Texte intégral
NICOLAS DEMORAND
Bruno LE MAIRE, bonjour.
BRUNO LE MAIRE
Bonjour Nicolas DEMORAND.
LEA SALAME
Bonjour.
BRUNO LE MAIRE
Bonjour Léa SALAME.
NICOLAS DEMORAND
Et bienvenue sur Inter. Monsieur le ministre, on va aller droit au but, on est à deux jours de la décision de l'agence de notation Standard & Poor's, pensez-vous qu'après Fitch il y a un mois, cette agence va dégrader la note de la France, est-ce qu'il faut s'y préparer ?
BRUNO LE MAIRE
Très franchement je ne sais pas, c'est une agence qui est indépendante, elle prend ses décisions de manière indépendante, en revanche je pense que nous avons de bons arguments à faire valoir. J'ai reçu l'agence Standard & Poor's, comme l'a rappelé la Première ministre, j'ai présenté nos arguments, je pense qu'ils sont convaincants. D'abord, contrairement à ce que disait l'agence Fitch, nous faisons des réformes, nous arrivons à les faire passer, à les appliquer, réforme de l'assurance chômage, réforme des retraites, c'est à mettre au crédit du président de la République et de la majorité, en deuxième lieu nous avons des résultats économiques qui sont solides, nous avons une croissance qui s'est maintenue à 0,2 au premier trimestre, là où notre voisin allemand est en récession, nous avons créé 42.000 emplois au premier trimestre et nous sommes en train de faire reculer l'inflation, et en troisième lieu…
LEA SALAME
Ça, vous leur avez dit tout ça…
BRUNO LE MAIRE
Et en troisième lieu nous avons une stratégie, crédible, de réduction des déficits et d'accélération du désendettement puisque la dernière proposition que nous avons faite durcit le désendettement du pays.
LEA SALAME
Oui, c'est sur ça manifestement qu'ils ont des doutes, vous pensez les avoir convaincus, vous pensez que, dans deux jours, vos arguments ont été suffisamment forts et suffisamment entendus pour que la note ne soit pas abaissée…
BRUNO LE MAIRE
Nous verrons.
LEA SALAME
Ou il faut se préparer à ça et… ?
BRUNO LE MAIRE
Nous verrons, mais, je vais vous dire, toutes les décisions dont je viens de vous parler, je ne les prends pas, nous ne les prenons pas pour les agences de notation, nous les prenons parce qu'elles sont bonnes pour les Français. Quand nous décidons, avec le président de la République, avec Elisabeth BORNE, d'accélérer le désendettement du pays et de dire il faut aller plus vite sur la réduction de la dette, c'est tout simplement parce que les taux d'intérêt augmentent et qu'on ne veut pas payer des charges de la dette vertigineuse avec de l'argent qui pourrait servir, aux hôpitaux, aux crèches, aux policiers ou aux gendarmes, donc c'est pour les Français que nous faisons cette…
LEA SALAME
Je sais bien, les agences de notation ce n'est pas l'alpha et l'oméga, il ne faut pas leur donner trop de pouvoir, mais ils ont quand même un pouvoir, c'est-à-dire que quand ils baissent la note ça a des conséquences économiques qui sont qu'on va emprunter plus cher, est-ce que ça si demain…
BRUNO LE MAIRE
Justement, je ne suis pas certain de ces conséquences-là, donc je ne vais pas lire dans le marc de café, je ne sais pas quelle sera la décision de Standard & Poor's, et il y a d'autres indicateurs pour les marchés. Je pense que ce qui compte pour les marchés c'est est-ce que oui ou non cette majorité continue à faire des réformes ? la réponse est oui. Est-ce que le président de la République est déterminé à continuer sur la voie des réformes ? la réponse est oui, et il a la capacité de le faire et les instruments constitutionnels pour le faire. Est-ce que cette majorité a une stratégie crédible de réduction des déficits et de réduction de la dette ? oui, j'ai expliqué que nous allions retirer le bouclier sur le gaz et sur l'électricité, que nous avions de la croissance, que nous avions mis sur pied une revue des dépenses publiques, dont je donnerai les résultats le 19 juin lors des Assises des finances publiques…
LEA SALAME
Oui, mais nous avons une dette à 3000 milliards.
BRUNO LE MAIRE
Avec plusieurs milliards d'euros d'économie en 2024, donc tout ça ce sont des éléments crédibles de désendettement.
NICOLAS DEMORAND
3000 milliards, le service de la dette, donc la charge de remboursement sera de 71 milliards en 2027, ça deviendra le premier budget de l'Etat, c'est ce que nous disait Pierre MOSCOVICI à ce micro, c'est absolument considérable et c'est ce qui est au cœur, Bruno LE MAIRE, du possible abaissement de la note française.
BRUNO LE MAIRE
Oui, mais d'abord pourquoi est-ce que nous avons cette dette élevée ? ça remonte à plusieurs années, ça ne remonte pas à 2017, nous avons ensuite fait face à la crise du Covid, il y avait un choix à faire, que nous assumons, que nous revendiquons avec le président de la République. Est-ce qu'il valait mieux protéger nos entreprises et nos salariés ou laisser exploser le nombre de faillites et le nombre de chômeurs ? nous avons fait le premier choix, nous avons protégé massivement, résultat, nous avons aussi retrouvé nos résultats économiques plus vite que tous les autres pays européens et retrouvé de la croissance.
LEA SALAME
Avec une dette qui a aussi explosé plus que nos voisins européens, Bruno LE MAIRE.
BRUNO LE MAIRE
Du coup, elle a augmenté pas plus que nos voisins européens, dans des dimensions qui sont parfaitement comparables. En revanche, maintenant que nous sommes revenus dans une situation normale, que l'inflation est en train de reculer, nous devons accélérer le désendettement, et je rejoins parfaitement Pierre MOSCOVICI, avec qui nous discutons très régulièrement, il faut accélérer le désendettement du pays, nous le ferons, et je ne veux laisser aucune ambiguïté, Nicolas DEMORAND à ce sujet, nous serons intraitables sur le rétablissement de nos finances publiques, sur la réduction des déficits et sur l'accélération de la baisse de la dette publique.
NICOLAS DEMORAND
Mais dans ce contexte, annoncer 2 milliards de baisses d'impôts pour les classes moyennes est-ce raisonnable, se priver de 2 milliards de recettes fiscales alors que vous disiez en septembre que la France est à l'euro près, est-ce que ce n'est pas paradoxal ? le gouverneur de la BANQUE DE FRANCE, vous le savez, François VILLEROY de GALHAU, appelle à " arrêter la course à la baisse d'impôts dans ce pays, surtout avec les déficits que nous avons ", ce sont ses mots que je viens de citer.
BRUNO LE MAIRE
Moi ça me semble à la fois raisonnable et cohérent, raisonnable parce qu'on parle de 2 milliards d'euros, donc c'est une somme qui est raisonnable, et cohérent parce que depuis 2017, ça fait maintenant 6 ans que je suis dans ces fonctions, avec le président de la République, le fil directeur de notre politique c'est le travail et la rémunération du travail. Le travail, nous sommes en train de réussir, nous n'avons jamais eu un niveau d'emploi aussi élevé depuis plusieurs décennies, et la rémunération du travail c'est un combat permanent, parce que tous les salariés vous le diront, ils veulent toucher plus pour leur travail. On a baissé l'impôt sur le revenu de ceux qui avaient les salaires les plus modestes, nous avons mis en place une prime d'activité, nous avons défiscalisé les heures supplémentaires, nous avons augmenté les primes pour ceux qui reviennent au travail, donc nous avons tout fait pour que le travail paye davantage, cette baisse d'impôts elle s'inscrit dans cette logique-là, que le travail paye mieux.
LEA SALAME
Oui, mais vous avez de plus en plus de voix, et de voix qui ne sont pas - pardon, François VILLEROY de GALHAU ce n'est pas les Insoumis - qui vous disent, ou la BCE, qui vous disent arrêtez d'être obsédé par ce postulat qui est de dire on ne baissera pas les impôts, alors qu'on est endetté à 3000 milliards, de plus en plus de voix vous le disent.
BRUNO LE MAIRE
Léa SALAME… je ne suis pas du tout obsédé par ça, je suis obsédé que par une chose, que les gens qui travaillent vivent bien, aient une rémunération digne, puissent construire leur vie sans se dire on est à l'euro près à la fin du mois, c'est mon obsession, et je pense que ce qui va rassembler la société française, dans les années qui viennent, c'est le sentiment que, oui, le travail paye, que tout le monde peut avoir un travail s'il se donne le mal de le faire, et on accompagnera ceux qui sont le plus éloignés de l'emploi pour le faire également, mais en plus c'est leur intérêt parce que le travail paye, je pense que c'est un combat juste, nécessaire, important pour notre pays.
NICOLAS DEMORAND
Un mot sur le rapport Pisani-Mahfouz consacré au coût de la transition écologique, rapport que Jean-Marc JANCOVICI jugeait très intéressant hier à notre micro, JANCOVICI regrettait d'ailleurs que vous l'ayez balayé si rapidement de la main. Ce rapport préconise, je le rappelle, un recours accru à l'endettement, 10 points de PIB d'ici à 2030, couplé à un impôt exceptionnel sur le patrimoine financier des 10% des contribuables les plus aisés, ce qui rapporterait 5 milliards d'euros par an. Pierre MOSCOVICI, je recite, défendait aussi le rapport, et il a souligné que si on finance la transition écologique, ni par les impôts, ni par la dette, on prend le risque de ne pas la financer du tout. Vous lui répondez quoi ?
BRUNO LE MAIRE
Que c'est effectivement un très bon rapport, ça a été ma première réaction chez vos confrères sur RTL, je pense que c'est un rapport très important le rapport Pisani-Ferry, je pense que c'est un rapport qui pose pour la première fois très clairement l'équation économique et financière de la transition écologique. J'ai commencé à le lire, il est très long, donc ça prendra un peu de temps, mais je trouve que l'évaluation qui est faite du coût économique de la transition écologique est très juste, et très impressionnante, et je valide…
LEA SALAME
Et sur les conclusions ?
BRUNO LE MAIRE
Je valide les chiffres, au niveau du ministère de l'Economie et des Finances on estime qu'on est sur 60 à 70 milliards d'euros de financements nécessaires chaque année.
NICOLAS DEMORAND
Et sur les leviers ?
BRUNO LE MAIRE
Mais les leviers, je vous donne juste un exemple…
NICOLAS DEMORAND
Et un ISF vert ?
BRUNO LE MAIRE
On parle d'un ISF vert qui toucherait 10 % des contribuables, ce 10% des contribuables c'est ceux qui payent déjà 75% de l'impôt sur le revenu, donc je dis non, et je redis avec beaucoup de fermeté non, nous n'augmenterons pas les impôts sur ces 10 % des contribuables qui payent déjà 75 % de l'impôt sur le revenu. La somme c'est 5 milliards d'euros, 5 paires d'euros par an c'est ce que rapporterait cet ISF vert. Je fais une autre proposition, mon autre proposition, plutôt que d'augmenter l'impôt des Français, c'est de mobiliser l'épargne des Français. Si nous mobilisons l'assurance-vie, et il y aura dans le projet de loi industrie verte une obligation d'avoir des unités de compte qui iront vers le financement de la transition écologique, si nous mettons en place ce plan épargne vert, qui est aussi dans le projet de loi industrie verte, et si nous réorientons les sommes du Livret de développement durable et solidaire, c'est très exactement 5 milliards d'euros chaque année qui pourront être dégagés pour le financement de la transition écologique. Je préfère financer la transition par la mobilisation de l'épargne, plutôt que par l'augmentation des impôts.
LEA SALAME
Là aussi on vous cite quelqu'un qui n'est pas, enfin qui a contribué à écrire le programme d'Emmanuel MACRON, et qui dit ça, on vous cite le Gouverneur de la BANQUE DE FRANCE, on vous cite Jean PISANI-FERRY qui a contribué à écrire et qui dit…
BRUNO LE MAIRE
Mais j'ai reçu Jean PISANI-FERRY, j'ai discuté avec lui.
LEA SALAME
Oui, non, non, je ne dis pas le contraire, je dis entendez-vous ces voix qui ne sont pas des voix extrême-gauchistes, ou même gauchistes, qui vous disent un ISF vert serait une bonne idée et vous le balayez immédiatement, il paraît même, c'est " Le Parisien " qui le dit, qui rapporte les propos du président de la République en conseil des ministres hier, " il est utile ", qui aurait dit sur ce rapport et sur l'ISF vert, " il est utile de révéler le coût de la transition écologique, mais il est important d'éviter le piège à cons du débat sur la fiscalité des riches. " C'est un piège à cons, pour qu'on comprenne bien ce que vous pensez au fond, parce que vous pouvez dire oui c'est un piège à cons, c'est un piège à cons de parler de la fiscalité des plus riches ?
BRUNO LE MAIRE
D'abord je n'étais pas au conseil des ministres hier, je ne peux pas valider des propos…
LEA SALAME
Mais votre avis ?
BRUNO LE MAIRE
Mon avis est très clair, d'abord je ne balaye jamais rien d'un revers de la main, il n'y a aucun mépris, aucune facilité de pensée chez nous, il y a simplement une équation financière, 60 à 70 milliards d'euros à trouver par an, il y a cette recette que nous avons employée pendant des années, des années, des années, qui est de dire on a besoin d'argent, on taxe ceux qui travaillent, eh bien désolé, ma réponse sera toujours non. On dit les plus riches, c'est 10% de nos compatriotes, et à la fin, quand on s'aperçoit qu'il faut encore plus d'argent, on va vers les classes moyennes et on finit par taxer tout le monde. Nous avons le niveau de prélèvements obligatoires le plus élevé de tous les pays développés, de tous les pays développés, je pense que les gens en ont marre, je pense que beaucoup de gens qui travaillent, qui voient ce qui leur reste à la fin du mois, disent trop c'est trop, et je prends vraiment très à coeur de répondre à tous ceux qui travaillent, qui ont le sentiment de payer trop…
LEA SALAME
Oui, ça c'est les classes moyennes, vous avez raison sur les classes moyennes, mais sur les plus riches, ils disent trop c'est trop ?
BRUNO LE MAIRE
Mais les plus riches ne disent pas trop c'est trop, les 10%, c'est beaucoup de Français, c'est des millions de nos compatriotes, et on sait très bien que quand on commence à ouvrir la voie d'une augmentation des impôts des 10% les plus riches, on vous dit c'est temporaire, c'est définitif, et on vous dit que c'est 10 % les plus riches, on finit par les classes moyennes, je pense que mon raisonnement, et notre raisonnement est très simple, quand on a le niveau d'impôts et de taxes le plus élevé de tous les pays développés on cherche des solutions alternatives. S'il n'y avait pas, Léa SALAME, de solutions alternatives, je dirais on n'a pas le choix, mais on a des solutions alternatives. Vous avez 500 milliards d'euros d'épargne privée qui se trouvent sur des livrets ou sur des placements sur lesquels vous n'avez pas l'épargne qui est orientée dans la bonne direction. Vous pouvez réorienter la fiscalité, c'est vrai que c'est plus difficile de dire on va fiscaliser davantage tout ce qui est dépenses " brunes ", dépenses pour les énergies fossiles, tous les avantages fiscaux qui existent sur des véhicules qui sont très lourds et très polluants, on va les retirer, on va récupérer l'argent, et on va le mettre sur la transition écologique, il me semble que c'est plus vertueux. Avoir l'Etat qui accompagne, et qui par exemple vous aide à acheter votre véhicule électrique, à rénover votre bâtiment, ça c'est vertueux, on peut le faire sans augmenter les impôts, s'il n'existait pas de solutions alternatives je me poserai la question, mais à partir du moment où il existe des solutions alternatives pour financer ces 60 milliards d'euros et la transition écologique, je préfère ces solutions alternatives à la facilité de l'impôt, qui exaspère nos compatriotes.
NICOLAS DEMORAND
Hier, Bruno LE MAIRE, vous étiez à l'inauguration de la première usine produisant en France des batteries pour voitures électriques, coentreprise STELLANTIS, TotalEnergies, MERCEDES, deux questions. Combien faudra-t-il d'usines de ce genre pour combler notre retard avec les Chinois, d'autant que vous avez dit que la bataille est au couteau entre Chine, Etats-Unis, Europe, pour attirer les industriels, et que personne ne se fait, en la matière, de cadeau, il y a eu évidemment les fonds mis par ces entreprises, mais aussi énormément d'argent public, plus d'1 milliard de fonds publics, l'écrasante majorité venait de la France, donc on va combler notre retard avec les Chinois, en combien de temps et c'est la guerre ?
BRUNO LE MAIRE
Oui, c'est une guerre économique, ça il ne faut se faire aucune illusion, en tout cas c'est un combat économique qui est très dur, parce que la transition écologique amène une nouvelle répartition des chaînes de valeur et des industries partout à travers la planète. Deuxième observation, cette usine est la preuve vivante que la politique peut changer la donne. personne ne croyait il y a quelques années, quand nous avons lancé ce projet avec le ministre de l'Economie allemand de l'époque, Peter ALTMAIER, avec la chancelière Angela MERKEL, et avec le président de la République Emmanuel MACRON, qu'on pouvait faire des batteries en Europe, personne, tout le monde nous a ri au nez, y compris de grands industriels qui participaient hier à cette réunion, mais qui finalement ont soutenu le projet, tout le monde disait c'est plié, les batteries électriques c'est la Chine et on ne pourra pas faire autrement. Nous nous sommes mobilisés, les industriels, TOTAL, PSA, STELLANTIS, MERCEDES, se sont mobilisés, les ingénieurs, l'ensemble des forces publiques, la Commission européenne, qui nous a permis de financer largement cette usine pour rattraper notre retard. Résultat, nous avons cette usine, nous aurons quatre usines de batteries électriques en France dans les années qui viennent, elles représentent 10.000 emplois salariés, 10.000, dans l'industriel…
LEA SALAME
Hier la CGT, vous le savez, a manifesté pour dénoncer la casse sociale liée à l'électrification des véhicules à Douvrin.
BRUNO LE MAIRE
Mais, il y a des inquiétudes de la part de tous les ouvriers qui travaillaient dans le véhicule thermique, ces inquiétudes elles sont légitimes, nous y répondrons, et les industriels doivent aussi y répondre, mais nous sommes en train de réussir notre rattrapage sur la Chine en matière de véhicules électriques, le véhicule électrique sera le véhicule du XXIème siècle, si nous ne faisions pas de batteries électriques en France et en Europe nous risquions de voir disparaître la filière de l'industrie automobile en Europe, là nous allons réussir, je pense que c'est la preuve vivante, une fois encore, que la politique peut changer la donne, que nous pouvons livrer le combat face à la Chine et face aux Etats-Unis, et qu'il faut investir massivement dans ce véhicule électrique.
LEA SALAME
Deux questions économiques encore Monsieur le ministre de l'Economie, avant de vous poser quelques questions politiques, parce qu'on voulait aussi vous entendre sur la situation politique du pays, d'abord le moral des patrons continue de s'assombrir, pour le troisième mois consécutif le climat des affaires s'est détérioré en France selon les données de l'INSEE parues hier, dans ce contexte vous maintenez votre prévision de croissance à 1% en 2023 ou ce n'est plus réaliste ?
BRUNO LE MAIRE
Non, je maintiens la prévision de croissance à 1%. Nous avons un premier trimestre où, une fois encore, nous avons 0,2 de croissance, donc la croissance française résiste, après soyons lucides, l'environnement économique est un environnement qui est plus difficile. Avoir notre premier partenaire commercial, l'Allemagne, qui est entré en récession, ce n'est pas une bonne nouvelle pour la France, avoir le conflit en Ukraine qui persiste, ce n'est pas une bonne nouvelle non plus pour l'économie française…
LEA SALAME
Mais tout de même, vous pensez qu'on arrivera au 1 %.
BRUNO LE MAIRE
Nous résistons, je maintiens la prévision de croissance à 1%, je suis lucide sur les risques qui pèsent aujourd'hui sur notre croissance et sur l'économie française.
NICOLAS DEMORAND
Sur l'inflation alimentaire, elle se maintient à un niveau élevé, près de 15% en avril, vous avez dit que les prix arrêteraient de monter à partir de l'automne, mais vont-ils baisser ? Michel-Edouard LECLERC a déclaré début mai qu'on ne reviendrait jamais aux prix d'avant, avis partagé par Dominique SCHELCHER de SYSTEME U, qui avertit les consommateurs, " il ne faut pas laisser croire que les prix vont revenir au niveau de ceux qui existaient avant le conflit Ukraine. " Ils ont raison ?
BRUNO LE MAIRE
Eh bien l'inflation ralentit, et elle ralentit même fortement, c'est la première fois depuis plusieurs mois que nous voyons que l'inflation ralentit, en France…
LEA SALAME
De combien ?
BRUNO LE MAIRE
Je ne peux pas donner le chiffre pour le moment…
LEA SALAME
Ça va sortir dans 5 minutes, donc je pense que vous pouvez le dire, l'inflation va baisser, dans 5 minutes on saura que l'inflation a baissé.
BRUNO LE MAIRE
Mais on va attendre, on va respecter, nous respectons tous les embargos, mais je l'ai toujours indiqué, nous avons toujours indiqué avec le gouvernement que, à l'entrée de l'été nous verrions l'inflation ralentir, nous y sommes, l'inflation ralentit, et il y a un certain nombre de prix qui vont commencer à baisser. Sur les prix alimentaires, maintenant il faut accélérer la baisse, il faut que chacun tienne ses engagements. Les distributeurs ont tenu leurs engagements sur le panier anti-inflation, sur le trimestre anti-inflation, et ils ont pris la décision de le prolonger au-delà du 15 juin, très bonne nouvelle, il faut que les industriels, qui se sont engagés, dans mon bureau, à revenir à la table des négociations commerciales pour traduire cette baisse de l'inflation dans les prix, sur les rayons, tiennent leurs engagements.
LEA SALAME
Pardon, vous avez entendu ce que dit le patron de SUPER U, il dit aux Français…
BRUNO LE MAIRE
Mais je réponds très précisément au patron de SUPER U…
LEA SALAME
" Les Français "… " il faut qu'ils s'habituent, les consommateurs, à l'automne l'inflation va baisser, mais les prix ne vont pas baisser ", c'est-à-dire que la bouteille d'huile va rester au prix où elle est aujourd'hui.
BRUNO LE MAIRE
Mais je souhaite que les prix qui doivent baisser, c'est-à-dire ceux dans lesquels les intrants ont fortement baissé, je pense aux pâtes avec le prix du blé qui a baissé, ça se traduise dans les rayons. Je le redis, les grands industriels ont pris dans mon bureau des engagements de revenir à la table des négociations commerciales avec les distributeurs, l'engagement pour le moment n'a pas été tenu, de deux choses l'une, soit les grands industriels tiennent leurs engagements dans les jours qui viennent, soit j'utiliserai l'instrument fiscal pour récupérer les marges qu'ils doivent rendre aux consommateurs, je ne peux pas être plus clair.
LEA SALAME
Mais Bruno LE MAIRE, ça vous le dites depuis un mois, ils ne le font pas.
BRUNO LE MAIRE
Mais, très bien. La loi de finances, Léa SALAME, elle n'est pas en juin, elle est en octobre, donc je mets le marché dans la main des industriels de manière très claire, ils se sont engagés dans mon bureau, les 75 plus grands industriels de l'agroalimentaire et des produits d'hygiène, à répercuter dans les prix la baisse des prix de gros, pour que le consommateur paye moins cher, dans ses rayons de supermarchés, aujourd'hui aucune de ces négociations commerciales ne s'est rouverte, j'avais laissé jusque fin mai-début juin, nous y sommes, je laisse encore quelques jours…
NICOLAS DEMORAND
Donc vous sanctionnerez les entreprises si elles ne le font pas.
BRUNO LE MAIRE
Je vais être beaucoup plus précis, ce n'est pas une sanction, ce sera une taxation. Les très grandes entreprises de l'agroalimentaire, les 75 qui étaient dans mon bureau, qui s'étaient engagées à redistribuer les marges aux consommateurs en baissant les prix avec des négociations commerciales, soit elles le font et tout se passera bien, et je leur fais confiance pour tenir parole, mais si elles ne tiennent pas parole je pense que je ne serai fondé à utiliser l'instrument fiscal pour récupérer les marges et rendre ces marges aux consommateurs.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 1er juin 2023