Texte intégral
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, dont le Sénat est saisi en application de l'article 47-1, alinéa 2, de la Constitution, de financement de la sécurité sociale pour 2025 (projet n° 129, rapport n° 138, avis n° 130).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes aujourd'hui réunis pour l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025.
Comme vous le savez, nous nous inscrivons dans un contexte particulier. Malgré de nombreuses heures de débats, l'examen du texte en première lecture à l'Assemblée nationale s'est arrêté sans que nous soyons parvenus à son terme.
Je regrette, bien sûr, que nous n'ayons pas terminé les discussions sur ces sujets fondamentaux pour les Français. Néanmoins, le dialogue parlementaire continue au Sénat toute cette semaine ; nous aurons l'occasion d'y revenir largement.
Comme nous le disons depuis le début de cette période budgétaire, et comme chacun ici le mesure, la situation de nos finances publiques exige de la responsabilité, ainsi qu'une recherche exigeante d'équilibre. La situation de nos comptes sociaux est inédite.
En 2024, le déficit de la sécurité sociale dépassera de près de 8 milliards d'euros le niveau voté dans la loi de finances de la sécurité sociale initiale.
En 2025, comme le soulignait le secrétaire général de la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), sans mesures nouvelles, le déficit projeté de la sécurité sociale atteindra 28 milliards d'euros. Chacun en conviendra, ce n'est pas soutenable. La situation implique des actions collectives pour y remédier.
Il est de notre devoir de freiner la dépense publique ; toutes les administrations publiques doivent prendre part à cet effort. À cet égard, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 constitue une étape essentielle dans le retour progressif à l'équilibre de nos comptes sociaux.
La pérennité et la préservation de notre modèle social hérité du Conseil national de la Résistance (CNR) étant en jeu (Marques d'ironie sur les travées du groupe SER.), nous devons collectivement trouver une ligne de crête pour réaliser des économies sans perdre de vue les attentes considérables de nos concitoyens et leurs besoins – la santé et l'accès aux soins constituent la première préoccupation des Français.
C'est pourquoi ce PLFSS vise à contenir le déficit de la sécurité sociale à 16 milliards d'euros tout en finançant des mesures nouvelles. Il permet ainsi d'améliorer la trajectoire de nos comptes sociaux tout en ouvrant de nouveaux droits, au service de nos concitoyens.
Je le répète, la santé des Français demeure plus que jamais une priorité de notre gouvernement ; ce budget le prouve. Nous sommes au rendez-vous de ces attentes. Il s'agit d'un budget d'action pour l'accès aux soins et pour l'hôpital (Mme Émilienne Poumirol proteste.), qui a tant besoin de soutien.
Il s'agit d'un budget de progrès, mais également de responsabilité, comme je vais m'employer à en faire la démonstration devant vous.
La trajectoire d'augmentation des dépenses d'assurance maladie, c'est tout d'abord un budget de progrès. Ce budget permet de répondre à nos priorités de santé publique, comme la prévention, les soins palliatifs, la santé mentale ou l'accès aux médicaments, entre autres.
Mme Annie Le Houerou. Avec quel argent ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. L'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) progressera, pour atteindre un peu plus de 264 milliards d'euros. C'est une hausse de 63 milliards d'euros par rapport à 2019 et de 9 milliards d'euros par rapport à 2024. Cette progression traduit concrètement notre volonté de poursuivre les investissements entrepris et de financer de nouvelles mesures attendues par les professionnels et par les patients.
Cette trajectoire d'augmentation des dépenses d'assurance maladie nous permet de poursuivre la dynamique de renforcement de l'accès aux soins dans tous les territoires et pour tous. Elle permet de financer nos grandes priorités : améliorer l'organisation du système de santé, assurer le financement du système de santé, renforcer nos politiques en matière de psychiatrie et de santé mentale, travailler à l'attractivité des métiers du soin et accompagner les innovations.
Nous respecterons les engagements conventionnels vis-à-vis des médecins, avec la revalorisation de la consultation à 30 euros dès décembre 2024.
Nous poursuivrons aussi la stratégie d'"aller vers", à destination des publics précaires et éloignés du soin, en ciblant les populations des territoires sous-denses. Nous développerons dans ce cadre des initiatives, comme les médicobus ou la télémédecine.
Pour renforcer l'attractivité des métiers et l'accès aux soins partout, nous travaillerons, avec le concours indispensable des élus locaux, au développement des maisons de santé pluriprofessionnelles, à la généralisation des services d'accès aux soins et à l'amélioration des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), toujours présentes sur tous les territoires.
Les maisons de santé pluriprofessionnelles permettent aux médecins de ne plus être isolés et de créer de nouvelles synergies entre professionnels de santé. C'est un facteur d'attractivité.
Ce PLFSS traduit aussi une action résolue, à laquelle je suis particulièrement attachée, en faveur des soins palliatifs : 100 millions d'euros seront dédiés à la mise en œuvre, dès 2025, de la stratégie décennale des soins d'accompagnement. Cette stratégie doit permettre dans chaque territoire le renforcement de l'offre de soins palliatifs au sein des établissements de santé et médico-sociaux, mais également à domicile.
La prise en charge des troubles de la santé mentale, que le Premier ministre a choisi d'ériger en grande cause nationale pour 2025, connaîtra aussi des progrès considérables. Le dispositif Mon soutien psy sera notamment renforcé, afin que chaque citoyen ait un accès simplifié et plus rapide à un psychologue, qui bénéficiera lui-même d'une meilleure rémunération, et le nombre de séances prises en charge lors d'une année civile augmentera, passant de huit à douze. Les équipes mobiles psychiatrie-précarité (EMPP) seront ainsi renforcées, pour aller à la rencontre des personnes les plus éloignées des soins et, surtout, de la psychiatrie.
Nous le savons, prendre soin de sa santé mentale s'apprend dès le plus jeune âge : le dispositif de prévention du suicide VigilanS sera élargi aux mineurs.
En outre, nous poursuivrons et amplifierons nos politiques en faveur de la prévention, en renforçant le repérage précoce. Ces actions interviendront à toutes les échelles et avec tous les acteurs, afin de prendre en charge au bon moment.
Nous devons installer une véritable culture de la prévention dans notre pays ; ce budget y contribuera.
Le dispositif Mon bilan prévention continuera d'être généralisé. Nous souhaitons que les mesures de prévention s'ancrent dans le quotidien de chaque Français. La part des dépenses des agences régionales de santé ciblées sur la prévention au sein de l'enveloppe du fonds d'intervention régionale augmentera de 10 %.
Il s'agit d'une politique globale de la prévention que nous souhaitons faire intervenir dès le plus jeune âge, car les inégalités de santé s'ancrent au moment de l'enfance.
Le suivi de l'enfant sera amélioré, avec plus de visites obligatoires. Nous prévoyons également une évolution du carnet de santé, avec notamment des pages dédiées aux méfaits des temps trop longs passés devant les écrans, afin de sensibiliser les familles et de trouver des équilibres dans ces utilisations. Nous consacrerons enfin 75 millions d'euros en 2025 pour poursuivre la vaccination contre le papillomavirus au collège.
Comme j'ai pu le rappeler à diverses occasions, la défense de nos hôpitaux est une autre de nos priorités que financera ce PLFSS ; c'est même une priorité majeure. Le sous-Ondam hospitalier se situe à 3,1 %. J'ai entendu les alertes qui ont été relayées auprès de mes services par les acteurs comme par les parlementaires.
L'évolution des cotisations pour assurer le financement de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), initialement prévue sur trois ans, sera finalement réalisée sur quatre ans. Le gain ainsi permis – de l'ordre de 256 millions d'euros – restera dans l'Ondam, au bénéfice du secteur hospitalier.
Nous conforterons les mesures en faveur des soins critiques de la réforme de 2022 pour les hôpitaux, mais nous faciliterons également la gestion des ressources humaines dans les établissements de santé en travaillant particulièrement sur la régulation de l'intérim.
Enfin, ce PLFSS permettra de garantir l'accès aux médicaments et produits de santé à tous les Français. La disponibilité des médicaments dans les pharmacies est un sujet de préoccupation majeur pour nos concitoyens, sur le quotidien desquels elle a un impact considérable.
Ce PLFSS viendra renforcer ce qui est déjà mis en place en ouvrant, par exemple, la distribution à l'unité en cas de risque anticipé de pénurie. Il prévoira aussi la possibilité de recourir à un financement dérogatoire pour des dispositifs médicaux utilisés en substitution d'un dispositif médical en rupture d'approvisionnement.
Ce PLFSS est aussi un budget de responsabilité. Comme nous l'avons souligné à plusieurs reprises, nous sommes face à des contraintes budgétaires dont nous devons tenir compte. Cela doit se traduire par une accentuation de la pertinence et de l'efficience de nos dépenses, de même qu'il faut amener l'ensemble des acteurs à faire preuve de responsabilité. Ils devront tous participer à la maîtrise de la progression d'une partie de ces dépenses, dans une logique d'efforts partagés et d'équité.
La lutte contre la fraude…
Mme Nathalie Goulet. Ah !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. … sera aussi un enjeu majeur. Nous comptons la soutenir en lien avec la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam).
Par ailleurs, nous devrons réaliser des économies à hauteur de 5 milliards d'euros en 2025 par rapport à la progression tendancielle des dépenses. Un quantum d'efforts et des cibles d'économies ont été identifiés pour répondre à cet impératif, en respectant un effort partagé.
En ce qui concerne le transfert vers les complémentaires santé, j'ai entendu les attentes des députés et des sénateurs. Je les ai prises en compte dans le travail que je mène depuis bientôt deux mois pour l'accès aux soins de nos concitoyens.
En premier lieu, je rappelle que l'assurance maladie obligatoire finance à ce jour 80 % des dépenses de santé.
Ce chiffre n'a jamais été aussi élevé dans notre pays. Il s'explique par l'effort que nous consentons chaque année pour augmenter les dépenses de santé, mais aussi par la prise en charge chaque année de 400 000 patients de plus qui basculent en longue maladie – vous le savez, tout cela est lié à la démographie de notre pays, d'une société qui vieillit avec des maladies chroniques qui se développent. Quoi qu'il en soit, c'est l'honneur de la République que de proposer à tous une prise en charge par la solidarité collective aussi élevée.
Pour autant, afin de garantir la soutenabilité des finances publiques, il est essentiel de préserver cet équilibre entre l'assurance maladie obligatoire et la prise en charge par les organismes complémentaires.
Pour tenir compte des positions exprimées par l'ensemble des députés et des sénateurs, le quantum a été ramené de 1,1 milliard d'euros à 900 millions d'euros.
Ainsi, j'ai pu décider que le ticket modérateur de la consultation médicale, qu'il était potentiellement envisageable d'augmenter de 10 %, n'évoluera que de 5 %. (M. Bernard Jomier s'exclame.) La consultation médicale demeurera donc l'acte de soins de ville le mieux remboursé par la solidarité nationale. C'est essentiel pour garantir l'accès aux soins.
En complément, le ticket modérateur sur les médicaments augmentera, lui, de 5 %.
Mme Émilienne Poumirol. Oh là là ! (Sourires sur les travées du groupe SER.)
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Nous envisageons, par ailleurs, des baisses de prix des produits de santé pour 1,2 milliard d'euros, ainsi que des mesures d'efficience à l'hôpital et en ville, à chaque fois pour 600 millions d'euros.
Pour compenser le dérapage constaté sur les médicaments en cette fin d'année 2024 et évalué à 1,2 milliard d'euros, nous allons poursuivre le dialogue engagé avec les industriels, afin de trouver des mécanismes de contractualisation permettant de modérer les dépenses – la hausse de la clause de sauvegarde ne sera activée qu'en cas d'échec de la démarche.
C'est donc dans une logique de confiance et de coconstruction que je souhaite faire au maximum face aux nouveaux défis de maîtrise de la dépense des produits de santé. Nous devons atteindre nos objectifs d'économie, mais je souhaite avant tout laisser la place à la concertation et aux débats parlementaires, comme cela a été le cas à l'Assemblée nationale.
Il convient, en effet, de poursuivre le dialogue avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour définir les modalités concrètes de mise en œuvre de ce texte et atteindre la cible d'économie fixée. Je sais pouvoir compter sur vous.
L'examen à l'Assemblée nationale a enrichi ce projet de loi, les amendements adoptés retenus dans le texte visant à avancer sur des sujets essentiels pour la santé, notamment en termes de prévention. Je pense à l'annualisation de l'examen bucco-dentaire, à la généralisation des centres de santé, à la suppression de l'adressage dans le dispositif Mon soutien psy ou encore au développement de campagnes de vaccination contre le méningocoque, qui sont autant de belles avancées pour la santé publique.
L'amendement relatif à la réforme de la taxe dite soda est aussi à souligner, car il vise à renforcer nos actions pour inciter les Français à adopter une alimentation plus équilibrée. Je sais que ce sujet tient particulièrement à cœur à Mme la rapporteure générale, Élisabeth Doineau, et à M. le sénateur Xavier Iacovelli, qui défendent des amendements en ce sens. (Mme Émilienne Poumirol manifeste son ironie.)
Je ne puis malheureusement être exhaustive, mais je tiens à remercier les députés qui ont soumis des amendements et participé au débat.
Aujourd'hui s'ouvre un nouveau moment essentiel du dialogue parlementaire pour la santé des Français et l'accès aux soins. J'ai été très attentive aux débats en commission, qui ont commencé la semaine dernière. J'ai écouté vos réflexions et vos propositions. Je répondrai tout au long du débat à vos interrogations et aux évolutions que vous proposez sur le texte, dans un dialogue que j'espère nourri.
Concernant le niveau de l'Ondam, je le redis, jamais autant de moyens n'ont été dédiés à la santé. Nous continuerons en ce sens, mais, en parallèle, il convient d'améliorer l'efficience de nos dépenses. Il importe de trouver le bon équilibre. Ce n'est pas simple, mais il me semble que nous sommes en mesure d'y parvenir ensemble. Et c'est le seul chemin qui me paraisse responsable.
Ce PLFSS ne contient aucune réforme structurelle. C'est un budget ; ce n'est donc pas le bon véhicule pour engager une telle réforme.
Mme Émilienne Poumirol. Quand est-ce que ce sera le moment ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Pour autant, cela ne nous dispense pas d'une réflexion commune, que je souhaite engager, pour une loi de transformation profonde de notre système de santé et de son financement. Un travail sur le temps long est nécessaire. Il nous faudra le mener ensemble, en confiance et en responsabilité.
D'ici là, vous pouvez compter sur moi, tout au long de ces débats, pour rester fidèle à la méthode que je mène et que je crois juste : l'écoute et le dialogue. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Marie-Do Aeschlimann et M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous retrouvons aujourd'hui pour l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Si vous me le permettez, je structurerai mon propos en trois points.
Une fois n'est pas coutume, je vous dirai tout d'abord un mot de méthode, en revenant notamment sur les avancées issues des discussions, certes inachevées, à l'Assemblée nationale.
Je reviendrai ensuite sur la situation de nos finances publiques et de nos comptes sociaux.
Je détaillerai enfin les mesures de freinage de la dépense sociale proposées par le Gouvernement pour l'année prochaine.
Tout d'abord, le Premier ministre a assumé, sans ambiguïté aucune, le fait que la copie du Gouvernement était "perfectible", pourvu que la trajectoire de redressement des comptes soit respectée.
Comme vous le savez, l'examen du texte n'a pu arriver à son terme à l'Assemblée nationale, faute de temps. Néanmoins, le Gouvernement a fait le choix de ne pas en revenir au texte initial, comme la Constitution l'y autorisait, mais de transmettre au Sénat un projet de loi enrichi par certaines avancées des discussions à l'Assemblée nationale.
Nous avons choisi de retenir des amendements issus de toutes les sensibilités politiques, dont les dispositions constituent autant d'améliorations possibles du texte.
Je pense au cumul emploi-retraite des médecins, mais également aux mesures en faveur du monde agricole, à la taxation des boissons sucrées, à la réforme de la radiothérapie, à l'accès aux soins gynécologiques pour les personnes en situation de handicap ou encore à la lutte contre la fraude aux cotisations sociales.
Mme Nathalie Goulet. Ah !
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Non seulement nous sommes ouverts à la concertation avec les partenaires sociaux et aux propositions issues de vos travées, mais nous en avons surtout réellement besoin.
À cet égard, le Premier ministre l'a dit, nous avons entendu les remontées de terrain sur la CNRACL – c'est un exemple très concret, qui parle à beaucoup d'entre vous ici.
Je vous confirme que le relèvement du taux de cotisation des employeurs locaux à la CNRACL sera étalé sur quatre ans, plutôt que sur trois, conformément à la proposition soutenue en commission par Mme la rapporteure générale.
Nous reconnaissons en toute transparence que la copie est perfectible, pourvu que le cadre financier fixé par le Gouvernement, lui, soit bien respecté.
Je tiens à saluer l'esprit de responsabilité qui a guidé les travaux de la commission des affaires sociales du Sénat, sous la présidence de Philippe Mouiller et avec la contribution de la rapporteure générale et des rapporteurs des différentes branches.
À l'issue de l'examen en commission, la copie du Sénat s'inscrit pleinement dans la logique de rééquilibrage progressif des comptes sociaux proposée par le Gouvernement.
Comme vous l'avez indiqué, monsieur le président de la commission, cette instance a fait de l'objectif de contenir le déficit des comptes sociaux à 16 milliards d'euros en 2025 le "premier postulat" de ses travaux. Je vous en remercie. J'ajoute que je souscris pleinement à vos propos lorsque vous affirmez que, dès le lendemain de l'adoption du PLFSS, il nous faudra engager le temps des réformes structurelles dont notre modèle de protection sociale a besoin.
M. Bernard Jomier. C'était déjà le cas l'an dernier !
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je rejoins les propos de Mme la ministre Geneviève Darrieussecq : ce n'est pas un PLFSS de réformes structurelles ; pour autant, il nous faudra rapidement un agenda réformateur.
Le Premier ministre a d'ailleurs ouvert la voie dès vendredi dernier lors du Congrès des départements de France, en annonçant un certain nombre d'évolutions dans le champ social. Ces chantiers structurels, notamment ceux qui se trouvent à l'intersection du champ social et des compétences des collectivités locales, nous engageront pour les prochains exercices.
La situation de nos finances publiques, vous la connaissez. Elle exige des réponses urgentes. À l'heure où je vous parle, la dette publique dépasse les 3 220 milliards d'euros. C'est une réalité comptable. C'est surtout une réalité très concrète.
Si nous subissions un choc de taux de l'ordre de l'ordre de 1 %, par exemple, la charge de la dette de l'État augmenterait de 3,2 milliards d'euros la première année, de 19 milliards d'euros à l'horizon de cinq ans et de 33 milliards d'euros à l'horizon de neuf ans. Pour l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), un choc d'un point représenterait en moyenne un coût de financement supplémentaire de l'ordre de 0,4 milliard d'euros.
Or, comme vous le savez, pour les marchés peu importe que l'endettement soit issu de l'État, de la sécurité sociale ou des collectivités : la dette publique, c'est la dette de la France, non celle de telle ou telle entité.
L'effort de redressement que nous proposons pour 2025 n'a pas d'autre sens que de permettre à notre pays de renouer avec une trajectoire financière soutenable, au bénéfice – je le précise – de l'ensemble des administrations publiques. Cet effort est d'une ampleur inédite : ce sont 60 milliards d'euros qui doivent nous permettre de contenir le déficit public à 5 % du PIB pour 2025, en vue de le ramener sous la barre des 3 % en 2029.
Il s'agit au fond de préserver et d'améliorer nos conditions de financement, c'est-à-dire notre capacité à consolider les droits sociaux de nos concitoyens et à ouvrir de nouveaux droits, qu'il s'agisse des retraites des agriculteurs, de la prise en charge du handicap et de la perte d'autonomie, de l'indemnisation des victimes d'accidents du travail, ou encore de la prise en charge de la petite enfance.
Je parle, au fond, de la capacité de notre système social à jouer son rôle de protection et de cohésion. Notre modèle, vous le savez, est fondé sur la solidarité.
Mme Émilienne Poumirol. Ce n'est plus vrai !
M. Laurent Saint-Martin, ministre. C'est une valeur forte. C'est aussi et surtout une exigence de responsabilité, qui trouve sa traduction budgétaire dans le principe d'équilibre des comptes sociaux.
Or cet équilibre est aujourd'hui dégradé. En 2024, le déficit de la sécurité sociale dépassera d'environ 8 milliards d'euros le niveau qui avait été voté en loi de financement de la sécurité sociale initiale.
Mme Laurence Rossignol. Qui gouvernait ce pays ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre. En 2025, le déficit des comptes sociaux pourrait atteindre 28 milliards d'euros sans mesure nouvelle, du fait de l'évolution spontanée des dépenses.
Mme Émilienne Poumirol. La faute aux exonérations !
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Il y a donc un caractère d'urgence à nous engager résolument sur la voie d'un rééquilibrage des comptes sociaux. Veiller à leur équilibre, c'est tout simplement veiller à la soutenabilité de notre modèle de protection sociale.
De ce point de vue, ce PLFSS marque une étape importante, mais qui en appellera d'autres. Je le dis très clairement, il faudra nécessairement que l'effort se poursuive sur plusieurs exercices et qu'il trouve son prolongement dans des réformes structurelles, qui devront améliorer l'efficience des dépenses.
Le PLFSS pour 2025 prévoit donc un coup de frein réel, mais proportionné, me semble-t-il, des dépenses sociales. Le Gouvernement propose une progression maîtrisée de la dépense des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse de 2,8 %, soit 18 milliards d'euros de plus, après une augmentation de 5,3 % en 2024.
Sur l'année 2024, comme vous l'avez probablement lu dans la presse hier ou aujourd'hui, un risque a été détecté par la direction de la sécurité sociale sur les dépenses de médicaments, en raison d'un niveau des remises consenties par les laboratoires qui est inférieur de 1,2 milliard d'euros à la prévision qui avait été retenue jusqu'à présent.
En 2024, le jeu des stabilisateurs automatiques devrait permettre de contenir environ un tiers du dépassement qui aurait résulté de cette nouvelle prévision. Ainsi l'Ondam pour 2024 sera revu de 0,8 milliard d'euros à la hausse.
Le Gouvernement en a immédiatement informé le Parlement. Nous travaillons actuellement, en lien avec la commission des affaires sociales, à des mesures qui devraient nous permettre de réagir rapidement, afin de ramener à 0,2 milliard d'euros le dépassement par rapport à la trajectoire de l'Ondam pour 2025 présentée en texte initial.
Nous proposons tout d'abord de mobiliser différents leviers de maîtrise de la dépense des médicaments, pour un rendement estimé à 600 millions d'euros.
Nous proposons ensuite de baisser le plafond des remises sur les médicaments génériques, pour environ 100 millions d'euros.
Nous proposons également d'introduire le tiers payant pour les médicaments biosimilaires et hybrides, afin d'accélérer leur diffusion, à l'instar de ce que nous faisons déjà pour les génériques, ce qui permettrait d'économiser 50 millions d'euros.
Nous proposons encore d'activer la clause de sauvegarde sur les dispositifs médicaux. Le montant Z sera révisé à la marge, afin de tenir compte de l'actualisation des prévisions sur la base des dernières données disponibles. Cela représente 150 millions d'euros.
Nous proposons enfin d'étendre les accords de maîtrise de prix-volume aux transports sanitaires. Cela représente 100 millions d'euros d'économies, soit l'équivalent du dérapage constaté en 2024 pour cette dépense.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, en toute transparence, les mesures que propose le Gouvernement pour freiner la nouvelle évolution de l'Ondam prévue sur l'année 2024.
À plus long terme, le Gouvernement souhaite se doter de nouveaux outils de régulation : ainsi, les amendements déposés en vue d'autoriser l'assurance maladie à appliquer de nouveaux plafonds de franchises spécifiques pour les transports sanitaires, d'une part, et les dispositifs médicaux, d'autre part, recevront un avis favorable. Compte tenu des délais de mise en œuvre opérationnels de ces dispositifs, il n'en est cependant pas attendu d'économies significatives dès l'année prochaine.
En 2025, quatre piliers permettront de ramener le déficit de la sécurité sociale à 16 milliards d'euros, tout en finançant des mesures nouvelles.
Le premier pilier est la modulation de l'indexation des pensions de retraite. Comme cela a été annoncé, un compromis a été trouvé, afin de corriger la copie initiale présentée par le Gouvernement – c'était d'ailleurs l'une des propositions de la commission des affaires sociales du Sénat.
Toutes les retraites feront l'objet au 1er janvier 2025 d'une revalorisation égale à environ la moitié de l'inflation.
Les petites retraites feront l'objet d'une revalorisation complémentaire à l'été pour qu'elles ne soient pas affectées par cette mesure. Je précise que le calendrier et les modalités de revalorisation des minima sociaux restent inchangés.
Le deuxième pilier est la maîtrise des dépenses de l'Ondam, qui permettra de ramener la progression de celui-ci à son niveau spontané de 2,8 %.
Les marges de manœuvre que nous dégageons nous permettront de financer les mesures nouvelles que le Gouvernement souhaite déployer : en faveur des professionnels de santé libéraux, que nous proposons de revaloriser via une enveloppe de 1,6 milliard d'euros ; en faveur de l'hôpital, dont nous proposons d'augmenter le budget de 3 milliards d'euros ; en faveur des établissements sociaux et médico-sociaux, dont nous proposons d'accroître le budget de plus de 2 milliards d'euros.
Le troisième pilier est constitué par les réformes d'efficience. Je pense notamment à celle des allégements généraux, qui doit nous permettre de lutter plus efficacement contre les trappes à bas salaires. Mais, comme vous le savez – nous l'avons dit à plusieurs reprises –, nous sommes ouverts à des ajustements sur ce point, afin de modérer la contribution demandée aux entreprises et aux employeurs.
J'ajoute – c'est le quatrième pilier – que nous continuerons à amplifier nos efforts en matière de lutte contre la fraude sociale, en lien avec les caisses du régime général, l'Urssaf et la Mutualité sociale agricole (MSA). Je l'ai dit, nous avons repris plusieurs amendements en ce sens qui étaient issus de l'Assemblée nationale. Je relève également des propositions intéressantes de la commission des affaires sociales du Sénat sur ce sujet.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis, aux côtés de mes collègues du Gouvernement, de travailler avec vous dans les prochains jours pour améliorer encore ce PLFSS, qui est avant tout, je le crois profondément, un texte d'urgence, mais aussi et surtout de responsabilité collective. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi qu'au banc des commissions. – M. Khalifé Khalifé applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre du travail et de l'emploi. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les sénateurs, le travail est au cœur du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Le travail finance notre protection sociale : les contributions sur le travail sont encore la ressource très majoritaire de la sécurité sociale. Les travailleurs et les employeurs comptent sur l'assurance santé, sur l'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles et sur une assurance vieillesse qui protège et qui tienne ses promesses durablement.
Notre discussion s'ouvre aujourd'hui dans un contexte différent, dans un environnement économique qui se tend, avec un niveau élevé de défaillances d'entreprises et d'importantes conséquences sociales dans les territoires, avec l'annonce de plusieurs plans sociaux.
Je profite de ce passage à la tribune pour saluer les projets d'accords trouvés vendredi dernier entre les organisations de salariés et les organisations patronales sur l'assurance chômage et l'emploi de seniors.
Mme Émilienne Poumirol. On prend les mêmes et on recommence !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Ce premier succès démontre qu'une nouvelle méthode et un dialogue social renouvelé permettent des avancées importantes. Il souligne également combien les partenaires sociaux sont des acteurs incontournables de la vie démocratique, sociale et économique du pays.
Il souligne encore qu'il est important de faire confiance au dialogue social – je sais que votre assemblée et son président y sont particulièrement attachés. Le succès de ces négociations est une réussite collective.
Alors que l'assurance chômage doit pleinement jouer son rôle de filet de sécurité, les différents points de l'accord conclu récemment permettent aujourd'hui de répondre aux enjeux.
Je reviens au cœur de mon propos sur le PLFSS. Pour tous les salariés de ce pays, pour tous les employeurs, nous avons la responsabilité collective de protéger notre modèle social, de le rendre plus efficace et d'en garantir la soutenabilité.
Si le travail et l'activité financent notre protection sociale, aujourd'hui, objectivement, ils ne suffisent pas.
Nous devrons, à terme, réfléchir à un mode de financement différent de notre protection sociale. Dans l'immédiat, personne ne peut se satisfaire que notre modèle social soit financé de facto par le déficit et l'emprunt !
Il nous faut donc travailler plus et mieux, tous et mieux, plus longtemps et en meilleure santé, afin de financer nos investissements d'avenir et notre protection sociale.
Ministre du travail et de l'emploi, mon rôle est d'abord de faire en sorte que notre économie continue à créer des emplois. Il est aussi de faire en sorte que ces emplois offrent un travail de qualité, exercé dans de meilleures conditions et que cette contribution soit reconnue. C'est ce que nous proposons aussi au travers de ce PLFSS.
Sur l'emploi et le travail, le PLFSS est d'abord un outil pour favoriser le dynamisme salarial et le travail qui paie. C'est le sens premier de l'article 6. Nous avons un double impératif : soutenir l'emploi dans le contexte particulier que l'on connaît ; développer la compétitivité de nos entreprises.
Avec cet article 6, nous souhaitons ouvrir un débat important. De fait, pour la première fois depuis très longtemps, cet article prévoit de réviser à la baisse des allégements de cotisations patronales. L'Assemblée nationale l'a supprimé sans proposer de solution de rechange, mais le texte arrive finalement au Sénat dans son état initial.
Je suis persuadée qu'il ne peut pas y avoir de cohésion sociale sans entreprises qui marchent, et inversement. La préservation de l'emploi est une priorité !
Je partage donc le souci exprimé de protéger l'emploi et de limiter la dynamique d'augmentation du coût des allégements généraux.
Pour tenir compte de ces différentes contraintes, le Gouvernement, comme Laurent Saint-Martin l'a récemment souligné, est prêt à revoir le rendement de cette mesure. Ce sera tout l'objet des discussions que nous aurons au Sénat.
Nous devrons également avancer sur l'articulation entre salaires, cotisations sociales et prestations. C'est l'un des enjeux de l'allocation sociale unique, chantier que le Premier ministre vient de relancer, sous l'égide de mon collègue Paul Christophe.
De la même manière, en dehors du champ du PLFSS, sur les minima conventionnels et les classifications professionnelles, qui contribuent grandement au tassement des grilles salariales, nous avons commencé à recevoir les branches qui tardent trop et, de façon structurelle, à négocier sur ces points.
Nous devons enfin, sur la question des salaires, examiner la question du temps partiel subi, qui, à 80 %, concerne des femmes. L'inspection générale des affaires sociales (Igas) va rendre très prochainement un rapport sur la question. J'aimerais que les partenaires sociaux comme les parlementaires puissent s'en saisir rapidement.
Comme vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, les leviers sont nombreux. Nous devons les activer pour que le travail paie dans notre pays.
Ainsi que je l'ai dit lors de mon audition par la commission, je suis, comme vous tous, attachée à la responsabilité budgétaire. Celle-ci est le deuxième axe de ce qui concerne le travail et l'emploi dans ce PLFSS. Un effort collectif doit être réalisé, afin d'assurer la pérennité de notre modèle social tout en préservant les plus vulnérables.
La proposition du Sénat tendant à instituer une contribution de solidarité par le travail est intéressante. Elle permettrait de mieux financer la branche autonomie, tout en présentant une grande souplesse d'application, laissant de la place au dialogue social.
Pour ce qui concerne les pensions de retraite, votre commission des affaires sociales a adopté une nouvelle rédaction de l'article 25, avec une revalorisation en deux temps : de l'ordre de la moitié de l'inflation pour tous au 1er janvier et une revalorisation complémentaire rétroactive à intervenir au 1er juillet, de manière que les pensions inférieures au Smic soient revalorisées au niveau de l'inflation.
Je veux rappeler ici pourquoi nous soutenons cette mesure.
Nous partageons tous l'objectif de garantir la soutenabilité et la pérennité de notre régime de retraite par répartition. La dégradation de la situation économique appelle des mesures qui produisent leur effet à court terme, tout en gardant un esprit de solidarité et de justice.
Par ailleurs, je rappelle que le précédent gouvernement a utilisé un instrument très puissant, en janvier de cette année, en revalorisant les pensions de 5,3 %, une mesure à 14 milliards d'euros pour les finances publiques.
Les retraités ne constituent pas plus que les salariés un bloc homogène. Je pense que cet article permet de préserver à la fois les retraités et les plus fragiles d'entre eux.
Enfin, garantir la soutenabilité du système de retraite oblige aussi à regarder en face la situation de certains régimes déficitaires, comme la CNRACL.
Le régime des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers souffre d'une démographie défavorable, avec moins de cotisants, plus de pensionnés et un taux de cotisations employeur très inférieur à celui du reste de la fonction publique.
Sans réforme, la CNRACL présenterait, en 2030, un déficit de 10 milliards d'euros – sur les 14 milliards d'euros de déficit de l'ensemble de la branche vieillesse.
Nous y répondons en procédant à une augmentation progressive des cotisations des employeurs. Nous avons fait le choix de hausses graduelles, plutôt que du choc préconisé par les inspections dès 2025. Les discussions en commission des affaires sociales ont permis d'enrichir ce texte, et les dispositions de l'amendement déposé par Mme la rapporteure générale vont dans le sens d'une plus grande progressivité et d'un lissage. Bien entendu, le Gouvernement soutiendra cette proposition.
Je veux maintenant évoquer la branche maladie.
Le montant des indemnités journalières (IJ) est passé de 8 milliards d'euros en 2017 à 17 milliards d'euros en 2023. Cette croissance ne s'explique qu'en partie – à hauteur de 58 % – par le vieillissement de la population active et par les conséquences automatiques des revalorisations du Smic. Elle doit donc nous interroger.
Nous avons intégré, dans ce PLFSS, une mesure d'économie sur les IJ qui sera mise en œuvre par voie réglementaire.
J'ai conscience qu'il s'agit d'une réponse de court terme, qui transfère le coût vers l'employeur et qui risque de polariser un peu plus encore le monde du travail, entre les salariés qui sont protégés par de bonnes conventions collectives et ceux qui ne le sont pas. Cette mesure comptable était nécessaire, sans être satisfaisante.
Nous devrons impérativement réexaminer le système des IJ dès que le budget sera voté, afin de trouver un meilleur équilibre, plus juste, entre responsabilité individuelle, responsabilité de l'entreprise et solidarité nationale.
Je souhaite que nous puissions en discuter au Parlement, mais nous devrons aussi échanger avec les partenaires sociaux et les chercheurs en mettant ces sujets sur la table dès janvier 2025.
Après le travail qui paie et la responsabilité budgétaire, un troisième grand axe de ce PLFSS pour le travail et l'emploi est formé de mesures de justice sociale et d'appui aux entreprises.
En matière agricole, ce PLFSS contient plusieurs progrès significatifs, comme la pérennisation de la hausse des exonérations de cotisations patronales sur le travail saisonnier et la hausse des exonérations de cotisations au moment de l'installation, des avancées qui ont été demandées en janvier dernier.
Pour ce qui concerne les exonérations pour les travailleurs saisonniers, nous avons complété le dispositif : à l'Assemblée nationale, nous avons pu avancer avec les députés engagés sur ce sujet, de manière à neutraliser les effets de la réforme des allégements généraux sur le dispositif dit travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi (TO-DE).
L'application de cette disposition outre-mer pose des difficultés spécifiques. Un rapport de l'Igas et de l'inspection générale des finances (IGF) sera d'ailleurs rendu dans les prochains jours ; il a déjà été présenté aux sénateurs et députés ultramarins. Ce bilan montre qu'il existe des marges d'efficacité pour que cette exonération soit mieux ciblée et plus efficace et pour qu'elle soutienne mieux l'emploi.
Un travail doit être engagé sur le sujet dans le cadre de l'ordonnance prévue à l'article 6. En attendant, il paraît sage de neutraliser l'impact de l'article 6 sur la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (Lodéom) ; le Gouvernement sera ouvert à toutes les propositions.
Nous mettons aussi en œuvre la convergence du mode de calcul des retraites des agriculteurs avec le régime général. Il s'agit d'une mesure de justice sociale, qui permet de tenir compte des importantes variations des revenus agricoles au cours des mauvaises années.
Nous avions travaillé avec les députés pour accélérer au maximum l'entrée en vigueur de cette réforme. Le Gouvernement a déposé un amendement pour anticiper certains effets de la réforme dès 2026. Ce point aussi pourra être amélioré dans le cadre de nos discussions.
Je veux aborder un dernier point très important : l'article 24 du PLFSS, qui souligne l'importance du dialogue social auquel nous sommes attachés. En effet, cette disposition permet la bonne transposition dans la loi de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 15 mai 2023 concernant l'indemnisation des accidents du travail.
Je sais que le Sénat y est particulièrement attentif – je pense notamment aux sénatrices Annie Le Houerou et Marie-Pierre Richer, qui ont rendu un rapport d'information sur la question au début du mois d'octobre.
La transposition est un exercice délicat : le passage des termes d'une négociation sociale serrée au droit positif n'est pas toujours évident. D'ailleurs, pour ceux qui s'en souviennent, la rédaction adoptée l'an dernier n'était pas totalement satisfaisante… Les partenaires sociaux ont été conduits à préciser certains termes de l'accord de 2023.
Cet automne, un travail soutenu, réalisé avec les partenaires sociaux et les parlementaires, a permis d'aboutir à une meilleure transcription de l'ANI, une transcription plus complète qui apporte des améliorations substantielles. Il s'agit notamment de permettre une sortie en capital, à la demande de la victime, pour la part majorée qui indemnise le préjudice personnel et qui est versée en cas de faute inexcusable de l'employeur.
Derrière le vocabulaire juridique, il y a des situations douloureuses, celles de personnes qui n'ont plus qu'une faible espérance de vie et qui préfèrent opter pour une sortie en capital, avec de l'argent immédiatement disponible, plutôt que pour une rente. C'est ce qui sera rendu possible par l'article 24.
Le Gouvernement soutiendra les amendements qui ont été travaillés avec les partenaires sociaux et les sénateurs et dont les dispositions permettent d'améliorer réellement le dispositif.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, le choix que nous vous proposons en matière de travail et d'emploi.
Beaucoup de discussions ont lieu depuis que le texte est passé en conseil des ministres. Certains débats ont commencé à l'Assemblée nationale sans pouvoir aboutir. Il vous revient maintenant de faire des choix pour soutenir le travail et l'activité, des choix responsables et qui ne cèdent en rien au court-termisme. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme la rapporteure générale de la commission des affaires sociales et M. Khalifé Khalifé applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre. (M. Xavier Iacovelli applaudit.)
M. Paul Christophe, ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons ensemble une responsabilité sur la partie du PLFSS qui concerne les solidarités.
Comme vous le savez, l'Assemblée nationale n'a pu aller jusqu'au bout de l'examen du texte proposé. Je n'ai donc pu défendre les articles qui me concernaient. Nous procéderons ensemble aux évolutions nécessaires, et je serai autant que possible le garant de la prise en compte des souhaits des députés, en complément des vôtres.
Je rappelle également que le texte qui vous est proposé a été préparé dans un cadre budgétaire contraint, et rapidement. Il est donc perfectible. Je sais que vous avez des avancées importantes à proposer ; j'y reviendrai.
Si nous avons eu le temps de les évoquer en audition, je tiens à rappeler ici les grands principes qui guident le budget de mon ministère, à savoir l'efficience, qui va de pair avec la fraternité, avec un budget d'investissement dans notre avenir, c'est-à-dire dans notre modèle de solidarité, et la prise en compte de notre transition démographique.
Dans le contexte budgétaire actuel, nous savons que les plus vulnérables d'entre nous seraient les premiers à souffrir d'un dérapage des finances publiques.
Les commissaires des affaires sociales peuvent en témoigner compte tenu des échanges que nous avons eus : mon ministère entend prendre toute sa part à l'effort collectif pour que la fraternité – la troisième valeur républicaine, celle qui apporte une indispensable dimension humaine – continue d'être un principe général d'action publique.
Je les remercie du travail qui a été mené. Celui-ci sera encore approfondi à partir d'aujourd'hui dans cet hémicycle. En effet, si les moyens des solidarités sont en hausse pour accompagner toutes les familles et tous les Français, il nous faut aussi – c'est indispensable – renforcer l'efficacité au juste coût, autrement dit l'efficience de nos moyens publics.
Pour ce faire, nous encouragerons les améliorations dans les pratiques d'achat des établissements et les mises en commun des ressources.
Nous favoriserons une sobriété médicamenteuse dans les établissements, car nous savons qu'un usage abusif des médicaments peut détériorer la santé et altérer la qualité de vie de nos concitoyens.
Nous lutterons contre toutes les formes de mésusage des moyens publics, lesquels doivent toujours aller à la qualité de l'accompagnement des usagers.
À cet égard, je vous remercie, madame la sénatrice Aeschlimann, de votre amendement visant à s'assurer que le complément de libre choix du mode de garde dit structure soit bien utilisé uniquement au bénéficie de la qualité de prise en charge.
Je commencerai en évoquant la politique familiale, qui est une priorité du Gouvernement et du Premier ministre.
Ce PLFSS conforte tout d'abord les moyens prévus pour le service public de la petite enfance. Celui-ci est crucial et a un impact considérable sur la vie des Français. Il est nécessaire d'agir de manière résolue et continue si l'on veut réduire les tensions sur l'offre d'accueil et la charge qui en découle pour les parents, et nous devons aller plus loin dans le contrôle de la qualité de cette offre.
Concrètement, nous renouvelons le défi de créer 35 000 places dans les établissements d'accueil du jeune enfant, en finançant les investissements nécessaires à horizon de 2027.
Nous poursuivons également la revalorisation des professionnels, qui sont essentiels à notre ambition pour la petite enfance. Dès cette année, le bonus attractivité commence son déploiement, pour augmenter les salaires nets à hauteur de 150 euros en moyenne en début de carrière.
Le service public de la petite enfance bénéficiera à partir du 1er janvier 2025 d'un nouvel élan, grâce aux compétences obligatoires conférées aux communes : celles-ci auront le rôle de recenser l'offre disponible et disposeront enfin de nouveaux outils pour assurer la qualité de l'accueil du jeune enfant.
De fait, l'objectif de ce service public est aussi et surtout de renforcer la sécurité des jeunes enfants. Les lieux d'accueil sont les premiers lieux de la vie ; ils doivent la protéger.
Nous devons tourner la page des intolérables situations d'optimisation financière, qui font souffrir nos enfants et les professionnels et qui créent une défiance des parents.
Mme Émilienne Poumirol. Très bien !
M. Paul Christophe, ministre. Rôle renforcé des communes, revalorisation des professionnels, création de nouvelles places : telles seront les clés d'une confiance retrouvée et d'un secteur consolidé.
M. Xavier Iacovelli. Très bien !
M. Paul Christophe, ministre. Je sais que le Sénat a des propositions sur les modalités de financement des crèches. Comme ma collègue Agnès Canayer, je les considère avec attention, tout en ayant à l'esprit le besoin de stabilité et de visibilité du secteur, en cette période décisive pour la relance de la création de places de crèche.
Je vous rappelle aussi que nous devons toutes et tous ici prêter une attention particulière aux familles monoparentales, dont la charge incombe plus souvent à des femmes.
À partir de 2025, comme prévu, la branche famille financera à hauteur de 600 millions d'euros en année pleine une réforme du complément de libre choix du mode de garde. Ce dernier pourra être versé, pour les familles monoparentales, jusqu'aux 12 ans de l'enfant, contre 6 ans actuellement.
Tous les parents sans exception ont besoin de concilier leurs différents temps de vie. Pour qu'ils puissent jouer pleinement leur rôle, nous devons favoriser leur accès à l'emploi et leur maintien dans la vie professionnelle. Ces exigences nécessitent une hausse des dépenses de près de 2 milliards d'euros sur la branche famille en 2025.
Pour ce qui concerne le projet de "congé de naissance" ou "d'accueil du jeune enfant" – peu importe le nom –, je partage avec Agnès Canayer et Salima Saa le besoin d'ajouter un nouveau droit, après les congés maternité et paternité. Nous allons reprendre les concertations pour faire plus simple et plus efficace, au service du développement lors des 1 000 premiers jours de l'enfant et de l'égalité entre les femmes et les hommes.
La valeur de fraternité porte également nos actions en faveur des personnes en situation de handicap.
Je souhaite, avec Charlotte Parmentier-Lecocq, conforter les mesures de la Conférence nationale du handicap (CNH) et la dynamique impulsée par les jeux Paralympiques en faveur d'une société plus inclusive.
Le PLFSS prévoit ainsi une accélération du déploiement des 50 000 nouvelles solutions d'accompagnement. Le rythme prévu s'appuyait sur 200 millions d'euros environ par an. Nous porterons l'enveloppe disponible à 270 millions d'euros supplémentaires en 2025.
Cette dynamique doit rendre possible, dès 2025, le déploiement effectif de 15 000 solutions plus individualisées, plus adaptées aux besoins spécifiques des personnes, au plus près de leurs lieux de vie.
On ne peut pas tout standardiser. Nos politiques visent à faciliter le sur-mesure. Si besoin, ces solutions pourront bénéficier, en complément, du fonds de transformation de l'offre de 250 millions d'euros annoncé en Comité interministériel du handicap et confirmé dans le PLFSS.
La transformation vers le milieu ordinaire ne se décrète pas. Elle s'accompagne et doit être dotée de moyens.
Dans ce contexte, nous aurons une attention particulière à l'école pour tous, à laquelle je crois profondément. Je le dis souvent, votre camarade de classe en situation de handicap peut être votre ami aujourd'hui, votre collègue de demain ou votre futur compagnon ou époux.
Une société est véritablement inclusive quand elle combat activement les préjugés dès le début de la sociabilisation. C'est de cette manière que l'on bâtit une société nativement inclusive.
Pour ce faire, notre école a besoin de moyens d'accompagnement médico-sociaux. Mon ministère est en mesure de les fournir.
Toutefois, avant même l'école, il y a le repérage, qu'il faut réaliser le plus tôt possible. À cet égard, nous apportons, avec Mme la sénatrice Guidez, une amélioration sur le service de repérage, pour nous assurer qu'il aille bien jusqu'aux 6 ans révolus de l'enfant, c'est-à-dire 6 ans et 344 jours, et non 5 ans et 344 jours. Cette correction a son importance, car un repérage et un diagnostic précoces sont essentiels pour éviter les risques de surhandicap.
J'en viens à un sujet d'attention pour lequel les défis sont toujours devant nous : le vieillissement de la population. Nous en avons beaucoup parlé, et nos préoccupations sont communes.
Oui, il faut se préparer dès maintenant à l'augmentation importante du nombre de personnes de plus de 85 ans qui auront besoin d'un soutien dans leur autonomie.
Le vieillissement de notre population est une réalité incontournable, même si – j'ai plaisir à partager avec vous cette information – le vieillissement en bonne santé s'améliore enfin dans notre pays, comme les toutes dernières statistiques de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) viennent d'en témoigner. La prévention paie !
En anticipant ce phénomène et en repensant notre approche politique, nous ne ferons pas seulement face à cette situation : nous garantirons également la préservation des valeurs fondamentales qui font la France.
Dans l'immédiat, nous faisons face à une urgence : la situation financière difficile des Ehpad ne peut plus durer ! C'est dans l'intérêt des résidents, des professionnels, des familles et des valeurs sociales de notre pays.
Aujourd'hui, 90 % des Ehpad de demain sont déjà là. Nous avons besoin d'eux ! Or leurs difficultés financières sont structurelles, comme l'ont montré plusieurs rapports parlementaires. J'ai bien l'intention d'apporter, avec vous, des solutions pérennes face à cet enjeu, et j'ai examiné avec attention les nombreux amendements déposés en ce sens.
Le sujet des Ehpad n'est pas seulement financier. Ceux-ci doivent se transformer : au-delà du "bien vieillir", il faut en faire des lieux de "bien vivre". Certains logent des étudiants, abritent des crèches conjointes, des services publics. Certains accueillent même parfois des lieux de convivialité pour tout un quartier. Des investissements immobiliers supplémentaires sont prévus à cet effet dans le PLFSS.
Évidemment, le financement des Ehpad doit également être simplifié. Ils ne sont pas uniquement financés, comme vous le savez, par la sécurité sociale. Or le renvoi de responsabilités entre cofinanceurs est délétère.
En complément d'une mesure de la loi Bien Vieillir, le PLFSS prévoit ainsi de financer de manière volontariste l'expérimentation du financement de l'entretien de l'autonomie en Ehpad, qui relève aujourd'hui des départements, par la branche de la sécurité sociale du même nom.
Cette réforme, pour laquelle 23 départements candidats sont retenus, représente un surcoût total d'environ 200 millions d'euros pour la sécurité sociale.
Cependant, nous croyons tous au caractère structurant de cette expérimentation, au point que certains voudraient en réduire la durée de quatre à deux ans. C'était le souhait de la députée Annie Vidal, que je me permets de citer ici. Je comprends que c'est aussi votre souhait, madame la sénatrice Deseyne. Je vous confirme que j'y serai favorable.
Durant l'année passée, nous avons travaillé dans ces 23 départements pour la fusion des sections qui commencera maintenant dans seulement un mois et demi si cette disposition est votée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'attire votre attention sur le fait que ce calendrier ne permet plus de modification. Nous avons besoin de tous les services impliqués dans cette expérimentation, dont les agences régionales de santé (ARS) et les équipes des départements, que je remercie par ailleurs. Ils ont besoin de stabilité.
Enfin, les moyens des Ehpad augmenteront, tous départements confondus, via le recrutement d'environ 6 500 professionnels supplémentaires, pour atteindre au plus vite les 50 000 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires annoncés pour 2030.
Ces évolutions aboutissent à une hausse des moyens dédiés aux personnes âgées d'environ 6 % en 2025, soit une augmentation supérieure à celle de l'année dernière.
Accompagner le vieillissement, c'est également soutenir nos aides à domicile, grâce auxquelles se réalise le souhait de nombreux Français de vieillir chez eux, que ce soit à leur domicile historique ou dans une résidence adaptée.
En accord avec la loi Bien Vieillir d'avril 2024, nous proposons, dans ce PLFSS, une nouvelle aide financière de 100 millions d'euros à destination des départements, qui la dirigeront vers les aides à domicile, afin de soutenir une partie de leurs dépenses en mobilité. En effet, les aides à domicile, qui sont souvent des femmes, financent encore leurs déplacements professionnels, ce qui est inacceptable !
Surtout, et c'est un effort important annoncé par le Premier ministre lors des Assises des Départements de France en fin de semaine dernière, nous allons préserver intégralement les taux de compensation des départements sur les dépenses d'allocation personnalisée d'autonomie et de prestation de compensation du handicap en 2025.
Cela a un coût : environ 200 millions d'euros. Cette somme sera ajoutée aux dépenses de la branche. Mais c'est aussi un signal fort pour mettre fin à un système de concours daté et illisible, qui ne répond plus aux besoins démographiques à venir.
Aujourd'hui, le montant des concours de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) dépend de l'évolution de ses recettes. L'enjeu est évidemment de les faire évoluer en fonction des besoins identifiés sur les territoires.
C'est ce que nous faisons avec ces 200 millions d'euros pour 2025, en nous assurant que, malgré une hausse dynamique des dépenses liée au vieillissement, le taux de compensation sera maintenu.
En lien avec Départements de France et à partir de ce premier mouvement significatif, nous négocierons ensemble des règles d'évolutions claires en 2026 et pour les années suivantes, afin de faire converger les taux de compensation et de donner à ces collectivités essentielles une visibilité sur l'accompagnement à venir de la sécurité sociale par rapport à des besoins en hausse.
C'est aussi cela la nouvelle méthode partenariale du Gouvernement avec les collectivités territoriales sur cet enjeu déterminant du vieillissement.
Enfin, je souhaite conclure en évoquant un sujet que je porte depuis plusieurs années, celui des 11 millions d'aidants de personnes en situation de handicap ou âgées en perte d'autonomie.
Je vous confirme que le PLFSS prévoit une augmentation des moyens pour le déploiement de nouvelles places de répit, et je surveille avec attention le déploiement des droits rechargeables du congé proche aidant pour chaque nouvelle personne aidée.
Je souhaite par ailleurs donner un nouveau souffle à la stratégie Agir pour les aidants, que les récents soubresauts démocratiques n'ont pas permis de porter autant que ce sujet le méritait. Un comité de suivi aura bien lieu avant la fin de l'année.
J'en profite pour ajouter que, dans une logique de convergence sociale à Mayotte, madame la sénatrice Ramia, et d'égalité de traitement entre tous nos concitoyens, je serai favorable à l'extension de l'assurance vieillesse des aidants à Mayotte.
Ceux qui accompagnent leurs proches doivent pouvoir cotiser au titre de leurs droits à la retraite pendant cette période partout sur notre territoire.
Mesdames, messieurs les sénateurs, les modifications de la trajectoire de la branche autonomie aboutissent à une hausse des dépenses en 2025, non plus de 2,4 milliards d'euros, mais de 2,6 milliards d'euros, compte tenu des efforts sur les concours. J'assume ces investissements nécessaires, au bénéfice aussi bien de la fusion des sections que du respect de notre mouvement de développement de l'offre à l'horizon 2030. Les Français comprennent très bien le vieillissement de notre pays et sont prêts à les soutenir.
Cela ne nous exempte ni d'exercer un devoir d'efficience ni de continuer à travailler sur la conciliation entre la responsabilité individuelle et la socialisation du risque autonomie, sachant que nous avons consacré ce dernier il y a maintenant quatre ans lors de la création de la branche. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)
(…)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Je vous remercie pour la qualité de cette discussion générale, au cours de laquelle de nombreux points ont été abordés, concernant les dépenses comme les recettes.
Un consensus se dégage en faveur d'une grande restructuration de notre système de santé. Du reste, celle-ci se fait à bas bruit depuis des années, notamment dans l'accès aux soins. Cela ne paraît pas forcément évident, puisqu'il y a encore des déficits sur certains territoires, mais l'action des communautés professionnelles territoriales de santé, tout comme la transformation des relations entre le secteur libéral et l'hôpital, reflète un travail de fond.
Oui, nous devons travailler aussi à une grande loi de prévention, réfléchir à la transition de notre système de santé et garantir son financement, en gardant la solidarité comme point de mire. Certes, le PLFSS n'a pas pour objet de répondre à ces enjeux, mais j'ai bien noté plusieurs des propositions que vous avez formulées – les discussions à venir promettent d'être riches. Comme le dit régulièrement le Premier ministre, tout est améliorable et nous pouvons discuter de tout. Avançons ensemble.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Paul Christophe, ministre. Je suis heureux que les motions aient été rejetées, car l'on voit combien vous avez la volonté de débattre : il eût été dommage de nous en priver.
Vous avez évoqué la trajectoire de vieillissement de la population. Le rapport de Dominique Libault estimait les besoins à 10 milliards d'euros : nous prévoyons 4,2 milliards d'euros pour la santé et 5,8 milliards d'euros pour l'autonomie. Nous avons fléché pour cela 0,15 point de CSG, soit 2,4 milliards d'euros en 2024. Il nous revient de construire une trajectoire pour trouver le reste de la somme. Je sais que votre commission a beaucoup travaillé sur le sujet : je serai très heureux de participer au débat et de me nourrir de votre réflexion.
J'ai entendu dire que 6 500 emplois supplémentaires ne représentaient qu'à peine un poste par Ehpad, que c'est insuffisant, etc. Je rappelle qu'il s'agit d'une trajectoire de 50 000 emplois à l'horizon 2030, qui entre dans sa deuxième année. Il y a eu 6 000 recrutements l'an passé, il y en aura 6 500 cette année, et j'espère que cette tendance se poursuivra. Pour l'heure, en tout cas, nous respectons la trajectoire prévue, qui prévoit donc bien plus qu'un salarié par Ehpad. D'ailleurs, il ne suffit pas de créer des postes, il faut aussi attirer les candidats. Une campagne de communication sera lancée en fin d'année pour valoriser l'ensemble des métiers du soin.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Je me réjouis du débat à venir. Allégements généraux, retraites – notamment agricoles –, Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, transposition de l'accord national interprofessionnel sur les accidents du travail : beaucoup reste à faire pour prolonger le travail de votre commission et améliorer significativement le texte.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Je souhaite simplement rappeler que la commission se réunira pendant la suspension.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures cinquante-cinq.
La séance est suspendue.
Source https://www.senat.fr, le 25 novembre 2024