Interview de M. Franck Riester, ministre délégué, chargé des relations avec le Parlement, à RFI le 17 octobre 2023, sur la lutte contre le terrorisme, la conférence sociale sur les bas salaires et le projet de loi de finances 2024.

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Média : Radio France Internationale

Texte intégral

JOURNALISTE
Il est 08h20. L'invité de la rédaction sur RFI, Frédéric RIVIERE, vous recevez ce matin Franck RIESTER, ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement.

FRÉDÉRIC RIVIÈRE
Bonjour Franck RIESTER.

FRANCK RIESTER
Bonjour.

FRÉDÉRIC RIVIÈRE
Le lycée Gambetta où un professeur a été assassiné vendredi à Arras, a dû être évacué en raison d'une alerte à la bombe au moment même où comme dans tous les établissements scolaires de France, un hommage devait être rendu à Samuel PATY, ce professeur décapité le 16 octobre 2020 par un terroriste islamiste. Pourquoi aujourd'hui les enseignants des établissements scolaires sont-ils devenus des cibles dans notre pays ?

FRANCK RIESTER
Vraisemblablement parce qu'ils sont les symboles de ce que la République permet, c'est-à-dire l'émancipation de nos jeunes, permettre par le travail exceptionnel de nos enseignants, permettre aux jeunes Français de s'émanciper, de sortir de parfois de l'obscurantisme et de devenir des citoyens éclairés avec leurs propres sens du jugement personnel, leur propre culture. Et je crois que cette attaque, ces attaques sont évidemment fortes de sens et montre que ce combat politique contre l'islam politique est un combat absolument crucial pour notre pays, pour nos valeurs et pour notre conception du vivre ensemble.

FRÉDÉRIC RIVIÈRE
Lorsque Samuel PATY a été assassiné il y a trois ans donc, il devait y avoir un avant et un après et après. Et après l'assassinat de Dominique BERNARD à Arras, l'après, finalement, n'est que la répétition dramatique de l'avant. Est-ce que ça signifie que nous sommes impuissants ?

FRANCK RIESTER
Non. Ça signifie que cette menace du terrorisme islamiste est une menace très présente, toujours présente et évidemment on peut ce matin avoir une pensée très émue pour nos amis Belges et Suédois et qui ont été attaqués hier à Bruxelles et avec deux victimes et je pense évidemment aux familles et à tous les Suédois et tous les Belges qui, on le voit bien, ont été une nouvelle fois aussi attaqués en Belgique par les terroristes islamistes. Donc, cette menace, elle touche toute l'Europe, elle touche un grand nombre de démocraties, elle touche le monde entier. Et donc, nous devons nous mobiliser et s'organiser pour lutter contre ce fléau et c'est ce que nous faisons depuis maintenant de nombreuses années depuis les attentats du Bataclan avec le renforcement progressif des dispositions et nous continuerons de le faire, vous avez vu qu'hier ont été a aussi un certain nombre de mesures complémentaires de protection des écoles, des lycées, des collèges, la mise en place de davantage de militaires sur le terrain avec le renforcement de l'opération Sentinelle, avec aussi, je dirais, un repérage, un regard tout particulier sur celles et ceux qui sont les plus aujourd'hui reconnus comme radicalisés et qui peuvent potentiellement être des terroristes. Et donc, nous ne lâcherons rien sur notre volonté de lutter contre ce fléau, c'est un combat politique, on le disait, c'est un combat sécuritaire, on a renforcé les moyens. Il faut continuer de renforcer les moyens, permettre par exemple que l'on renvoie plus facilement un certain nombre d'étrangers radicalisé que c'est le cas aujourd'hui, c'est tout l'objet, enfin, c'est un des objets de la loi qui sera en discussion à prochainement au Sénat et à l'Assemblée nationale. C'est de ne rien lâcher en termes de renforcement des dispositions pour pouvoir lutter contre ce fléau.

FRÉDÉRIC RIVIÈRE
Après les attentats en Belgique auxquels vous faisiez allusion il y a un instant je rappelle que c'est un homme qui a été identifié comme un Tunisien en situation irrégulière qui a tué à l'arme automatique deux supporters suédois venus assister à un match de foot. Emmanuel MACRON a dit : "Notre Europe est bousculée". Est-ce que l'Europe peut faire front commun face à cette menace ? La menace islamiste ?

FRANCK RIESTER
Oui et il faut être unis, il faut être solidaire et il faut être déterminé. Je trouve que c'est l'état d'esprit du président de la République et c'est l'esprit de nos partenaires européens bien sûr.

FRÉDÉRIC RIVIÈRE
Alors, vous avez évoqué la loi immigration à l'instant et ce drame d'Arras relance le débat sur ce texte dont l'examen doit commencer dans trois semaines au Sénat. Hier, à l'issue d'une réunion de sécurité, hier, midi, le ministre de l'Intérieur a dit : "Nous avons réfléchi à des mesures qui pourraient venir augmenter la fermeté du projet de loi immigration." Hier soir, Gérald DARMANIN se montrait confiant : "On va trouver un compromis", disait-il. L'urgence justifie qu'on s'entende, est-ce que le Gouvernement est prêt à aller jusqu'à abandonner la mesure prévoit la régularisation des clandestins dans les métiers en tension puisque c'est ce point en particulier que contestent les Républicains ?

FRANCK RIESTER
Je ne vais pas anticiper les discussions qu'il y aura au Parlement mais ce qui est certain et c'est l'état d'esprit qui est, l'état d'esprit du Gouvernement depuis maintenant un peu plus d'un an, c'est l'état d'esprit du compromis, c'est d'aller chercher avec les oppositions constructives des compromis pour permettre que notre législation évolue dans le sens nécessaire à relever les défis qui sont les nôtres et notamment le défi de la lutte contre le terrorisme. Nous devons être plus efficaces et pour ça il faut que chacun fasse des efforts les uns vers les autres, que nous, la majorité présidentielle, on aille vers les oppositions constructives, en l'occurrence ceux qui sont les plus aujourd'hui en discussion avec nous pour pouvoir voter ce texte immigration, c'est-à-dire les LR. En allant plus vers les LR, peut-être que les LR aillent plus vers nous aussi. Ce n'est pas tout ou rien dans le contexte dans lequel nous sommes aujourd'hui, chacun doit faire un effort pour l'intérêt général, dépasser ces simples intérêts, ses simples projets, je dirais, ou les projets de tels qu'ils sont dans leur épure pour arriver à faire voter des textes qui changent concrètement la vie des gens. On l'a fait depuis un peu plus d'un an. On a voté 52 textes dont 49 avec des majorités plus larges que la majorité présidentielle, sans utilisation du 49.3 et nous continuerons de le faire. Et sur cette loi immigration qui commence en débat au Sénat, la semaine du 6 novembre, j'espère que nous réussirons à avoir un texte fort pour relever ce défi de la lutte contre l'immigration telle qu'illégale notamment et de permettre de pouvoir renvoyer plus facilement ceux qui n'ont rien à faire sur notre sol.

FRÉDÉRIC RIVIÈRE
La conférence sociale sur les bas salaires a été ouverte hier par la Première ministre, Élisabeth BORNE. Est-ce que l'État a vraiment les moyens de peser sur le niveau des rémunérations dans le secteur privé ?

FRANCK RIESTER
Alors, c'est du ressort effectivement des acteurs privés, des partenaires sociaux. Pour autant, on peut mettre la pression notamment sur les branches pour que la dynamique de progression salariale soit réalisée. C'est ce qu'on a fait hier et c'est ce qu'on continuera de faire. Et puis, ensuite, c'est la politique économique et fiscale du Gouvernement qui fait la différence, c'est ce qu'on fait depuis 2017 à la demande du président de la République, c'est de faire en sorte que notre pays soit un pays plus compétitif, que la priorité soit la priorité du plein emploi et que donc il y ait moins de chômage c'est ce qui est le cas puisque nous avons créé deux millions d'emplois, les entreprises on crée deux millions d'emplois depuis 2017. Maintenant, il faut que ces emplois soient mieux rémunérés, soit de meilleure qualité, c'est l'objet de cet accompagnement des partenaires sociaux à travers cette conférence sociale, à travers l'agenda social et nous continuerons d'être en pression positive vis-à-vis de ces acteurs privés, notamment des entreprises, mais enfin (phon), nous sommes en capacité aussi de pouvoir éventuellement sanctionner un certain nombre de branches si elles ne négocient pas mieux leur grille tari de rémunération.

FRÉDÉRIC RIVIÈRE
L'examen du projet de loi de finances 2024 va commencer aujourd'hui en séance à l'Assemblée. Est-ce que le Gouvernement va laisser le temps au débat où va recourir très rapidement au 49.3 ? Puisque je rappelle que sur les textes budgétaires, l'utilisation de cet article qui permet une adoption sans vote n'est pas limitée.

FRANCK RIESTER
Oui. Vous savez sur les textes financiers, les choses sont assez simples, c'est que les oppositions votent contre parce que c'est un marqueur d'appartenance à l'opposition. Dans une commune, j'ai été maire de Coulommiers, pendant, vous le savez, pendant presque dix ans, les oppositions votaient contre le budget. Les oppositions au niveau national votent contre le budget, c'est dans l'ordre des choses. Il n'y a pas de majorité alternative à la majorité présidentielle et il faut bien donner un budget à notre pays. Et donc, on utilisera effectivement les moyens à notre disposition…

FRÉDÉRIC RIVIÈRE
Rapidement.

FRANCK RIESTER
Si nécessaire le 49.3 et il y a déjà eu presque quarante heures de débat en commission, un grand nombre de sujets ont été abordés, on veut en tout cas que ce budget soit adopté de la meilleure façon possible en utilisant tous les moyens qui sont à notre disposition y compris peut-être rapidement.

FRÉDÉRIC RIVIÈRE
Merci Franck RIESTER. Merci.

FRANCK RIESTER
Merci à vous.

FRÉDÉRIC RIVIÈRE
Bonne journée


Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 octobre 2023