Texte intégral
ADRIEN GINDRE
Bonjour Olivier VERAN.
OLIVIER VERAN
Bonjour.
ADRIEN GINDRE
Merci beaucoup d'être là ce matin. Hier le Gouvernement a confirmé la préparation d'une loi d'urgence pour faire face aux reconstructions nécessaires dans les communes touchées par les violences, une circulaire a d'ores était préparée pour, vous disiez vous hier, 90 % des cas, quand la loi, pour le reste, sera-t-elle présentée, examinée, mise en application ?
OLIVIER VERAN
Nous regardons les choses de très près. D'abord il y a une certitude, c'est qu'on veut pouvoir reconstruire ce qui a été détruit. Pourquoi ? parce que les premières victimes sont les Français, qui n'ont rien demandé, et qui ont vu leur bibliothèque, une école, un stade, une antenne de mairie ou de commissariat détruite partiellement ou totalement, donc c'est normal de reconstruire ça. Il ne s'agit pas, je différencie ça, de ce qui reviendrait à mettre à nouveau de l'argent public pour de nouvelles constructions dans les quartiers comme une réponse politique à ces émeutes, ce que nous ne faisons pas.
ADRIEN GINDRE
Juste, reconstruire, pardon Olivier VERAN, je vous arrête un instant pour bien comprendre, ça va quand même coûter de l'argent, il y a certes des cas où les assurances couvrent, mais il y aura quand même des cas, soit parce que des bâtiments ne sont pas assurés, soit parce que le montant est excessif, où il faudra de l'argent public.
OLIVIER VERAN
Ces familles, de cette commune qui a vu une école brûler, en fait elles ont besoin de mettre leurs enfants à l'école, ce ne sont pas des émeutiers, ce ne sont pas des familles d'émeutiers, donc il est normal que l'État intervienne.
ADRIEN GINDRE
Et donc là qui paiera ?
OLIVIER VERAN
Nous travaillons avec les assurances, nous travaillons avec les banques, et puis l'État prend sa part, les collectivités, nous voulons accompagner les collectivités financièrement pour qu'il n'y ait aucun frein à la reconstruction, le plus souvent d'ailleurs ce sera à l'identique, parfois ça sera peut-être aussi l'occasion de finaliser un projet qui était en cours de discussion, donc pour cela il faut aller vite, hors de question d'attendre.
ADRIEN GINDRE
Donc quand ?
OLIVIER VERAN
Donc on a pris une circulaire, à la demande de la Première ministre, le ministre Christophe BECHU a pris une circulaire, qui a été publiée, qui permet d'activer, d'accélérer un certain nombre de mécanismes, là où nous regardons les choses c'est que, dans un certain nombre de situations, par exemple dans des zones… des bâtiments, des bâtiments de France, il y a des procédures qui peuvent rallonger ou qui peuvent freiner les reconstructions, et là peut-être qu'un recours à la loi serait nécessaire, auquel cas le président de la République…
ADRIEN GINDRE
Peut-être, ce n'est pas encore sûr ?
OLIVIER VERAN
C'est quasiment évident, enfin c'est quasiment assuré ; et donc le président de la République a demandé au Gouvernement de travailler très très vite à un complément législatif, c'est-à-dire un texte de loi, complémentaire de la circulaire, de manière à ce qu'aucune situation ne nous échappe.
ADRIEN GINDRE
Mais dans quelques jours le Parlement va partir en vacances, c'est la pause estivale, y compris pour les députés et sénateurs, vous allez demander au Parlement de siéger plus longtemps ?
OLIVIER VERAN
Tout est sur la table, un objectif : ne pas retarder la reconstruction de ce qui doit être retardé…
ADRIEN GINDRE
De ce qui doit être reconstruit.
OLIVIER VERAN
Qui doit être reconstruit ; nous avons…
ADRIEN GINDRE
Mais les choses ne sont pas calées.
OLIVIER VERAN
Les choses ne sont pas calées complètement dans le délai, mais sur le principe, sur la priorité et sur l'urgence, sachez-le, c'est ce que nous allons faire.
ADRIEN GINDRE
Alors, une question quand même, parce que quand on dit loi d'urgence, loi d'accélération pour la circulaire, quels que soient les termes, ça sous-entend que nous procédures aujourd'hui sont trop lourdes, trop longues, trop compliquées, est-ce qu'on ne peut pas faire rentrer de manière pérenne dans nos règles le fait qu'on a des procédures plus légères, plus souples, plus rapide ?
OLIVIER VERAN
Ce n'est pas la même chose quand il s'agit de reconstruire quelque chose qui vient d'être incendié et quand il s'agit de construire un bâtiment public neuf, dans certains endroits, donc les règles ne peuvent pas être les mêmes, par contre si vous m'interrogez sur la célérité avec laquelle l'État devrait être capable de pouvoir accompagner la construction de bâtiments fondamentaux, la réponse elle est oui, et d'ailleurs c'est le sens du travail qui nous a demandé le président de la République, c'est l'efficacité de l'action publique, aller toujours plus vite, de manière efficace, proportionnée, s'en prendre non plus de risques, ni avec évidemment la biodiversité, ni avec le bien-être des habitants, donc il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Là on sait que, là où une école avait été détruite, on veut reconstruire une école, on n'a pas besoin d'attendre un an ou deux ans de procédure pour savoir qu'on va reconstruire ici une école.
ADRIEN GINDRE
Je reviens à la question du financement. L'Association des maires de France, l'AMF, a demandé clairement hier dans un communiqué un fonds d'urgence exceptionnel financé par l'État, oui ou non, y aura-t-il un fonds d'urgence financé par l'État ?
OLIVIER VERAN
Ce sont les discussions qui sont en cours entre le Gouvernement et les représentants des élus, sachant que vous connaissez notre intention, elle est de faire en sorte que toutes les communes puissent reconstruire leurs bâtiments.
ADRIEN GINDRE
Mais vous avez budgété une enveloppe d'ores et déjà ?
OLIVIER VERAN
Les modalités opérationnelles, financières, sont en cours de discussions, mais je vous le redis, dès lors qu'on dit ça c'est qu'on veut que les communes puissent reconstruire une école.
ADRIEN GINDRE
Alors l'autre sujet sur lequel le Gouvernement a attiré l'attention c'est le point des réseaux sociaux, vous y êtes revenu vous-mêmes hier, il y a un mot qui a été employé par le président qui a fait réagir, c'est l'idée de "couper les réseaux sociaux", il n'a pas dit "limiter des fonctionnalités", il n'a pas dit "empêcher la géolocalisation", il a dit "couper les réseaux". Est-ce qu'il y a une option dans laquelle le Gouvernement envisage de pouvoir couper les réseaux sociaux ?
OLIVIER VERAN
En fait le président de la République était interrogé par un des maires qui lui dit "dans ce genre de situation il faudrait pouvoir couper les réseaux", et lui il dit "il faut pouvoir réguler, couper, etc." Ce que nous avons fait, pendant ces nuits d'émeutes, c'est que nous avons demandé aux plateformes, exigé des plateformes, qu'elles coupent certaines fonctionnalités sur une durée de temps déterminée, par exemple le fameux Snap Mat, sur la plateforme Snapchat, alors que ce n'est pas un outil qui a été prévu pour ça du tout, d'ailleurs c'est une start-up française qui avait développé cet outil, qui est qu'est ludique et qui peut être utile au quotidien, y a eu un mésusage, un usage détourné de cette fonctionnalité pendant les émeutes, qui fait que ça permettait aux émeutiers de se retrouver à tel endroit à telle heure, et donc ça c'était hors de question, donc il faut pouvoir aussi saper tous les outils qui vont être détournés par les émeutiers dans ce type de situation. Et ça appelle à avoir une réflexion, parce que ce que nous avons fait dans l'urgence, avec les plateformes, en leur demandant de le faire, eh bien il est plus prudent, pour l'avenir, pour toutes les situations qui pourraient intervenir dans notre pays dans des années, dans des décennies, peu importe, eh bien être capable d'avoir les outils législatifs qui permettent d'être plus réactifs encore, donc c'est cela que nous sommes en train de réfléchir, nous ne le réfléchissons pas dans notre coin, c'est le ministre Jean-Noël BARROT, ministre du Numérique, qui réunit un groupe transpartisan, c'est-à-dire qu'il y en a de tous les partis, de tous les groupes politiques, de l'Assemblée et du Sénat, pour pouvoir évaluer s'il y a des besoins complémentaires dans la loi. Donc il ne s'agit pas de couper, d'avoir un bouton on/off sur les réseaux sociaux, sur décision politique, etc., je vous vois venir, ce n'est évidemment pas le sens de la politique que nous menons, par contre de se dire il y a certains moments où l'État il doit pouvoir reprendre la main sur des outils lorsqu'ils servent à des gens qui agissent mal.
ADRIEN GINDRE
Vous savez aussi que la question se pose parce que vous ne serez pas éternels au pouvoir et que d'autres peuvent vous suivre un jour et avoir d'autres comportements.
OLIVIER VERAN
Nous sommes toujours attentifs à cette question de manière générale, quand on est, comme vous dites, au pouvoir, on réfléchit à l'usage qui pourrait être fait des textes de loi que nous prenons si d'aventure c'était d'autres qui prenaient le pouvoir.
ADRIEN GINDRE
Il y a une question aussi que le président a posée, il dit il faut prendre le temps pour comprendre ce qui s'est passé, c'est l'un des chantiers qui est engagé. Au moment où l'on est, là, vous, qu'est-ce que vous avez retenu de la semaine qui s'est passée, quel message vous avez entendu, s'il y a un message ?
OLIVIER VERAN
Il y a des messages, d'abord que nous avons été en capacité de restaurer l'ordre et de maintenir l'ordre, avec une mobilisation exceptionnelle…
ADRIEN GINDRE
Ça c'est ce que vous avez bien fait, mais ce n'est pas ce qui a déclenché les émeutes et les violences.
OLIVIER VERAN
Pardon, si ça avait été mal fait, c'est la question que vous me poseriez ce matin, donc on peut aussi ensemble reconnaître que nos forces de l'ordre, nos forces de sécurité intérieure, nos pompiers, nos agents aussi, hospitaliers, qui ont été mobilisés, ont fait un travail remarquable.
ADRIEN GINDRE
Mais quand vous me dites ça, ça veut dire qu'en fait vous dites il faut se préparer à de nouvelles violences et être capable d'y répondre, c'est le rôle des forces de l'ordre, mais il n'y a pas de moyen d'empêcher, de prévenir, de lutter contre.
OLIVIER VERAN
Je fais un premier constat qui me semble important, je pense que c'était le constat fondamental pour les Français la semaine dernière, restaurer, rétablir, et maintenir l'ordre, point. Deuxièmement, la justice a été capable de fonctionner avec une vitesse inédite, et qu'il faut saluer, avec des centaines de comparutions immédiates. Troisièmement, nous avons plus de 4 000 personnes, jeunes pour l'essentiel, qui ont été arrêtées, ces 4 000 personnes elles ont été, elles sont, ou elles seront traduites devant la justice, et donc cela va nous permettre de saisir à qui nous avons affaire, et il y a des choses que nous n'expliquons pas aujourd'hui. Pourquoi est-ce que dans une ville, qui a cinq ou six quartiers populaires, il y en a deux qui se sont enflammées et d'autres qui n'ont pas été…
ADRIEN GINDRE
Et pourquoi dans des villes qui n'en ont pas du tout il y avait des violences.
OLIVIER VERAN
Pourquoi est-ce que dans des villes qui n'ont pas de quartiers populaires, qui ont toujours été très calmes, il y a eu des violences ? pourquoi dans certains endroits c'est des jeunes issus de l'immigration, dans d'autres pas du tout ? pourquoi dans certains endroits ce sont des jeunes qui sont connus des services, comme on dit, et dans la plupart des endroits, pas du tout ?
ADRIEN GINDRE
Et qui va faire ce travail d'analyse concrètement, vous allez mobiliser des sociologues qui vont venir décortiquer les fichiers de la justice ?
OLIVIER VERAN
C'est un ensemble de professionnels qui se penchent sur la question d'ores et déjà, pour qu'on puisse ensuite communiquer, et ensuite il faut qu'on puisse identifier des facteurs communs, s'il y en a, et je pense qu'il y en a. Quel est le rapport à l'Education, quand il s'agit d'enfants, d'adolescents notamment, quel parcours scolaire, éducatif, quel est le parcours professionnel, quels sont les lieux de vie, quelles sont les pratiques ? vous savez, on nous raille parfois quand on parle de l'impact qu'ont pu avoir certains jeux vidéo, personne ne dit que c'est les jeux vidéo qui conduisent les jeunes dans la rue à la violence, mais enfin, si vous vous êtes déjà penché sur certains jeux, comme par exemple "GTA" qui est un concept selon lequel en fait vous devez carjacker des voitures, écraser des piétons avec les voitures, tirer pour tuer des policiers ou des pompiers, ou la population civile, et plus vous le faites, plus vous avez des points, des jeux qui sont interdits aux moins de 18 ans, et je suis à peu près convaincu que ce ne sont pas que des majeurs qui parfois y passent 3 ou 4 heures par jour, ça peut avoir un impact.
ADRIEN GINDRE
La réponse ça peut être quoi, interdire ces jeux ?
OLIVIER VERAN
Déjà ils sont interdits aux moins de 18 ans, de la même manière qu'il est interdit pour un mineur de 12 ans de sortir avec un bidon d'essence au milieu de la nuit dans une rue, qu'il y ait émeutes ou qu'il n'y ait pas émeutes, en fait, quand il y a quelque chose qui est interdit à des mineurs c'est que c'est interdit à des mineurs, ce n'est pas c'est pas grave ou que je le laisse faire ce qu'il veut, donc il y a ce rôle éducatif, il y a peut-être aussi de l'éducation parentale, par endroits, qu'il faut pouvoir revoir, vous savez que le garde des Sceaux a pris une circulaire de politique pénale qui rappelle les parents à leurs obligations, et on rappelle aussi…
ADRIEN GINDRE
Il prépare un flyer pour le rappeler aux parents, un dépliant, en bon français.
OLIVIER VERAN
Vous savez, parfois, quand il n'y a pas de modèle, restaurer un modèle ça se fait aussi de manière assez simple et de manière directe, donc il y a tout cela que nous devons réfléchir. Ce que nous savons aussi c'est qu'il y a deux écueils que nous voulons éviter. Un, le premier, c'est de dire la réponse, si on avait mis 10 000 milliards de plus dans les banlieues ça ne serait pas arrivé, c'est faux, on n'a jamais mis autant d'argent dans les banlieues que depuis six ans…
ADRIEN GINDRE
Donc il n'y aura pas d'argent en plus, il n'y a pas de besoins.
OLIVIER VERAN
Ce n'est pas la même mobilisation, ce n'est pas la même nature de mobilisation, que celle de 2005, qui portait, elle, des revendications politiques, sur les moyens, sur l'accès à la République, etc., ce n'est pas le même public, ce n'est pas un gamin de 12 ans qui se mobilise parce qu'il manque de moyens dans un quartier populaire, et le deuxième écueil ce serait de dire si vous nous aviez écoutés et que vous aviez coupé les allocs aux familles ou fait ça, etc., on n'en serait pas là. Pardon, non, les solutions simplistes ça ne fonctionne pas dans cette situation. Donc, le président de la République nous a demandé de faire un constat clair, adapté, profond, rapide, pour que nous puissions intervenir, le diagnostic et le traitement comme on dit chez moi.
ADRIEN GINDRE
Avant qu'on en vienne à la suite du diagnostic, puisque vous venez de rappeler que ça va se faire vite, mais que ce n'est pas immédiat, l'immédiat c'est samedi un appel à des marches justement sur les suites de la mort du jeune Nahel, le 14 juillet il y a des craintes exprimées encore par certains de vos opposants politiques ce matin à la radio, que ce soit Marine LE PEN, Gérard LARCHER, est-ce que les préfets sont appelés à prendre des mesures particulières sur les marches de samedi, est-ce qu'autour du 14 juillet vous avez des remontées d'information qui suscitent des craintes chez vous ?
OLIVIER VERAN
Deux choses qui sont très différentes et qu'on va traiter différemment, si vous en êtes d'accord. Un, l'appel à des marches de samedi, ce sont aux préfets de décider s'ils autorisent ou s'ils interdisent ces rassemblements, moi je note juste qu'à l'heure où la quasi-totalité de la classe politique se mobilise pour panser nos plaies et penser l'avenir, avec "penser" cette fois-ci, et faire des propositions, une partie de la classe politique appelle à quoi ? à manifester, à descendre dans la rue.
ADRIEN GINDRE
C'est à l'appel de certains syndicats et partis de gauche, en effet.
OLIVIER VERAN
Quand nous parlons de mettre de l'huile sur le feu, vous en avez ici la démonstration la plus évidente.
ADRIEN GINDRE
Parce que manifester c'est forcément mettre de l'huile sur le feu ?
OLIVIER VERAN
Quand vous avez un parti, la France insoumise, qui depuis une semaine n'a de cesse que de justifier bon an, mal an, le fait que les gens aient envie de contester, y compris en ayant recours à la violence sociale, quand ce même parti vous explique, alors que ça fait quelques nuits que nous obtenons, avec une mobilisation extraordinaire des forces de l'ordre, un retour au calme dans nos villes, et que ce parti est dit "eh bien samedi, vous êtes en colère, venez l'exprimer dans la rue"…
ADRIEN GINDRE
Parce que vous pensez que cette manifestation ce sera forcément l'expression et l'occasion de violences ?
OLIVIER VERAN
Je vous dis que l'intention qui est derrière plus personne, s'il y avait encore des personnes qui étaient dupes dans notre pays sur les intentions politiques de LFI, des Insoumis aujourd'hui, plus personne n'est dupe, et vous avez de l'autre côté la fête de la Nation, la fête de la République, le jour où on célèbre la France, le jour où on fait communion, où on fait groupe, où on fait corps, le 14 juillet, ce 14 juillet il est évidemment hors de question de considérer qu'il devrait s'effacer derrière quelques milliers d'émeutiers dans nos villes, donc il faut traiter les choses de manière très différente, le 14 juillet les gens viennent célébrer la France, samedi prochain la France insoumise n'appelle pas à célébrer la France.
ADRIEN GINDRE
Mais le 14 juillet il n'y aura pas d'annulations d'événements ? ces derniers jours il y a eu des annulations de concerts, de kermesses, de fêtes de villages, précisément en raison du contexte, et pour ne pas mobiliser de forces de l'ordre. Les 13 et 14 juillet il y a traditionnellement des bals des pompiers, des feux d'artifice municipaux, tout cela aura lieu comme une année normale ?
OLIVIER VERAN
Nous faisons tout, nous mettons tout en œuvre pour sécuriser, pour que les conditions de sécurité et de tranquillité publique soient réunies évidemment pour ce grand moment de fête nationale, et ensuite j'imagine que ce sera au cas par cas avec les préfets sur certains événements peut-être, mais je vous dis qu'aujourd'hui il n'y a pas du tout de consignes de revenir sur la tradition du 14 juillet, qui est encore une fois le grand jour pour la Nation.
ADRIEN GINDRE
Revenons aux conséquences politiques, vous commenciez à les évoquer, il y a des propositions, là encore faites par vos oppositions, mais qui font échos à certaines déclarations aussi du chef de l'État. Quand il dit en début de semaine qu'on pourrait envisager de sanctionner financièrement les familles, ça fait écho à la suppression des allocations familiales portée par les Républicains, ça fait écho à la proposition de supprimer les logements sociaux pour certains d'entre eux. Concrètement, pour vous, où est la marge de manœuvre entre l'idée de sanctionner les familles, comme le dit le chef de l'État, et les propositions de LR par exemple ?
OLIVIER VERAN
Adrien GINDRE, il y a une loi dans notre pays…
ADRIEN GINDRE
Oui, qui n'est pas ou peu appliquée, deux ans d'emprisonnement, 30 000 euros d'amendes.
OLIVIER VERAN
Non mais, quand il y a une loi elle est faite pour être appliquée.
ADRIEN GINDRE
Je m'arrête juste là-dessus, parce que ça paraît une évidence ce que vous dites, mais vous imaginez vraiment envoyer deux ans en prison, ou donner une amende de 30 000 euros, à des parents ?
OLIVIER VERAN
Ce les peines maximales encourues pour des parents qui refuseraient par exemple de se présenter devant un juge pour enfants lorsque leur enfant est accusé d'un fait grave, avec de a récidive, etc., la loi est toujours proportionnée, vous le savez, et elle prévoit des peines maximales, mais elle prévoit aussi des peines intermédiaires, or la loi aujourd'hui prévoit qu'en cas d'absence, de défection complète des parents, qui peuvent conduire à des délits, eh bien il peut y avoir, on peut se retourner contre les parents, et c'est normal, c'est normal de le dire et c'est normal de le faire. Donc, ce que dit le président de la République, c'est qu'on a un arsenal législatif, ce que dit le garde des Sceaux c'est que cette loi elle doit être utilisée, d'où l'objet de la circulaire qu'il a envoyée aux procureurs. Ensuite, il y a deux philosophies Adrien GINDRE. Je n'ai pas la réponse gouvernementale aujourd'hui, je peux vous donner la mienne, ça importe peu mais…
ADRIEN GINDRE
Allez-y, avec plaisir.
OLIVIER VERAN
Il y a celle qui consiste à dire là où il y a un délit, là où il y a une faute, on punit, et la loi est faite pour ça, et on met des amendes, y compris en tapant au portefeuille des parents qui sont concernés, et il y a une philosophie qui consisterait à dire on prend le risque de priver toute une fratrie, toute une famille, de prestations sociales dont elle a besoin pour vivre correctement, parce qu'il y en a un qui fait n'importe quoi dans la fratrie. Je ne sais pas si vous avez des frères et sœurs, beaucoup de Français ont des familles nombreuses, avec des frères et sœurs, et qui ont eu quant à eux une vie tout à fait normale, avec des études, un parcours studieux un métier, qui vont bien, qui participent à la vie de la cité, et qui peuvent avoir dans la fratrie un élément qui lui va partir pas droit.
ADRIEN GINDRE
Et donc votre… personnelle ?
OLIVIER VERAN
Moi je préfère la philosophie qui consiste à dire on met des amendes, on sanctionne, on traduit devant la justice les parents lorsqu'il y a lieu de le faire, plutôt qu'un système qui consisterait à déterminer qui peut percevoir l'aide de la solidarité nationale quand il est dans le besoin et qui ne peut pas. Le résultat financier, la peine peut être très lourde, à travers la loi et les sanctions, je vous dis juste que c'est une question de philosophie, voilà, après il n'y a pas aujourd'hui de proposition de loi dans un sens, ni dans l'autre, mais on ne peut certainement pas surréagir, enfin pas surréagir, mais réagir dans l'urgence à cela tant que nous n'avons pas fait un constat précis.
ADRIEN GINDRE
Rapidement, mais sans précipitation, si on résume ce qu'on a compris du Gouvernement. Dans les facteurs d'explication il y a également la question de l'immigration, les Républicains l'ont remise sur la table, de manière assez claire, Bruno RETAILLEAU, le président des sénateurs LR, dit hier "certes ce sont des Français", en l'occurrence le ministre de l'Intérieur a dit 90 % des interpellés sont français, mais il ajoute, Bruno RETAILLEAU, "mais ce sont des Français par leur identité, malheureusement pour la deuxième, la troisième génération, il y a comme une sorte de régression vers les origines ethniques." Est-ce que vous dites il a raison ou est-ce que vous dites, par exemple comme Mathilde PANOT, il est raciste ?
OLIVIER VERAN
En fait je ne comprends pas l'intention de Bruno RETAILLEAU, qui par ailleurs a été dans une posture tout à fait républicaine depuis le début des événements, et je salue cela, en disant il faut soutenir l'action qui est conduite parce qu'il faut faire bloc, il faut l'unité nationale, donc je ne vais pas moi-même… du désordre, je vais juste rappeler à ceux qui en douteraient qu'une forte proportion de la population française est issue de l'immigration de deuxième ou troisième génération. Moi je suis député de Grenoble, qui est une ville très tournée vers l'Italie, où la moitié de la population, peut-être grenobloise, est issue de l'immigration italienne depuis deux ou trois générations…
ADRIEN GINDRE
C'est ce qu'il dit aussi, mais en disant qu'il y a une sorte de régression vers les origines ethniques, c'est son terme.
OLIVIER VERAN
En fait je n'ai pas compris le sens de sa phrase, voilà, je n'ai pas compris le sens de sa phrase, je n'ai pas envie de surinterpréter sa phrase, je n'imagine pas qu'il ait pu dire ce que vous laissez…
ADRIEN GINDRE
Vous n'imaginez pas qu'il y ait du racisme comme le dit Mathilde PANOT ?
OLIVIER VERAN
Quand vous êtes français en fait…
ADRIEN GINDRE
De la France insoumise.
OLIVIER VERAN
Quand vous êtes français vous apportez à votre pays, vous aimez la France, vous adhérez à ses valeurs, vous êtes citoyen français, on regarde plus ce que faisaient vos grands-parents ou vos arrière-grands-parents, ça ça n'a pas de sens, ça ça n'a pas de sens, enfin vous êtes d'accord avec moi ?
ADRIEN GINDRE
Je suis là pour poser des questions Olivier VERAN, si en plus les journalistes se mêlent du débat politique avec leurs opinions personnelles, on ne s'en sort pas.
OLIVIER VERAN
Jamais, Adrien GINDRE.
ADRIEN GINDRE
Juste une question quand même. C'est un Républicain, il se trouve que les Républicains peuvent contribuer à faire des majorités au Parlement, ils ont fait beaucoup de propositions, peine plancher pour les auteurs de violences contre les forces de l'ordre, expulsion des étrangers majeurs condamnés, déchéance de nationalité pour les binationaux condamnés pour violences, Eric CIOTTI disait à votre place en début de semaine, est-ce que vous êtes prêt à faire un pas vers les Républicains sur un de ces sujets-là, est-ce qu'il y a une de ses idées que vous pouvez reprendre ?
OLIVIER VERAN
Nous ce qu'on veut c'est un texte pragmatique, efficace, juste, c'est-à-dire qu'on veut que les étrangers qui sont en situation d'avoir un emploi et qui trouvent un emploi, qu'en plus on n'arrive pas à pourvoir, ils puissent le faire de manière un peu plus simple et un peu plus légale qu'aujourd'hui. Je rappelle qu'en France le taux de chômage des étrangers est le double du taux de chômage des Français…
ADRIEN GINDRE
En creux vous nous dites que le titre de séjour pour les métiers en tension, qui est une ligne rouge LR, hors de question de toucher ?
OLIVIER VERAN
Attendez ; mais oui, mais pourquoi, alors qu'ailleurs en Europe ce n'est pas le cas. Pourquoi est-ce que la proportion d'étrangers au chômage est plus importante en France qu'ailleurs en Europe ? peut-être parce que les conditions qui permettent de travailler et de subvenir à leurs besoins ne sont pas remplies comme… ça c'est le premier point.
ADRIEN GINDRE
Et donc la réponse à ma question c'est non, vous ne reprendrez aucune de ces propositions ?
OLIVIER VERAN
Deuxième point très important – vous savez j'aime toujours quand même rappeler ce que le Gouvernement fait ou veut faire avant de parler de ce que les autres commentent. La deuxième chose qui est très importante c'est mieux expulser ceux qui n'ont pas vocation à rester, et faire en sorte que quand on vous a refusé l'asile, eh bien vous n'ayez pas je ne sais combien d'occasions de redemander si vraiment on est sûr, et donc de ne pas vous laisser pendant deux ans ou trois ans en carafe en vous disant non tous les trois mois, alors que vous n'avez pas d'emploi et que vous vivez parfois des prestations sociales alors que vous n'avez pas vocation…
ADRIEN GINDRE
Là vous nous rappelez la philosophie du texte du Gouvernement…
OLIVIER VERAN
Oui, mais elle est importante.
ADRIEN GINDRE
Oui, sauf qu'en fait il faudra bien que des parlementaires…
OLIVIER VERAN
Parce qu'on lit parfois beaucoup de choses sur ce texte et j'en rappelle le principe.
ADRIEN GINDRE
Il faudra bien que des parlementaires votent ce texte, aujourd'hui vous n'avez pas de majorité.
OLIVIER VERAN
D'abord le texte n'a pas été… (…) en mon sens il devrait y avoir un arc républicain très large, de la gauche à la droite…
ADRIEN GINDRE
Il n'y est pas.
OLIVIER VERAN
Qui vote ce texte. Vous savez pourquoi ? parce que je connais très peu de députés, qui soient socialistes, écologiques ou républicains, qui n'auraient pas besoin des outils que nous voulons mettre dans la loi, dans leurs pratiques au quotidien dans leur conscription. Quand je dis pragmatique, pragmatisme, justesse et efficacité, c'est cela que nous voulons faire. Après on est ouvert Adrien GINDRE, c'est-à-dire qu'on veut trouver une majorité avec les parlementaires de bonne volonté qui veulent apporter, enrichir, notre texte.
ADRIEN GINDRE
Et sinon, 49.3 ou pas de 49.3, sur la loi immigration ?
OLIVIER VERAN
Je n'ai pas… vous savez, on ne part pas dans une bataille législative, comme l'expression est consacrée, avec l'idée qu'à la fin ça va finir en 49.3, on n'est pas dans cet état d'esprit.
ADRIEN GINDRE
Donc il n'y a pas de tabou.
OLIVIER VERAN
Ce n'est pas une question pas de tabou, vous n'allez pas faire un bandeau avec marqué "49.3 pas de tabou", ce que je vous dis c'est qu'on est aujourd'hui en discussion avec tous les parlementaires qui, de manière efficace, pragmatique et juste, veulent que nous améliorions la situation sur le front de l'immigration et de l'intégration dans notre pays, et qu'on va y arriver, parce que, encore une fois c'est un sujet qui peut réunir très largement, à droite, et je le redis, à gauche, on n'entend pas la gauche sur le sujet. J'ai été député socialiste, j'ai été en mesure de voter des textes sur l'immigration, qui allaient dans le même sens que le texte que nous proposons aujourd'hui, et à l'époque les LR l'avaient aussi voté…
ADRIEN GINDRE
On verra si votre voix est entendue, merci beaucoup Olivier VERAN d'avoir été l'invité de LCI ce matin.
OLIVIER VERAN
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 13 juillet 2023