Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux de vous accueillir, avec mon ami Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. Je voudrais remercier chacune et chacun d'entre vous de sa présence, en particulier les organisations syndicales, le président de la CPME, cher François Asselin, qui aura un rôle décisif à jouer, les représentants de l'U2P, le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, qui a un rôle financier décisif à jouer sur ce sujet stratégique de l'adaptation des filières économiques au changement climatique.
Je voudrais vous dire tout de suite, en mon nom et au nom de Christophe Béchu, le caractère stratégique de cette réunion et des décisions qui devront suivre dans les mois à venir sur l'adaptation des filières économiques au changement climatique. Le réchauffement climatique, il est déjà là. Nous devons évidemment lutter contre ce réchauffement, réduire les émissions de gaz à effet de serre. Et la France est un des pays de la planète qui réussit le mieux dans ce domaine, je tiens à le rappeler. Nous pouvons et nous devons être un modèle en la matière. Mais chacun voit bien, dans sa vie quotidienne, qu'il fait de plus en plus chaud, qu'il y a des épisodes de sécheresse à répétition, que vos propres maisons et celles de nos compatriotes sont menacées du retrait gonflement argile — et ce n'est pas 100 maisons, ce n'est pas 100 000 maisons, c'est 11 millions de maisons qui sont menacées — qu'il y a des épisodes d'inondations à répétition qui créent des souffrances quotidiennes pour nos compatriotes, et je voudrais avoir une pensée pour tous les habitants du Nord et du Pas-de-Calais qui ont vécu à nouveau des épisodes d'inondations qui saccagent leur maison, qui saccagent leurs commerces, qui les mettent dans des situations personnelles extraordinairement difficiles, eux et leurs familles, des épisodes de submersion marine, des typhons, des tornades, des épisodes de pluie torrentielle comme ceux qu'a connus La Réunion il y a encore quelques jours.
Le réchauffement climatique et les désastres qui s'en suivent sont notre quotidien donc nous ne pouvons pas attendre. Et il ne suffit pas de fixer des grands plans sur la lutte contre le réchauffement climatique, il faut aussi prendre des décisions immédiates, fortes et radicales d'adaptation au changement climatique. Et c'est ça l'enjeu de notre réunion aujourd'hui. Notre responsabilité, c'est d'anticiper, d'anticiper pour protéger, d'anticiper pour faciliter la vie de nos compatriotes qui ne comprennent pas que lorsqu'ils prennent le train au mois de juillet, le train ne fonctionne plus parce que, à cause de la distorsion des rails sous l'effet de la chaleur, le train ne peut plus fonctionner, qui ne comprendraient pas qu'il y ait des problèmes d'alimentation de l'électricité parce que les lignes à haute tension ne résisteraient pas à un épisode climatique et qui ne comprennent pas que la vie soit tout simplement invivable dans leur appartement, dans leur domicile ou sur leur lieu de travail, parce que entreprises et administrations n'auraient pas fait le nécessaire pour s'adapter au réchauffement climatique.
Donc, je le redis, l'adaptation climatique, ce n'est pas une option. C'est un impératif absolu et c'est un impératif immédiat. Je souhaite donc que nous prenions aujourd'hui un certain nombre de décisions au-delà du plan de bataille que nous devons définir, et, de ce point de vue-là, trois annonces très concrètes à vous faire pour ce qui relève du champ public.
Nous devons d'abord nous assurer que nos infrastructures de transport et d'énergie qui sont absolument stratégiques puissent résister aux aléas climatiques. Je demande donc que toutes les grandes entreprises publiques qui sont essentielles pour le fonctionnement de nos systèmes énergétiques et de transport, je pense à la SNCF, je pense à EDF, je pense à RTE, le réseau d'électricité, nous fournissent d'ici la fin 2024 un plan détaillé d'adaptation au réchauffement climatique. Sur les rails, sur les réseaux électriques, sur les ports, sur les centrales, sur les barrages, je veux des propositions d'ici fin 2024 et ce sera la responsabilité de tous les dirigeants de ces entreprises que j'ai citées de m'apporter des propositions précises, détaillées, chiffrées, d'adaptation de l'ensemble des réseaux d'infrastructures de transport et d'énergie aux aléas climatiques.
Je ne veux pas que ces équipements vitaux puissent être menacés par les fortes chaleurs, par des inondations et par des tempêtes. Nous nous devons, et ce sera la responsabilité de tous les dirigeants de ces entreprises que j'ai citées, d'apporter des propositions précises, détaillées, chiffrées, d'adaptation de l'ensemble des réseaux d'infrastructures de transport, d'énergie aux aléas climatiques. Je ne veux pas que ces équipements vitaux puissent être menacés par des fortes chaleurs, par des inondations et par des tempêtes. Nous devons planifier les décisions, planifier les travaux, planifier les investissements correspondants.
Je souhaite qu'une attention toute particulière soit portée aux Outre-mer, car chacun sait bien que les territoires d'Outre-mer sont particulièrement menacés par ces événements climatiques majeurs. Je veux que les entreprises publiques donnent l'exemple et c'est donc une commande ferme qui leur est passée d'ici fin 2024. Mais je souhaite évidemment que cette commande ferme puisse inspirer les chefs d'entreprises et je ne saurais trop inciter les patrons de PME, les patrons de TPE, d'entreprises de taille intermédiaire ou de très grandes entreprises, de suivre l'exemple que je viens de donner pour le public : regarder de manière précise et détaillée quels sont les investissements nécessaires pour vous adapter au réchauffement climatique.
Alors vous me direz, c'est la deuxième décision que je vous annonce, que tout ça va coûter cher. C'est vrai, mais ça coûte moins cher d'anticiper que de réparer. Et donc il faut que nous réfléchissions ensemble au financement de ces mesures d'adaptation. Là-dessus, je vais être très clair : il n'y aura pas un argent du budget public. L'heure est à l'économie de la dépense publique. L'heure n'est pas à plus des dépenses publiques. Donc inutile de venir toquer à la porte du ministre des Finances. Elle est fermée. Je suis dans mon bureau pour faire des économies, pour réduire la dépense publique et pour accélérer le désendettement. Certainement pas pour ouvrir tout grand la pompe à subventions. Je veux que les choses soient claires. J'ai l'habitude de parler franchement. Vous me connaissez. L'heure est à l'économie de la dépense publique. L'heure est au désendettement. L'heure n'est pas à plus de dépenses publiques. En revanche, il y a d'autres outils que nous pouvons déployer et qui sont à mon avis infiniment plus efficaces. Le meilleur outil que nous puissions mettre en oeuvre, c'est celui de la garantie de l'État.
C'est la deuxième annonce que je vous fais. Nous allons mettre en place des prêts verts garantis par l'Etat pour l'adaptation au changement climatique et la transition écologique. Ces prêts garantis par l'État pourront aller jusqu'à 2 milliards d'euros. Ça représente zéro dépenses publiques, mais c'est pour vous une garantie pour investir dans l'adaptation au changement climatique. Si le prêt est supérieur à 200 000 euros, je vous demande de vous adresser à la Banque publique d'investissement, la BPI. Vous pourrez le faire à partir de mars 2024. Si vous êtes une plus petite entreprise et que les investissements sont moins importants, inférieurs à 200 000 euros, c'est à votre agence bancaire qu'il faudra vous adresser. Vous pourrez le faire à partir de juillet 2024. Voilà la deuxième annonce que je voulais vous faire aujourd'hui pour vous aider à financer l'adaptation de votre entreprise au changement climatique. Nous mettons à disposition 2 milliards d'euros de prêts garantis fournis soit par la BPI, soit par vos agences bancaires. Ça ne coûte pas 1 euro d'argent public, mais ça vous offre la sécurité financière nécessaire pour investir.
Troisième élément, il faut évidemment que nos administrations soient tout à fait exemplaires en la matière. Éviter les conséquences du changement climatique, s'adapter, c'est un investissement et c'est une économie. Je refuserai désormais tout investissement public qui ne prendra pas en compte le changement climatique. Si on me propose de rénover un bâtiment public, de rénover un grand établissement culturel public, de rénover des administrations ou des éléments de l'immobilier de l'État, et que ces rénovations ne s'adaptent pas au changement climatique, la réponse sera non. Tout investissement doit prendre en compte le changement climatique, sans quoi c'est de l'argent jeté par les fenêtres. Si vous faites une réparation ici ou là d'une façade de vitrage ou de béton et que ça ne résiste pas au changement climatique, c'est de l'argent jeté par les fenêtres, l'investissement sera refusé. La règle absolue que je fixe donc aujourd'hui : pas d'investissement dans l'immobilier qui ne réponde pas au changement climatique pour ce qui concerne l'immobilier public.
Qu'est-ce que cela veut dire très concrètement ? Ça veut dire qu'il faut prévenir les surchauffes dans les locaux, limiter l'accumulation de chaleur en journée, faciliter le destockage la nuit, travailler sur l'enveloppe des bâtis pour renforcer leur inertie thermique, pour améliorer leur déphasage, favoriser la surventilation nocturne, apporter de l'ombre par des brises soleil, limiter le réchauffement par des peintures qui soient claires, végétaliser les abords pour limiter les îlots de chaleur urbains, permettre aux administrations de travailler et d'accueillir du public dans des bâtiments sans climatisation à l'intérieur, même lorsqu'il fait 35 degrés à l'extérieur. Ça doit être ça notre objectif, ce n'est pas de mettre des climatisations partout qui vont rejeter beaucoup de chaud à l'extérieur et produire peu de froid à l'intérieur et vous donner un rhume au passage, c'est d'avoir des bâtiments bien ventilés, bien rénovés, bien isolés, bien protégés du soleil, pour que nos agents publics puissent travailler dans des conditions qui soient satisfaisantes et que le public soit accueilli aussi dans des conditions satisfaisantes. Pour ces investissements-là, ce sera oui pour les investissements qui ne répondent pas à l'exigence d'adaptation au changement climatique, ce sera non. La règle sera appliquée dès les prochains jours.
En conclusion, je vais vous dire à quel point nous attachons avec Christophe Béchu une importance stratégique à cette réunion. Nos compatriotes veulent des résultats immédiats et des décisions immédiates. On ne peut pas renvoyer aux calendes grecques l'amélioration de la vie quotidienne en raison de la lutte contre le changement climatique. L'amélioration doit être immédiate. Elle doit être sensible tout de suite. L'adaptation au changement climatique est donc une nécessité absolue pour vivre et pour travailler dans des conditions supportables tout de suite et pas dans des années. Elle est aussi, je pense que vous l'avez compris dans mes propos, un investissement avisé. Il est beaucoup moins coûteux de nous adapter maintenant que de réparer ou de réagir demain.
C'est le sens des 3 décisions que je vous annonce aujourd'hui : un plan d'adaptation climatique pour toutes les grandes entreprises publiques d'ici fin 2024, 2 milliards d'euros de prêts garantis verts pour les entreprises qui prendraient des décisions d'adaptation au changement climatique et le refus de tout investissement dans l'immobilier public qui ne répondent pas à cette obligation d'adaptation au changement climatique.
Je vous remercie.
Source https://www.economie.gouv.fr, le 9 février 2024