Texte intégral
FLORENCE PERUSIN
Nous recevons ce matin en studio, une membre du Gouvernement ; c'est la ministre déléguée à l'Egalité femmes-hommes et à la Lutte contre les discriminations, Jules BRELAZ.
JULES BRELAZ
Bonjour Bérangère COUILLARD.
BERANGERE COUILLARD
Bonjour.
JULES BRELAZ
Merci d'être avec nous en studio. On va tout de suite vous poser plein de questions sur la laïcité, sur la lutte contre les discriminations.
FLORENCE PERUSIN
Et on vous pose aussi une question. Vous pouvez prendre la parole sur France Bleu Gironde, en cette veille de la Journée nationale de la laïcité. On vous pose la question : comment faire pour améliorer le vivre ensemble ? Vos témoignages, c'est dès maintenant. Vous nous appelez au 05 56 19 10 10.
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FLORENCE PERUSIN
Notre invitée est Bérangère COUILLARD, la ministre déléguée à l'Egalité femmes-hommes et à la Lutte contre les discriminations. L'élue girondine est en déplacement aujourd'hui à Bordeaux, Pessac, Andernos les Bains et Biganos ; une visite marathon pour parler de la lutte contre les violences conjugales, le racisme et l'antisémitisme. Elle répond à vos questions, Jules BRELAZ.
JULES BRELAZ Bonjour Bérangère COUILLARD.
BERANGERE COUILLARD
Bonjour.
JULES BRELAZ
Merci d'être avec nous en studio ce matin. Votre réaction tout d'abord à ces témoignages que l'on entend, ces menaces de mort, parfois à caractère raciste, qui visent – depuis plusieurs jours maintenant – un Collège Marguerite Duras et un lycée Jean Monnet de Libourne. Que répondez-vous aux professeurs, aux enseignants qui disent avoir peur pour leur vie ?
BERANGERE COUILLARD
Déjà, je leur apporte tout mon soutien, évidemment, face à ces propos scandaleux et également aux élèves parce qu'il y a aussi des élèves qui ont été menacés. Et donc que j'apporte évidemment tout mon soutien à la communauté éducative et aux élèves. Après, vous savez, mon quotidien, c'est de lutter contre la haine et les discriminations. Et donc, il s'agit notamment d'y lutter à chaque instant, d'où que ça vient.
JULES BRELAZ
Et de ne rien laisser passer ?
BERANGERE COUILLARD
Et de ne rien laisser passer. Et donc c'est pour ça d'ailleurs tout à l'heure que je préside un CORA qui est un comité opérationnel qui vise justement à lutter contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT. Nous avons choisi justement de réanimer ces CORA qui sont donc mis en place par le préfet et le procureur et qui permettent justement de mettre autour de la table tous les acteurs qui permettent de lutter contre la haine. Parce que c'est indispensable de continuer à avoir ces initiatives. Et là, quand je vois ce qui se passe dans les écoles, il faut que nous continuions notamment à sensibiliser ; sensibiliser les professeurs pour pouvoir aussi sensibiliser les élèves. C'est indispensable de le faire et ça fait partie du plan que je me charge de déployer. Et puis, nous avons aussi évidemment, nos concitoyens... Une partie de nos concitoyens vivent des discriminations au quotidien. Et donc, j'ai cette charge, et notamment, nous avons voté une loi il y a maintenant deux jours, qui vise à lutter contre les discriminations. Ça passe par la mise en place d'une loi notamment, qui met en place des testing ; des testing pour lutter contre les discriminations à l'embauche, les discriminations pour l'accès au logement et puis également aux discriminations pour l'accès aux prêts bancaires. Tout ça, nous menons de front parce que nous ne souhaitons pas laisser les choses aller dans ce sens.
JULES BRELAZ
Votre réaction également, Bérangère COUILLARD, à cette petite polémique sur les réseaux sociaux à l'avant-veille, demain, de la journée de la laïcité ? Emmanuel MACRON a participé à une célébration de la fête juive Hanouka, c'était hier soir à l'Élysée. Comprenez-vous que l'image puisse interpeller certains défenseurs de la laïcité ? Et vous êtes bien placée pour en parler puisque vous participiez, vous aussi, à cette célébration à l'Elysée.
BERANGERE COUILLARD
Alors, il ne s'agissait pas d'une célébration Hanouka, c'était la remise d'un prix que le Président recevait au sein de l'Élysée. Donc le grand-rabbin de France était présent, d'autres rabbins de toute la France étaient également présents. Et au moment d'allumer la bougie, j'étais présente et au premier rang donc je peux vous dire exactement ce qui s'est passé. Le grand-rabbin de France a demandé en dernière minute au Président s'il pouvait chanter. Et donc du coup, le Président a aimablement répondu positivement. Et donc, il s'est avéré qu'ils ont chanté un paragraphe d'une chanson religieuse. Mais en aucun cas c'était prévu dans le déroulé et donc c'était un peu surprenant. Mais en rien, ça ne remet en cause ce que défend le Président avec vigueur, c'est-à-dire la laïcité. Et l'idée, c'était évidemment de faire en sorte qu'il y ait concorde et non pas qu'il y ait cette difficulté et en tout cas pas cette polémique sur les réseaux sociaux.
JULES BRELAZ
Ce n'est pas une forme de clientélisme, comme certains le dénoncent, ou bien une forme de câlinothérapie, parce qu'on sait qu'Emmanuel MACRON avait été critiqué pour avoir été absent à cette grande marche de l'antisémitisme ?
BERANGERE COUILLARD
Je vous assure que si vous avez vu l'entièreté de la cérémonie, vous auriez vu que le Président a eu des mots... ; et d'ailleurs il l'a dit, il a dit aux rabbins qui étaient présents, il a dit "Je ne suis pas présent pour vous dire ce que vous avez forcément envie d'entendre et qu'il y a des choses sur lesquelles on peut être en désaccord." Et donc, je vous assure que les 20 minutes de discours qu'il a prononcé, il a eu un discours de vérité (en tout cas, sa vérité) ce qu'il ressentait et ce qu'il pensait pouvoir dire et la position de la France. Et donc il ne s'agissait pas de câlinothérapie, mais simplement de respect.
JULES BRELAZ
En parlant de laïcité, c'est un sujet sensible. On l'entend, on parle souvent du retour du religieux chez les plus jeunes. Exemple, tiens, avec Jason, c'est un élève de seconde dans un lycée de Bordeaux qui a une question pour vous, Bérangère COUILLARD.
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JULES BRELAZ
Une réponse à Jason. Il y a cette incompréhension, cette difficulté à expliquer le principe même de la laïcité.
BERANGERE COUILLARD
Il l'a dit lui-même, Jason ; il l'a dit, il a dit "c'est une opinion personnelle qu'on garde pour soi." Et donc du coup, ce que demande, ce que dit la République, ce que demande la République et particulièrement la laïcité, c'est justement de garder sa pensée, sa religion pour soi, dans la sphère personnelle. Mais il y a une neutralité des écoles. Il est possible à partir des universités de porter des signes religieux et donc de faire, de montrer en tous les cas son appartenance religieuse, mais pas à l'école. L'École doit être un sanctuaire et c'est la neutralité qui doit régner.
JULES BRELAZ
Vous êtes ministre déléguée à l'Egalité hommes-femmes, Bérangère COUILLARD. Comme ailleurs en France, vous allez rencontrer aujourd'hui à Bordeaux et Cenon des femmes victimes et des auteurs de violences conjugales. On les entend peu souvent ; ils vous disent quoi, ces auteurs ?
BERANGERE COUILLARD
Ecoutez, les auteurs, c'est aussi intéressant de les entendre dans la mise en place des centres pour auteurs que nous avons mis en place ; une trentaine partout en France, il y en a un à Charles Perrens à Bordeaux. Et nous mettons en place notamment ces centres pour lutter contre la récidive. Et ce que me disent ces auteurs, notamment ceux qui viennent par eux-mêmes... Parce que vous savez, 10 % d'entre eux des 14 000 auteurs que nous avons accueillis l'année dernière, sont venus de leur propre chef. C'est-à-dire qu'ils ont senti le besoin d'être aidés, ils ne veulent plus vivre cette situation, cet environnement de violences à domicile. Et donc, ce que nous souhaitons faire, c'est faire en sorte qu'ils soient mieux accompagnés et qu'ils viennent plus facilement de leur propre chef. Et c'est pour ça que nous avons d'ailleurs lancé une communication à plus grande échelle pour faire connaître ces centres de prise en charge pour auteurs.
JULES BRELAZ
C'est un espoir. Autre sujet qui fait polémique, Bérangère COUILLARD, ce projet de forage de nouveau puits de pétrole sur le bassin d'Arcachon, que dit l'ancienne secrétaire d'État à l'écologie que vous êtes ? Est-ce que vous êtes pour ou contre ? Plusieurs collectifs appellent à manifester demain, samedi, devant la sous-préfecture d'Arcachon, car c'est maintenant à l'État de se prononcer sur cette question. Est-ce que ce sera oui ? Est-ce que ce sera non ?
BERANGERE COUILLARD
Ecoutez, ce n'est pas moi qui décide si c'est oui ou non, et ce n'est ni le Gouvernement non plus. Il y a aujourd'hui une loi qui a été votée en 2017 qui interdit toute nouvelle concession et qui interdit la prolongation des concessions existantes à partir de 2040. Il semble que dans le cas de La Teste, ce soit une concession existante, donc il s'agit d'une interdiction à partir de 2040. Donc là…
JULES BRELAZ
Sur le fond, sur le fond, ce n'est pas ce que retient les Girondins, qui ont réagi lors de l'enquête publique et même la commissaire enquêtrice a reconnu des inquiétudes légitimes du public face aux grands enjeux et pourtant, bon, l'avis est favorable, il n'est que consultatif. Est-ce que le Gouvernement va suivre cet avis ?
BERANGERE COUILLARD
Ce n'est pas le Gouvernement déjà, c'est les représentants locaux de l'État, c'est-à-dire la DREAL qui va regarder après l'enquête publique…
JULES BRELAZ
Qui est la représentante de la préfecture et qui est la représentante de l'État…
BERANGERE COUILLARD
D'accord. Mais qui regarde sur des faits, sur savoir si le projet respecte la loi, nous devons respecter la loi…
JULES BRELAZ
Et vous, en tant que secrétaire à l'écologie et…
BERANGERE COUILLARD
Et ancienne députée, et ancienne députée monsieur, donc, nous votons des lois et les lois, elles doivent être respectées. Et donc moi, je n'ai pas à me prononcer sur le projet. Aujourd'hui, si le projet respecte la loi, ce sera évidemment les services de l'État qui vont regarder si le projet respecte notamment toutes les contraintes environnementales, mais respecte la loi aussi et respecte un certain nombre de choses. Moi je comprends par contre que ça interroge les Français. Bien sûr, quand on prône l'arrêt des concessions, forcément, quand il y a ce type de projet, ça questionne et ça questionne d'autant plus…
JULES BRELAZ
… COP 28, l'année la plus chaude, 2023, jamais enregistrée…
BERANGERE COUILLARD
… Que nous sommes clairement dans une période où on parle de ces sujets parce qu'il y a la COP 28, donc moi je comprends tout ça. La seule chose que je dis, c'est qu'il semble dans ce cas, que cette concession respecte la loi, compte tenu qu'elle est déjà existante. Donc vous me demandez à savoir ce que va faire le Gouvernement, le Gouvernement, moi je vous réponds qu'en tant qu'ancienne législateur et donc aussi en garante de l'application de la loi, la seule chose, c'est qu'après, il faut regarder si ce projet respecte toutes les règles et… Mais je comprends que ça crée de l'émoi parce qu'en fait l'idée c'est de sortir du tout pétrole. C'est bien ça l'idée, mais de dire que demain matin, on n'ira plus extraire du pétrole parce qu'en fait aujourd'hui on n'est pas en capacité de dire ça aux Français. Et les Français, ce n'est pas ce qu'ils souhaitent, ils souhaitent pouvoir remplir le réservoir pour aller travailler.
JULES BRELAZ
Un principe de réalité…
BERANGERE COUILLARD
Un principe de réalité.
JULES BRELAZ
On en reste là. Merci, Bérangère COUILLARD, d'avoir répondu à nos questions, ministre déléguée à l'Égalité Femmes Hommes et à la Lutte Contre les Discriminations. Merci d'avoir été notre invitée ce matin.
BERANGERE COUILLARD
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 12 décembre 2023