Texte intégral
Bonjour à toutes et à tous,
Je suis très heureux de vous accueillir avec Olivia Grégoire, avec les parlementaires de la majorité Louis Margueritte de Saône-et-Loire, Anne-Cécile Violland de Haute-Savoie, Nadège Havet du Finistère et Alexis Izard de l'Essonne. Il manque juste Philippe Bolo qui n'est pas présent pour vous présenter ce rapport remarquable " Rendre des heures au français 14 mesures pour simplifier la vie des entreprises ".
J'insiste sur le fait que nous avons choisi des parlementaires dont chacun connaît le talent, mais qui représentent une grande partie du territoire français. Pour nous, c'était extrêmement important quand on parle de simplification. Il faut d'abord s'adresser aux territoires.
Ce rapport, il va évidemment alimenter le projet de loi sur la simplification qui sera présenté au Parlement dans les mois qui viennent. Et je voudrais d'abord remercier très sincèrement le travail exceptionnel qui a été fait par les députés et sénateurs sur ce sujet.
Dans ce travail, il y a d'abord une méthode. Une méthode à laquelle nous sommes, avec Olivia Grégoire, extrêmement attachés depuis 2017, c'est la méthode de la consultation et du dialogue. On n'a de bonnes idées qu'en allant écouter les Françaises et les Français.
Ça a été la méthode de la loi PACTE, la méthode qui a été retenue par les parlementaires qui ont fait 50 déplacements, 30 réunions publiques. C'est la méthode que nous avons appliquée depuis le 15 novembre 2023, où nous avons lancé une consultation qui a rencontré un succès totalement inédit pour le Ministère de l'Économie et des Finances, avec 5 500 propositions et 730 000 votes. C'est dire à quel point les attentes sur la simplification sont considérables en France.
Ce rapport, c'est une méthode et c'est aussi une ambition. L'ambition, c'est simplifier au maximum la vie quotidienne des entrepreneurs.
Et c'est, enfin, une attention particulière. Je le souligne parce que je la partage totalement. C'est une attention aux plus petits entrepreneurs, une attention aux TPE qui ne peuvent pas absorber le coût des normes et des règles.
Vous avez donc fait, je tiens à vous le dire en mon nom et au nom d'Olivia, oeuvre utile. Je vous en remercie. Maintenant, il va falloir aller jusqu'au bout, faire preuve de beaucoup de détermination parce que l'enjeu politique de la simplification est un enjeu décisif.
Et je voudrais maintenant profiter de cet échange avec vous pour que nous prenions tous ensemble la mesure de l'enjeu politique de la simplification et de l'enjeu économique de la simplification.
Je voudrais faire un diagnostic sévère sur la situation économique européenne. Nous avons aujourd'hui un taux de croissance qui est largement inférieur à celui des États-Unis. Tous les États européens sont en train de réviser leur croissance. L'Allemagne vient de le faire, d'autres États membres de la zone euro l'ont fait et je le ferai également dans les prochains jours.
Mais au-delà de cette révision conjoncturelle, nous avons un problème structurel de niveau de la croissance en Europe, de manque de productivité en Europe qui crée moins d'emplois, moins de prospérité et donc, moins d'opportunités pour les citoyens européens et une des raisons fondamentales de ce manque de croissance en Europe, c'est l'excès de normes.
L'Europe ne peut pas être le continent de la norme. L'Europe doit être le continent de la croissance, de l'innovation et de l'emploi. L'excès de normes tue la croissance en Europe. L'excès de normes alimente la colère des entrepreneurs, des agriculteurs et donc nourrit les extrêmes en Europe. Voilà pourquoi l'enjeu de la simplification est aussi important.
C'est qu'il en va de l'avenir du continent européen, de sa prospérité et qu'il en va aussi de l'avenir des choix politiques qui seront faits par nos concitoyens.
Je refuse cette paupérisation du continent européen. Je refuse cette relégation européenne par rapport au continent américain ou par rapport à la Chine. Nous devons nous attaquer aux normes pour retrouver de la croissance, de la prospérité et des emplois.
Nous devons le faire au niveau national, puisque cela a été établi notamment par l'excellent rapport du sénateur Olivier Rietmann. Les normes nous coûtent environ 70 milliards d'euros par an, mais nous devons aussi le faire au niveau européen.
Nous y avons travaillé avec Robert Habeck, mon homologue ministre de l'économie allemand, et je reprendrais volontiers le mot allemand qui va nous servir de ligne de conduite, Bürokratisierung, débureaucratiser la croissance européenne et la construction européenne.
La débureaucratisation de l'Europe doit nous permettre de retrouver de la croissance. C'est d'autant plus essentiel que non seulement cela a un impact sur notre niveau d'activité, mais je pense que le mal est plus profond et que ça aussi a un impact moral, sur l'esprit des entrepreneurs, sur leur travail quotidien.
Dans les multiples rencontres que nous avons faites avec Olivia Grégoire, j'ai rencontré il y a quelques jours un entrepreneur qui me faisait part de certaines absurdités. Je pourrais en citer mille. Je n'en cite juste deux, elles m'ont frappées.
Il a eu droit à un redressement de l'URSSAF parce qu'il avait organisé un pot de départ et qu'il ne l'avait pas déclaré et que ça constituait un avantage en nature 70 euros de redressement. Vous pensez vraiment qu'on a du temps à perdre avec 70 euros de redressement pour un pot de départ pour des collaborateurs qui ont bien travaillé.
Deuxième exemple de ce même entrepreneur. Il a envoyé des fleurs à une de ses assistantes qui venait d'avoir un enfant : avantage en nature, redressement. En revanche, quand il a envoyé des fleurs à la famille d'un de ses collaborateurs décédé, pas de redressement puisque pas d'avantage en nature, le collaborateur est mort.
Ça fait rire ou ça fait pleurer. Moi, ça me fait pleurer que notre administration ait du temps à perdre pour des redressements aussi ridicules dans des situations humaines où l'administration ne devrait même pas s'en occuper. Donc, il y a urgence à réagir car parfois, la situation confine à l'absurde.
Je vous donne un autre exemple : celui d'une entreprise chimique que j'ai rencontrée il y a quelques jours. Elle devait faire un bassin, un réservoir et donc la DREAL lui indiquait que le bassin, il fallait mieux qu'il soit dans ce sens-là, comme un toit en pente pour favoriser l'écoulement de l'eau.
Et puis ensuite, le SDIS est venu, le service d'incendie qui a dit : Ah non, il vaut mieux qu'il soit dans le sens inverse parce que comme ça, vous garderez de l'eau qui pourra servir en cas d'incendie. Conclusion de l'entrepreneur : j'ai fait un bassin plat. Où est-on ? Et où allons-nous avec une telle absurdité ? Il y a urgence, je le redis, à réagir.
Un mot maintenant sur le texte législatif lui-même. La proposition que j'ai faite au Premier ministre et au président de la République, c'est de bien distinguer les textes législatifs.
J'avais eu l'occasion d'en parler avec Gabriel Attal. J'ai fait un certain nombre de propositions pour relancer la croissance et l'activité en France. Je pense qu'il est de bonne politique de bien découper les textes.
Un texte sur la simplification, un texte sur les professions réglementées et un texte sur l'attractivité de la place financière de Paris, chacun de ces textes pouvant être soit des projets de loi, soit des propositions de loi venant des parlementaires.
Mais je pense qu'il est important de bien découper les sujets pour être plus efficace et garantir la relance de la croissance dans notre pays. Sur les grandes lignes de ce projet de loi sur la simplification donc, et sur le seul sujet de la simplification. Pour vous donner une image, je pense que l'objectif de ce texte, je le dis à mes amis parlementaires, c'est de transformer un maquis en jardin, maquis dans lequel on ne se retrouve pas, en jardin, dans lequel on se retrouve, un jardin dans lequel on taille, on soigne et on développe.
D'abord, on commence par tailler. Et ça doit être un des objectifs, évidemment, de ce projet de loi : retirer toutes les normes inutiles, les règles absurdes, les innovations contradictoires, tailler dans les normes inutiles, tailler dans les règles redondantes et tailler dans le business de la norme. Car il y a un business de la norme.
Quand vous imposez des normes, vous imposez des coûts et vous avez même des entreprises qui se créent pour gérer la complexité de la norme qui s'impose aux entreprises.
Quand vous voyez, par exemple, l'examen de conformité fiscale, qui étaient des propositions qui avaient été faites avec les meilleures intentions du monde et des entreprises qui se créent pour remplir l'examen de conformité fiscale et le faire payer à l'entrepreneur.
Et bien, je souhaite que nos parlementaires taillent dans les normes et dans le business de la norme qui alourdit les coûts pour nos entreprises. Soigner, soigner, parce qu'il est essentiel que la relation évolue entre l'administration et l'usager, entre les services administratifs et les entrepreneurs.
Il faut soigner cette relation avec moins de documents, avec des documents plus simples, avec des documents qu'on ne remet qu'une seule fois. Voilà ce que j'appelle soigner la relation entre l'administration et l'usager.
Vous avez remis un document. C'est bon une fois pour toutes et c'est à l'administration de se débrouiller avec ce document pour toutes les administrations. Pour ne pas être obligé à chaque fois de remettre les mêmes papiers, les mêmes certificats, les mêmes documents, parce que c'est de la perte de temps. Soigner la relation.
L'Administration est à disposition de l'entrepreneur. Et mettons-nous bien une bonne fois pour toutes dans la tête qu'un entrepreneur n'est pas un fraudeur en puissance. Un entrepreneur, c'est quelqu'un qui veut faire le mieux pour ses salariés, le mieux pour son pays, le mieux pour son territoire, et qui cherche avant tout à développer les ressources de la nation française.
Enfin, développer parce qu'il faut aider les entreprises à grandir. Et que c'est de notre intérêt que les entreprises grandissent. Quand je vois les propositions qui ont été faites par nos amis parlementaires sur les seuils, notamment sur le seuil de 50 salariés, je pense qu'ils ont raison.
L'idée de relever les seuils est une très bonne idée parce que ça veut dire qu'on peut vous permettre de grandir sans que le seuil soit un obstacle. On l'a fait dans Pacte, je suis tout à fait prêt à ce que nous allions plus loin dans ce projet de loi.
J'y mets juste une toute petite réserve, par souci de cohérence avec la situation de nos finances publiques : on peut parfaitement faire évoluer les seuils réglementaires sans bouger aux seuils fiscaux, pour que tout cela, évidemment, n'ait pas un coût vertigineux pour nos finances publiques. Je le dis au passage sinon je manquerais de cohérence.
Développer, c'est aussi simplifier les démarches, raccourcir les délais pour permettre à une entreprise d'aller plus vite et donc de grandir plus vite. Voilà à mon sens les grandes lignes de ce projet de loi : transformer un maquis en jardin, tailler dans les normes, soigner la relation administrative, développer les entreprises pour qu'elles gagnent en taille et en puissance.
Un petit mot de conclusion sur ce sujet qui, vous le voyez, me tient très à coeur car je pense que c'est un des grands sujets politiques nationaux et européens des années qui viennent. En réalité, ce qu'il faut faire, c'est une révolution des esprits. C'est une révolution de la construction européenne et c'est une révolution économique nationale, qui est parfaitement dans la ligne de ce que défend le président de la République depuis 2017 : permettre à chacun de grandir, de se développer sans être entravé par une administration, par des règles trop pesantes.
Alors j'ai parfaitement conscience du scepticisme qui peut entourer ce genre d'initiative. C'est pour ça que je veux bien fixer l'enjeu et montrer à quel point cet enjeu s'inscrit sur plusieurs années.
On ne fait pas la révolution en un jour, on ne fera pas la simplification en un texte. Je suis lucide là-dessus. Ce texte est un point de départ, il ne doit pas être un aboutissement.
Il doit être le point de départ de cette révolution des esprits à laquelle j'appelle pour le continent européen comme pour la France. Il faut arrêter de se demander comment contrôler. Il faut se demander comment soutenir. Il faut arrêter de se demander comment rajouter des REP. Il faut se demander comment en retirer. Il faut arrêter de soupçonner pour faire confiance. Il faut arrêter d'alourdir pour alléger. Arrêter de complexifier pour simplifier.
Le législateur doit se mettre à la place de l'entrepreneur. Il doit créer de l'espoir et de l'enthousiasme, pas de l'inquiétude et du doute. Alléger les normes, c'est donc soulager les créateurs de richesses au profit de tous.
Notre objectif doit être, en Europe comme en France, d'aller vers une économie simple, efficace et prospère. C'est exactement ce que vous proposez et je tiens à vous en remercier une nouvelle fois.
Merci à toutes et à tous.
Source https://www.economie.gouv.fr, le 16 février 2024