Texte intégral
JOURNALISTE
Il est 8 h 33 sur France info, la porte-parole du Gouvernement, Maud BREGEON est l'invité du 8 h 30. Elle répond aux questions d'Hadrien BECT et de Bérengère BONTE.
HADRIEN BECT
Bonjour Maud BREGEON,
MAUD BREGEON
Bonjour,
HADRIEN BECT
Les départements de Droite menacent de ne plus verser le RSA à partir du 1er janvier pour protester contre les coupes budgétaires. C'est une menace sérieuse ou c'est un coup de menton ?
MAUD BREGEON
J'entends cette annonce comme une alerte pour nous rappeler ce qu'on sait d'ailleurs, que les départements, pour beaucoup, sont aujourd'hui, dans une situation financière, budgétaire qui est très compliquée. Moi, je me déplace beaucoup, j'étais dans la Haute-Marne, dans le Calvados, à chaque fois, les présidents de départements me font part des difficultés auxquelles ils sont confrontés, avec des dépenses sociales qui augmentent. On sait qu'on leur demande des efforts.
HADRIEN BECT
Oui, parce que je viens vous dire, vous…
MAUD BREGEON
… Dans le budget, tel qu'il est écrit, aujourd'hui. Et ce budget, il a été écrit en un temps record. On a dit qu'il était imparfait, qu'il y avait des améliorations à faire, notamment envers les collectivités territoriales. Le Premier ministre, aujourd'hui, aux côtés des départements de France, vous le savez. Et puis il y a le débat qui va arriver au Sénat. Et donc notre volonté, c'est d'arriver à trouver un point d'accord qui permette de répartir l'effort équitablement, mais sans mettre les uns et les autres en péril sur le plan budgétaire.
HADRIEN BECT
Quand Michel BARNIER dit : "Des ajustements", il évoque ça dans une interview à Ouest-France, ça veut dire que les départements n'auront peut-être pas à faire d'effort, que ce seront d'autres collectivités qui feront des efforts ?
MAUD BREGEON
En tout cas, la porte est ouverte à diminuer l'effort par rapport à celui qui est demandé, aujourd'hui, parce qu'on a conscience qu'un certain nombre de départements…
HADRIEN BECT
Donc, ils feront quand même un effort ?
MAUD BREGEON
Un certain nombre de départements sont, aujourd'hui, dans des situations extrêmement compliquées. Ils prennent en charge une grande part de la dépense sociale. La démographie est telle qu'aujourd'hui, cette dépense sociale augmente. Et donc on entend cette difficulté-là, nous, on ne montre pas des efforts par plaisir, et notre souhait, ce n'est pas de mettre les collectivités territoriales à terre, pardonnez-moi. Le Premier ministre a toujours dit : "On fera, ni sans eux, ni contre eux". Donc on souhaite avec eux, par le dialogue, et c'est pour ça que le Premier ministre est à leurs côtés, aujourd'hui, trouver un modus operandi et un point d'atterrissage qui permette de répartir l'effort, peut être différemment de tel qu'il est réparti aujourd'hui. Mais bien sûr, en gardant un cadre budgétaire que celui qu'on connaît et qui est très complet.
BERENGERE BONTE
Je reviens juste sur l'explication que vous donnez, au début, vous dites : "Désolé, on a été trop vite". Vous ne reconnaissez pas ça, c'est un peu ça.
MAUD BREGEON
Je dis non, je dis qu'on a mis sur la table une équation qui fonctionne, soixante milliards d'euros d'économies, un budget, encore une fois, je le redis, construit en un temps record en tenant toujours ce discours que celui de l'ouverture à des modifications, à des améliorations. On entend, aujourd'hui, les départements qui tirent pour certains la sonnette d'alarme parce qu'ils sont dans des situations très compliquées, et notre volonté, c'est de travailler avec eux, à voir comment est-ce qu'on peut peut-être diminuer cet effort, peut être le répartir différemment au sein des collectivités territoriales ?
HADRIEN BECT
Il y aura cinq milliards d'efforts des collectivités en tout, quand même.
MAUD BREGEON
Je ne vais pas, je ne vais pas préempter le débat qui va débuter…
HADRIEN BECT
Non, mais parce que c'est quand même ça qui va être le sujet.
MAUD BREGEON
Qui va débuter au Sénat. Je le redis, nous sommes prêts à des améliorations. Est-ce que ça resterait cinq milliards ? Peut-être. Est-ce que ça pourrait diminuer en fonction des débats au Sénat ? Oui, à une condition, c'est que, face à ces modifications-là, il va falloir trouver des réductions de dépenses supplémentaires.
BERENGERE BONTE
Stéphane TROUSSEL, président du département de la Seine-Saint-Denis, département de gauche, parce qu'il n'y a pas de ceux de droite…
MAUD BREGEON
Sur votre antenne, tout à l'heure.
BERENGERE BONTE
Qui était sur notre antenne, explique que c'est globalement la prise en charge de toutes les aides sociales qui est en question, et que ça fait 20 ans que ça a été installé comme ça et que petit à petit, l'État, il y a dix ans, l'état compensait 70 % les aides individuelles de solidarité, aujourd'hui, c'est seulement 40 % alors que le coût du RSA, lui, a doublé. Et de fait, il y a un système qui ne fonctionne plus. Est-ce que cette remise en question globale, vous êtes prête à l'envisager ?
MAUD BREGEON
Vous dites, enfin, il disait quelque chose d'extrêmement juste. Il y a d'abord une situation d'urgence à traiter qui est celle du budget de l'année prochaine. Et donc comment est-ce qu'on trouve les économies nécessaires ? En demandant, encore une fois, un effort qui est justement partagé et supportable par tout le monde, y compris par les départements.
BERENGERE BONTE
Mais là, concrètement.
MAUD BREGEON
Et puis ensuite, et j'en viens à votre question, il y a une réflexion plus structurelle à mener sur le financement des départements et sur leur organisation, parce qu'on voit bien que ces dépenses sociales, elles augmentent de façon tendancielle, quand l'État augmente le RSA. Comme c'est le cas chaque année, d'avoir une, ce sont les départements derrière qui supportent cette augmentation.
BERENGERE BONTE
Ils supportent cette augmentation, c'est ce que, eux, disent.
MAUD BREGEON
Mais il y a d'autres exemples. Quand on voit que dans certains départements, il y a les départements de droite, on parle notamment une augmentation de la prise en charge du coût de la prise en charge des mineurs non accompagnés. C'est aussi les départements qui supportent l'aide sociale à l'enfance.
HADRIEN BECT
Et d'ailleurs, est-ce que c'est vraiment aux mineurs de supporter ça, Maud BREGEON ?
MAUD BREGEON
Et donc, pardonnez-moi, il y a à mon avis, à moyen et long terme, une réflexion à mener sur la structure financière et économique des départements. D'abord, il y a une situation d'urgence qui est celle du budget de l'année prochaine. Je pense que c'est ce que voulait dire Stéphane TROUSSEL aussi, ce matin, sur votre antenne. Je l'ai écouté, en tout cas, c'est comme ça que je l'ai compris.
HADRIEN BECT
Alors, Michel BARNIER, il dit aussi dans Ouest France, il dit : "Voilà, si on a cette allocation sociale unique, ça permettra aux départements de faire de l'économie". On a du mal à comprendre pourquoi. On avait là encore, vous parliez, Stéphane TROUSSEL, lui-même dit : "On ne comprend pas bien comment ça peut marcher cette histoire, et surtout, ça pourrait conduire à faire des économies sur les bénéficiaires". Alors que Michel BARNIER dit, "Ça fera faire des économies aux départements". Comment ça marcherait ?
MAUD BREGEON
On voit bien que quand on rationalise les allocations, au sens où on simplifie les procédures ou on simplifie les process, ça permet de faire des économies. Et je voudrais être très clair sur une chose, il ne s'agit pas, lorsqu'on parle d'allocation sociale unique, de diminuer les allocations qui sont de droit pour les uns et les autres.
HADRIEN BECT
Totalement, c'est ce qu'il y a si vous versez moins d'argent, c'est qu'il y a des gens qui touchent moins.
MAUD BREGEON
Mais on n'a pas dit qu'il était question de verser moins d'argent. On a dit qu'il était question…
BERENGERE BONTE
Il était question de faire des économies.
MAUD BREGEON
… De rationaliser en fonction de ce que les uns et les autres ont droit à, tout simplement.
HADRIEN BECT
Alors comment on rationalise sans faire des efforts, sans réduire ?
MAUD BREGEON
On aura ce débat dans les semaines et les mois à venir.
HADRIEN BECT
Oui, mais c'est quand même important, parce que Michel BARNIER en reparle ce matin. Il en avait déjà parlé à plusieurs reprises. C'est quelque chose qui avait été cité, y compris par des socialistes à l'époque, y compris sous le mandat de Nicolas SARKOZY. Et ça revient sur la table aujourd'hui. C'était aussi une promesse d'Emmanuel MACRON, accessoirement. Et on a du mal à comprendre, quand on entend là encore ce témoignage de président de département qui dit que ça va conduire à baisser en valeur globale les prestations sociales. Et les prestations sociales, c'est ça l'idée ?
MAUD BREGEON
Non, et ce n'est pas du tout ce qu'on a dit. Il faut, aujourd'hui, regarder l'addition des différentes aides sociales et voir comment est-ce qu'on peut, je le redis encore une fois, dans la façon dont elles sont versées, rationaliser tout ça, faire en sorte que ce soit probablement plus simple pour les départements. C'est un débat qu'on aura aussi avec les présidents du département…
HADRIEN BECT
Il sera quand ce débat ? Il y aura un calendrier ?
MAUD BREGEON
… Je ne peux pas le préempter, aujourd'hui. On a d'abord, si je puis dire, la première haie à franchir, qui est celle du budget des semaines à venir. Et donc c'est là-dessus qu'on est concentrés. Et puis ensuite, le Premier ministre l'a dit, il aura l'occasion de présenter sa vision à trois ans avec un plan d'action adossé et des propositions de réformes.
BERENGERE BONTE
Et concrètement, qu'est-ce que vous dites aux départements qui ne vont pas pouvoir voter leur budget ? Certains qui n'y arriveront pas, le président d'Eure-et-Loire, par exemple, Christophe LE DORVEN, dit qu'il doit trouver près de quarante millions d'euros d'économies dans le budget qu'il avait prévu, et donc qu'il ne votera pas son budget en décembre.
MAUD BREGEON
Ce que je dis, moi, c'est que nous on souhaite, dans le budget tel qu'on est en train de le construire, de pouvoir faire en sorte, je peux redire ce que je vous ai déjà dit…
BERENGERE BONTE
Non mais il y a une tolérance, ça n'a pas été prévu, les départements et l'État sont censés voter leur budget avant la fin de l'année.
MAUD BREGEON
Ecoutez, il n'est pas question de laisser des départements ne pas pouvoir boucler l'année. Donc s'il y a des situations particulières, j'imagine que ce sera regardé, et je vous envoie vers ma collègue, ministre des Collectivités Territoriales. Moi, je suis là, ce matin, pour vous dire que face à la difficulté dont on a conscience que rencontrent les départements aujourd'hui, on est prêt à faire des modifications sur le budget 2025 qui est proposé, et qu'on aura ce débat avec les sénateurs, que le Premier ministre aura ses échanges aujourd'hui avec le président de département.
HADRIEN BECT
Justement, Maud BREGEON, vous voulez parler de budget, donc parlons-en. Certains, comme le président du Centriste au Sénat, proposent d'augmenter...
MAUD BREGEON
Hervé MARSEILLE,
HADRIEN BECT
Hervé MARSEILLE, des Hauts-de-Seine, propose d'augmenter la TVA à 22 % au lieu de 20. Hervé MARSEILLE, il est proche de vous. Est-ce que c'est une bonne idée ? Vous soutenez ?
MAUD BREGEON
Il y aura ce débat au Sénat, ce n'est pas la proposition du Gouvernement.
HADRIEN BECT
Le Gouvernement sera amené à se prononcer, vous le savez.
MAUD BREGEON
Aujourd'hui, ce n'est pas la position du Gouvernement. Nous, on souhaite que le débat puisse se poursuivre au Sénat, avec, je le redis, un objectif qui est celui de trouver soixante milliards d'euros. En basant l'effort, essentiellement, pour deux tiers sur une réduction des dépenses, je ne suis pas certaine qu'une augmentation de la TVA soit le moyen le plus juste et le plus équitable de trouver des recettes fiscales.
BERENGERE BONTE
Accessoirement, c'est le TVA qui finance les départements.
MAUD BREGEON
Nous, ce qu'on a proposé, c'est d'avoir des contributions ciblées et exceptionnelles sur les Français qui le peuvent le plus, sur les entreprises qui le peuvent le plus. La TVA, vous le savez bien, ça touche tout le monde. Ce n'est pas la philosophie qui est celle du Gouvernement.
BERENGERE BONTE
La deuxième journée de solidarité, on comprend que Michel BARNIER y est défavorable.
MAUD BREGEON
Il y a nécessité, en France, de trouver des moyens de travailler davantage.Le Premier ministre est effectivement réservé sur cette journée de solidarité. Pour autant, on est ouvert aux débats, et il y a notamment cette proposition au Sénat sur vous savez, sept heures travaillées pour permettre de contribuer au budget de la Sécurité sociale. On verra avec les sénateurs dans quelle mesure, dans quelle mesure est-ce qu'on peut l'adopter ou pas, ce qu'elle rapporte exactement. On ne ferme pas, on ne ferme pas la porte au débat, on ne ferme pas la porte au débat. On partage cette volonté de trouver des moyens d'augmenter le nombre d'heures travaillées. Est-ce que ça passe nécessairement par une nouvelle journée de solidarité ? On sait que la première avait déjà été difficilement acceptée. Donc regardons ce qui peut se faire différemment.
BERENGERE BONTE
Ça revient au même et en l'occurrence, les Centristes du Sénat dont parlait Hadrien à l'instant, proposent, eux, d'allonger la durée de travail sur l'année très sensiblement, c'est-à-dire, ils vont bien au-delà d'une deuxième journée de solidarité.
MAUD BREGEON
Mais nous, on partage la volonté d'augmenter le nombre d'heures travaillées et de pouvoir faire en sorte qu'on ait un travail aujourd'hui qui soit davantage rémunérateur. Donc, il y a une réflexion qui est une réflexion globale à mener.
HADRIEN BECT
Un mot peut-être, Maud BREGEON, puisqu'on est à parler d'économie, sur l'accord sur l'assurance-chômage qui a été trouvé hier soir par les partenaires sociaux, patronat et syndicats. Il va y avoir des économies, à priori, faites grâce à cet accord. Est-ce que vous saluez ? C'est une bonne nouvelle ?
MAUD BREGEON
Oui, je salue. Au-delà et avant de rentrer dans les détails, ça démontre que la méthode qui est celle du Premier ministre et du Gouvernement, de laisser la place au dialogue social, de prendre le temps d'échanger, de prendre le temps de négocier, ce n'est pas facile, ça prend du temps, mais ça porte ses fruits. Et aujourd'hui, on a des organisations syndicales qui, après des échanges, n'étaient pas dans la salle, mais probablement longuement, parfois difficile, on finit par trouver un accord, encore une fois, sur l'assurance-chômage et sur la question des seniors, c'est extrêmement, extrêmement important aujourd'hui, on le sait. Évidemment, on le salue, et je dirais que ça nous encourage, encore une fois, à rester dans cette optique de dialogue…
HADRIEN BECT
Le Gouvernement n'a plus à reprendre la main.
MAUD BREGEON
Pardon ?
HADRIEN BECT
Le Gouvernement n'a pas à reprendre la main, donc.
MAUD BREGEON
On verra, le Premier ministre s'exprimera cet après-midi, mais c'est évidemment une bonne nouvelle.
BERENGERE BONTE
Mais sur l'assurance-chômage, précisément, pour rester quand même un instant là-dessus, c'est des règles qui se durcissent, clairement, à partir de janvier 2025, ce n'est pas une bonne nouvelle pour les allocataires. Pour les frontaliers, ceux qui travaillent en Suisse, en Belgique, en Allemagne, qui généralement gagnent plus et qui vont être indemnisés moins, c'est la mensualisation des allocataires qui change et donc, sans entrer forcément dans les détails techniques, mais une mensualisation qui sera lissée sur trente jours. Donc, en gros, ils perdent cinq jours d'indemnisation, c'est toute une série de durcissements qui sont préjudiciables aux allocataires, c'est comme ça qu'il faut présenter le sujet.
MAUD BREGEON
Cet accord a été trouvé par qui ?
BERENGERE BONTE
Par les partenaires sociaux.
MAUD BREGEON
Oui, par les partenaires sociaux eux-mêmes, entre eux.
BERENGERE BONTE
Mais le constat, il est bien celui-là. Il faut dire clairement les choses aux gens qui nous écoutent.
MAUD BREGEON
Il y a des points d'avancée, et il y a aussi des points qui prennent en compte la réalité du marché du travail tel qu'il est aujourd'hui. Donc, moi, je crois que chacun le comprend. On nous a beaucoup demandés, Michel BARNIER est Premier ministre, de faire une nouvelle réforme de l'assurance-chômage. Il y en a eu, je crois, trois ces dernières années. Michel BARNIER a dit quoi ? Il a dit : "Non, moi, je ne referai pas de façon brutale une nouvelle réforme de l'assurance-chômage parce que je souhaite donner la main aux organisations syndicales et aux partenaires sociaux de telle sorte qu'entre eux, ils puissent trouver un accord". C'est ce qui s'est passé.
HADRIEN BECT
On comprend, donc, effectivement, Maud BREGEON, que cet accord, le Gouvernement va plutôt le valider ?
MAUD BREGEON
Je laisserai, évidemment, la primauté au Premier ministre de sa prise de parole…
HADRIEN BECT
Les choses sont claires. Vous restez avec nous, Maud BREGEON, porte-parole du Gouvernement. Le Fil Info, avant de continuer la discussion. 08 h 45, Marie MAHEUX.
(…)
BERENGERE BONTE
Et Maud BREGEON, porte-parole du Gouvernement, on évoquait les économies sur l'assurance-chômage et toute une série de mesures. Tout ça nous ramène quand même aux discussions budgétaires puisque Michel BARNIER confirme qu'il va sans doute utiliser le 49.3, il le dit dans Ouest-France. J'ai envie de dire, tout ça pour ça ? Pourquoi tous ces débats alors ?
MAUD BREGEON
Moi, je pense qu'on ne perd jamais à respecter la démocratie et le parlementarisme. Je pense qu'on ne perd jamais à débattre, à laisser les uns et les autres confronter leurs idées et d'ailleurs, ça a permis aussi de trouver des compromis.
BERENGERE BONTE
Ce compromis…
MAUD BREGEON
Pardonnez-moi, non, non, le compromis, je vais terminer, sur les petites retraites qui a été annoncé lundi dernier, c'est un compromis qui a été le fruit de plusieurs semaines de débats et donc, moi, je vais vous dire…
HADRIEN BECT
Mais ce n'est pas un débat dans l'hémicycle, ça, c'est le débat avec Michel BARNIER à Matignon.
MAUD BREGEON
Si le Gouvernement, pardonnez-moi…
BERENGERE BONTE
C'est un accord entre Bercy et Laurent WAUQUIEZ, ce n'est effectivement pas le fruit des débats…
MAUD BREGEON
Je prends cet exemple-là, c'est un débat qui a eu, par ailleurs, lieu en commission, mais je prends cet exemple-là. Il y a d'autres amendements qui seront probablement retenus qui n'étaient pas dans le projet initial du Gouvernement. Et donc, moi, je le redis, on ne perd jamais à laisser le débat se tenir et je vais même aller plus loin, si on avait mis le débat sous le tapis, que Michel BARNIER était arrivé au premier, deuxième ou troisième jour du débat, montant à la tribune... Non, non, je vais terminer, montant à la tribune en sortant de 49.3, on nous aurait dit : "Regardez, oh la la, il ne respecte pas le Parlement. Il refuse le débat" et je vais vous dire, vous auriez eu probablement eu raison.
HADRIEN BECT
C'est comme ce qu'il s'est passé l'année dernière, effectivement.
MAUD BREGEON
La méthode de Michel BARNIER, c'est de laisser les opinions des uns et des autres s'exprimer.
HADRIEN BECT
Là, il y avait plus l'impression qu'il s'agissait de laisser le débat pourrir, Maud BREGEON, c'est ce qu'ont dit beaucoup d'oppositions, de gauche, du RN.
BERENGERE BONTE
Est-ce que c'est de fait ce qui s'est passé ? Puisque le texte quasiment de départ est parti au Sénat. Ou disons-le, le bloc macroniste, enfin, la majorité est favorable au Gouvernement.
MAUD BREGEON
Ça a été un grand moment de clarification. Moi, je pense que les Français ont le droit de voir concrètement ce que votent lors d'un débat qui est un débat absolument crucial dans la vie parlementaire, celui du budget. Et qu'est-ce qu'on a vu effectivement ? Le Nouveau Front Populaire qui, souvent avec l'Alliance du Rassemblement National, a voté 35 milliards de taxes supplémentaires pour les Français et les entreprises. C'est ce qu'on a vu ?
BERENGERE BONTE
Il fallait chercher des ressources supplémentaires pour équilibrer le budget. Pour le coup, c'était dans le sujet.
MAUD BREGEON
C'est ce qu'on a vu ? Oui, mais il y a différentes façons d'équilibrer un budget. Moi, j'ai du mal, vous voyez, à m'expliquer qu'on ait les députés du nouveau Front Populaire le lundi sur les piquets de grève aux côtés des salariés des entreprises en difficulté, et le mardi dans l'hémicycle à voter des taxes qui mettent ces entreprises à terre. Ce débat, encore une fois, je le redis, a été un moment de clarification, a permis aux uns et aux autres de porter des positions, et je pense que c'est toujours ça en démocratie, et ça va continuer au Sénat.
HADRIEN BECT
Alors, justement, allons sur le fond, vous avez dit, Maud BREGEON, dans votre première réponse, qu'il s'agirait sans doute de garder un certain nombre d'amendements qui ont pu être avancés, qui ont même pu être votés pour certains. Est-ce que ça veut dire que l'idée des allègements de charges avancés pour les entreprises, avancés par les macronistes, c'est quelque chose, enfin, en tout cas les conserver, plus qu'ils n'auraient pu l'être, est-ce que c'est quelque chose qui va être conservé ?
MAUD BREGEON
Nous souhaitons qu'il y ait un accord avec les députés du socle commun sur la question des allègements de charges. Nous entendons, et le Premier ministre entend ce message qui est notamment porté par le groupe de Gabriel ATTAL, des députés qui nous disent, la situation n'est pas facile, et dans la situation telle qu'elle est, il ne faut pas alourdir le coût du travail, ou en tout cas, il faut le faire peut-être moins que ce qui était prévu dans le budget initial. Donc, de la même façon qu'on a été ouverts à un accord sur la question des petites retraites, on est ouverts à un accord sur la question des allègements de charges. Il y a des dialogues et des échanges qui se poursuivent, et je souhaite vraiment que chacun puisse faire un pas vers l'autre, de telle sorte qu'on arrive à atterrir là-dessus.
BERENGERE BONTE
Si vous gardez un amendement NFP, ce sera quoi ?
MAUD BREGEON
Écoutez, je ne vais pas présager des amendements.
BERENGERE BONTE
Non mais puisque Michel BARNIER dit qu'il gardera des idées de chacun des groupes.
MAUD BREGEON
Oui, il y aura, et c'est notre souhait.
BERENGERE BONTE
Même question pour le RN.
HADRIEN BECT
Est-ce qu'il faut garder un amendement du Rassemblement National ?
MAUD BREGEON
Alors, on va, d'abord, on a terminé le débat à l'Assemblée nationale, le débat va se poursuivre au Sénat, suite à ça, il y a de fortes chances qu'il y ait ce qu'on appelle une commission mixte paritaire, donc, c'est-à-dire une instance, je l'explique, dans laquelle sont réunis les députés et les sénateurs. Moi, je ne vais pas appréhender les débats qui auront lieu dans les semaines à venir, mais la position de Michel BARNIER, parce que je vois bien où vous voulez nous emmener, sur : "Est-ce qu'il faut garder des amendements du NFP ou du Rassemblement national ?".
HADRIEN BECT
Oui, mais vous savez très bien, Maud BREGEON, oui, mais je vois bien aussi où vous voulez nous emmener, c'est le Gouvernement qui décide à la fin du texte qu'il présente quand il s'agit d'un 49.3.
MAUD BREGEON
Oui, mais on le décide lorsque les débats sont terminés, lorsque, encore une fois, on a respecté l'Assemblée nationale, on va respecter le Sénat.
HADRIEN BECT
Est-ce que vous pourriez garder ou on ne veut pas garder des amendements du Rassemblement National. C'est exclu ou ça n'est pas exclu ?
BERENGERE BONTE
Est-ce que vous considérez que ce serait normal ?
MAUD BREGEON
Je vais vous dire, on a tenu une ligne qui est extrêmement claire. On respecte les députés pour ce qu'ils sont, c'est-à-dire élus de la République. Nous prendrons toutes les bonnes idées, d'où qu'elles viennent, qui permettent d'améliorer la situation en maintenant le cadre budgétaire tel qu'il est aujourd'hui. Le Premier ministre a eu l'occasion de le dire et de le redire. Nous ne sommes pas sectaires, mais le débat est encore en cours.
HADRIEN BECT
Alors, le corollaire de cette question, est-ce qu'il n'y a donc que des mauvaises idées qui viennent du Rassemblement National ?
MAUD BREGEON
Il y a des amendements qui ont été adoptés à l'Assemblée nationale, qui ont été déposés par un nombre parfois très important de groupes, y compris le Rassemblement National. Donc, il y a une forme d'hypocrisie dans ce débat. Je pourrais vous faire la liste, parce que je suis un petit peu agacé par ce truc-là…
HADRIEN BECT
Non mais vous n'excluez pas, c'est important, c'est une question qui se pose, Maud BREGEON.
MAUD BREGEON
Non mais je vois bien le discours moral qu'il peut y avoir derrière. On pourrait faire la liste de tous les projets de loi depuis deux ou trois ans, qui ont été, y compris, voté par les députés du Rassemblement National.
HADRIEN BECT
Bien sûr, y compris même des motions de censure, d'ailleurs.
MAUD BREGEON
Non mais par des projets de loi parfois présentés par le Gouvernement. Moi, ce que je dis, je ne regarde pas l'étiquette partisane adossée à tel ou tel amendement. Ce que je dis, c'est qu'on a un défi extrêmement important à relever, celui du redressement budgétaire. Le Premier ministre n'est pas quelqu'un de sectaire, et donc on laisse les débats se tenir jusqu'à la fin et on prendra, autant que possible, les bonnes idées d'où qu'elles viennent dans la mesure où elle respecte le cadre budgétaire tel qu'il s'impose.
BERENGERE BONTE
Dans la foulée du 49.3, il y aura sans doute une motion de censure. Certains imaginent que le RN, précisément, pourrait tenter de la voter, cette fois-ci, pour précipiter un calendrier électoral. Alors ça paraît être de la tambouille politique, mais sauf que c'est la conséquence du réquisitoire jugé comme très dur par le Rassemblement National dans l'affaire des assistants parlementaires Européens. On rappelle que le procureur a requis avant-hier une inéligibilité avec exécution provisoire, c'est-à-dire effet immédiat. D'où l'idée de censurer, très vite, avant le prononcé du jugement, est-ce que vous le redoutez, ça ?
MAUD BREGEON
Nous, on est sous la surveillance de 577 députés…
BERENGERE BONTE
Et ça change tout…
MAUD BREGEON
Et à travers eux, de 67 millions de Français. Il faut arrêter de faire croire aux Français que la question de la censure du Gouvernement ne dépendrait que du Rassemblement National. Parce que ça, ça revient à déresponsabiliser complètement les députés du NFP et notamment les députés socialistes. Moi, je vais vous dire, si les députés socialistes acceptaient de venir, c'est mathématique, à la table des discussions et de ne pas être dans une logique de censure automatique et de culture de la censure, le Rassemblement National, dans la question que vous posez aujourd'hui, n'aurait pas mathématiquement le poids qu'il a. Voilà, c'est tout ce que j'ai. Ne laissons pas croire que la question de la censure dépend seule du Rassemblement National. Elle dépend des 577 députés de cet hémicycle et notamment des députés socialistes. J'aimerais qu'on en parle davantage.
BERENGERE BONTE
Un mot pour finir sur ce réquisitoire du RN. Vous allez me dire qu'on ne commande pas des décisions de justice, même des réquisitoires. Sauf qu'il est remis en cause, y compris dans vos propres rangs, par un Gérald DARMANIN, par exemple, qui considère que ce ne serait pas normal qu'elle ne puisse pas se présenter au suffrage des Français, Marine LE PEN. La question peut-être, c'est est-ce que cette remise en cause de la justice en permanence par les politiques, ce n'est pas ça la véritable inquiétude pour la démocratie ?
MAUD BREGEON
Alors, il n'y a pas de remise en cause de la justice en permanence par les politiques, non mais je vous invitais à ne pas globaliser les politiques.
BERENGERE BONTE
C'est Gérald DARMANIN, c'est Jean-Luc MELENCHON, c'est François FILLON, à l'époque de sa mise en examen qui se parle d'un cabinet, en disait énormément.
MAUD BREGEON
… Les journalistes, vous voyez, on n'est pas obligé de globaliser.
BERENGERE BONTE
Non, mais je vous donne trois exemples, ce ne sont pas des généralités.
MAUD BREGEON
Moi, je vais vous redire la phrase que vous attendez que je vous dise. Evidemment, je suis ministre de la République et il ne m'appartient pas, aujourd'hui, de commenter une affaire judiciaire en cours. Gérald DARMANIN est député. Il n'a pas le même rôle que moi. Moi, je n'ai pas à commenter, encore une fois, les propos qui sont les siens. Il a donné un avis. C'est le sien et il a le droit de le faire. Moi, je ne critiquerai pas Gérald DARMANIN. Vous savez, je vais vous dire, Gérald DARMANIN, c'est quelqu'un qui a beaucoup combattu le Rassemblement National, effectivement, par les urnes, au départemental, dans sa ville de Tourcoing, aux législatives, dans un territoire où le Rassemblement National a longtemps gagné du terrain. Je crois qu'il n'a pas de leçons à recevoir en la matière.
HADRIEN BECT
Merci beaucoup. Merci Maud BREGEON, porte-parole du Gouvernement, d'avoir été l'invité de France Info. Merci Bérengère BONTE.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 18 novembre 2024