Texte intégral
Jérôme CHAPUIS
Le grand témoin de France info ce matin c'est Jean-Noël BARROT, ministre délégué chargé du Numérique. Bonjour.
JEAN-NOËL BARROT
Bonjour.
Jérôme CHAPUIS
On va parler avec vous de la loi que vous portez depuis hier à l'Assemblée sur la régulation de l'espace numérique mais avant cela, l'iPhone 12. Vous étiez venu dans ce studio il y a trois semaines pour justifier le retrait de la vente du smartphone d'APPLE qui émet trop d'ondes par rapport aux normes autorisées. APPLE a proposé des mises à jour et pourtant, l'affaire n'est pas réglée selon vous.
JEAN-NOËL BARROT
APPLE s'est pliée à nos règles. L'entreprise a conçu une mise à jour logicielle qui va permettre de rendre les iPhone 12 conformes aux normes européennes. Cette mise à jour a été validée par notre agence nationale des fréquences, l'autorité de surveillance du marché des équipements radio et donc des smartphones, elle sera disponible le 10 octobre.
Jérôme CHAPUIS
Ce qui est trop tard ?
JEAN-NOËL BARROT
Je regrette que cette mise à jour ne soit pas disponible plus tôt mais je constate qu'APPLE s'est bien pliée à nos règles.
Jérôme CHAPUIS
La loi sur la régulation de l'espace numérique, je le disais, elle est en débat cette semaine à l'Assemblée. Il y a plusieurs sujets, notamment l'exposition des plus jeunes à la pornographie. Est-ce qu'on va vraiment après cette loi réussir à freiner cette exposition ?
JEAN-NOËL BARROT
Cette exposition, c'est un scandale de santé publique. Ce sont deux millions d'enfants chaque mois qui sont exposés à ces contenus pornographiques à des âges extrêmement jeunes, puisqu'à 12 ans ce sont la moitié des petits garçons dans notre pays qui sont exposés à ces contenus avec des conséquences délétères pour leur santé et leur développement affectif, alors c'est un combat de longue haleine. Ce que nous voulons aujourd'hui avec ce projet de loi, c'est aller beaucoup plus vite en permettant à l'ARCOM qui est le gendarme de l'audiovisuel et de l'Internet d'ordonner en quelques semaines seulement le blocage et le déréférencement des sites qui ne vérifieront pas l'âge de leurs utilisateurs, parce que c'est ça le problème : la vérification d'âge à l'entrée.
Jérôme CHAPUIS
Mais vous parlez des sites, mais on sait bien que ça ne passe pas que par les sites. Ça passe par les réseaux sociaux, ça passe par des messageries cryptées. Techniquement est-ce qu'il n'y a pas un problème, il n'y a pas une impasse ?
JEAN-NOËL BARROT
Il y a une exposition massive de la part des sites, ne nous trompons pas. Un site comme Pornhub par exemple voit 20 % à peu près de son trafic constitué par des enfants, c'est-à-dire 20% de ses recettes publicitaires. Donc il y a une exposition massive au travers de ces sites parce que ces sites ne vérifient pas l'âge de leurs utilisateurs. Si l'ARCOM, le gendarme de l'audiovisuel et de l'Internet peut bloquer ces sites en quelques semaines seulement, alors sous la pression ils finiront bien par respecter nos lois et vérifier l'âge de leurs utilisateurs.
Jérôme CHAPUIS
Il y aura une régulation de ces plateformes dont on parlait d'ailleurs hier dans Le choix de France info comme Mime (phon) par exemple qui propose à des jeunes beaucoup, qui cible les jeunes ? Ça commence par des cours de cuisine pour faire simple et puis, petit à petit, parce qu'ils font des rencontres sur ces plateformes, on leur propose de l'argent contre le fait qu'ils se dénudent.
JEAN-NOËL BARROT
Bien sûr : Mime est touché par ces mesures que nous prenons dans le projet de loi, et d'ailleurs Mime est en train d'expérimenter à l'heure où nous parlons une solution de vérification d'âge. Puisque dès lors qu'il y a des contenus pornographiques, aucun mineur ne doit y être exposé. Donc Mime est en train de vérifier…
Jérôme CHAPUIS
Mais on n'est pas un peu naïf ? Parce qu'on sait très bien qu'il suffit de cliquer sur J'ai plus de 18 ans pour pouvoir accéder à ces systèmes.
JEAN-NOËL BARROT
Précisément nous avons pris une loi il y a 3 ans qui dit qu'il ne suffit plus de demander à un mineur si oui ou non il a plus de 18 ans.
Jérôme CHAPUIS
Mais ça marche vraiment ça ?
JEAN-NOËL BARROT
Ce que nous faisons désormais, c'est d'une part de donner à l'ARCOM le pouvoir de bloquer et, d'autre part, de fixer ce qui doit être fait pour vérifier sérieusement l'âge des utilisateurs, avec un niveau de fiabilité pour être sûr qu'on est bien en train de discriminer des majeurs et que les mineurs n'ont plus accès à ces sites. Et d'autre part, des règles élémentaires de respect de la vie privée et des données personnelles des utilisateurs.
Jérôme CHAPUIS
Mais alors, vous n'avez pas répondu à la question : techniquement, qu'est-ce qu'on fait quand ça passe par des messageries cryptées ?
JEAN-NOËL BARROT
Les messageries cryptées, elles sont protégées par le secret de la correspondance. Mais ce que je vous ai répondu, c'est qu'aujourd'hui cette exposition massive elle n'est pas le fait des messageries cryptées même s'il y a des problèmes et qu'il faudra s'y atteler, elle est le fait de sites qui se comportent comme des irresponsables et comme des lâches et qui déversent gratuitement et sans aucun contrôle des millions de vidéos pornographiques sur Internet.
Jérôme CHAPUIS
On a l'impression que c'est un peu le même sujet sur le cyber-harcèlement dont on parle beaucoup depuis la rentrée. Ça ne passe pas que par les réseaux sociaux, ça passe aussi par des messageries. Est-ce que là aussi cette loi ne risque pas de passer à côté de son objectif ?
JEAN-NOËL BARROT
Non. Je crois qu'avec la peine de bannissement des réseaux sociaux qui a été prévue par ce projet de loi et que nous allons renforcer au Parlement, notamment pour tenir compte de ce qu'avec la Première ministre et le ministre de l'Éducation nationale nous avons annoncé la semaine dernière, pour lutter efficacement contre le harcèlement et le cyber-harcèlement scolaire. Cette peine de bannissement, nous allons l'étendre avec le Parlement pour qu'elle puisse être prononcée dès le début de l'enquête, sans attendre une condamnation.
Jérôme CHAPUIS
De manière préventive.
JEAN-NOËL BARROT
De manière préventive pour éviter la récidive et mettre fin beaucoup plus tôt à ces phénomènes de raids de violence et de haine qui sont déclenchés par une minorité d'internautes sur les réseaux.
Jérôme CHAPUIS
Ce bannissement en cas de cyber-harcèlement, il sera effectif avant la fin de cette année scolaire ?
JEAN-NOËL BARROT
Absolument, puisque le projet de loi sera, je l'espère, adopté dans les prochaines semaines. Il a d'ores et déjà été adopté à l'unanimité au Sénat, ce qui veut dire que ces mesures entreront en vigueur dès la fin de l'année scolaire. Avant la fin de l'année scolaire.
Jérôme CHAPUIS
Et même peut-être dès la fin de cette année 2023, enfin pour le mois de janvier ?
JEAN-NOËL BARROT
C'est ça. En début d'année prochaine, j'ai bon espoir que ce texte soit promulgué.
Jérôme CHAPUIS
Merci beaucoup Jean-Noël BARROT, ministre délégué chargé du Numérique, vous étiez le grand témoin de France Info ce matin.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 octobre 2023