Interview de Mme Dominique Faure, ministre déléguée, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, à France Info TV le 6 mars 2024, sur les élus locaux, le non-cumul des mandats, la crise agricole et les élections européennes.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Dominique Faure - Ministre déléguée, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Média : France Info TV

Texte intégral

JEAN-BAPTISTE MARTEAU
L'interview politique de la Matinale, Caroline MOTTE, vous recevez ce matin Dominique FAURE, qui est ministre déléguée, chargée des Collectivités territoriales et de la Ruralité.

CAROLINE MOTTE
On va notamment s'intéresser au statut des élus locaux, mais aussi au non-cumul des mandats.

JEAN-BAPTISTE MARTEAU
C'est parti pour l'interview politique de la Matinale.

CAROLINE MOTTE
Bonjour Madame la Ministre ?

DOMINIQUE FAURE
Bonjour.

CAROLINE MOTTE
Vous êtes donc en charge des Collectivités territoriales, vous souhaitez renforcer le statut des élus locaux. Concrètement, qu'est-ce que vous proposez ?

DOMINIQUE FAURE
On est dans une vraie volonté de continuité démocratique par rapport à nos 560 000 élus locaux maires, qui mettront en jeu leur mandat en 2026. Aujourd'hui, nos maires, nos élus locaux, sont les sentinelles de la République. On a véritablement besoin de leur donner de la reconnaissance, de revaloriser ce qu'ils sont, dans cette proximité à laquelle on est très attaché. Trois sujets sur lesquels nous travaillons, principalement, la première, c'est donner accès à tous les citoyens, à cette belle mission de maire ou de conseiller municipal ou intercommunal d'ailleurs. Bien sûr, donner accès à tous, ça veut dire rembourser des frais de transport pour nos étudiants, rembourser les frais pour tous d'ailleurs. Permettre à nos jeunes femmes enceintes de bénéficier des mêmes avantages que dans le privé alors qu'elles sont élues. Et puis c'est revaloriser les indemnités et c'est aussi tout ce qui touche à la formation, formation initiale. Quand on devient maire, on a véritablement besoin d'appréhender tout le sujet du Code général des Collectivités territoriales, mais c'est aussi la validation des acquis d'expérience. Faire en sorte qu'ils puissent, quand ils décident de ne pas se représenter, de pouvoir retrouver facilement un emploi. Et c'est ces passages public/privé, qui nous paraissent intéressants à remettre sur le devant de la scène.

CAROLINE MOTTE
Alors, il y a deux propositions de loi qui prévoient d'instaurer un statut de l'élu spécifique. Est-ce que vous allez les soutenir, ces propositions de loi ?

DOMINIQUE FAURE
Bien sûr. Donc, la première, j'étais hier soir au Sénat, c'est une proposition de loi extrêmement intéressante et qui vise, sur les axes que je vous ai brièvement cités, de faire vraiment un pas en avant. C'est une étape importante. La deuxième proposition de loi de Violette SPILLEBOUT, et Sébastien JUMEL, transpartisane, à l'Assemblée nationale, elle aussi extrêmement intéressante. Ce qui est intéressant à souligner, c'est le fait que ces deux propositions de loi sont prises sous des angles extrêmement différents et très complémentaires. Donc oui, je vais soutenir et travailler avec à la fois le Sénat et peut être ce soir et encore demain, peut être trois jours sur ces sujets qui sont cruciaux pour notre démocratie. Et puis au mois de mars, a mois d'avril, de même avec nos députés à l'Assemblée nationale.

CAROLINE MOTTE
Vous avez parlé de revalorisation ; dans les communes de moins de 500 habitants, par exemple, l'indemnité d'un maire c'est 1 041 €. De combien serait cette revalorisation ? Est-ce que vous le savez déjà ?

DOMINIQUE FAURE
Ce que propose la proposition de loi de la sénatrice GATEL, sur laquelle nous travaillons aujourd'hui, c'est une augmentation de 10% des indemnités de tous les élus locaux et de tous les maires, quelle que soit la strate, les petits comme les grands. C'est un début. C'est une discussion que nous allons avoir, encore une fois au Sénat et à l'Assemblée, moi j'assume l'absolue nécessité de revaloriser les indemnités de nos élus locaux et plus particulièrement des maires.

CAROLINE MOTTE
Et vous espérez répondre à la crise des vocations que connaissent ces élus locaux avec toutes ces mesures ?

DOMINIQUE FAURE
Je vous l'ai dit, c'est une étape. Oui, je pense qu'on va contribuer à donner envie à nos citoyens de s'engager pour leur commune, pour leur ville. Donc il restera encore un certain nombre de choses à faire, mais regrouper dans un même texte tous ces bouts de code pour en faire un statut de l'élu, je pense que véritablement cela va rendre plus lisible la façon dont vont pouvoir s'exercer ces mandats de maire. Et puis ces difficultés auxquelles sont confrontés nos maires, c'est tout simplement concilier cette vie d'élu avec la vie professionnelle, concilier cette vie élue avec la vie personnelle. Et c'est là-dessus que nous travaillons pour essayer de donner envie à nos jeunes, à nos moins jeunes, de s'engager.

CAROLINE MOTTE
De nombreux élus ont été agressés, plus de 2 300 atteintes aux élus recensées en 2023. Le dernier Congrès des maires y était d'ailleurs consacré. Est ce qu'il y a un problème de respect de la fonction aujourd'hui ?

DOMINIQUE FAURE
La violence dans la société est une réalité. Et nos maires en font les frais aussi. C'est triste. Quand on s'attaque à un élu, c'est la République qui recule. C'est pour ça que je suis extrêmement attachée, depuis le mois de mars je me suis saisie de ce sujet : plan de lutte contre la violence faite aux élus. Nous venons d'aboutir, très récemment par la sanction, et il fallait passer au Parlement. Donc, c'est une proposition de loi issue du Sénat, portée par François-Noël BUFFET, et qui a abouti dans une Commission mixte paritaire et qui vise à ce que tous ceux qui s'attaquent à des élus soient autant sanctionnés que quand on s'attaque à un gendarme ou à un policier. Mais on était sur la protection juridique, précédemment sur la protection fonctionnelle, on était sur la protection psychologique de nos élus qui font l'objet de cyberviolences, cybermenaces. Et aujourd'hui, on est aussi maintenant sur le champ de la sanction. Je crois qu'on a l'arsenal qui va bien pour lutter contre ces violences faites aux élus. Mais rien de mieux que la prévention, ce sur quoi nous travaillons aussi avec le ministère de l'Intérieur, Gérald DARMANIN.

CAROLINE MOTTE
Jeudi prochain, le 14 mars, les députés européens vont proposer d'assouplir la loi sur le non-cumul des mandats. Quelle est votre position ?

DOMINIQUE FAURE
Je suis effectivement pour un assouplissement de ce non-cumul des mandats. Je pense que cela a du sens. A plusieurs titres et j'étais moi-même extrêmement séduite quand cette loi sur le non-cumul a été promulguée. Je considérais à ce moment-là, et je considère toujours, que pour bien faire son mandat, son mandat de maire, son mandat d'élu local ou son mandat de parlementaire, il est important de pouvoir s'y donner en totalité. Aujourd'hui, ma pensée a légèrement évolué, et je vais par rapport à cette proposition de loi, j'ai tout simplement besoin de temps. Le président de la République a confié une mission à Eric WOERTH, qui entre autres, consiste à réfléchir à ce sujet. Donc je vais être au banc face à nos députés, et je vais, je pense, émettre un avis de sagesse, c'est-à-dire laisser le Parlement, l'Assemblée nationale, décider, et je vais me nourrir de ces réflexions pour voir ce que véritablement nous devons faire sur cette règle pour laquelle je pense que nous devons l'assouplir.

CAROLINE MOTTE
Alors, est ce qu'on doit s'attendre au retour des députés-maires, comme c'était le cas avant, par exemple ?

DOMINIQUE FAURE
C'est trop tôt pour vous le dire.

CAROLINE MOTTE
Bien. Vous avez vu, comme tout le monde, l'accueil qu'a reçu Emmanuel MACRON au Salon de l'agriculture. Est-ce que vous comprenez cette colère des agriculteurs ?

DOMINIQUE FAURE
Oui, je la comprends. Vous savez, je suis petite fille d'agriculteurs, je suis députée d'une circonscription extrêmement agricole, donc je vois monter cet agacement, et bien plus fort que ça, maintenant, de la colère. Donc je la comprends. Moi je trouve que le Premier ministre Gabriel ATTAL a vraiment très bien réagi. D'abord, de la réactivité. Il est venu en Haute-Garonne et cette réactivité a été véritablement très appréciée par nos agriculteurs. Il a écouté, beaucoup écouté, et il a décidé. Moi, je considère qu'on a déjà un certain nombre de décisions qui ont été prises, qui contribuent à cette confiance dont on a besoin pour pouvoir travailler sur des actions beaucoup plus moyen terme ou beaucoup plus long terme.

CAROLINE MOTTE
Mais ce ressentiment, est ce que ça ne veut pas dire qu'Emmanuel MACRON et son gouvernement ont totalement perdu le lien avec la ruralité, avec le monde agricole ?

DOMINIQUE FAURE
Alors, pas du tout. Emmanuel MACRON, on le voit quand il va dans nos ruralités, il y va assez régulièrement, il est proche des gens, il écoute lui aussi. Et je pense que c'est un mauvais procès qui lui est fait, tout simplement.

CAROLINE MOTTE
Ce week-end, la majorité va lancer sa campagne pour les européennes depuis Lille, avec une nouvelle tête de liste, inconnue du grand public, Valérie HAYER. Comment elle va pouvoir se démarquer de ses concurrents ?

DOMINIQUE FAURE
Valérie HAYER dispose d'énormément d'atouts. C'est une jeune femme de 37 ans, anciennement élue locale. Donc pour moi, c'est extrêmement important. Elle connaît les territoires ruraux comme urbains et ensuite c'est une députée européenne sortante et qui a su prendre la présidence de Renew, la troisième formation politique de l'Europe en succession de Stéphane SEJOURNE quand il a été nommé ministre. Donc Valérie est peut-être peu connue aujourd'hui, elle va l'être extrêmement rapidement, parce que, comme vous le savez, samedi après-midi, le 9, nous nous rendons à Lille pour lancer la campagne pour les européennes, « Besoin d'Europe ». Valérie va être la leader dont on a besoin pour notre famille politique.

CAROLINE MOTTE
Mais d'un mot, dans les sondages, la liste de la majorité accuse 10 points de retard face au Rassemblement national. Est-ce que ça vous inquiète ?

DOMINIQUE FAURE
Alors, ça ne m'inquiète pas. Vous savez, je suis une ancienne sportive de haut niveau et tant que le dernier point, la dernière balle n'est pas jouée, eh bien tout est possible. Donc on a une très bonne candidate. On va annoncer un très bon projet. La campagne, elle ne va pas se faire sur les têtes de liste uniquement, elle va se faire aussi sur le projet. Et donc aujourd'hui, les sondages disent ce qu'ils veulent, nous, on sera samedi, nombreux, pour soutenir Valérie et pour annoncer quelques éléments de notre projet « Besoin d'Europe ». Et puis on va voir comment les choses évoluent. Mais en tout cas, personnellement, je vais me mobiliser en tant que ministre Radical. Nous avons, vous le savez, l'Europe au coeur depuis très longtemps, pour cette belle campagne pour les européennes.

CAROLINE MOTTE
Merci beaucoup, Madame la Ministre, d'avoir répondu à nos questions.

DOMINIQUE FAURE
Avec plaisir.

CAROLINE MOTTE
Merci à vous.

JEAN-BAPTISTE MARTEAU
Merci beaucoup Madame et merci Caroline.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 7 mars 2024