en voulant que je mette des mots, en un mot résumer quelque chose, ni le président, ni qui que ce soit ne cherche à résumer en un mot une pensée qui est plus complexe…

DIMITRI PAVLENKO
Non, mais vous avez bien vu ce qu'il en est dit, c'est-à-dire que pour la gauche il y a un clin d'œil…

OLIVIER VÉRAN
Le mot "décivilisation" par exemple, moi j'ai entendu des gens… voyez, ça c'est aussi emblématique de notre incapacité aujourd'hui à vouloir laisser le débat sur des données pourtant importantes, le mot "décivilisation" il a été employé par un sociologue juif, qui s'appelait Norbert ELIAS, qui était dans les années 30, et qui décrivait l'impact de la montée du nazisme dans les sociétés, ce n'est pas l'apanage de Monsieur Renaud CAMUS d'extrême-droite, et probablement qu'avant Norbert ELIAS d'autres ont utilisé ce mot. Ce qui m'intéresse, et là je vous le dis comme ministre du Renouveau démocratique, c'est que chacun d'entre nous peut aussi avoir une action pour enrayer cette tentation de la violence, et cette tentation de la désinhibition, par exemple en ne partageant pas des messages sur les réseaux sociaux qui sont haineux, insultants, ou qui vont au-delà de l'expression d'un désaccord et qui vont parfois toucher la menace ou attenter à la santé des personnes, ou l'intégrité physique, ou mentale de personnes, par exemple aussi en étant capable, il m'arrive de le faire, d'appeler des gens qu'on connaît, et qui se livrent à ce type d'exercice, pour leur dire "en fait tu as voulu exprimer un désaccord, tu n'es pas d'accord avec ce politique, ce n'est pas pour autant que tu dois le menacer de le décapiter, ou ce n'est pas pour autant que tu dois le menacer, si jamais tu le croisse dans la rue un jour d'aller le…", parce que tout ça crée une pression, une tension…

DIMITRI PAVLENKO
J'entends ce que vous dites !

OLIVIER VÉRAN
Encore une fois ne nions pas l'impact que ça a sur chacun d'entre nous.

DIMITRI PAVLENKO
Alors vous balayer l'accusation qui est faite par la gauche de dire "c'est un clin d'œil à l'extrême-droite", parce que c'était le titre d'un livre de Renaud CAMUS…

OLIVIER VÉRAN
Mais c'est ridicule, mais pardon, ce dont on est en train de parler là, excusez-moi…

DIMITRI PAVLENKO
Oui, oui, mais quand en face Marine LE PEN dit "c'est bien, mais c'est une prise de conscience peut-être un peu tardive, oui, que la France aujourd'hui, il y a une montée de la violence générale", qu'est-ce que vous répondez à cela Olivier VÉRAN ?

OLIVIER VÉRAN
En fait je crois que ce dont je suis en train de vous parler n'est pas un phénomène qui correspond à un parti politique, ou qui correspond à une idée politique…

DIMITRI PAVLENKO
Non, non, c'est un diagnostic sur l'état de la société.

OLIVIER VÉRAN
C'est un diagnostic, et je crois, pardonnez-moi, que c'est plus important que l'exploitation politique que les uns et les autres voudraient en faire, je ne cherche pas, en disant cela, justement à faire de l'exploitation politique, je cherche à faire un pas de côté.

DIMITRI PAVLENKO
Non, mais c'est-à-dire que le président aurait employé le mot d'ensauvagement, qui a été l'objet de tant de polémiques il y a quelques temps, finalement c'était la même chose Olivier VÉRAN.

OLIVIER VÉRAN
Moi je ne me suis jamais inscrit dans les polémiques autour des mots encore une fois. Décrire le malheur du monde, comme disait l'autre, c'est quelque chose qui est absolument essentiel, et qu'on soit capable de se dire quelle société voulons-nous. Moi j'ai deux enfants, de 9 et 12 ans, je veux que mes enfants ils puissent vivre dans une société dans laquelle ils puissent utiliser des outils numériques, où ils puissent aussi débattre les uns avec les autres dans la vraie vie, avec comme constante l'idée de se respecter, et l'idée qu'avoir un désaccord est une chance, avec quelqu'un, et moi je suis ravi de débattre politiquement avec des gens qui ne pensent pas comme moi, et peut-être d'ailleurs qu'ils ont raison, peut-être que j'ai tort, peut-être que je peux évoluer, ou peut-être que je vais les faire évoluer, la beauté de la société c'est de se construire dans le débat et l'échange, voilà, pas dans l'invective, la haine, des petites phrases ou la surinterprétation de tout.

DIMITRI PAVLENKO
Venons-en, au concret Olivier VÉRAN, Emmanuel MACRON était hier à l'hommage national rendu aux trois policiers tués dimanche sur la route, la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël BRAUN-PIVET, pense qu'il faut désormais se poser la question du zéro alcool au volant, zéro drogue, comme au Japon dit-elle, où elle a vécu. Est-ce que ça fait partie des pistes suivies actuellement par le gouvernement ?

OLIVIER VÉRAN
Le zéro drogue au volant, me semble-t-il, je ne veux pas de dire de bêtise, mais je crois que c'est la règle, c'est-à-dire que si vous êtes attrapé et que vous avez consommé des stupéfiants au volant, vous ne pouvez pas conduire et vous êtes sanctionné…

DIMITRI PAVLENKO
Il y a une tolérance aujourd'hui.

OLIVIER VÉRAN
Non, pour la drogue non, non non, pour la drogue non, et vous êtes, même par définition, tant qu'on n'a pas démontré… si vous avez des traces résiduelles de drogue dans le sang, on doit vérifier si c'est une consommation qui est récente ou plus ancienne.

DIMITRI PAVLENKO
Le système des amendes quand on est pris avec de la drogue dans la poche, pardonnez-moi…

OLIVIER VÉRAN
Non, non, vous avez une sanction dans le code de la route qui est systématique, si vous êtes pris en ayant consommé de la drogue au volant, il vous arrive forcément quelque chose.

DIMITRI PAVLENKO
Quelqu'un qui aurait fumé un pétard c'est plus grave que quelqu'un qui aurait bu plus que… ?

OLIVIER VÉRAN
Sur l'alcool, ça dépend en fait quand vous avez consommé la drogue, c'est pour ça qu'il faut remonter à la date de prise de la consommation, si vous êtes sous emprise en réalité, c'est ça qui compte. Pour l'alcool il y a une tolérance qui est à peu près un à deux verres en fonction de votre corpulence, en fonction de quand vous les avez ingérés et qui correspond au maintien de l'intégrité, qui est considéré comme le maintien de l'intégrité des fonctions d'équilibre, après si on veut faire évoluer la loi…

DIMITRI PAVLENKO
Non, mais les gens connaissent ça, mais est-ce qu'il faut aller à la tolérance zéro aujourd'hui ?

OLIVIER VÉRAN
En fait le truc c'est qu'il y a des gens… moi je fais toujours attention, et pourtant c'est le médecin qui vous le dit, je fais toujours attention à ce que quelqu'un qui aurait pris une bière ou un verre limité il y a trois heures à l'apéritif, qui pour le coup est parfaitement maître de ses actions, de ses actes, ne se fasse pas choper à 0,0 je ne sais combien gramme, et se retrouve considéré comme un délinquant, voilà, c'est toujours cette… c'est pour ça qu'il y a une tolérance aujourd'hui qui fait que si vous avez bu un, un verre et demi, il n'y a pas… il y a quelques temps, vous pouvez être considéré comme pouvant conduire, après si on fait évoluer la règle, on la fera évoluer, mais ce n'est pas dans les cartons aujourd'hui.

DIMITRI PAVLENKO
Oui, parce qu'aujourd'hui on va vers une tolérance pour les petits excès de vitesse, il faudrait être intraitable sur l'alcool, ça pourrait être pris comme des signaux contradictoires d'une certaine manière.

OLIVIER VÉRAN
Je vous dis juste il faut… c'est le comportement et la conduite sous emprise qu'il faut sanctionner.

DIMITRI PAVLENKO
Alors, autre sujet important cette semaine Olivier VÉRAN, l'immigration, avec notamment ce plan de répartition des migrants en région, qui fait beaucoup parler. Alors, je vous pose la question…

OLIVIER VÉRAN
Quel plan de répartition des migrants en région ?

DIMITRI PAVLENKO
Ah bah écoutez, excusez-moi, on a parlé que de ça cette semaine, vous rentrez du Brésil mais vous avez suivi l'actualité nationale…

OLIVIER VÉRAN
Non, non, mais il n'y a pas de plan, vous ne pouvez pas dire… enfin vous avez le droit, mais il n'y a pas…

DIMITRI PAVLENKO
Alors attendez…

OLIVIER VÉRAN
…du gouvernement, il n'y a pas de plan de répartition des migrants en région, dire ça, excusez-moi, c'est déjà aller orienter à mort les choses, ce n'est pas du tout ce qui existe.

DIMITRI PAVLENKO
Très bien, c'est un dispositif national d'accueil, on va employer les termes techniques si vous le voulez, mais enfin qui revient en substance à proposer à des migrants en région parisienne, ou des sans-abri, d'aller prendre une place dans un sas d'accueil en région, j'espère que là vous êtes satisfait de l'exposé, ce sont les termes officiels.

OLIVIER VÉRAN
Région Ile-de-France ou tout endroit qui serait saturé, en fait…

DIMITRI PAVLENKO
Est-ce que c'est lié aux Jeux olympiques ?

OLIVIER VÉRAN
Non, il y a 200 000…

DIMITRI PAVLENKO
Ah bah moi je vous pose la question parce qu'on a parlé que de ça cette semaine.

OLIVIER VÉRAN
Je sais, c'est pour ça que je me permets de… je vous réponds bien volontiers. Il y a 200 000 hébergements d'urgence aujourd'hui dans notre pays, c'est-à-dire qu'on a atteint un niveau record d'hébergement d'urgence, c'est depuis le Covid d'ailleurs, puisqu'on avait décidé pendant le Covid que l'État se donnait tous les moyens pour qu'il n'y ait personne à la rue, ça c'est très bien, parce que quand les gens sont à la rue c'est très mal pour plein de raisons. Ensuite, quelles sont les capacités des territoires à organiser des hébergements d'urgence, des hébergements temporaires ? c'est toute la question qui est posée, ce n'est pas lié aux Jeux olympiques ou à autre chose, ce n'est pas lié en particulier à l'Ile-de-France. Il se trouve que là où vous avez des grandes préfectures qui traitent les demandes d'asile, eh bien c'est là que les gens qui sont en attente du rendu de leur demande vont plutôt stationner, ils vont plutôt résider pendant la durée nécessaire, et donc ce qui veut dire que… et ça a été une réforme d'ailleurs qui avait été portée il y a une quinzaine d'années, qui faisait que ce n'est pas toutes les préfectures du pays qui traitent les demandes d'asile, mais seulement quelques-unes, donc c'est hyper concentré, du coup vous avez rapidement un débordement des capacités d'accueil, sur place, dans les villes concernées, des personnes en attente du rendu pour savoir s'ils ont droit à l'asile ou non, donc c'est le cas en Ile-de-France, c'est le cas ailleurs, et donc partout où c'est le cas, et nous le faisons depuis des années, donc il n'y a rien de nouveau de ce point de vue-là. Lorsque les centres sont saturés on crée des places ailleurs, parce qu'à contrario il y a des endroits où il n'y a pas de préfecture qui traite les demandes d'asile, où il y a très peu de demandeurs d'asile qui sont à la rue, mais qui ont des capacités d'accueil, mais c'est quelque chose de régulier depuis des années, donc il n'y a pas de plan stratégique.

DIMITRI PAVLENKO
Vous voyez la réception quand même par le public de ces annonces…

OLIVIER VÉRAN
Non mais parce que le truc a été, pardon, le truc a été attaqué comme si c'était un plan caché vis-à-vis des JO, je vous le dis, ce n'est pas le cas, et si vous voulez des preuves regardez ce qui est fait depuis des années. Il se trouve que député socialiste sous HOLLANDE je m'étais déjà mobilisé à l'époque pour qu'on puisse modifier le périmètre des demandes d'asile dans les préfectures de France.

DIMITRI PAVLENKO
Mais vous avez vu ce sondage cette semaine dans "Le Figaro" qui dit que les Français, très largement, sont plutôt favorables aux propositions portées par les Républicains pour mettre fin à l'immigration massive, c'est l'intitulé du projet, il n'y a pas d'orientation de ma part, des propositions…

OLIVIER VÉRAN
Ce n'est pas vous en particulier, je lis la presse figurez-vous.

DIMITRI PAVLENKO
J'ai bien compris, pas d'offense. Ces propositions des Républicains, vous aurez noté aussi qu'elles trouvent un écho plutôt favorable du côté de Gérald DARMANIN, c'est moins vrai auprès d'autres figures de la majorité relative ou du gouvernement. Quelle est la position aujourd'hui du gouvernement par rapport à ce projet, est-ce qu'une entente possible avec les Républicains, sur ce projet de loi, cette proposition de loi pardon, ces deux propositions de loi, pourrait aboutir ?

OLIVIER VÉRAN
D'abord le sondage que vous citez il montre aussi et surtout, c'est ce qui m'intéresse en l'occurrence, qu'il y a près de 70 % des Français qui sont d'accord avec les mesures que nous portons dans notre projet de loi, c'est-à-dire mieux expulser ceux qui n'ont pas vocation à rester, répondre plus vite aux demandeurs d'asile qui n'ont pas vocation à obtenir l'asile, mais également la mesure qui permet à des étrangers d'occuper des postes dans les métiers à tension pour lesquels on ne trouve pas de travailleurs en France, c'est important de le dire. La droite a eu le mérite de faire des propositions, je n'ai pas entendu un ministre, ni Gérald DARMANIN, ou un autre, dire "je suis d'accord avec ces propositions", et pour cause, les Républicains ils ont le mérite de faire des propositions et je pense que c'est bien, pour animer le débat, qu'ils les fassent. On n'est pas d'accord avec beaucoup des propositions qu'ils font, de la même manière…

DIMITRI PAVLENKO
Lesquelles ?

OLIVIER VÉRAN
Le fait qu'ils mettent des lignes rouges, par exemple sur les travailleurs étrangers, ça ne me semble pas aller dans le sens de l'opinion, mais ils ont le mérite de le faire. Moi ce matin j'ai envie de passer un appel, je ne sais pas si je dirais un appel solennel, c'est un peu galvaudé, mais en tout cas un appel sérieux, pour que la gauche ne soit pas en dehors de ce débat. La gauche française, la social-démocratie, la gauche de gouvernement, pas LFI, on sait ce qu'ils en pensent, mais la gauche de gouvernement elle a des choses à dire sur l'immigration et l'intégration dans notre pays, parce que l'électorat de gauche, dans notre pays, il attend des propositions aussi en la matière, et certaines de ces propositions doivent aller vers une meilleure régulation de l'immigration et une meilleure organisation de l'intégration.

DIMITRI PAVLENKO
Sur quels points vous souhaiteriez entendre la gauche ?

OLIVIER VÉRAN
Par exemple qu'est-ce qu'on dit du fait que le taux de chômage des étrangers dans notre pays il est de 13 %, c'est-à-dire presque le double du taux de chômage national, et comment se fait-il qu'en France le taux de chômage des étrangers soit en général plus élevé que le taux de chômage des étrangers ailleurs en Europe, ça c'est un exemple.

DIMITRI PAVLENKO
Mais on le sait pourquoi Olivier VÉRAN.

OLIVIER VÉRAN
Attendez ; qu'est-ce que la gauche a à dire…

DIMITRI PAVLENKO
Vous semblez dire qu'on ne sait pas pourquoi, mais on sait tout à fait, le manque de qualification, le manque de maîtrise de la langue française, etc… c'est documenté Olivier VÉRAN.

OLIVIER VÉRAN
Donc qu'est-ce qu'on fait, qu'a à proposer… ? nous nous disons ce que nous voulons faire, nous continuons de renforcer les conditions d'acquisition de la nationalité, nous continuons de renforcer l'apprentissage du français, l'adhésion aux valeurs, etc. Que propose la gauche ? je suis sûr qu'elle a quelque chose à dire. Qu'à la gauche à dire au fait qu'il y a des départements français dans lesquels on a dépassé les 30 % d'étrangers à l'échelle du département ? c'est le cas de la Seine-Saint-Denis. Est-ce qu'on est capable d'accueillir dans de bonnes conditions 30 % d'une population qui est d'origine étrangère, ou est-ce qu'il ne faut pas procéder différemment ? il faudrait que ce débat il puisse s'enrichir de ces apports et de ces propositions.

DIMITRI PAVLENKO
Appel donc lancé à la gauche, sur ce point-là ?

OLIVIER VÉRAN
Oui, parce qu'elle ne peut pas rester en dehors du coup, enfin franchement, ça n'existe pas, et ailleurs en Europe la gauche est capable de dire oui, on saisit le défi qu'est l'immigration, l'intégration, et on propose de faire évoluer les règles. Après, la droite elle a des propositions qui sont parfois intéressantes, mais qui sont parfois très dures, on ne va pas changer la Constitution à chaque fois qu'on doit faire une loi sur l'immigration, on ne va pas sortir des traités européens et internationaux sur ces questions migratoires, enfin moi j'ai connu une droite républicaine qui était européenne, europhile, respectueuse des traités, et dans ce cadre-là on peut faire beaucoup de choses, d'ailleurs il y a des pays autour de nous, je cite le Danemark notamment, qui ont été capables de faire beaucoup de choses sans sortir du cadre des traités.

DIMITRI PAVLENKO
Oui, mais enfin ils ont des "opt-out"…

OLIVIER VÉRAN
Ils ont un "opt-out", ils respectent très largement les règles.

DIMITRI PAVLENKO
Autre sujet, Olivier VÉRAN. Mickaëlle PATY, la sœur de l'enseignant décapité, réclame une enquête parlementaire sur le dysfonctionnement de l'appareil d'État, les éventuels dysfonctionnements qui selon elle ont concouru à la mort de son frère, le Sénat va examiner sa proposition. Soutenez-vous la démarche de Mickaëlle PATY ?

OLIVIER VÉRAN
Toute personne qui a besoin d'avoir des réponses doit les obtenir, donc si la sœur de Samuel PATY s'interroge et qu'elle n'a pas eu toutes les réponses pour comprendre, on ne peut pas comprendre pourquoi ou comment un drame comme celui-ci a pu intervenir, mais si elle a besoin d'obtenir des réponses, en lien avec l'assassinat sordide de son frère, il faut qu'elle les obtienne d'une manière ou d'une autre, ça ne veut pas dire forcément une commission d'enquête, c'est aux parlementaires de le décider, mais ça veut dire qu'il faut de toute façon, encore une fois, pouvoir l'éclairer et dire les choses telles qu'elles se sont déroulées.

DIMITRI PAVLENKO
J'ai une dernière question. Vous êtes aussi, je ne l'ai pas dit, ministre du Renouveau démocratique…

OLIVIER VÉRAN
Je l'ai dit, moi, tout à l'heure.

DIMITRI PAVLENKO
Vous l'avez dit, je le signale à nouveau parce que c'est à ce titre que vous vous êtes rendu au Brésil cette semaine pour comprendre les ressorts de l'extrême-droite, alors la question que je me suis posée, est-ce que c'est de l'action gouvernementale ou est-ce que c'est de l'action partisane, est-ce qu'il n'y a pas un peu confusion des rôles dans ce voyage que vous avez entrepris cette semaine Olivier VÉRAN ?

OLIVIER VÉRAN
Vous savez, quand on défend la démocratie on défend les institutions, et ce qui s'est passé au Brésil, qui est un pays qui a acquis la démocratie, et qui a failli la perdre, c'est que lorsque l'extrême-droite de BOLSONARO a été battue dans les urnes, elle a tenté de résister, et il y a eu là des scènes d'invasion des bâtiments officiels, à Brasilia, du Parlement, du Sénat, de la Cour suprême, avec presque… de coup d'État. Et oui, en tant que ministre de la Démocratie…

DIMITRI PAVLENKO
Vous redoutez un coup d'État en France ?

OLIVIER VÉRAN
En tant que ministre de la Démocratie il est de mon rôle d'aller pouvoir parler avec les acteurs politiques, institutionnels, associatifs, les ONG, qui pendant cette période ont été déterminants pour maintenir la sauvegarde et sauvegarder la démocratie.

DIMITRI PAVLENKO
Mais d'où vient le danger en France, Olivier VÉRAN ?

OLIVIER VÉRAN
Je vous dis que je regarde, qu'en Amérique du Sud, au Brésil, l'extrême-droite avait gagné le pouvoir par les élections, l'a perdu par les élections, mais n'a pas voulu le rendre, et qu'il a fallu un système, encore une fois sacrément solide, pour que ça tienne.

DIMITRI PAVLENKO
Mais je vous le redemande, c'est un rôle de ministre ça, de faire cela, ou c'est le rôle d'un militant politique ?

OLIVIER VÉRAN
Je vous le redis, je suis ministre du Renouveau démocratique, garant aussi des institutions et du fonctionnement… je pense, vous savez, que l'émoi planétaire, l'émoi français, en tout cas d'une bonne partie des Français, de voir ces militants d'extrême-droite tenter d'envahir des bâtiments officiels, est le même…

DIMITRI PAVLENKO
Donc la menace vient de l'extrême-droite en France.

OLIVIER VÉRAN
Est le même émoi que celui qu'il y a eu lorsqu'il y a eu l'invasion du Capitole. Est-ce que ça fait partie du champ démocratique ? si vous considérez que ce n'est pas le cas, je vous propose qu'on en discute, parce que je serai intarissable sur le sujet.

DIMITRI PAVLENKO
Merci Olivier VÉRAN d'être venu nous voir sur Europe 1 ce matin.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 30 mai 2023