Déclaration de Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics, sur la régulation et la sécurité du e-commerce, à l'Aéroport de Paris-Charles de Gaulle le 29 avril 2025.

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Circonstance : Déplacement sur la régulation et la sécurité du e-commerce

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,

Le commerce numérique est devenu un champ de bataille économique, et la France refuse d'y entrer sans règles.

Aujourd'hui, ce sont 800 millions de petits colis qui entrent chaque année sur notre territoire sans droits de douane, à des prix défiants toute concurrence. 91% viennent de Chine. Derrière ces chiffres, il y a une réalité : une vague massive de produits souvent dangereux, vendus sans respect de nos normes, de notre fiscalité, de nos exigences environnementales et sociales.

Sur les produits achetés en ligne, nous constatons un taux de non-conformité de 94 %, dont 66 % de produits dangereux. Cela signifie que derrière un achat anodin, un consommateur sur deux prend aujourd'hui un risque pour lui-même ou ses enfants.

Face à cela, il y a deux options : Se résigner, ou agir. Nous avons choisi d'agir.

En première ligne, et je veux saluer aujourd'hui leurs actions que nous avons pu constater il y a quelques minutes encore, ce sont nos douaniers.

Ici à Roissy, ils font face chaque jour à une marée de colis, dans un système où un colis = une déclaration. Dans un système où les contrôles se font colis par colis, sur des marchandises à l'unité, souvent avec des valeurs faibles, leur travail est une course contre la montre, contre le dumping fiscal, contre les nombreuses fraudes.

En 2024, pour que chacun ait un ordre d'idée, les douaniers à Roissy ont traité plus de 180 millions de déclarations, une hausse de près de 50% par rapport à l'année 2023.

En tant que ministre des Douanes, je suis ici pour dire que la France ne baissera pas la garde. Nous ferons respecter nos règles pour chaque colis, pour chaque produit, pour chaque consommateur.

C'est pourquoi nous allons renforcer les contrôles en :

- prêtant une attention particulière à certains produits particulièrement sensibles pour la sécurité des consommateurs tels que les médicaments ;
- agissant sur l'établissement de la valeur des marchandises ;
- repérant plus facilement la non-conformité des produits ;
- renforçant les sanctions ;
- luttant davantage contre les contrefaçons.

Mais nous devons aller plus loin, et frapper plus fort.

C'est pourquoi, pour la première fois, nous décloisonnons l'action de l'État :

- Douane, répression des fraudes et services fiscaux agiront désormais main dans la main.
- Chaque produit, chaque opérateur suspect fera l'objet d'une surveillance croisée, immédiate, efficace.

Nous serons intransigeants :

- Pour défendre nos entreprises contre la concurrence déloyale.
- Pour protéger nos consommateurs contre des produits dangereux.
- Pour garantir que chacun paie sa juste part d'impôt.

Concrètement, nous rendrons publics les produits retirés des plateformes, pour que chaque consommateur sache à quoi s'attendre. Nous ne laisserons plus circuler des produits dangereux en toute impunité.

C'est une question de sécurité économique, mais aussi de justice.

Et parce que ce combat dépasse nos seules frontières, il faut que nous le portions en européens.

J'ai déjà engagé des discussions avec mon homologue des Pays-Bas et je m'entretiendrai avec mon homologue d'Allemagne lorsqu'il aura été nommé.

Je serai dans les prochaines semaines à Bruxelles pour bâtir cette coalition d'États qui refusent que notre marché unique soit déstabilisé par une concurrence sauvage.

Nous défendons deux mesures très concrètes :

- En anticipation de la réforme de l'Union douanière en 2028, nous défendrons l'instauration rapide d'un mécanisme de frais de gestion sur chaque petit colis entrant en Europe, pour financer nos contrôles.
- L'abaissement du seuil de franchise douanière prévu dans la réforme de l'Union douanière.

Je veux être claire : ce n'est pas une taxe pour les consommateurs. C'est un moyen de faire payer ceux qui aujourd'hui profitent d'un système sans assumer leurs responsabilités.

La France ne sera pas seule, mais elle sera en tête du combat.

Je voudrais par ailleurs rappeler ici que la France a fait preuve d'un soutien constant à la réforme de l'Union douanière depuis ses prémices et n'a pas cessé de contribuer à ce projet de manière constructive car cette réforme est essentielle à la protection de nos concitoyens. En particulier, la création du data hub européen garantira la sécurité et la souveraineté des données douanières européennes et améliorera la coordination des services douaniers des différents États-membres, une nécessité dans un contexte de tensions commerciales internationales accrues.


En conclusion,

Nous voulons un e-commerce qui respecte nos règles, nos valeurs, notre souveraineté.

Protéger, réguler, reconstruire une Europe forte face au choc du numérique : c'est notre responsabilité. Et c'est ce que nous faisons aujourd'hui.

Merci aux douaniers, aux contrôleurs, aux agents qui font vivre cette ambition sur le terrain.


Source https://www.economie.gouv.fr, le 30 avril 2025