Interview de Mme Maud Bregeon, ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement, à BFM TV le 9 octobre 2024, sur la politique budgétaire du Gouvernement.

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Média : BFM TV

Texte intégral

APOLLINE DE MALHERBE
Bonjour Maud BREGEON.

MAUD BREGEON
Bonjour.

APOLLINE DE MALHERBE
Merci d'être dans ce studio pour répondre à mes questions. Vous êtes porte-parole du Gouvernement. Il y a beaucoup de questions à vous poser, et notamment sur les questions des impôts, du budget, mais d'abord, quand même, cette première épreuve traversée hier à l'Assemblée, la motion de censure, traversée et surmontée, puisque le Gouvernement ne tombera pas, vous n'avez pas eu peur ?

MAUD BREGEON
C'est moins une motion de censure qu'une motion de posture. Et heureusement, tant mieux pour la France, elle n'a pas trouvé de majorité hier. Maintenant, je vais vous dire, de la part de La France Insoumise, qui ne veut pas beaucoup de bien au pays, ça n'étonne personne, de la part du Parti socialiste, c'est désolant, parce que cette motion de censure était présentée par le Parti socialiste, et le Parti socialiste, qui a été un grand parti dans l'histoire de notre pays, est en train de basculer d'une culture de gouvernement à une culture de la censure, alors même que Michel BARNIER met sur la table des questions qui devraient les intéresser, la justice fiscale, l'écologie, l'amélioration de la réforme des retraites. Est-ce que ce n'est pas des sujets et des revendications historiques du Parti socialiste qui nécessiteraient qu'ils viennent autour de la table ?

APOLLINE DE MALHERBE
François HOLLANDE lui-même a voté cette motion de censure…

MAUD BREGEON
Oui, et je l'écoutais d'ailleurs sur votre plateau…

APOLLINE DE MALHERBE
Il y a quelques jours…

MAUD BREGEON
… La semaine dernière. Il disait, au fond, on vote une motion de censure, non pas à cause de Michel BARNIER, non pas du fait de sa déclaration de politique générale, et on la vote tout en sachant bien que de toute façon, elle ne sera pas adoptée. Enfin, quelle est la cohérence ? Quelle est la cohérence de la part d'un ancien président de la République ?

APOLLINE DE MALHERBE
Alors, attendez, parce qu'il y a ceux qui ont voté cette motion, puis, il y a ceux qui ne l'ont pas votée, mais dont l'explication n'est pas forcément meilleure pour vous. Je voudrais que vous écoutiez Guillaume BIGOT, il est député RN, et c'est lui qui s'exprimait au nom du Rassemblement national à l'Assemblée.

GUILLAUME BIGOT, DEPUTE RN DU TERRITOIRE DE BELFORT
On ne censure pas, car un seul tweet de Marine LE PEN suffit à infléchir la position du Premier ministre sur la désindexation des salaires. Et il aura suffi d'un simple rappel à l'ordre pour que le chef du Gouvernement fasse comprendre, merci, vous l'avez fait, à votre ministre de l'Economie que sa porte devait rester ouverte, être restée ouverte à tous.

APOLLINE DE MALHERBE
Nous préférons exercer une pression que de voter la censure. Est-ce que ce n'est pas pire en fait ?

MAUD BREGEON
Nous, nous dépendons de 577 députés, et à travers eux, de 67 millions de Français. La voix d'un député vaut la voix d'un autre député. Et c'est bien normal en démocratie. La seule question qui se posera dans les semaines et dans les mois à venir, si d'autres motions de censure sont déposées, ce qui est possible, c'est : y-a-t-il une convergence des luttes entre Jean-Luc MELENCHON et Marine LE PEN ? Si la réponse est oui, la France peut tomber dans l'immobilisme et dans l'instabilité avec les conséquences économiques et sociales qu'il y aura derrière. C'est la seule question qu'il y a à se poser…

APOLLINE DE MALHERBE
Donc, tant qu'il n'y a pas cette convergence des luttes, comme vous dites, entre le RN et LFI, vous tenez ?

MAUD BREGEON
Nous, on écoutera l'ensemble des députés. On l'a toujours dit, tous les élus sont des élus de la République. On veut s'adresser à l'ensemble des Français et s'adresser à l'ensemble des Français, ça signifie prendre en compte l'ensemble du Parlement, de LFI au Rassemblement national avec une méthode qui est celle de Michel BARNIER, de l'écoute, du respect, de la considération, et je pense que ça fait du bien aux Français.

APOLLINE DE MALHERBE
Maud BREGEON, vous êtes porte-parole de Michel BARNIER ou des Macronistes ?

MAUD BREGEON
Je suis porte-parole de Michel BARNIER et du Gouvernement Michel BARNIER. Il faut revenir un petit peu en arrière, ma famille politique n'a pas gagné les élections…

APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes vous-même députée Macroniste.

MAUD BREGEON
Les Français n'ont pas fait le choix d'une Assemblée uniforme. Les Français n'ont pas fait le choix de la pensée unique. Ils ont élu une Assemblée nationale plurielle, d'aucuns diraient : une Assemblée nationale divisée. Et c'est pour ça que le président de la République a nommé le Premier ministre qui était le plus à même de rassembler le plus largement possible. Nous n'avons pas de majorité absolue, mais nous avons le bloc le plus large possible aujourd'hui au sein de l'Assemblée nationale. Et Michel BARNIER a composé un gouvernement qu'il a aussi voulu le plus large possible en tendant la main à la gauche, en tendant la main à la droite, certains l'ont acceptée…

APOLLINE DE MALHERBE
… La gauche n'a pas beaucoup, beaucoup accepté…

MAUD BREGEON
Comme Didier MIGAUD. D'autres ne l'ont pas fait, et je le déplore. Maintenant, les Français nous demandent de nous accorder…

APOLLINE DE MALHERBE
Non, après, ce que j'aimerais comprendre, c'est le rapport au Macronisme, c'est-à-dire que vous, Maud BREGEON, je me dis que ça doit être compliqué dans une situation comme celle d'hier matin. Hier, Michel BARNIER, le Premier ministre, vient rencontrer les députés Macronistes. Ça se passe dans une des salles de l'Assemblée nationale. Ils sont tous là. C'est censé se passer plutôt bien, puisque vous êtes le plus gros constituant des forces de Michel BARNIER désormais à l'Assemblée. Sauf que ça se tend, ça se tend de plus en plus, et notamment des pics de Michel BARNIER à l'endroit de ceux qui ne lui font pas la vie facile, que ce soit Gérald DARMANIN ou Gabriel ATTAL, dont on ne comprend pas très bien s'ils veulent qu'il réussisse ou s'ils ne veulent pas qu'il réussisse. Et vous, Maud BREGEON, vous vous retrouvez au milieu. Vous faites comment ?

MAUD BREGEON
D'abord, moi, je suis intimement convaincue que l'intérêt du pays, encore une fois pour éviter l'instabilité, c'est que Michel BARNIER réussisse. Ensuite, on ne va pas…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais quand vous avez un Gérald DARMANIN qui dit que le budget en l'état est inacceptable, vous vous sentez plutôt DARMANIN ou plutôt BARNIER ?

MAUD BREGEON
On ne va pas se raconter d'histoires, on ne vient pas tous de la même famille politique, on n'a pas tous la même histoire politique, on n'a pas tous la même culture politique. Mais, je crois qu'on a un intérêt commun. Et cet intérêt commun, c'est de permettre au pays d'avancer, et c'est de permettre au Gouvernement de présenter un budget de redressement. Maintenant, est-ce qu'on est toujours tous d'accord au sein du Gouvernement ? Je ne vais pas vous dire que oui. Chacun voit bien que ce n'est pas le cas, parce qu'encore une fois, on vient d'horizons différents. Est-ce qu'on est toujours tous d'accord au sein même de Renaissance ? Pas toujours non plus. Mais c'est normal qu'il y ait des débats, et moi, je trouve ça sain. Et Michel BARNIER est là pour écouter tout le monde, avec, encore une fois, un objectif…

APOLLINE DE MALHERBE
Comment vous l'avez vécu hier, parce qu'il y a quelque chose du frondeur…

MAUD BREGEON
Un objectif, c'est de redresser…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais il y a quelque chose du frondeur chez Gérald DARMANIN, chez Gabriel ATTAL. Comment vous le vivez, vous ?

MAUD BREGEON
Mais c'est normal et c'est légitime qu'il y ait du débat. Michel BARNIER ne vient pas de notre famille politique. On est dans un contexte qui est extrêmement difficile. Et j'entends que les uns et les autres ont des propositions, ont des idées, et on écoutera l'ensemble des amendements qui seront présentés…

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, mais, Michel BARNIER, il trouve ça gonflé, et au fond, les Français, sans doute aussi, qu'un ancien ministre du Budget, Gérald DARMANIN, qu'un ancien Premier ministre, Gabriel ATTAL, fassent des leçons dans la situation budgétaire dans laquelle est la France.

MAUD BREGEON
Je crois que personne ne fait de leçon. Il y a du débat sur un budget qui, encore une fois, je le dis, est un budget d'urgence, qui est extrêmement difficile, 60 milliards d'économies…

APOLLINE DE MALHERBE
On va rentrer dans les détails.

MAUD BREGEON
C'est difficile. Mais qu'il y ait du débat, au fond, au sein d'une famille politique, et qu'on ne pense pas toujours tous pareil, qu'on ne soit pas dans cette logique de la pensée unique, ça me semble plutôt sain…

APOLLINE DE MALHERBE
Alors, justement, rentrons dans le détail du budget. Il est présenté cette semaine, c'est la prochaine épreuve pour le Premier ministre. Ce matin, le gouverneur de la Banque de France, François VILLEROY de GALHAU, alerte. Il dit : chacun doit arrêter de jouer au chamboule tout, avec les pistes d'économies, il y a 60 milliards à trouver, dont 25 milliards, probablement de hausses d'impôts. C'est le chiffre avancé par Les Echos. C'est beaucoup plus que prévu ?

MAUD BREGEON
D'abord, on est dans une situation qui est grave, et je pense qu'il faut poser les termes. Il faut qu'on arrive à partager le constat. On est dans une situation qui est grave, avec un déficit qui va dépasser les 6 % cette année et qui arriverait à 7 % l'année prochaine si on ne fait rien. On a quelques semaines pour constituer un budget d'urgence avec 60 milliards d'euros d'économies. C'est absolument colossal. On a mis, et le Premier ministre l'a fait, une proposition sur la table, une équation qui marche, avec, je le redis, 40 milliards d'euros de réduction de dépenses, ce qui est énorme, et 20 milliards d'euros environ de contribution exceptionnelle, ciblée et temporaire. Ça nous semble être un équilibre qui est juste, encore une fois, parce que si on n'arrive pas à passer cette marche qui est extrêmement haute, à la fin, c'est l'économie française qui serait mise en péril. Et ce qu'il faut bien comprendre, c'est que, moi, vous savez, j'ai conscience d'être porte-parole d'un budget extrêmement difficile et d'être porte-parole d'un budget de combat…

APOLLINE DE MALHERBE
Je le disais ce matin sur RMC, vous avez probablement le job le plus dur en ce moment, parce que pour pouvoir honnêtement l'assumer, c'est vrai que ce n'est quand même pas évident, et de slalomer entre les Macronistes, Emmanuel MACRON et Michel BARNIER, pas forcément facile…

APOLLINE DE MALHERBE
C'est difficile. Michel BARNIER dit : je préfère être impopulaire, qu'irresponsable. Mais je crois que l'intérêt du pays et que l'intérêt des Français, c'est qu'on maintienne cette trajectoire de redressement des finances publiques, parce que…

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, mais alors, comment est-ce que vous allez pouvoir tenir, vous m'avez dit : c'est ciblé…

MAUD BREGEON
C'est difficile à court terme…

APOLLINE DE MALHERBE
Non, mais attendez…

MAUD BREGEON
C'est difficile à court terme, mais à moyen terme…

APOLLINE DE MALHERBE
Je ne peux pas non plus entendre n'importe quoi, Maud BREGEON, vous avez dit : c'est ciblé et temporaire. Quand on écoute Michel BARNIER, lorsqu'il a annoncé les premières mesures, il a dit que ce serait les foyers les plus riches qui seraient mis à contribution et les entreprises qui ont les plus gros chiffres d'affaires. Sauf qu'entre temps, on découvre qu'il va y avoir le gel temporaire des pensions de retraite. On découvre qu'il va y avoir la remontée des taxes sur l'électricité, qu'il va y avoir un effort supplémentaire pour les collectivités locales. Ce n'est pas les Français les plus riches. Ce n'est pas ultraciblé, ça, c'est tous les Français.

MAUD BREGEON
Alors, prenons par exemple le cas de l'électricité. Et regardons deux petites secondes en arrière. On a traversé des crises, chacun s'en rappelle, la crise du Coronavirus, la crise de l'énergie, la crise de l'inflation. Et tout le monde s'accordait à dire à ce moment-là qu'il fallait multiplier les dépenses pour aider les Français et les entreprises. Nous l'avons fait, et je pense qu'il ne faut pas le regretter. Mais nous sommes aujourd'hui en sortie de crise. Ces crises sont derrière nous, et donc, il est normal que ce qui était des dépenses exceptionnelles de crise, et c'est le cas du bouclier tarifaire sur l'électricité, ne deviennent pas des dépenses pérennes. Parce que si, et c'est une manie française, on passe systématiquement des dépenses exceptionnelles en dépenses pérennes, on augmente petit à petit et significativement le déficit.

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, mais Maud BREGEON, il y a une question qui est de savoir si, alors, on va rentrer un peu dans la technicité, mais en effet, cette taxe, elle a été baissée, cette taxe sur les factures d'électricité, elle a été baissée, c'était le fameux bouclier tarifaire. Il y a une chose qui serait de la remonter au même niveau qu'avant crise, mais, il y en a une autre qui serait de la faire remonter plus haut qu'avant crise. C'est le scénario.

MAUD BREGEON
Alors, on discutera de l'atterrissage exact, cette taxe, c'est un peu technique…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais, est-ce que vous accepteriez, vous, Maud BREGEON…

MAUD BREGEON
C'est un petit peu technique…

APOLLINE DE MALHERBE
D'ailleurs, vous êtes vous-même ingénieure dans les questions d'énergie, donc, vous comprenez sans doute ça mieux quoi. Mais de manière tout à fait basique, vous accepteriez que ça remonte au-dessus du niveau d'avant ?

MAUD BREGEON
Non, la première chose, c'est que…

APOLLINE DE MALHERBE
Au-dessus du niveau d'avant ?

MAUD BREGEON
Pardonnez-moi. D'abord, les prix du marché de l'électricité ayant considérablement baissé du fait que la crise énergétique est derrière nous, les factures des Français et de tous ceux qui sont aux tarifs réglementés, ça représente 80 % des Français, baisseront quoiqu'il arrive en janvier prochain, d'environ une dizaine de pourcent. Cette fameuse taxe dont on parle, c'est un peu technique, c'est la TICFE…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais allez-y, prenez le temps, on a besoin de comprendre…

MAUD BREGEON
Elle est d'environ… elle est, en temps normal, d'environ 32 euros le mégawattheure, durant la crise, on l'avait baissée au minimum, à 0,5 euro, 50 centimes d'euro. On l'a déjà remontée en début d'année dernière, en janvier dernier, autour de 22 euros. Et donc, il s'agit de passer la marche d'après pour revenir à ce qui était…

APOLLINE DE MALHERBE
Pardon, je vous demande, la marche d'après, c'est quoi, est-ce que les 32 euros d'avant, c'est un plafond pour vous ?

MAUD BREGEON
Pour revenir à ce qui était le niveau initial, est-ce que ce sera un tout petit peu au-dessus, un tout petit peu en-dessous ? On en discutera. Le budget sera présenté jeudi prochain. Mais je le redis, l'objectif, c'est évidemment de préserver le pouvoir d'achat des Français…

APOLLINE DE MALHERBE
Vous ne nous dites pas ce matin…

MAUD BREGEON
Et je le redis, parce que je pense que c'est ce qui intéresse les gens, 80 % des Français verront leur facture d'électricité baisser en janvier prochain, et pour les 20 % restants, ils ont déjà vu cette facture d'électricité baisser parce qu'ils sont au prix de marché, et que le marché de l'électricité a déjà baissé depuis quelques mois…

APOLLINE DE MALHERBE
Pardon, Maud BREGEON, mais je voudrais juste comprendre, ce matin, vous n'êtes pas en mesure de nous promettre que cette taxe restera au niveau avant crise. Il y a toujours un scénario au moment où on se parle pour que cette taxe monte plus haut ?

MAUD BREGEON
Je suis en mesure de promettre que les factures d'électricité baisseront pour 80 % des Français, et que nous serons d'une grande vigilance à faire en sorte que, encore une fois, les classes moyennes qui travaillent, et c'est une ligne rouge et un axe absolu du Premier ministre, ne paient pas davantage qu'ils le devraient.

APOLLINE DE MALHERBE
Le gel temporaire des pensions de retraite, est-ce que c'est toujours sur la table ?

MAUD BREGEON
C'est toujours sur la table, et ce n'est pas une décision qui est une décision facile. Je voudrais d'abord dire une chose. Les retraites resteront indexées sur l'inflation. C'est une promesse de campagne que j'ai portée moi-même dans ma circonscription, à Anthony, à Châtenay-Malabry, à Bourg-la-Reine, à Sceaux, parce que c'est juste. Néanmoins, les retraites ont été revalorisées cette année de plus de 5 %. Elles l'ont été l'année précédente, et l'année encore d'avant. Point très important, les retraites ont augmenté davantage que l'inflation, et donc, on a massivement soutenu le pouvoir d'achat des retraités. Là, on est dans une période, je le redis, qui est très difficile, avec un budget d'urgence qui nécessite de demander parfois des efforts aux gens. Et donc on proposera, ce sera soumis…

APOLLINE DE MALHERBE
Je croyais que ça allait cibler les foyers les plus élevés…

MAUD BREGEON
Et ce sera soumis au débat, un décalage de six mois en maintenant l'indexation des retraites de l'inflation, mais un décalage de six mois. Maintenant, le premier ministre a ouvert une porte…

APOLLINE DE MALHERBE
Ça peut être discuté ?

MAUD BREGEON
On pourra évidemment discuter. Nous, on met sur la table…

APOLLINE DE MALHERBE
En fait, vous êtes dans la négo, c'est-à-dire, vous dites : on va mettre…

MAUD BREGEON
Mais, et c'est normal. Et c'est ça la méthode BARNIER. On met sur la table une équation qui marche, on met sur la table une équation qui marche. Maintenant, si les parlementaires ont des idées de réduction de dépenses supplémentaires par rapport à ce qu'on proposera pour permettre de rééquilibrer certains efforts qui seraient demandés aux entreprises, qui seraient demandés aux Français les plus aisés, et qui seraient demandés aux retraités, mais on écoutera l'intégralité de ces propositions.

APOLLINE DE MALHERBE
Sauf qu'il y en a pour tout le monde, là, c'est-à-dire qu'on a quand même l'impression…

MAUD BREGEON
Et on donnera un avis favorable…

APOLLINE DE MALHERBE
Les retraités, les malades, 3 euros de plus pour les consultations chez le médecin. Est-ce que c'est sur la santé qu'il faut faire des économies ?

MAUD BREGEON
Alors, là, je vous renverrai à la présentation du budget qu'on fera jeudi prochain, demain, jeudi soir, avec…

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, c'est ça, c'est ce que j'allais dire, j'étais en train de réfléchir, nous sommes mercredi…

MAUD BREGEON
Avec mes collègues Antoine ARMAND et Laurent SAINT-MARTIN. On sera extrêmement vigilant, je le redis, à protéger les Français. Et en même temps, c'est très difficile. On est dans une situation…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais ça ne correspond pas au deal de départ. C'est-à-dire que quand Michel BARNIER dit "On va cibler les foyers les plus riches, les entreprises qui font le plus d'argent" et qu'on se retrouve finalement à payer 3 euros de plus pour aller chez le médecin ; ce n'est pas exactement ce qui était prévu.

MAUD BREGEON
D'abord, je ne confirme pas cette information ce matin. Et il est bien prévu et c'est l'objectif, de faire contribuer d'abord ceux qui le peuvent le plus. On en parle un peu moins, mais la contribution exceptionnelle est…

APOLLINE DE MALHERBE
RMC a vu, noir sur blanc, que c'était une des pistes évoquées par le Gouvernement.

MAUD BREGEON
D'abord, les contributions exceptionnelles et ciblées, elles concernent les Français qui gagnent plus de – pour un couple – 500 000 euros nets par an. Je pense qu'on peut s'accorder, toutes les deux, pour dire que 500 000 euros nets par an, ce n'est pas tout à fait la classe moyenne.

APOLLINE DE MALHERBE
Bien sûr, mais la santé, c'est tout le monde.

MAUD BREGEON
Les entreprises dont le chiffre d'affaires dépasse 1 milliard d'euros. On parle aussi des grosses entreprises qui le peuvent le plus. Maintenant, il y aura un débat… Il y aura un débat à l'Assemblée nationale. Vous savez, nous, on assume d'arriver avec des propositions qui ne sont pas figées, qui ne sont pas fixées, sur lesquelles on peut discuter. Parce qu'on respecte le Parlement et qu'au fond, c'est ça, le parlementarisme. La question qui viendra ensuite, c'est : est-ce qu'on partage un constat ? Et il faut peut-être en revenir là.

APOLLINE DE MALHERBE
Mais est-ce que ça veut dire que si tout ça évolue…

MAUD BREGEON
Est-ce que ça, c'est extrêmement important, Apolline De MALHERBE parce que…

APOLLINE DE MALHERBE
Est-ce que ça voudrait dire que Michel BARNIER pourrait ensuite dire "Ce budget, tel qu'il ressort des débats avec les parlementaires, ne me convient pas" ? C'est possible, ça ?

MAUD BREGEON
D'abord, je reviens sur l'histoire du constat parce qu'il y a beaucoup de discussions ici ou là. Est-ce qu'on est d'accord, ou pas, pour dire que plus de 6 % de déficit cette année, ce n'est pas acceptable ; que 7 % l'année prochaine, si on ne fait rien, ça ne l'est pas non plus ? Et donc, il y a nécessité de faire un effort colossal. Oui ou non ?

APOLLINE DE MALHERBE
J'ai l'impression que là-dessus, vous êtes d'accord. Mais simplement, certains disent que ce n'était pas tant que ça.

MAUD BREGEON
Non mais c'est une vraie question. Est-ce que d'abord, on partage le constat ?

APOLLINE DE MALHERBE
Avec qui vous posez cette question ?

MAUD BREGEON
À l'intégralité des groupes, à l'Assemblée nationale et au Sénat. Et si la réponse est oui, il faut apporter des solutions. Nous, on fait des propositions…

APOLLINE DE MALHERBE
Moi, je vous repose la question. Je vous repose la question, Maud BREGEON. Depuis tout à l'heure, vous me dites que ce sont des propositions qui seront discutées, amendées, votées au Parlement. Si ça ne vous convient pas, est-ce que Michel BARNIER ressortira le budget initial et passera par le 49.3 ?

MAUD BREGEON
Notre objectif, c'est que, le débat…

APOLLINE DE MALHERBE
Parce qu'en fait, tout ça, c'est un peu théorique, le débat, puisqu'on sait qu'à la fin…

MAUD BREGEON
Ce n'est pas du théorique.

APOLLINE DE MALHERBE
À la fin, c'est le 49.3 qui gagne quand même.

MAUD BREGEON
Non. Parce que notre objectif et notre engagement, c'est de laisser se faire le débat autant que possible pour permettre aux parlementaires, comme on le souhaite, de proposer, de se positionner aussi sur les pistes du Gouvernement, de faire évoluer le budget…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais quand Gérald DARMANIN juge, ce budget, je cite, inacceptable.

MAUD BREGEON
Ce budget, c'est un budget d'urgence. On a quelques semaines, quelques semaines – c'est historique – pour présenter un budget qui intègre 60 milliards d'euros de déficit. Notre responsabilité, c'est de redresser les finances publiques parce qu'encore une fois, redresser les finances publiques à long terme, c'est l'intérêt du pays. Ne pas le faire, c'est envoyer le pays dans le noir.

APOLLINE DE MALHERBE
Et je le disais parfois, c'est difficile pour vous puisque vous êtes ministre non seulement du… enfin, vous êtes la porte-parole du Premier ministre, mais aussi de ce Gouvernement. Et dans ce Gouvernement, il y en a qui disent que les comptes n'y sont pas. Je voudrais vous écouter Didier MIGAUD, le ministre de la Justice.

DIDIER MIGAUD, MINISTRE DE LA JUSTICE
Le budget qui vous sera présenté ne sera pas satisfaisant pour nous. Je souhaite bien évidemment qu'un réajustement puisse intervenir. Nous sommes mobilisés pour que ces réajustements soient le plus haut possible, pour faire en sorte que la plus grande partie des engagements qui ont été pris puissent être tenus. Notre pays n'a jamais eu autant besoin de justice. On ne pourra pas faire plus de justice avec moins de moyens pour la justice.

APOLLINE DE MALHERBE
Il est numéro deux du Gouvernement.

MAUD BREGEON
Vous verrez que dans le budget présenté demain, il y aura une attention particulière sur trois sujets qui sont les sujets régaliens sur la Justice, sur l'Intérieur et sur la Défense. Parce que c'est une demande…

APOLLINE DE MALHERBE
Il faudrait lui dire ; il ne le sait.

MAUD BREGEON
C'est une demande qui est une demande majeure des Français. Et on a parfaitement conscience, et le Premier ministre a parfaitement conscience des moyens supplémentaires nécessaires dans la Justice.

APOLLINE DE MALHERBE
Normalement, il y a 1 800 greffiers qui devraient être embauchés, 1 500 magistrats supplémentaires. Si le budget n'est pas à la hauteur, la Justice ne sera pas à la hauteur.

MAUD BREGEON
Notre engagement, ce sera de maintenir une hausse des effectifs, sur la Justice, sur l'Intérieur et sur la Défense, parce que ça correspond d'une part à des besoins, mais aux attentes des Français. On a tous entendu durant nos campagnes législatives. J'étais moi-même candidate dans ma circonscription, les gens nous demandent plus de justice, plus d'ordre et on mettra un budget en conséquence face à ça. Maintenant, je le redis, il va falloir que chacun accepte aussi de faire des efforts et ne reste pas dans son couloir. C'est, je crois, notre responsabilité…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais ça veut dire quoi ça ?

MAUD BREGEON
Notre responsabilité…

APOLLINE DE MALHERBE
"Ces Français" qui ?

MAUD BREGEON
Notre responsabilité collective au sein du Gouvernement, à l'Assemblée nationale, avec les collectivités territoriales, dont j'entends qu'elles réagissent déjà, et je le comprends. D'ailleurs, nous, et je tiens à le dire ce matin…

APOLLINE DE MALHERBE
Ils disent que c'est inacceptable. Les 5 milliards demandés aux collectivités, "Nous n'accepterons aucune de ces mesures d'économies présentées dans le budget". Ça c'est ce que disent l'Association des maires de France.

MAUD BREGEON
Non, je répondrai deux choses. La première, et je cite ce que m'a dit le Premier ministre il y a quelques jours : nous ne ferons pas contre les collectivités territoriales, nous ne ferons pas sans les collectivités territoriales. Nous ferons avec les collectivités territoriales. Nous avons un respect infini pour l'ensemble des élus locaux et pour les associations. C'est un…

APOLLINE DE MALHERBE
C'est une drôle de manière de les respecter, de leur demander 5 milliards.

MAUD BREGEON
La deuxième chose, c'est de rappeler que les collectivités territoriales ont été largement aidées durant les crises que j'ai déjà citées. Donc on discutera avec elles sur comment est-ce qu'on peut ensemble faire des efforts. Mais je crois que les Français comprennent que face à ce budget, encore une fois de crise extrêmement difficile, on a besoin d'avoir des efforts qui soient des efforts équilibrés et qui soient des efforts partagés. Donc, ne surréagissons pas et moi j'invite chacun à venir autour de la table, que ce soit au sein du Parlement, avec les collectivités et tous ceux qui seront parties prenantes de ce budget.

APOLLINE DE MALHERBE
Ça tombe bien, parce que le ministre de la Justice, qu'on entendait tout à l'heure demander plus d'argent, est justement à ce micro demain matin. On verra si vous arrivez à convaincre les ministres eux-mêmes que les moyens seront là pour eux.

MAUD BREGEON
Moi je connais mes collègues du Gouvernement et je pense qu'on partage tous un objectif commun, c'est de faire avancer le pays, d'avancer ensemble et de trouver des chemins de compromis dans une période qui n'est pas facile mais qui est, je crois, cruciale pour le pays.

APOLLINE DE MALHERBE
Merci Maud BREGEON d'être venue ce matin répondre à mes questions.

MAUD BREGEON
Merci à vous.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes porte-parole du Gouvernement.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 10 octobre 2024