Interview de Mme Sophie Primas, ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement, à RTL le 12 mai 2025, sur le droit à l'aide à mourir, un pompier fauché par un véhicule lors d'un rodéo urbain, l'intervention télévisée attendue du président de la République avec des propositions de référendums ou de consultations citoyennes.

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Média : RTL

Texte intégral

OLIVIER BOY
Bonjour Sophie PRIMAS,

SOPHIE PRIMAS
Bonjour Olivier,

OLIVIER BOY
La loi sur la fin de vie arrive cet après-midi à l'Assemblée Nationale en débattant dans l'hémicycle. Autant l'augmentation des moyens pour les soins palliatifs fait consensus, l'autre volet, l'autre proposition de loi sur l'aide à mourir les fait beaucoup moins consensus, notamment sur le pronostic vital. Quelle sera la règle que vous allez défendre, vous, la voix du Gouvernement, quand est-ce qu'un patient pourra décider de choisir de mourir ?

SOPHIE PRIMAS
Je voudrais dire, d'abord, et saluer la décision du Premier ministre de scinder ce texte en deux, car je pense que, comme vous l'avez dit, un des sujets fait consensus et le mélanger à l'autre sujet qui est la fin de vie aurait été prendre en otage, en réalité, les parlementaires. Donc, je salue cette première décision. La seconde décision, elle est toute personnelle. Je crois que chaque parlementaire, dans son fort intérieur, doit réfléchir aux conséquences de cette loi. C'est une décision qui est une décision qui traverse les groupes politiques. Je voudrais parler, ce matin, et vous engager à aller sur le site de l'Humanité voir une tribune absolument exceptionnelle d'un collectif de médecins et de personnels soignants qui appellent à rejeter en fait ce texte sur la fin de vie. Alors il y a des garanties, Catherine VAUTRIN…

OLIVIER BOY
Plus de 70 % des Français y sont favorables. Pourquoi vous faites cet appel à lire cette tribune dans l'Humanité ?

SOPHIE PRIMAS
Parce qu'elle rend les choses beaucoup plus profondes en réalité.

OLIVIER BOY
Vous êtes sénatrice, vous la voteriez ?

SOPHIE PRIMAS
Je ne sais toujours pas. Si j'avais été sénatrice aujourd'hui, je ne sais pas ce que j'aurais fait toujours. Car la réflexion autour de la fin de vie, c'est aussi une réflexion sur la vulnérabilité, sur les moyens que nous mettons pour accompagner les plus sensibles. Alors, je comprends évidemment les cas particuliers, je l'ai vécu moi-même.

OLIVIER BOY
Vous avez besoin de combien de temps pour le déterminer ? Ça fait des mois qu'on en parle, ça fait quatre ans que cette proposition de loi est sur la table et que vous êtes sénatrice depuis tout ce temps-là. Donc, vous êtes contre cette proposition de loi.

SOPHIE PRIMAS
Même plus longtemps que ce temps-là. Non, je ne suis pas contre. Je continue à m'interroger. Je sais que les garanties qui vont être apportées par Catherine VAUTRIN, qui va déposer, à l'Assemblée Nationale, des amendements pour réduire l'accès effectivement à des cas bien particuliers, c'est une bonne intention. Est-ce que ça va assez loin ? Si on regarde, par exemple, la législation au Canada, qui était très restrictive au début. Elle a tendance, aujourd'hui, à s'élargir, à s'élargir sur des publics vulnérables. C'est cela que la tribune de l'Humanité regarde avec attention. La question est vraiment profonde et elle traverse tous les groupes politiques.

OLIVIER BOY
Vous êtes ici en tant que porte-parole du Gouvernement. Vous nous donnez votre position personnelle sur une question difficile qui touche à l'intime, vous nous l'avez dit. C'est le cas pour tout le Gouvernement. Il y a les dissensions.

SOPHIE PRIMAS
Absolument.

OLIVIER BOY
Bruno RETAILLEAU lui a clairement dit qu'il était opposé. Même François BAYROU a émis des réserves. Qu'est-ce qu'on comprend de tout ça ? Qu'est-ce que vous allez défendre comme texte à la fin ? Est-ce qu'il y aura une position du Gouvernement pour dire "Oui, cette loi est bonne pour les Français ou cette loi n'est pas bonne pour les Français ?

SOPHIE PRIMAS
Moi, je pense que c'est un travail parlementaire qui doit aller jusqu'au bout. Il faut faire confiance aux parlementaires. C'est eux qui détermineront l'issue de ce texte. Catherine VAUTRIN, qui est favorable à ce texte, va déposer, je le rappelle, des amendements pour essayer vraiment d'encadrer très strictement cette possibilité. D'autres défendront d'autres positions. C'est vraiment la discussion parlementaire qui va donner une issue à ce texte. Et puis on n'en est qu'au début. C'est la première lecture à l'Assemblée nationale. Il y aura encore trois autres lectures.

OLIVIER BOY
Donc, c'est le patient qui doit décider, qui doit éventuellement s'administrer lui-même une dose létale. Est-ce que quelqu'un d'autre peut le faire à sa place ?

SOPHIE PRIMAS
Écoutez, ça, encore une fois, ce sont les discussions parlementaires qui iront au bout de cette question-là.

OLIVIER BOY
C'est une ligne rouge pour vous que quelqu'un le fasse à la place du patient ?

SOPHIE PRIMAS
Si on va au bout de ce texte et si on fait une aide à mourir, ce n'est pas pour moi une ligne rouge que quelqu'un d'autre le fasse à condition qu'on ne l'oblige pas à le faire. C'est-à-dire que le droit de conscience de chacun des médecins soit aussi respecté.

OLIVIER BOY
On va parler maintenant de ce drame ce week-end à Evian-les-Bains. Un pompier qui a été fauché par une voiture après un rodéo, c'était samedi matin. Ce pompier a 38 ans. Est-ce que vous savez d'abord dans quel état de santé il est ce matin ?

SOPHIE PRIMAS
Écoutez, j'ai des nouvelles d'hier soir où son pronostic vital était encore engagé. Moi je veux avoir une pensée pour lui, pour sa famille, pour le corps des pompiers et plus généralement pour tous ceux qui s'opposent à ces rodéos qui sont des plaies dans les communes, les petites, les grandes. Moi-même j'ai été maire, je me suis trouvée confrontée à cela. On a la police nationale, la police municipale, les élus. Tout le monde y va, les pompiers naturellement. C'est vraiment des incivilités, c'est de la violence urbaine gratuite et c'est très très difficile à contrecarrer.

OLIVIER BOY
On a encore entendu le mot dans la bouche de Bruno RETAILLEAU, d'ensauvagement hier. Il a même parlé de société laxiste qui a engendré une fabrique de barbares. Vous partagez ce diagnostic ?

SOPHIE PRIMAS
Écoutez, quand quelqu'un qui vient de renverser un pompier prend le soin de faire demi-tour pour venir cracher sur les pompiers qui sont en train de soigner leurs collègues, je ne sais pas si c'est de l'ensauvagement mais c'est probablement un acte barbare. Ça je confirme.

OLIVIER BOY
Qu'est-ce qu'il faut faire ? Il faut changer la loi sur les rodéos ?

SOPHIE PRIMAS
La loi a déjà été changée sur les rodéos. Elle permet notamment de prendre immédiatement les véhicules. À la fois, Bruno RETAILLEAU et Gérald DARMANIN ont engagé l'ensemble des forces de l'ordre à appliquer les saisies automatiques sur l'ensemble du territoire. Ce n'était vrai qu'en Ile-de-France jusqu'à présent. Sur l'ensemble du territoire, il faut appliquer la loi jusqu'au bout, saisir l'ensemble des véhicules, les vendre. Il faut vraiment être sans pitié sur cette question des rodéos.

OLIVIER BOY
Emmanuel MACRON est de retour sur les questions politiques intérieures. On a vraiment ce sentiment avec cette convention, par exemple, sur le rythme scolaire ou demain cette émission à laquelle il va participer sur TF1 qui s'appelle, d'ailleurs, "Les défis de la France". Il devrait proposer, c'est ce qu'on attend en tout cas, des référendums. Est-ce que vous en savez plus ? Sur quel thème demain le Président peut proposer des référendums ou, en tout cas, une consultation aux Français ?

SOPHIE PRIMAS
Je n'ai pas partagé avec le Président de la République les scoops de demain soir. Je le laisserai annoncer évidemment les sujets sur lesquels il veut lancer des référendums mais ce n'est pas une surprise. Depuis les vœux de cette année, le Président de la République a mis cette question des référendums sur la table. Il a beaucoup consulté, beaucoup réfléchi.

OLIVIER BOY
Quel thème ? Quel accord ?

SOPHIE PRIMAS
Je ne sais pas. On parle effectivement, beaucoup de gens parlent autour de cette intervention de demain soir d'un certain nombre de sujets. Pourquoi pas la fin de vie ? Pourquoi pas les écrans ? Pourquoi pas la réforme territoriale ? Il y a beaucoup de sujets qui sont sur la table, dans l'air. On est à l'habitude que le Président de la République soit disruptif donc on va le laisser aller au bout de l'exercice.

OLIVIER BOY
Les derniers arbitrages, a priori, aujourd'hui, nous le disaient.

SOPHIE PRIMAS
Il y a des consultations.

OLIVIER BOY
Il y aura en tout cas. Vous ne savez pas sur quel sujet mais est-ce que vous êtes certaine qu'il y aura des annonces sur des référendums, une consultation à venir ?

SOPHIE PRIMAS
Je pense que la question de la consultation citoyenne était un sujet qui viendra sur la table probablement pendant son interview. Est-ce que ça sera vraiment des référendums ? Est-ce que ça sera des consultations citoyennes ? Est-ce que ça sera des sortes de votations ? Je ne sais pas et je ne sais pas non plus sur les thèmes, donc, on va l'écouter avec attention demain soir.

OLIVIER BOY
Est-ce qu'il y aura le référendum sur le budget qu'appelle de ses vœux François BAYROU ? Il en a parlé il y a une dizaine de jours depuis on a l'impression que c'est l'être morte et que même l'Élysée a enterré purement et simplement le projet.

SOPHIE PRIMAS
Ce n'est pas l'être morte puisque c'est une proposition qu'a fait le Premier ministre au Président de la République. Ça fait partie des sujets sur lesquels il s'exprimera ou pas demain soir.

OLIVIER BOY
C'est toujours d'actualité. François BAYROU veut ce référendum ou, en tout cas, estime que ce serait efficace ?

SOPHIE PRIMAS
Ce que le Premier ministre veut c'est mettre la question budgétaire au cœur de l'actualité des Français pour bien expliquer quelle est la situation budgétaire et quelles sont les réformes que nous devons mener qui sont des réformes qui seront forcément difficiles à expliquer mais qui sont absolument nécessaires pour avoir une souveraineté budgétaire dans les années qui viennent.

OLIVIER BOY
Il paraît que ça n'a pas plu au Président de la République cette sortie sur le référendum qui est une prérogative présidentielle on le précise et pas du tout une prérogative du Premier ministre.

SOPHIE PRIMAS
Je ne suis pas dans le couple Premier ministre, Président de la République donc, je pense que les humeurs des uns et des autres ce n'est pas tellement mon sujet.

OLIVIER BOY
Comment il va justement ce couple à la tête de l'exécutif Premier ministre, Président de la République ?

SOPHIE PRIMAS
Je pense qu'ils se parlent beaucoup. La géopolitique, aujourd'hui, est tellement compliquée. Les impacts de ce qui se passe à la fois en Ukraine, en Russie avec la Chine dans les relations commerciales sur le Moyen-Orient avec les États-Unis sont tellement compliqués qu'elles ont des répercussions en politique intérieure et donc, les discussions sont importantes.

OLIVIER BOY
François BAYROU a perdu 12 points dans les sondages en moins de 3 mois, il est derrière Emmanuel MACRON. Est-ce qu'il faut qu'il change de méthode ? On entend qu'il ne prend pas cette décision qu'on connaît dans un Gouvernement de l'immobilisme.

SOPHIE PRIMAS
Non, ce n'est pas un Gouvernement de l'immobilisme pardonnez-moi. C'est un Gouvernement qui a une nouvelle méthode. Cette nouvelle méthode c'est de poser des sujets de poser des questions et de beaucoup consulter car derrière ce que vous appelez de l'attente, il y a énormément de travail, énormément de consultations.

OLIVIER BOY
Les retraites, le conclave, on ne sait plus du tout où ça en est.

SOPHIE PRIMAS
Très bien, ça avance, ça continue d'avancer et d'ailleurs, il est probable que ça perdure un petit peu parce que les discussions sont intéressantes et que peut-être on trouvera des solutions sur des sujets qui sont des vrais sujets pour les Français. Cette méthode de la concertation, de la discussion avec les tiers, elle est très importante elle donne peut-être ce sentiment mais à partir de mi-juillet, les décisions seront prises les orientations seront présentées et elles seront le fruit d'un travail collectif.

OLIVIER BOY
Vous êtes la porte-parole du Gouvernement, vous êtes aussi membre des Républicains, est-ce que quand même, vous avez une liberté de parole, on l'entend dans vos interviews est-ce que vous dites au Premier ministre, "Parfois il faut quand même un peu plus de concret pour gouverner" puisque les Français le disent, qu'ils ont l'impression que ça n'avance pas. Vous venez nous dire pourquoi, mais quand même est-ce que vous lui diriez, il faut un peu de concret ?

SOPHIE PRIMAS
Moi je pense qu'on est dans une période où il n'y a jamais eu autant de textes qui ont été adoptés au Parlement, ça ne se voit peut-être pas, parce que ce sont des propositions de loi, mais il y a énormément de textes qui ont été adoptés, notamment sur des questions de sécurité, il y a des questions qui concernent notre organisation sur les questions agricoles, sur les questions d'organisation, de compétence des collectivités territoriales, beaucoup de textes ont été adoptés.

OLIVIER BOY
Et pourquoi les Français ne comprennent pas ? Ils ne comprennent pas la méthode BAYROU, pour l'instant.

SOPHIE PRIMAS
Voilà, parce qu'elle est nouvelle et parce que cette histoire de concertation qui prend du temps nécessairement et de réflexion en profondeur pour une réforme en profondeur, par exemple, de l'État, c'est du travail qui est quasi invisible aux yeux des Français et aux yeux des journalistes d'ailleurs.

OLIVIER BOY
C'est problématique que le travail du Gouvernement soit invisible d'un mot quand même, juste un dernier mot là-dessus.

SOPHIE PRIMAS
Non, ce n'est pas problématique du tout dans la mesure où les engagements qui sont pris par le Premier ministre qui est de donner des orientations à mi-juillet, notamment budgétaire, seront tenus.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 13 mai 2025