Interview de Mme Marie Lebec, ministre déléguée, chargée des relations avec le Parlement, à Sud Radio le 20 février 2024, sur l'imam de Bagnols-sur-Cèze, le Rassemblement national, l'inscription de l'IVG dans la Constitution, l'annulation de 10 milliards d'euros de dépenses publiques, le droit de grève et les élections européennes 2024.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : Sud Radio

Texte intégral

PATRICK ROGER
Bienvenue à l'écoute de Sud Radio si vous nous rejoignez pour notre invitée politique, c'est Marie LEBEC, ce matin.

MARIE LEBEC
Bonjour.

PATRICK ROGER
Ministre des Relations avec le Parlement. Bonjour. Première femme ministre des Relations avec le Parlement…

MARIE LEBEC
Tout à fait…

PATRICK ROGER
Eh bien, non, mais il faut le souligner. Alors, l'actualité entre la polémique autour du RN dans l'arc républicain ou non, les propos de l'imam de Bagnols-sur-Cèze, dans le Gard. Marine LE PEN à la cérémonie au Panthéon de Missak MANOUCHIAN, la pression des agriculteurs, et puis, il y a d'autres sujets, notamment les débats à l'Assemblée nationale. C'est tout ce qu'on va voir avec vous. L'imam de Bagnols-sur-Cèze, tout d'abord, dans le Gard, accusé d'un prêche anti-France, qui parle d'un drapeau qui nous gangrène. Est-ce que cet imam doit être expulsé ?

MARIE LEBEC
Moi, j'ai toute confiance en Gérald DARMANIN pour prendre les bonnes décisions et protéger à la fois notre pays et aussi nos compatriotes musulmans, et qui, je crois, doivent être protégés de ce genre de discours extrémistes. Et donc, je crois que les bonnes décisions sont prises concernant l'imam de Bagnols.

PATRICK ROGER
C'est-à-dire : bonnes décisions, il doit faire l'objet d'une procédure pour pouvoir être expulsé par la suite ?

MARIE LEBEC
Absolument, si tous les éléments concordent, et c'est ce que semble dire à la fois…, c'est ce que dit le ministre, et ce que semble dire la préfecture ce matin. Je crois que les décisions doivent être prises pour mener à son expulsion.

PATRICK ROGER
Oui, comment continuer à contrôler les mosquées, pour vous, c'est un vaste chantier ou pas ? Quand on voit les propos qui étaient tenus, des drapeaux tricolores qui nous gangrènent, qui font mal à la tête, aucune valeur auprès d'Allah, valeurs sataniques ?

MARIE LEBEC
Ce qui est sûr, c'est que toutes celles sur lequel il y a un doute quant à ce qui peut être dit dans un prêche et qui attaquerait les valeurs de la République font l'objet d'une surveillance par les préfectures, par les services territoriaux, par nos services de sécurité intérieure. Je crois que Gérald DARMANIN, depuis qu'il est ministre de l'Intérieur, a pris des décisions fortes. Et ce que je constate aussi, c'est que la communauté musulmane, par la voix de ses représentants, notamment l'imam de la mosquée de Paris, l'imam de la mosquée de Nîmes, hier, se sont exprimées pour condamner très fermement ces propos qui, je crois, nuisent justement à…

PATRICK ROGER
C'est à eux aussi de se faire entendre, quoi, entre guillemets…

MARIE LEBEC
C'est à eux de se faire entendre…

PATRICK ROGER
De pouvoir faire le ménage…

MARIE LEBEC
Mais surtout, ils viennent en soutien d'une action qui est conduite par le Gouvernement, et je crois que c'est là le plus important, c'est que nous pouvons avancer main dans la main avec les représentants de la communauté musulmane et nos services de sécurité pour justement lutter contre ces prêches ultra radicaux qui viennent nuire aux valeurs de notre de notre pays.

PATRICK ROGER
Oui, Marie LEBEC, la polémique autour du RN qui ne serait pas dans l'arc républicain, en tant que ministre des Relations avec le Parlement, comment vous considérez, vous, les élus RN ?

MARIE LEBEC
Mais, je crois que la question, ce n'est pas comment est-ce que je considère les élus RN ou est ce qu'il y a une polémique, puisque le président de la République, comme le Premier ministre, comme l'ensemble du Gouvernement et de la majorité ont le même comportement à l'égard des extrêmes qui composent l'Assemblée nationale. Pour ce qui est des députés RN…

PATRICK ROGER
C'est-à-dire alors…

MARIE LEBEC
Pour ce qui est des députés RN, je vais vous le dire, ils ont été élus par nos compatriotes, ils sont présents à l'Assemblée nationale, ils votent des lois, ils ont des responsabilités à l'Assemblée nationale qui leur reviennent de droit, parce que nous respectons le fonctionnement de nos institutions. En revanche, depuis le début, depuis que nous sommes élus, depuis 2007, et nous avons réaffirmé notre volonté en 2022, nous combattons pied à pied le RN sur le plan des idées. Nous nous battons contre les idées du RN, et je ne crois pas qu'à aucun moment, il y ait la moindre chose, le moindre combat que nous portons qui puisse donner le sentiment que nous travaillons avec le RN. Nous respectons leur place dans les institutions. C'est à ce titre qu'ils sont invités aux hommages. Et je crois que la question de leur place doit leur revenir, la question de leur présence. Ils n'ont pas été présents à l'hommage à BADINTER, par exemple. Nous respectons leur place dans les institutions, mais je crois que depuis que nous sommes élus, nous avons tout fait et tout mis en œuvre pour combattre le RN. Et je crois que nous sommes très clairs sur ce point, tant ce que dit le Président de la République dans son interview à L'Humanité que ce que dit Gabriel ATTAL, que les combats qu'il a pu porter, et également ce qui est fait par l'ensemble des députés dans l'hémicycle qui s'opposent au RN.

PATRICK ROGER
C'est-à-dire qu'il faut voter des textes, parfois avec les voix du RN ou pas alors, parce que ça arrive… ?

MARIE LEBEC
Mais le sujet n'est pas : est-ce que nous votons des textes avec les voix du RN…

PATRICK ROGER
Eh bien, oui, mais…

MARIE LEBEC
Nous défendons des textes, nous les portons, nous les amendons, nous les travaillons, nous portons ce qui sont nos convictions, ce qui sont les engagements du président de la République. Est-ce que la majorité peut empêcher que le RN s'associe à ce que nous portons ? C'est absolument impossible. Ce que nous faisons, c'est que nous…

PATRICK ROGER
Donc, vous acceptez, vous pouvez accepter les voix du RN pour voter une loi ?

MARIE LEBEC
Non, mais ce n'est pas une histoire de : est-ce que nous acceptons…

PATRICK ROGER
Non, mais…

MARIE LEBEC
Non, mais je ne crois pas que le débat se pose en ces termes-là. Je crois que…

PATRICK ROGER
Non, mais je vous pose la question…

MARIE LEBEC
Non, mais d'accord, mais je crois que le président, dans son interview à L'Humanité, que la politique que porte le Gouvernement, que les combats qui sont menés dans l'hémicycle par la majorité, disent toutes de notre volonté de s'opposer au Rassemblement national. Les respecter dans leur place dans l'institution est très différent de les combattre sur le plan des idées. Et je ne crois pas que, à aucun moment, quelqu'un puisse nous accuser de rapprochement avec le RN. La réélection d'Emmanuel MACRON face à Marine LE PEN…

PATRICK ROGER
C'est-à-dire que dans des déclarations parfois d'Emmanuel MACRON, on a pu comprendre qu'il fallait respecter aussi le RN, parce qu'il y avait des électeurs derrière.

MARIE LEBEC
Mais, pardon, mais le président de la République, il est garant du bon fonctionnement de nos institutions. Les électeurs ont fait le choix d'avoir 88 députés RN au Parlement. Il est de son devoir de, par exemple, les inviter aux cérémonies patriotiques. Il est de son devoir de considérer qu'ils sont dans la vie politique. Mais le sujet n'est pas de savoir si oui ou non le RN est légitime dans sa représentation dans les institutions. Le sujet est de savoir : est-ce que nous nous opposons au RN ? Et encore une fois, je crois que la réélection du président face à Marine LE PEN en 2022, ce qu'il incarne, les combats qu'il porte depuis 2017, démontrent en tous points que nous sommes opposés au RN. Vous voulez que je vous donne l'exemple le plus flagrant, le plus fragrant, c'est sur l'assurance-chômage. Aujourd'hui, on voit caracoler partout dans leurs circonscriptions les députés RN expliquant que c'est un scandale et qu'il faut que tous ces gens qui sont au chômage, il faut durcir les conditions. Ils ont refusé de voter la réforme de l'assurance-chômage. Je crois que, partant de ce principe-là, nous voyons bien…

PATRICK ROGER
Parce qu'ils n'étaient pas forcément d'accord justement avec un durcissement aussi.

MARIE LEBEC
Oui, mais enfin, aujourd'hui, ils disent l'inverse sur le terrain. Donc, ce que ça traduit bien, c'est que nous menons une politique qui est la traduction de nos engagements. Et ces engagements, ils ont été pris notamment en opposition très frontale avec ce que fait le Rassemblement national, parce que nous ne croyons pas aux méthodes simples et simplistes qui sont portées par le Rassemblement national…

PATRICK ROGER
Donc vous dites que, par exemple, la gauche fait fausse route quand elle vous accuse d'avoir repris parfois des idées qui étaient dans les propositions autour de la loi Immigration, dans les propositions du RN ?

MARIE LEBEC
Mais encore une fois, je ne crois pas que nous ayons à aucun moment travaillé avec le RN. Cette loi Immigration…

PATRICK ROGER
Non, non, mais sur des idées, y compris les idées…

MARIE LEBEC
Non, mais pardon, mais cette loi Immigration, mais alors, je reviens sur cette loi Immigration, Marine LE PEN, 24h avant la réunion de la Commission mixte paritaire, qui est le rassemblement de l'Assemblée nationale et du Sénat, indique qu'elle ne votera pas le texte s'il y a des mesures d'intégration. Ces mesures, elles sont dans le texte. Le Rassemblement national fait le choix de voter le texte. Ce n'est pas nous qui portons la contradiction. Nous avons toujours été clairs sur la ligne que nous défendions. Nous sommes... nous avons voté en 2017, dès 2017, une loi sur l'Asile et l'immigration, sur la protection de ceux qui viennent en France. Et nous votons en 2023 une loi qui vise à mieux contrôler l'immigration clandestine qui arrive sur notre territoire. Si le RN vote le texte avec nous, nous en prenons acte. Mais je crois qu'à aucun moment nous avons été dans le sens de ce que défendait le RN.

PATRICK ROGER
Bon, vous ne refusez pas les voix du RN. Mais vous ne voulez pas travailler avec…

MARIE LEBEC
Encore une fois, ce n'est pas ce que j'ai dit…

PATRICK ROGER
Non, mais…

MARIE LEBEC
Le sujet, ce n'est pas de savoir si nous les refusons ou pas, ils sont députés, ils sont libres de voter les textes… je crois que tout dans notre engagement démontre que nous nous opposons au RN.

PATRICK ROGER
Oui, alors l'hommage demain au Panthéon, justement, vous avez évoqué des cérémonies du résistant communiste arménien, Missak MANOUCHIAN. Marine LE PEN sera présente. Est-ce qu'elle est la bienvenue ou pas alors ?

PATRICK ROGER
Je crois que c'est comme pour l'hommage à BADINTER, elle est présente parce qu'elle est invitée au titre de son groupe, de sa représentation dans les institutions. Je crois que Missak et Mélinée MANOUCHIAN représentaient tout ce à quoi ils s'opposent aujourd'hui internationalistes, communistes, antifascistes. Je crois que la décence voudrait que le RN se pose la question de sa présence ou non. Je crois que le président de la République les a invités, encore une fois, au titre de leur représentation institutionnelle. La question de savoir s'ils doivent être présents ou pas se pose à eux.

PATRICK ROGER
Oui, bon, c'est à eux de choisir quoi…

MARIE LEBEC
Exactement, comme nous avons vécu…

PATRICK ROGER
Parce qu'Emmanuel MACRON a dit : les forces d'extrême droite seraient inspirées de ne pas venir.

MARIE LEBEC
Absolument. Et encore une fois, cette décision leur reviendra, tout comme elle est revenue dans le cadre de l'hommage à Robert BADINTER.

PATRICK ROGER
Oui. Qu'est-ce que vous répondez à Jordan BARDELLA, qui dit : beaucoup de Français sont fatigués de ces leçons de morale, à propos des déclarations justement, par exemple d'Emmanuel MACRON ?

MARIE LEBEC
Non, mais, pardon, à aucun moment, il y a une leçon de…

PATRICK ROGER
Est-ce que c'est une leçon de morale ?

MARIE LEBEC
Non, mais, il n'y a pas de leçon de morale, mais nous avons droit, je crois, en tant que parti majoritaire, en tant que parti qui a fait 28 % au premier tour des élections en 2022, de revendiquer nos convictions, de nous imposer sur ce que nous voulons porter et ce que nous voulons porter en termes de combat. Oui, notre combat, c'est notamment de nous opposer aux valeurs qui sont portées et défendues par le RN. Oui, nous n'avons pas la même vision de la France, oui, nous n'avons pas la même vision de la France, oui, nous n'avons pas la même vision de la France au sein de l'Union européenne. Ça n'a en rien... il ne faut pas repousser dans le champ de la morale ce qui relève des idées. Encore une fois, nous nous battons contre le RN sur le plan des idées, pied à pied. Nous respectons leur place dans les institutions, mais je ne crois pas que nous, nous partagions la vision du RN. Si le RN a du mal à vivre avec cela, il faut qu'ils s'interrogent sur leur place dans la sphère politique…

PATRICK ROGER
Comment vous expliquez alors, comment vous expliquez qu'il y a autant d'électeurs qui vont vers le RN aujourd'hui, vous, qui êtes aussi élue de terrain, donc députée, aujourd'hui, donc ministre en charge des Relations avec le Parlement, donc vous discutez justement aussi avec d'autres députés qui sont sur le terrain. Comment vous expliquez cela, dans les intentions de vote comme dans les scrutins, les différents scrutins, Marie LEBEC ?

MARIE LEBEC
Au fond, c'est assez multifactoriel, et à ce titre-là, la représentation du RN dans le Sud ou dans le Nord, on voit bien que ce n'est pas du tout les mêmes dans le Sud de la France ou dans le Nord de la France, ils sont plutôt élus dans ces territoires-là, n'est pas…, ce ne sont pas du tout les mêmes combats qui sont portés. Je crois qu'il y a une colère qui est forte, à laquelle nous répondons, et en tout cas, nous tentons d'apporter des réponses depuis 2017, et je crois que, par exemple…

PATRICK ROGER
Ce sont des gens en colère donc qui votent pour le Rassemblement national…

MARIE LEBEC
Non, mais, oui, et il y a certainement d'autres raisons, mais par exemple, on peut prendre la question du chômage, du plein emploi, d'un certain nombre de territoires qui avaient été désindustrialisés, depuis 2017, nous nous sommes justement attachés à permettre à chacun de retrouver un emploi. Nous avons réindustrialisé des territoires, et je pense notamment autour de Dunkerque, des territoires qui parfois avaient été trop longtemps abandonnés par les responsables politiques locaux ou nationaux. Donc nous avons apporté une partie des réponses. Il y a encore des réponses sur lesquelles nous devons progresser. Les enjeux de sécurité, les enjeux d'éducation, et c'est pour ça que les enjeux de logement, le Premier ministre en a fait ses priorités.

PATRICK ROGER
Marie LEBEC, vous êtes ministre en charge des Relations avec le Parlement. Alors, justement, venons au Parlement, à l'Assemblée. Quel est le calendrier, là, des réformes à venir ? Quelles sont les premières réformes ?

MARIE LEBEC
Alors, il y a… déjà, il faut dire que l'Assemblée, depuis janvier, et depuis le remaniement, à la fois resserré, et puis, ensuite élargi au cours du mois de février…

PATRICK ROGER
On va y revenir tout à l'heure…

MARIE LEBEC
L'Assemblée est au travail. Pour ma part, j'ai, à l'occasion du Gouvernement resserré, largement été au banc ces dernières semaines. Il y a un calendrier qui a été défini par l'ancienne Première ministre, Élisabeth BORNE, et qui porte des sujets qui sont absolument fondamentaux pour notre pays. La gouvernance du nucléaire, par exemple, qui arrivera la semaine prochaine à l'Assemblée nationale. La réforme constitutionnelle en Nouvelle-Calédonie qui parle de l'avenir d'un de nos territoires ultramarins, qui, en plus, occupe une position stratégique dans la zone indopacifique. Il y a également la lutte contre les dérives sectaires. Et puis, ensuite, s'ajouteront ces textes-là, qui sont stratégiques et fondamentaux, un certain nombre de textes qui sont les priorités définies par le Premier ministre à l'occasion de de son discours de politique générale. La question agricole, bien sûr, qui est venue, qui avait déjà un texte préparé, mais que nous enrichissons. Et je crois que ça fait partie aussi de la patte de Gabriel ATTAL, la question du logement, la question de la simplification pour le développement de notre activité économique, la question de la fin de vie. Tous ces sujets seront débattus d'ici à la suspension cet été…

PATRICK ROGER
Oui, et l'IVG dans la Constitution. Alors, Gérard LARCHER, le président du Sénat, avait, on se souvient, affirmé que la Constitution n'était pas un catalogue de droits sociétaux. Qu'est-ce que vous lui répondez ? Et d'ailleurs, en est-on aussi autour de la date pour entériner ça avec une date du Congrès ?

MARIE LEBEC
D'abord, peut-être répondre sur le premier volet technique de votre question, où en est-on de la date du congrès ? Pour l'instant, nous, avant de parler même du Congrès, nous en sommes au débat qui doit avoir lieu au Sénat le 28 février prochain, et nous sommes tout à fait, le Gouvernement, tout à fait respectueux de ce qui pourra être débattu au Sénat. Et donc nous attendons de savoir si le Sénat adoptera un texte conforme ou apportera des modifications au texte qui provient de l'Assemblée nationale ; en fonction de ce choisira…

PATRICK ROGER
Il n'y a pas de rejet pur et simple du texte, a priori, non ?

MARIE LEBEC
Encore une fois, je ne crois pas. Mais encore une fois, tout ça relève des discussions qui auront lieu dans l'hémicycle au Sénat, et où je crois que nous devons respecter ce temps, fonction de ce que votera le Sénat, nous organiserons un Congrès dans les meilleurs délais, qui suivra l'adoption du texte…

PATRICK ROGER
On avait parlé de la date du 5 mars, c'est trop tôt ?

MARIE LEBEC
Encore une fois, si le texte est adopté conforme, c'est possible. Si le Sénat souhaite y aller…

PATRICK ROGER
C'est bientôt, c'est dans quinze jours…

MARIE LEBEC
Si le Sénat souhaite apporter des ajouts à ce texte, nous respecterons les ajouts du Sénat, auquel cas, il y aura une nouvelle lecture dans chaque Chambre, et nous organiserons à la suite de ça un Congrès dans les meilleurs délais. Ensuite, sur le fond du sujet…

PATRICK ROGER
Oui, et ce que disait Gérard LARCHER, ce n'est pas un catalogue de droits sociétaux la Constitution…

MARIE LEBEC
Oui, mais je ne crois pas non plus que l'inscription de l'IVG dans la Constitution, ce soit un caprice. Je crois que la Constitution peut faire une place aux femmes, peut faire une place aux droits des femmes. Je crois que c'est absolument fondamental. Et donc, oui, la majorité, le Gouvernement sont très attachés à l'inscription de l'IVG dans la Constitution. Nous nous battons depuis plus d'un an et demi pour que cela soit possible. Nous travaillons avec ceux qui sont pour, ceux qui ont plus de réticences pour trouver la bonne formulation. Mais encore une fois, je crois que c'est important de veiller à protéger les droits des femmes et protéger probablement un des droits les plus fondamentaux des femmes, qui est le droit à la question de la reproduction.

PATRICK ROGER
Bon, donc, voilà, il va y avoir cette décision au Sénat. Enfin…

MARIE LEBEC
La discussion aura lieu…

PATRICK ROGER
La discussion, voilà, et ensuite, Congrès, probablement début mars, mais c'est peut-être un peu trop rapide…

MARIE LEBEC
Encore une fois, je ne crois pas qu'il faille parler d'une date, puisque…

PATRICK ROGER
Non, mais vous êtes ministre en charge des Relations avec le Parlement, donc, vous travaillez sur ces sujets…

MARIE LEBEC
Oui, bien sûr, mais parce que notre priorité, c'est de respecter, c'est un débat qui est important, c'est de respecter le temps du débat au Sénat. Si le Sénat est convaincu que la version qui est proposée par l'Assemblée nationale est la bonne, il adoptera un conforme, et auquel cas, nous pourrons avancer sur le Congrès.

PATRICK ROGER
Sur les débats à l'Assemblée nationale, tout à l'heure, vous avez évoqué un certain nombre de sujets, vous n'avez pas évoqué le budget, par exemple, Bruno LE MAIRE a annoncé un plan d'économies d'environ 10 milliards. Voilà, parce qu'on a vu le mur de la dette, près de 3 000 milliards de dette. Donc, il faut faire des économies. Est-ce que ça doit passer par un projet de loi de finances rectificative ou alors par décret ? Certains à gauche demandent à ce qu'il y ait une discussion pour un projet de loi rectificatif…

MARIE LEBEC
Tout d'abord, vous avez raison, le sujet de la dette est essentiel, et la question de la bonne gestion de nos finances publiques est un sujet majeur. La bonne gestion de nos finances publiques, ça veut dire être en capacité de garder des marges de manœuvre pour faire face à des crises qui arrivent de manière très brutale dans le débat public, comme la crise agricole, et sur laquelle le Gouvernement doit réagir vite, pour pouvoir accompagner. Mais pour ça, nous devons être en capacité d'avoir des marges de manœuvre. La décision de Bruno LE MAIRE, c'est une décision aussi qui s'impose, qui s'impose à nous, liée au contexte international de ralentissement de l'économie, voire de récession pour certains pays, dont notre partenaire qui est l'Allemagne, et à un contexte géopolitique qui est particulièrement tendu. La décision qui est prise par le ministre de l'Economie et des Finances, c'est de pouvoir agir vite, et pour agir vite, nous prenons des décisions qui sont par voie réglementaire, et nous allons au plafond de ce que nous pouvons faire avec ces 10 milliards d'euros d'économie qui sont annoncés. Par ailleurs, nous arrivons dans une période d'échéances électorales, à quelques semaines, puisque, vous le savez, il y a les élections européennes qui arriveront début juin. Et moi, je rejoins ce que dit le ministre de l'Economie, je ne crois pas que dans un moment d'élections, tout un chacun est tenté par le souhait de faire des économies.

PATRICK ROGER
C'est-à-dire que ce serait…

MARIE LEBEC
Et ça prendrait plus de temps, et je ne suis pas sûre qu'on ferait face à une immense responsabilité des oppositions en la matière. Et donc, il est fait…

PATRICK ROGER
Des débats qui s'éterniseraient…

MARIE LEBEC
Des débats qui s'éterniseraient, mais qui ne nous permettraient pas…

PATRICK ROGER
Et donc qui ne seraient pas sur le fond…

MARIE LEBEC
Si, qui seraient peut-être sur le fond, et qui seraient peut-être de qualité, mais qui, je crois, ne nous permettraient pas d'agir aussi rapidement. Bruno LE MAIRE a annoncé dès dimanche les mesures qu'il souhaitait. Le gel des crédits aura lieu, l'annulation des crédits aura lieu dans le courant de la semaine. Donc, nous agissons rapidement, et nous montrons que nous sommes dans cette logique qui nous tient à cœur depuis 2017 d'avoir une gestion responsable de nos finances publiques. Pour autant, le ministre n'a pas exclu que, plus tard, au cours de l'été, si cela s'avérait nécessaire, nous puissions avoir un collectif budgétaire, c'est-à-dire un débat sur un budget rectificatif.

PATRICK ROGER
Oui, autre sujet qui préoccupe beaucoup les Français, c'est toujours… ce sont les menaces de grèves, les aiguilleurs de la SNCF, peut-être encore le week-end prochain. Il y a des menaces aussi qui ont été brandies avant les Jeux olympiques. Est-ce que vous seriez favorable, vous, à ce qu'il y ait une proposition de loi qui soit étudiée pour encadrer le droit de grève ?

MARIE LEBEC
Déjà, je crois qu'il est nul besoin de redire à votre antenne que le droit de grève est un droit qui est protégé constitutionnellement. Pour autant, effectivement, nous sommes dans un moment qui est de vacances scolaires, et je crois qu'au-delà de la question des vacances, c'est souvent pour les familles l'occasion de se retrouver. Et je pense notamment aux familles recomposées où parfois les parents habitent loin l'un de l'autre, où les parents sont séparés. Et pour les enfants, c'est l'occasion des vacances scolaires d'aller chez l'un des deux parents. Et donc, c'est très difficile…

PATRICK ROGER
Quand il n'y a plus de train, c'est difficile…

MARIE LEBEC
C'est très difficile dans ces périodes-là où, effectivement, c'est important de préserver la vie familiale, et où on ne peut pas le faire, parce qu'il y a des décisions de grève. Je crois que la question de la protection de ce droit de grève, elle est essentielle, mais je crois qu'on peut s'interroger sur le recours au droit de grève quand on a une mission de service public. On le voit bien, il y a, là, on est en période de vacances, mais cet été, nous aurons les Jeux olympiques, et que ça mettra la France à l'honneur, ça mettra des sportifs qui s'entraînent depuis quatre ans à l'honneur. C'est l'occasion pour la France de briller. Et donc, on peut s'interroger aussi sur la pertinence d'une grève à l'occasion…

PATRICK ROGER
Eh bien, Mathilde PANOT, de LFI, a dit l'autre jour que s'il fallait mener des combats, y compris des grèves, elle soutiendrait évidemment ces grèves.

MARIE LEBEC
Oui, mais pourquoi sans cesse, quand on est un responsable politique, chercher à contribuer à dégrader l'image de la France, on peut s'interroger aussi sur ça. Moi, je crois encore une fois qu'il y a des moments… la grève, c'est un droit légitime, mais je crois qu'il y a des moments où on peut estimer qu'il faut sanctuariser ces périodes…

PATRICK ROGER
Eh bien alors, s'il faut les sanctuariser, alors est-ce que ça passe par justement une législation, peut-être encadrer…

MARIE LEBEC
J'ai vu que Les Républicains avaient déposé…

PATRICK ROGER
Il y a une proposition de loi... Oui, Les Républicains disent : 60 jours par exemple…

MARIE LEBEC
... une proposition de loi, j'imagine qu'elle sera débattue à l'occasion de leur discours parlementaire.

PATRICK ROGER
Et vous alors, justement, en tant que ministre des Relations avec le Parlement, quelle est votre position par rapport à ça ? Est-ce que cette loi doit être vraiment débattue ? Est ce qu'il faut aller ? Est ce qu'il faudra aller jusqu'au bout ou quoi ?

MARIE LEBEC
Non, je n'ai pas encore lu le texte proposé par Les Républicains, donc je ne vais pas m'exprimer sur la proposition de loi faite par Les Républicains, mais...

PATRICK ROGER
Ils voudraient un cadre de 60 jours, où on ne toucherait pas effectivement à ces... pendant ces 60 jours, il n'y aurait pas de grève.

MARIE LEBEC
Ce qui est sûr, en tout cas, c'est que quand on a une mission de service public, je crois qu'il est important aussi de respecter l'ensemble de nos compatriotes qui comptent sur ces services publics, soit pour pouvoir se retrouver, pour pouvoir se déplacer, pour pouvoir aller travailler, ou lorsque ce sont des moments qui permettent le rayonnement de notre pays. Encore une fois, est ce que ça doit... les modalités doivent forcément passer par la loi ? Est-ce que ça peut faire l'objet d'un accord autre avec les représentants syndicaux ? Je crois que toutes les options…

PATRICK ROGER
Bon. Vous n'allez pas pousser ce texte, en tout cas, à l'Assemblée nationale, vous, en tant que ministre des Relations avec le Parlement.

MARIE LEBEC
En tout cas, c'est une proposition de loi…

PATRICK ROGER
Et pourtant, vous dites que…

MARIE LEBEC
Non mais c'est une proposition de loi. Il y a, je ne veux pas rentrer dans la technique parlementaire, mais soit elle est inscrite sur une journée dédiée aux Républicains, soit ils trouvent une majorité pour l'inscrire dans du temps transpartisan de…

PATRICK ROGER
Mais vous, vous êtes favorable, pourquoi pas, à ce qu'il y ait une réflexion autour de ça, pour sanctuariser, vous l'avez dit, sanctuariser un certain nombre de jours.

MARIE LEBEC
On voit bien la colère de nos compatriotes, de nos concitoyens, quand effectivement, à des moments qui sont importants pour eux, ils sont bloqués, parfois même si bien sûr, il y a un remboursement qui doit être fait par la SNCF, et c'est parfois aussi un petit investissement qui est fait à l'occasion de ces moments. Donc je trouve que, en tout cas, la réflexion sur le sujet peut être débattue à l'Assemblée nationale.

PATRICK ROGER
Voilà, sur ce capital annuel de 60 jours, ce serait 60 jours d'interdiction de grève. Et puis il y aurait un calendrier, les vacances scolaires, des grands événements donc.

MARIE LEBEC
Mais encore une fois, je n'ai pas lu le texte des Républicains, je ne m'exprime pas sur le fond du sujet…

PATRICK ROGER
Ah, eh bien il va falloir le faire, Marie LEBEC, parce que ça va venir quand même.

MARIE LEBEC
Mais je vais le faire. Pardon de me concentrer…

PATRICK ROGER
Vous êtes ministre en charge des Relations avec le Parlement, c'est un sujet important, c'est en ce moment.

MARIE LEBEC
Absolument, mais pardon de me concentrer sur les priorités qui sont portées par le Gouvernement…

PATRICK ROGER
Ce n'est pas une priorité, ça ?

MARIE LEBEC
Non, mais ce n'est pas le sujet de la priorité, c'est : je suis ministre des Relations avec le Parlement. Je suis pleinement à la tâche de la préparation, de la mise en œuvre des législatives, des priorités du Premier ministre. Je regarderais la proposition si elle est inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, bien évidemment.

PATRICK ROGER
À propos des élections européennes, certains commencent à taper du, pas du poing sur la table, mais presque, en tout cas à piaffer, en se disant : mais on n'a toujours pas dans la majorité, de têtes de liste. Et il serait temps quand même, non ?

MARIE LEBEC
Non mais, la préparation de la…

PATRICK ROGER
Il faudrait 4 mois.

MARIE LEBEC
Oui oui, mais la préparation de la campagne avance. Vous savez, moi je suis membre de la Commission nationale d'investiture pour les européennes. Nous sommes en train de travailler à la constitution de la liste. Outre la tête de liste qui est bien sûr importante, je le comprends bien, mais à la constitution de la liste, avec des personnalités qui reflètent ce que nous voulons porter en tant qu'Européens, ce que nous voulons porter au niveau de l'Union européenne, les combats que la France souhaiterait incarner au niveau de l'Europe. Donc nous travaillons à la constitution de cette liste. La tête de liste fait l'objet d'une discussion entre les trois chefs de partis, François BAYROU, Edouard PHILIPPE et Stéphane SEJOURNE. Et donc bien sûr, ces discussions sont en cours.

PATRICK ROGER
Est ce qu'il y a des équilibres à trouver ? On dit que certains sont un peu, dans la majorité, au bord de la crise de nerfs. Il y a eu des rancœurs, l'attente a été longue pour le remaniement. Comment ? Vous qui êtes justement en charge de ces relations avec le Parlement, vous sentez, vous avez du mal à conserver le calme de vos troupes ?

MARIE LEBEC
Vous savez, depuis 2007, En Marche à l'époque, Renaissance aujourd'hui, elle est composée de gens qui viennent d'origines différents, d'horizons différents, d'engagement politiques différents. Donc la question de l'équilibre, c'est ce qui nous fait vivre, c'est ce qui fait que nous sommes ce parti qui est uni et qu'elle a toujours, ça a toujours existé, il faut toujours l'accompagner.

PATRICK ROGER
Il y aura toujours des déçus, c'est ce que vous dites.

MARIE LEBEC
Non, mais il y en aura toujours, et…

PATRICK ROGER
Des gens qui peuvent partir, aussi.

MARIE LEBEC
Non, je ne crois pas, et mon rôle...

PATRICK ROGER
J'ai vu qu'il y a eu un ou deux départs.

MARIE LEBEC
Mon rôle, en tout cas, c'est de garantir avec Sylvain MAILLARD, avec Jean-Paul MATTEI qui est le président du groupe MoDem, avec Laurent MARCANGELI, le président du groupe Horizons à l'Assemblée nationale, de garantir l'unité de notre majorité et que cette majorité soit forte et que cette majorité, elle incarne ce que nous souhaitons porter, le dépassement, notre capacité à travailler ensemble, un certain pragmatisme, répondre aux urgences et aux besoins de nos concitoyens. C'est ça.

PATRICK ROGER
Marie LEBEC, pourquoi, selon vous, il y a quand même de l'amertume et un peu de rancœur auprès de certains députés, justement, de la majorité aujourd'hui ?

MARIE LEBEC
Eh bien, le remaniement, ça suscite toujours des attentes qui sont légitimes. Et maintenant, il s'agit de dépasser ces petites déceptions qui sont... Mais je pense que tout un chacun peut comprendre ça. Parce que quand dans une entreprise ou quand il y a une élection dans une association pour la présidence, tous ceux qui sont candidats, aspirent à pouvoir être reconnus dans leurs talents, dans leurs compétences, dans leur travail, dans leur engagement. Et c'est la même chose pour un remaniement ministériel.

PATRICK ROGER
Il y a forcément des déceptions.

MARIE LEBEC
Vous avez envie de travailler sur un sujet, vous avez envie de le porter différemment. C'est très différent le rôle de parlementaire et le rôle de ministre. Il y a des déceptions qui sont légitimes. Je crois, enfin, les députés qui composent la majorité, ce sont des humains, ils ont le droit d'avoir des aspirations, des attentes et des déceptions. Mais je ne crois pas que personne, dans tout ceux que j'ai pu voir depuis la composition du Gouvernement, m'aient exprimé le souhait de partir…

PATRICK ROGER
Vous ne craignez pas de nouveaux départs. Non ?

MARIE LEBEC
Je ne crains pas de nouveaux départs, et encore une fois, je crois que la priorité c'est de nous dire qu'ensemble nous œuvrons à la mise en œuvre du président de la République, pour changer le quotidien de nos concitoyens. Et encore une fois, les déceptions, elles se traitent. On avance. On redonne la confiance et…

PATRICK ROGER
Certains choisissent le camp d'Edouard PHILIPPE, déjà. Est-ce que ce serait un bon candidat pour 2027 ?

MARIE LEBEC
Non, mais je ne crois pas qu'on en soit là dans ces discussions-là.

PATRICK ROGER
Eh bien certains, certains, non ?

MARIE LEBEC
Encore une fois, nos priorités, elles sont claires, elles ont été définies par Gabriel ATTAL, elles sont définies par le président de la République. L'objectif du Gouvernement, c'est de mener le mandat à bien, à son terme, avec des vraies transformations qui sont perceptibles par nos concitoyens. Et après, certains députés choisissent le camp d'Edouard PHILIPPE, moi je constate surtout que c'est dans la même majorité et que tout le monde a le même souhait d'agir dans le sens de la majorité, dans le sens du programme porté par le président de la République.

PATRICK ROGER
Merci Marie LEBEC.

MARIE LEBEC
Merci à vous.

PATRICK ROGER
Ministre des Relations avec le Parlement, d'avoir répondu à toutes nos questions ce matin sur Sud Radio.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 21 février 2024