Conférence de presse de Mme Maud Bregeon, ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement, sur les droits sociaux des personnes détenues et la ratification de l'ordonnance portant partie législative du code pénitentiaire, la revalorisation anticipée du Smic et le plan budgétaire et structurel à moyen terme (PSMT) de la France pour 2025-2029, Paris le 23 octobre 2024.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Maud Bregeon - Ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement

Circonstance : Conférence de presse à l'issue du Conseil des ministres

Texte intégral

Bienvenue au compte rendu de ce conseil des ministres.

Compte rendu durant lequel la faculté a été donnée au Premier ministre, à titre provisoire, d'utiliser le 49.3, faculté qui est valable pour le projet de loi de finances, le projet de loi de finances de la Sécurité sociale et le projet de loi de finances de fin de gestion. C'est une possibilité constitutionnelle. Mais l'objectif du Premier ministre, Michel BARNIER, n'a pas changé, celui de laisser toute sa place au débat, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, et de le faire dans le respect du Parlement qui est le sien. C'est donc, je le redis encore une fois, à titre préventif. L'objectif du Gouvernement n'est pas d'utiliser le 49.3, mais bien de laisser les débats se tenir dans les deux chambres, à l'Assemblée et au Sénat.

Du reste, l'ordre du jour s'articulait autour de quatre grands thèmes : la justice, l'emploi, l'international et l'économie. En matière de justice, Didier MIGAUD a tout d'abord présenté un projet de loi ratifiant l'ordonnance relative aux droits sociaux des personnes détenues. Ce texte poursuit l'ambition d'améliorer la réinsertion des personnes détenues et de lutter contre la récidive.

Les objectifs sont multiples. Premièrement, leur permettre de bénéficier de droits à la formation. Deuxièmement, leur donner une couverture pour les accidents du travail dans le cadre pénitentiaire. Troisièmement, améliorer l'accès à l'emploi des détenus en situation de handicap, quatrièmement, et enfin, lutter contre les discriminations et le harcèlement.

Le garde des Sceaux, toujours, a ensuite présenté un second projet de loi ratifiant l'ordonnance relative à la poursuite de la codification du droit pénitentiaire. Le président de la République a, quant à lui, insisté sur le fait que ces deux textes étaient clés pour la réinsertion.

Concernant l'emploi, la ministre du Travail et de l'emploi, Astrid PANOSYAN-BOUVET, a présenté le décret de revalorisation anticipé du Smic. Vous le savez, le Premier ministre l'a annoncé dans son discours de politique générale. Le Gouvernement a décidé d'anticiper la revalorisation annuelle du Smic. Cette augmentation interviendra au 1er novembre de cette année au lieu du 1er janvier 2025. Pour entrer dans le détail, c'est une revalorisation du 1er novembre qui sera de 2 % et qui porte le Smic à 1 426 euros nets. Cette revalorisation anticipée n'est qu'une première pierre et j'insiste là-dessus pour soutenir les salariés rémunérés au voisinage du Smic. Ce ne sera évidemment pas la seule action du Gouvernement en la matière.

Et j'insiste sur le fait que le Smic ne doit pas être un salaire à vie. Nous allons inciter les employeurs à revaloriser les salaires. Ce sera notamment l'objet de la réforme des allégements de charges que nous présenterons dans le projet de budget de la Sécurité sociale. De même que nous n'oublions pas que nombre de Français sont employés dans des branches professionnelles dont le salaire minimum est inférieur au Smic. Et Astrid PANOSYAN rencontrera les branches concernées pour accélérer les négociations.

Le Premier ministre a quant à lui ajouté vouloir travailler, vous le savez, sur l'intéressement et la participation, qui constitue une autre des pierres angulaires au soutien des salariés et du pouvoir d'achat.

J'en viens au point international. Jean-Noël BARROT est revenu sur son déplacement de deux jours en Ukraine et a insisté sur le fait que la conférence sur la sûreté et la sécurité nucléaire, qui a réuni une soixantaine de pays, dont l'Inde, le Brésil et la Chine, avait été très appréciée. Il a fait un point sur le Proche-Orient et a mentionné la mort du leader Yahya SINWAR, la qualifiant de succès tactique pour les Israéliens, qui doit, et vous le savez, c'est la position de la France, mener vers la fin du conflit. Est venu ensuite un point sur les attaques qui continuent contre la FINUL. Et là-dessus, notre collègue des armées Sébastien LECORNU a insisté sur le fait que les violences aux abords des différents postes d'observation de la FINUL continuaient et étaient tant inquiétants qu'inacceptables. Enfin, les 70 pays, vous le savez, seront réunis à l'occasion de la conférence de soutien au Liban qui se tiendra demain à Paris, avec un triple objectif : politique, humanitaire et institutionnel. Dernier point concernant le Conseil de l'Union européenne : il a été souligné une convergence des 27 autour d'une mise en œuvre rapide du pacte Asile immigration et pour la révision de la directive retour.

Enfin, en quatrième point sur l'Économie. Le ministre de l'Économie et des Finances et de l'Industrie, Antoine ARMAND, a présenté le plan budgétaire structurel à moyen terme pour la période 2025-2029, qui sera transmis au Parlement et soumis à la Commission européenne avant le 31 octobre 2024. C'est un plan qui détaille la trajectoire budgétaire française sur les quatre prochaines années, conformément aux engagements du Premier ministre Michel BARNIER. Il prévoit donc un objectif de retour du déficit sous la barre des 3 % du produit intérieur brut en 2029, 3 % qui, je le rappelle, n'est pas un chiffre qui tombe de nulle part, mais qui est bien le seuil qui nous permet de stabiliser notre dette.

Laurent SAINT-MARTIN, ministre chargé du Budget, a quant à lui insisté sur le fait que ce cadre pluriannuel était nécessaire pour envoyer un message de crédibilité et que cette trajectoire pluriannuelle était ce qui nous permettait d'éviter l'austérité précisément cette année. Il a insisté notamment sur deux outils. Le premier, c'est l'importance de la revue des dépenses pour chaque ministère et le second, c'est la nécessité de mener des réformes structurelles dans les mois et les années à venir qui devront permettre des économies, de telle sorte que les efforts exceptionnels qui sont intégrés dans ce projet de loi de finances restent bien des efforts exceptionnels. Là-dessus, le Premier ministre a lui-même insisté sur la nécessité d'inscrire notre action dans un plan d'action de réforme pour le pays et de ne pas se cantonner à une réflexion budgétaire et comptable. Je reprends ses mots, il faut relever la ligne d'horizon et ce sera notamment au programme du séminaire gouvernemental qui se tiendra le lundi 4 novembre 2024.

Le président de la République a quant à lui appelé à continuer à œuvrer pour que le produit intérieur brut augmente, pour l'attractivité et la croissance française et insister sur notre besoin d'améliorer notre capacité en France à innover et plus globalement sur l'importance de mener des réformes dans la durée. Et donc, nous aurons l'occasion d'en discuter au sein du Gouvernement au séminaire gouvernemental que j'ai évoqué. L'objectif est vraiment de donner de la perspective sur l'action qui doit être la nôtre, au-delà de l'exercice très difficile qui débute, à savoir l'examen du budget, mais bien d'inscrire une vision dans le temps, long avec des réformes structurelles qui devront avoir lieu l'année prochaine et que le Premier ministre et le Gouvernement auront l'occasion de détailler et d'expliciter dans les semaines à venir.

Je vous remercie et je passe à la partie questions.


Thomas DESPRÉ
Bonjour, Madame la ministre. Thomas DESPRÉ, RTL. Avant de passer aux questions, permettez-moi un propos introductif au nom de l'association de la presse présidentielle. Jeudi dernier, depuis Bruxelles, le président de la République a gravement mis en cause la déontologie de la presse entière en fustigeant la publication de propos qu'il a lui-même tenu lors du Conseil des ministres. Ce propos, qu'il n'a d'ailleurs pas démenti, a été publié, après avoir été plusieurs fois recoupés par plusieurs rédactions. Mettre en cause le professionnalisme et l'éthique des journalistes, quand ils font honnêtement leur travail, afin de mettre la pression sur leurs sources notamment, nous semble une dérive dangereuse. De plus, il nous apparaît très grave que le Président estime, ce sont ses mots, que ce qui n'est pas dans un communiqué ou un compte rendu n'existe pas. Notre travail ne peut se résumer à reprendre les déclarations officielles, il est aussi, et surtout, de permettre aux concitoyens de savoir ce qu'il se passe une fois les micros coupés. Notre travail est de pouvoir enquêter, librement, sur les coulisses du pouvoir pour permettre à chacun de se faire une opinion. Cette liberté fondamentale en démocratie ne saurait être remise en cause au gré des tempêtes politiques. L'association de la presse présidentielle le rappelle donc avec fermeté ce midi, la définition du journalisme ne sera jamais une prérogative présidentielle. Et dans ces temps où les tentations populistes mettent à mal la liberté d'informer, notre association appelle à respecter le travail des journalistes. Merci beaucoup de votre attention. J'en viens à ma première question. Hier, le Gouvernement s'est fait battre dans un amendement sur la taxation temporaire sur les très hauts revenus à l'Assemblée nationale quelques heures plus tôt. Le socle commun n'était pas parvenu à désigner un candidat commun pour la vice-présidence de l'Assemblée nationale. Est-ce que le socle commun est encore commun aujourd'hui ?

Maud BREGEON
Je vous remercie. Et j'entends que votre première déclaration n'appelait pas de réponse. Mais…

Journaliste
Pas spécialement.

Maud BREGEON
…si vous me permettez néanmoins de rebondir dessus, parce que c'est un sujet qui, pour vous, pour nous et pour l'ensemble des Français, est extrêmement important. Je voudrais commencer par dire que personne, ni le président de la République, ni le Premier ministre, ni le Gouvernement, n'a remis et ne remettra jamais en cause la liberté de la presse. Vous êtes un des piliers du bon fonctionnement de notre démocratie. J'ai eu l'occasion de le dire lors de mes premiers propos liminaires, lors du premier compte rendu de Conseil des ministres, et je tenais à vous le redire, préciser aussi, que la prise de parole du président de la République, à laquelle vous faites référence, n'était pas une mise en cause, c'était une mise au point, d'abord, à l'égard de ses ministres, qui l'a invité à un professionnalisme. C'est bien normal. Ce qui se dit en Conseil des ministres peut être parfois, et pour partie, confidentiel. Et donc il nous appartient, à nous, de respecter, encore une fois, sur certains sujets, et lorsque c'est nécessaire, de respecter cette confidentialité. Concernant les journalistes, encore une fois, il ne s'agit pas de remettre en cause la liberté et l'indépendance des journalistes, juste de rappeler qu'un propos rapporté, que vous êtes libre d'utiliser, parce qu'encore une fois, c'est la liberté éditoriale, mais qu'un propos rapporté ne vaut pas un propos officiel. Et je pense que c'est peut-être là la nuance, et qu'un propos rapporté, et là, ça vaut, je pense, davantage, pour les ministres, quand il est sorti de son contexte, devient un propos qui change de couleur, voilà. Mais je voudrais vraiment vous dire qu'il n'y a, en tout cas j'espère, aucun malentendu sur l'attachement qu'on porte toutes et tous à la liberté de la presse, au bon fonctionnement de la démocratie auquel vous participez, et qui est absolument nécessaire pour les années à venir. Et vous le dites dans des moments où le complotisme et le populisme prennent parfois le pas sur la rationalité des échanges et sur l'explication que vous faites au mieux au quotidien et je vous en remercie.

Journaliste
Je rappelle et qui est donc important.

Maud BREGEON
En tout cas, je me permets d'y répondre, parce que c'est un sujet qui est important pour l'ensemble des Français et pour notre pays sans transition. J'en viens…

Journaliste
(inaudible)

Maud BREGEON
J'en viens maintenant à votre question. D'abord, je ne peux évidemment qu'inviter les uns et les autres à faire preuve de solidarité au sein de ce socle commun. On vient de partis politiques, de familles politiques parfois différentes, on a des histoires, on a des cultures politiques différentes. Mais si on s'accorde autour, tous autant qu'on est aujourd'hui, à œuvrer autour de Michel BARNIER, c'est parce qu'on partage des plus petits dénominateurs communs. Et moi, je vois au quotidien, à l'Assemblée nationale, lorsque je discute avec mes anciens collègues au sein du Gouvernement, que ces plus petits dénominateurs communs, au fond, ce qui fait l'essentiel et qui justifie l'union qui est la nôtre aujourd'hui, sont bel et bien réels pour le pouvoir d'achat, pour le redressement des comptes publics, pour la sécurité des Français, sur le volet européen et international aussi. Il y a probablement besoin de faire un effort. L'unité, ça ne se décrète pas. L'unité, ça se construit. Les compromis ne se décrètent pas. Il faut trouver des chemins de compromis. Et le Premier ministre continuera à agir en ce sens, à écouter les uns et les autres, à respecter aussi des sensibilités qui parfois, sont différentes. Et moi, je ne vais pas vous dire qu'on est un Gouvernement de clones et que l'intégralité des députés qui composent ce socle commun pensent toujours, nécessairement, exactement la même chose. Mais pour autant, face à la situation extrêmement difficile à laquelle on est confronté sur le plan budgétaire, plus globalement sur le plan politique, je ne peux qu'inviter encore une fois chacun à travailler au quotidien pour cette unité. Je remarque que ça n'a pas nécessairement toujours été suffisamment le cas. Vous faisiez référence.

Journaliste
Ces dernières 24 heures.

Maud BREGEON
Voilà. Ces dernières 24 heures mais depuis quelques temps, vous avez évoqué la question de l'élection de la vice-présidente. Vous auriez aussi pu évoquer celle de la présidente de la Commission des affaires économiques. Il ne m'appartient pas, en tant que membre de l'exécutif, de commenter outre mesure ce qui se passe à l'Assemblée nationale. Mais pour autant, je pense que les Français ne comprendraient pas que face à la situation qui est la nôtre, on ne mette pas tout en œuvre pour garantir l'unité, encore une fois au service du pays, au service des préoccupations des Français et contre l'instabilité institutionnelle.

Nicolas LAURENT
Nicolas LAURENT, TF1, LCI. Est-ce que le Président a livré son état d'esprit concernant l'emploi éventuel d'un 49.3 pour le budget ?

Maud BREGEON
Non, il a simplement évoqué le fait qu'il était probablement plus – ce ne sont pas ces mots – mais probablement plus facile et plus sain de pouvoir l'utiliser, encore une fois, l'évoquer à titre préventif, mais il ne s'est pas positionné sur le fond. Il a simplement rappelé qu'il revenait au Premier ministre de décider d'en faire usage ou non et de décider le moment de cet usage s'il devait advenir, tout simplement.

Nicolas LAURENT
Et pour que les débats se poursuivent, quitte à perdre sur certains amendements ?

Maud BREGEON
Oui, alors c'est une autre question. Mais j'anticipe peut-être des questions à venir. Le Gouvernement, en faisant ce choix, celui de laisser le débat se poursuivre, accepte aussi des votes qui n'iront pas nécessairement dans le sens de notre copie budgétaire initiale. Mais c'est ça, le respect du Parlement. On ne peut pas dire d'un côté qu'on veut respecter le parlementarisme et en même temps refuser des votes souverains, puisqu'ils viennent des parlementaires qui n'iraient pas dans notre sens. C'est aussi la beauté du débat, voilà. Et des fois, sur des amendements, on gagne ; des fois, on perd. Mais à la fin, eh bien c'est aussi ça, le fonctionnement de la démocratie.

Nicolas LAURENT
Merci.

Oscar TESSONNEAU
Bonjour, Madame BREGEON, Oscar TESSONNEAU pour Rightbrain Magazine. Ce matin, Mathieu ARON, qui est journaliste au Nouvel Observateur, décryptait l'impact qu'aurait ce nouveau budget sur les classes moyennes, notamment à travers 3 points. Donc, le premier, c'est l'augmentation de leur facture d'électricité, l'augmentation des tarifs des consultations médicales, qui, pour certaines, passeront à 30 euros, et également des changements sur les politiques de leasing avec la réduction des aides pour l'accompagnement au passage d'un véhicule thermique avec un moteur thermique vers l'électrique. Est-ce que vous continuez d'affirmer aujourd'hui que ce budget est plutôt favorable aux classes moyennes françaises ? Pour rappel, il donne une estimation dans son article. On parle de personnes qui gagnent entre 1 600 et 2 900 euros par mois.

Maud BREGEON
Tout sera fait pour préserver les classes moyennes et les classes populaires qui travaillent. Maintenant, je ne vais pas faire comme si ce budget était un budget facile. 6,1 % de déficit, enfin, vous connaissez les chiffres, 60 milliards d'euros à trouver en un temps qui est absolument record avec des choix que nous avons dû faire, qui sont des choix difficiles, qui sont des choix parfois impopulaires, des choix qui ne nous font pas plaisir, mais qu'on estime être nécessaires parce qu'à la fin, rétablir les finances publiques, c'est travailler à la souveraineté du pays et c'est à moyen et à long terme protéger les Français. Ça, c'est la première chose. La seconde, je le redis, c'est que l'essentiel de l'effort qui est nécessaire, et donc des 60 milliards, repose sur la réduction des dépenses à hauteur de deux tiers. Et sur le tiers restant qui effectivement, touche en partie à la fiscalité. Nous avons travaillé à concentrer cet effort autant que possible sur des contributions ciblées et exceptionnelles des ménages les plus fortunés. Concernant l'électricité, il y a effectivement l'augmentation d'une taxe et donc de la TICFE, c'est un peu technique, qui est présentée dans la copie initiale. Je rappelle que l'État a déboursé 50 milliards d'euros dans le bouclier tarifaire ces 3 dernières années et qu'il convient donc de revenir à un niveau de fiscalité qui était au moins le niveau d'avant crise énergétique. On l'oublie lorsque c'est derrière nous, mais l'État est allé jusqu'à prendre en charge près de la moitié des factures d'électricité des Français. Et donc, il est normal, en tout cas, nous estimons légitime au regard de la situation budgétaire qu'est la nôtre, de revenir à une situation d'avant crise a minima, mais ça fera l'objet, encore une fois, je le redis des discussions au sein du Parlement. Nous, on a… encore une fois, on met un cadre sur la table qui est celui de trouver 60 milliards d'euros pour revenir à un déficit autour de 5 % l'année prochaine, avec une équation qui fonctionne et le débat parlementaire qui va continuer à se tenir dans les jours et dans les semaines à venir devra permettre d'adapter et de modifier en partie ce budget.

Oscar TESSONNEAU
Un tout dernier point sur cette question de financement. Donc il a été acté par les députés de gauche du Nouveau Front populaire, que ce financement passerait par une augmentation des recettes et notamment avec des taxes que vous avez mentionnées sur les grandes fortunes et les entreprises ayant un nombre considérable de salariés, est-ce qu'il y a dans les groupes politiques aujourd'hui une position à ces mesures qui ont été adoptées et soutenues par le Nouveau Front populaire pour soutenir la transition écologique et des politiques sociales ?

Maud BREGEON
Encore une fois, nous, on propose un cadre qui fonctionne avec ces 2/3, 1/3 dont j'ai évoqué. Non, mais plus globalement, quand je regarde les propositions qui sont celles du Nouveau Front Populaire, ça correspond à 40 milliards de taxes supplémentaires. Nous estimons qu'un projet qui repose essentiellement et majoritairement sur davantage de taxes et davantage d'impôts qui toucheront in fine les classes moyennes, ce n'est pas un projet qui est souhaitable et ce n'est pas un projet qui est viable pour le pays. Voilà. Et donc, moi, je ne peux qu'inviter le Nouveau Front Populaire à sortir de son obsession fiscale qui touchera à la fin, les classes moyennes et les classes populaires.

Bérénice GABRIEL
Bonjour. Bérénice GABRIEL, pour Mediapart. On l'a vu, le taux de pauvreté en France augmente. Le 9 octobre, le collectif Alerte a publié un rapport dans lequel il estime que le coût de non-traitement, justement, de la pauvreté s'élève à 67 milliards d'euros par an, donc pour l'État, et que cette somme pourrait être économisée avec un investissement social massif. Du coup, j'ai une petite question sur comment on peut justifier les baisses des crédits de paiement, par exemple, du programme 304 sur l'inclusion sociale et la protection de personnes ? Donc, c'est 2 % cette année, la baisse, notamment aussi de la lutte contre l'habitat indigne, enfin, les crédits de paiement pour la lutte contre l'habitat indigne, pardon, 7 millions d'euros. Ou encore la baisse des moyens de France Travail, le gel de l'AME et la baisse des places d'hébergement d'urgence.

Maud BREGEON
Alors, je ne voudrais pas balayer votre question, parce que la question de la pauvreté en France est évidemment primordiale et préoccupante. Je voudrais insister sur le fait que nous avons mis un point d'honneur, par exemple, à maintenir les revalorisations des minima sociaux, de l'ensemble des minima sociaux, je pense notamment au minimum vieillesse, mais pas que. Et que nous serons extrêmement vigilants, dans toutes les décisions prises, à sanctuariser les budgets qui servent les Français les plus modestes et les plus en difficulté. Je ne rentrerai pas, je vous le dis très sincèrement, parce que je n'ai pas les réponses dans l'ensemble des points que vous venez de détailler. Mais je m'engage à revenir vers vous là-dessus.

Bérénice GABRIEL
Et du coup, en termes de volonté, c'est-à-dire que là, on est en train de nous alerter sur le fait que ne pas financer, enfin, ne pas financer avec un gros investissement, la pauvreté risque de nous coûter plus cher. On est en train de dire qu'on essaie de... Ce n'est pas l'austérité, on essaie de maîtriser les budgets. Il ne faut pas qu'on dépasse (inaudible) PIB, voilà. Est-ce que du coup, on ne pourrait pas investir plus dans la pauvreté qui à long terme nous coûterait moins cher, réduirait c'est 67 milliards qui s'évaporent et qui nous coûtent plutôt que, bah en fait que de baisser ou de mettre un petit peu plus de millions dans l'aide alimentaire. Enfin, est-ce que là, ce n'est pas le moment de faire un grand plan d'investissement pour lutter contre la pauvreté ?

Maud BREGEON
Le Parlement sera le lieu pour avoir ces débats. Pour autant, on est un des pays les plus redistributifs pour donner qu'un seul exemple. L'Assurance maladie restera après ce budget, un des systèmes de remboursement les plus généreux au monde. Le reste à charge en France est un des plus faibles de l'ensemble des pays de l'OCDE. Pour ne prendre que l'exemple de la santé, mais qui est primordial, je pense, notamment quand on parle des personnes précaires. On continue à investir sur le logement, notamment pour les primo-accédants. Ma collègue ministre du Logement a eu l'occasion d'en parler ces dernières heures et ces derniers jours. Donc, j'entends parfaitement votre point, mais je ne voudrais pas laisser penser que le Gouvernement abandonne les Français les plus précaires. Et c'est précisément pour ça qu'on a assumé, et ça nous a été reproché, mais de demander d'abord des efforts aux entreprises qui font le plus de profits et d'abord des efforts aux Français les plus fortunés. La non-hausse d'impôts n'est pas un dogme. Et nous, on estime normal et légitime de demander davantage aujourd'hui à ceux qui le peuvent le plus, précisément pour continuer à protéger et à œuvrer pour les Français qui en ont le plus besoin. Alors, on peut estimer, et c'est une question qu'on peut se poser, que ça ne va pas forcément assez loin. Et pour autant, les choix budgétaires qui sont faits aujourd'hui, tout est mis en œuvre pour ne pas mettre à contribution ceux qui aujourd'hui ont déjà beaucoup de mal à vivre.

Léopold AUDEBERT
Bonjour. Léopold AUDEBERT pour BFM TV. J'avais une question concernant cette actualité dont on parle beaucoup depuis la semaine dernière. Le militant écologiste Paul WATSON qui demande au président de la République de lui accorder l'asile politique et ces dernières heures, il y a encore une mobilisation autour de cette actualité. Brigitte BARDOT, qui notamment a écrit une lettre aussi pour demander au Président de la République que cet asile politique soit accordé. Est-ce qu'on a des nouvelles par rapport à ça ?

Maud BREGEON
Non. Pour tout vous dire, j'ai essayé de venir en conseil des ministres avec une réponse à vous formuler là-dessus, mais je n'en ai pas plus. Je néanmoins redis à titre personnel l'admiration que j'ai pour son action et pour cette cause, mais il n'y a pas aujourd'hui de décisions prises, donc je ne suis pas en mesure de vous la communiquer.

Journaliste
Merci.

Simon LE BARON
Bonjour Madame la Ministre, Simon LE BARON pour France Inter. Est-ce que vous avez des précisions à nous apporter sur la feuille de route confiée à Gérard LARCHER et Yaël BRAUN-PIVET sur leur mission concernant la Nouvelle-Calédonie et sur le calendrier également ? On parle d'une visite sur place des deux présidents de l'Assemblée et du Sénat la deuxième semaine de novembre. Est-ce que c'est le calendrier qui est retenu ?

Maud BREGEON
Je n'ai pas de confirmation à apporter sur ce calendrier, mais ça interviendra effectivement dans un temps proche et donc dans les semaines à venir. L'objectif de fond, et sans rentrer dans le détail de la feuille de route parce que je ne l'ai pas aujourd'hui, c'est de renouer le dialogue. Après les violences que vous avez observées depuis la métropole des dernières semaines et des derniers mois, le Gouvernement, le précédent Gouvernement, a eu d'abord comme objectif légitime de rétablir l'ordre, parce que de telles violences sur un territoire qui, je le rappelle, malgré tout, a choisi par 3 fois de rester dans la République française, ne sont évidemment pas acceptables. Et donc il était légitime de notre part d'assurer d'abord la sécurité des biens et des personnes. Maintenant, l'heure est à un retour au dialogue entre l'ensemble des parties prenantes. Le déplacement sur place de Yaël BRAUN-PIVET et de Gérard LARCHER n'est pas uniquement symbolique, mais est un signal fort qui est envoyé en termes d'implication de l'État et de la représentation nationale. Voilà.

Simon LE BARON
Il y a eu une réunion, justement, à ce sujet avec le Président et le Premier ministre, Yaël BRAUN-PIVET et Gérard LARCHER, hier soir à l'Élysée. Le Président et le Premier ministre n'ont pas évoqué ce sujet ce matin en conseil ?

Maud BREGEON
Non.

Simon LE BARON
Merci beaucoup.

Elizabeth PINEAU
Bonjour, Elizabeth PINEAU de l'agence Reuters. Je me fais écho du Rapport annuel du Conseil économique, social et environnemental à propos de la santé des Français qui semblent fatigués et lassés, y compris par la démocratie. La moitié d'entre eux serait favorable à un régime plus autoritaire. Qu'est-ce que cela vous inspire ?

Maud BREGEON
Alors, moi, je n'ai pas à commenter la véracité de cette étude, que je n'ai pas eu le temps de lire pour être très sincère avec vous, à proprement parler. Mais néanmoins, ça doit nous interroger. J'ai pris connaissance du compte rendu de l'étude, en tout cas de la version synthétisée. Ça doit nous interroger sur d'abord le rapport qu'ont les Français à leurs dirigeants politiques, à l'écart, pour ne pas dire au fossé, qui s'est creusé depuis des années maintenant. Ça fait longtemps, mais on le voit sur notamment l'absentéisme lors d'un certain nombre d'élections entre les Français, entre le peuple et les dirigeants. Cela nous oblige, nous, je crois, d'abord à avoir des résultats. Et je pense que, au fond, ce lien avec la démocratie, avec le système tel qu'il est aujourd'hui, ne pourra être consolidé que si on démontre que ce système là est en capacité d'agir pour les Français, de répondre à leurs préoccupations, à leurs attentes, à leurs difficultés. Nous, nous essaierons de le faire en écoutant, et c'est ce que je crois on attend de nous à notre niveau, les messages qui ont été ceux des Français lors des dernières élections européennes et législatives. Alors ces messages, ils ont été pluriels et ce n'est jamais très simple d'analyser en détail les ressorts des votes qui ne sont évidemment pas tous les mêmes. Mais on voit bien qu'aujourd'hui il y a un mécontentement, je pense que le Premier ministre en a éminemment conscience. Et c'est, je crois, aussi le sens de la volonté qui est la sienne d'écouter l'ensemble des parlementaires – je ne vais pas revenir sur un débat qui nous ramènerait à il y a trois, quatre semaines déjà, mais d'écouter l'ensemble des parlementaires et l'ensemble des députés, qu'ils appartiennent à son socle commun ou à d'autres formations politiques, de La France insoumise au Rassemblement National. Parce que si on veut respecter l'ensemble des Français, si on veut entendre leurs difficultés, je crois que, précisément, le fait de les entendre et de vouloir y répondre va dans le sens d'une meilleure confiance dans le système démocratique qui est le nôtre, eh bien il faut s'adresser à tous les députés avec le même ton, on ne peut pas prétendre vouloir entendre les 6 millions de Français qui ont voté pour le nouveau Front populaire au premier tour en ignorant leurs députés. De même qu'on ne peut pas prétendre vouloir répondre aux attentes des 10 millions de Français qui ont voté rassemblement national au premier tour des législatives en ostracisant leurs élus démocratiquement élus. Merci.

Journaliste
Une toute dernière question, Madame. Dans les prochains jours, les républicains, donc le groupe de Monsieur MARLEIX et Véronique LOUWAGIE, présentera un amendement sur les transmissions de succession avec des Français qui auront la possibilité, je me base toujours sur le travail de Matthieu ARON pour Le Nouvel Observateur, de transmettre une partie de leur patrimoine pour inciter des jeunes ou des personnes à acheter un bien immobilier. On parle de montants avoisinant à peu près les 150 000 euros. Est-ce que vous pensez qu'avoir une fiscalité aménagée pour permettre justement de faciliter ces transmissions, puisque de nombreux Français n'ont pas justement ces 150 000 euros pour acheter un bien, est assez injuste ? Et le fait que Monsieur MARLEIX et Véronique LOUWAGIE proposent cet amendement va aujourd'hui un petit peu à l'encontre des efforts budgétaires qu'on demande aux Français.

Maud BREGEON
Vous répondez presque à ma place, au sens où nous comprenons bien la philosophie qui est celle de cet amendement. Mais néanmoins, ce n'est pas dans la proposition de budget initial formulée par le Gouvernement, et notamment pour des questions de contraintes budgétaires sur lesquelles je ne vais pas revenir de nouveau. Donc, notre position, elle n'a pas changé. On discutera des différents amendements soumis par l'intégralité des groupes. Mais si ces amendements génèrent des dépenses supplémentaires, il faut qu'ils soient accompagnés de propositions d'économies supplémentaires, parce que le cadre ne change pas, et celui-là est si bien la seule chose qui ne variera pas d'ici à la fin de l'année, c'est la nécessité de faire 60 milliards d'euros d'économies. Du reste, nous nous prononcerons de façon favorable à l'ensemble des amendements dont on estime qu'ils vont dans le bon sens pour le pays, mais à condition que le cadre budgétaire soit respecté. Et donc, à proposition de dépenses supplémentaires, proposition d'économie supplémentaire. Et je vais répéter ça, je pense souvent pendant quelques semaines, mais c'est la réalité des chiffres, et ça compte aussi. Je vous remercie.


Source https://www.info.gouv.fr, le 24 octobre 2024