Interview de Mme Juliette Méadel, ministre déléguée, chargée de la ville, à Sud Radio le 5 juin 2025, sur le commerce en centre-ville, le Comité interministériel des villes, le statut de la monoparentalité, les violences après le match PSG-Inter en Ligue des champions, la politique sécuritaire, les AIRBNB et MaPrimeRénov'.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : Sud Radio

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Avec nous, Juliette MEADEL, ministre déléguée à la Ville. Bonjour Juliette MEADEL.

JULIETTE MEADEL
Bonjour.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors vous faites partie du centre-gauche.

JULIETTE MEADEL
Oui, de la Gauche.

JEAN-JACQUES BOURDIN
De la Gauche-même. Vous êtes ministre, mais ministre de Gauche, bien loin des positions de messieurs RETAILLEAU et DARMANIN, on est bien d'accord ?

JULIETTE MEADEL
Oui, absolument. Mais c'est un Gouvernement de coalition.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ça, j'ai bien compris.

JULIETTE MEADEL
Et comme l'est du reste de l'Assemblée nationale, il n'y a pas de majorité, mais il y a une coalition. Et donc nous faisons vivre la coalition.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a une coalition. Bon, mais nous allons voir tout cela, parce que vous êtes chargée de la Ville, vous avez des objectifs. Alors je vais revenir sur les violences, sur les saccages, sur les pillages. Je vais revenir sur les propositions des uns et des autres. Mais Juliette MEADEL, il y a quelque chose qui nous tient à coeur, qui vous tient à coeur, c'est le commerce en centre-ville. Et je tenais à commencer avec ça. Pourquoi ? Parce que les centres-villes de nos villes et même de nos gros villages sont en train d'être désertifiés. Plus de commerce, les commerces ferment. Vous prenez des initiatives pour cela ?

JULIETTE MEADEL
Oui, parce que ça me frappe. Et en même temps, ça m'attriste. Quand on se promène dans ces belles villes, dans les quartiers, c'est encore pire, on voit des rideaux fermés, on voit des tags. On voit même des squats dans de jolies villes. Donc stop, il faut que ça s'arrête. On a besoin du commerce en centre-ville. On a besoin d'avoir aussi ce plaisir…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça, c'est le constat.

JULIETTE MEADEL
...de pouvoir aller acheter son pain et de pouvoir se retrouver avec quelques autres, comme dans les villes, à l'époque.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors que faire ?

JULIETTE MEADEL
Alors que faire ? J'ai donné une mission assez exigeante à trois personnes qui sont les meilleurs connaisseurs du sujet : le patron de SYSTEME U, qui est Dominique SCHELCHER, le patron de la BANQUE DES TERRITOIRES actuellement, qui est devenu le patron de la Caisse des Dépôts, qui est Olivier SICHEL, et surtout la maire de Saint-Quentin, Saint-Quentin dans l'Aisne, qui est Frédérique MACAREZ. J'ai demandé à ces trois acteurs, qui connaissent à la fois le commerce, qui sont maires, et qui savent ce que c'est, de me faire des propositions révolutionnaires pour le mois de septembre. Révolutionnaire, ça veut dire qu'il faut qu'on aille au-delà de ce que nous avons fait jusqu'à présent dans les différents ministères. J'ai donné cette mission avec ma collègue Véronique LOUWAGIE, qui est ministre du Commerce. Et donc vous avez le ministère de l'Aménagement du territoire et le ministère de la Ville et le ministère de l'Économie qui sont déterminés à avancer.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous verrons ce que dit cette mission. Je suis un peu étonné de voir Dominique SCHELCHER dans cette mission, parce que lui, avec ses hypers et ses supers, il a vidé les centres-villes et les commerces de centres-villes.

JULIETTE MEADEL
Si ce n'est qu'à Saint-Quentin, il y a des petits SYSTEME U. Et moi, j'ai besoin d'avoir l'avis de tout le monde.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon ? Parce que…

JULIETTE MEADEL
Je ne vais pas vous faire la publicité de SYSTEME U. C'est lui qui le fera.

JEAN-JACQUES BOURDIN
La grande distribution a vidé les centres-villes. Pardon, mais…

JULIETTE MEADEL
Exactement. Et comme ils sont en train de revenir là-dessus et que, précisément, ils réinstallent des supérettes, j'ai besoin d'avoir leur avis. Mais je partage votre constat.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je comprends. Alors il y a un autre constat qui est fait sur les commerces. Parce que quels sont les commerces qui s'installent en centres-villes ? Les kebabs, les barbiers, les petites épiceries de proximité qui sont là pourquoi ? Pourquoi ? Pour blanchir l'argent de la drogue. Et le maire de Montpellier dit qu'il faut que les maires aient un droit, un droit sur l'ouverture d'un commerce.

JULIETTE MEADEL
Écoutez, moi, je suis d'accord avec ça. D'ailleurs, c'est à Montpellier que j'organise le comité interministériel des villes. On va en parler tout à l'heure.

JEAN-JACQUES BOURDIN
J'allais y venir.

JULIETTE MEADEL
Vous êtes très fort. Et vous êtes bien informé. Mais au-delà de ça, oui, il faut que les pouvoirs publics se saisissent de cette question du commerce. Il faut des commerces diversifiés. Ce n'est plus possible d'avoir tout le temps les mêmes commerces. Ce que vous décrivez à juste titre sur des commerces qui se ressemblent et parfois dans les quartiers, oui, et parfois des barbiers et autres, qui sont tout le temps les mêmes, ça abîme.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui sont vides souvent.

JULIETTE MEADEL
Non mais surtout quand c'est de l'économie illégale.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais évidemment que c'est de l'économie illégale.

JULIETTE MEADEL
Surtout, ça abîme à la fois les quartiers. Ça abîme la vie quotidienne. Il faut qu'il y ait de tout. Il faut qu'il y ait de tout, que ce soit varié et que ce soit du commerce de qualité.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il faut donner aux maires la possibilité d'autoriser ou pas l'ouverture d'un commerce ?

JULIETTE MEADEL
C'est précisément la question que j'ai posée aux trois auteurs du rapport. Mais vous me connaissez. Moi, je suis assez favorable à l'intervention publique, surtout des maires, M-A-I-R-E, pas que des mères E accent grave.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, j'ai compris.

JULIETTE MEADEL
Et donc il faut qu'on puisse fixer des objectifs.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes favorable à cette idée ?

JULIETTE MEADEL
Je ne vais pas vous dire... J'attends d'avoir les réponses de mes rapporteurs.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est une demande de Michaël DELAFOSSE à Montpellier. Est-ce que vous êtes favorable à cette idée ?

JULIETTE MEADEL
Je suis favorable à l'intervention publique dans le commerce, voilà, pour que l'on puisse... C'est pour ça que je donne le rapport. Ce n'est pas pour dire que je vais donner les clés aux distributeurs.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est très intéressant.

JULIETTE MEADEL
Si je le fais, moi, en tant que ministre de la Ville avec Véronique LOUWAGIE, ministre du Commerce, c'est que nous pensons que cette question du commerce en centre-ville est une question politique et qu'on ne peut plus laisser faire. Il faut s'en mêler pour le bien commun et pour l'intérêt général.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a donc cette relocalisation des commerces de proximité. C'est l'un de vos objectifs. Alors la Ville, parlons-en. Parlons de ce qui va se passer à Montpellier. Concert interministériel des villes demain…

JULIETTE MEADEL
Comité.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Comité, pardon.

JULIETTE MEADEL
Mais vous avez raison, c'est un concert gouvernemental.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pourquoi je dis " concert " ?

JULIETTE MEADEL
Mais non, mais ça va très bien.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Des mesures seront annoncées : soutien à l'enfance, amélioration du cadre de vie, développement économique. Bon, c'est un peu vague, ça, lutte contre l'isolement.

JULIETTE MEADEL
Non, ça va être très précisément vendredi. Mais c'est parce que je ne peux pas tout vous dire. Je ne peux pas tout vous dévoiler ce matin.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon ? D'accord.

JULIETTE MEADEL
Mais je vais quand même vous dire deux-trois choses.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Même pour ça, ça me paraît quand même un peu vague.

JULIETTE MEADEL
Je vais quand même vous dire deux- trois choses importantes.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Allez-y !

JULIETTE MEADEL
Il y a un maître-mot sur ce comité interministériel auquel participera évidemment le Premier ministre, François REBSAMEN et puis au moins 9 ministres du Gouvernement… Il y a un mot-clé. Ça va vous faire sourire, mais pourtant, c'est un sujet très important et très grave.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, je ne souris pas.

JULIETTE MEADEL
C'est l'enfant, c'est l'enfant dans la ville. C'est l'idée que si on investit davantage dans l'enfance, on prévient tous les dysfonctionnements auxquels nous avons assisté ces dernières années, c'est-à-dire de la désespérance enfantine, puis de la déscolarisation, puis de la dépression adolescente. Et hélas, parfois, on l'entrait dans des addictions et dans la spirale de la violence, voire de la criminalité. Et dans ces quartiers qui sont des quartiers jeunes en moyenne, où il y a un taux de familles monoparentales très élevé par rapport à la moyenne nationale, avec des enfants qui, hélas, sont livrés à eux-mêmes, pas abandonnés volontairement, mais livrés à eux-mêmes, faute de moyens, faute parfois de parents en bonne santé et avec des ressources suffisantes, vous avez là des enfants, des jeunes qui sont la proie et les victimes des réseaux, des réseaux de trafic, des réseaux de radicalisation islamiste, parce que ce sont des populations vulnérables. À 8 ou 9 ans, quand on a une mère qui travaille la nuit, qui est fatiguée, un père absent, et une mère qui n'a pas les moyens d'être là pour préparer le petit-déjeuner et qui n'a pas les moyens d'être en bonne santé, à la fois psychique, eh bien on est exactement la cible des trafiquants. Donc la société doit protéger ces jeunes. C'est notre devoir. Et je ne vous cache pas que c'est particulièrement efficace. Ça a été démontré par des économistes dans d'autres pays que le nôtre. Abandonner un enfant, c'est hypothéquer l'avenir.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous allez axer ce comité interministériel sur l'enfance.

JULIETTE MEADEL
L'enfant dans la ville.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Dans la ville. Et le statut de la monoparentalité, tiens ?

JULIETTE MEADEL
Ça, c'est précisément ce que nous visons. Pourquoi ? Quand vous vous occupez d'un enfant qui ne va pas bien…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il faut absolument qu'une femme seule ait un statut. Comme il existe Famille Nombreuse, le statut de Famille Nombreuse, avec une carte de Famille Nombreuse. Est-ce qu'on pourrait imaginer une carte de la monoparentalité ?

JULIETTE MEADEL
Mais pourquoi pas ? Je vais vous dire. C'est déjà un peu le cas dans la mesure où elles ont déjà par exemple leur dossier sur le haut de la pile quand elles cherchent un logement. Elles ont des aides, etc. Mais ça ne suffit pas. On peut toujours imaginer mille statuts, ça ne suffit pas. Moi, ce que je veux, c'est une mobilisation pour les aider dans leur fonction éducative et par exemple les aider en termes de conciliation entre vie professionnelle, vie familiale. Ça veut dire qu'elles aient plus de place en crèche. C'est ce que nous allons faire. Ça veut dire qu'il faut leur permettre d'avoir du pouvoir économique. Et c'est l'un des trois piliers du comité interministériel de Montpellier, là du 6, de vendredi, C'est ça, le 3e pilier.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Demain.

JULIETTE MEADEL
C'est demain. Je veux que les femmes qui tiennent les quartiers... En fait, c'est elles qui assument tout. En réalité, vous savez, moi, les interlocuteurs sont des interlocutrices. Ce sont elles qui gèrent tout. Je veux qu'elles aient du pouvoir économique. Pour qu'elles aient du pouvoir économique, il faut qu'elles puissent créer des entreprises ou retrouver un emploi ou être formées. Surtout, il faut qu'on garde leur enfant. Et tout ça, c'est une volonté politique que nous allons déployer.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je comprends très bien. Vous parliez de femmes. Moi, je suis frappé par un fait. Dire qu'il y a eu des comparutions après les émeutes. Les émeutes, là, qui ont suivi... Enfin, les émeutes... Oui, des débordements, des violences, des saccages, des pillages après le match PSG-Inter. Je n'ai pas vu une seule femme comparaître. Je ne vois que des hommes…

JULIETTE MEADEL
Mais vous avez raison de le dire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Des garçons et des hommes ; peu de mineurs, d'ailleurs contrairement à ce que disent beaucoup, peu de mineurs… Des majeurs et des hommes, toujours des hommes. Mais pourquoi ?

JULIETTE MEADEL
Et qui ne viennent pas forcément des quartiers du reste. Je tiens quand même à le préciser.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Mais pourquoi ?

JULIETTE MEADEL
C'est exactement la même problématique que la violence que vous retrouvez et les profils types des délinquants. Les délinquants sont globalement des hommes. Ce n'est pas un scoop, ce que je suis en train de vous dire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non.

JULIETTE MEADEL
Mais c'est précisément pour cela que je souhaite qu'on redonne du pouvoir économique aux femmes, parce qu'elles doivent avoir leur part de la décision. Pourquoi ? Parce qu'elles assument, parce qu'elles sont plus responsables…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais comment faire pour donner du pouvoir économique aux femmes ?

JULIETTE MEADEL
D'abord en leur donnant la possibilité de travailler tout en ayant des enfants. Et dans les quartiers, il n'y a pas assez de crèches, il n'y a pas assez de services publics de la petite enfance. Vous voyez, je vais aller à Marseille dans un mois pour inaugurer une crèche que j'ai réussi à exhumer de travaux qui n'étaient pas conduits. Tant qu'on ne peut pas garder leurs enfants, elles seront entravées. Deuxièmement, c'est un message politique. Je veux du pouvoir aux femmes dans les quartiers. Le mot de « pouvoir » et le mot de « femme », le mot de « quartier » doit être posé avec un signe égal dans ces termes-là, c'est-à-dire leur reconnaître la capacité à gagner leur vie mieux qu'elles ne le font actuellement, car elles n'ont pas la possibilité de le faire. Donc notre rôle, c'est du microcrédit.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est pour ça qu'un statut de femme seule, c'est un statut indispensable.

JULIETTE MEADEL
Mais on peut imaginer mille statuts, Jean-Jacques BOURDIN, pourquoi pas ? Mais il faut surtout qu'on leur donne la possibilité de retrouver un emploi, de ne pas être à la maison de 8h à 19h parce qu'elles ont besoin de travailler, de pouvoir se former, de pouvoir s'émanciper, de pouvoir choisir la vie qu'elles veulent mener, y compris sur le plan de leur vie sentimentale et sexuelle. C'est leur indépendance et leur autonomie. Et ça, c'est un combat politique.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Dites-moi, des barbares, ceux qu'on a vus piller et saccager ? Vous emploieriez ce mot ?

JULIETTE MEADEL
Non, je n'emploierais pas ce mot, parce que je ne veux pas en rajouter. Le débat est suffisamment inflammable en ce moment.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. C'est un mot malheureux. C'est un mot malheureux,

JULIETTE MEADEL
Moi, ce n'est pas les termes que j'emploie pour des tas de raisons, et en particulier parce que je ne veux pas d'amalgame et je ne veux pas qu'on considère qu'ils sont tous à mettre dans le même panier. Les casseurs ont leur place en prison, quand c'est justifié par la justice, et manque de limites. Ça, c'est certain. Mais vous savez, si on en vient à avoir des jeunes, comme j'ai vu certains cas, des jeunes qui n'habitent pas spécialement dans les quartiers, qui ont un emploi, mais qui se sont amusés à aller tout casser, tout vandaliser, ça, c'est des enfants qui n'ont pas eu assez de limites éducatives. Donc là, il y a bien un problème dans la qualité de l'encadrement, de l'éducation et dans la qualité du message que nous devons envoyer. Un enfant, ça s'éduque. Et ce n'est pas parce qu'il est seul qu'on doit le laisser livrer à lui-même. Et je réprouve aussi ce qui renvoie les parents à leur responsabilité en considérant que personne ne doit s'en mêler.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc la suspension des allocations familiales aux parents des mineurs délinquants, vous n'y êtes pas favorable.

JULIETTE MEADEL
Mais c'est un slogan inutile, totalement inutile. Pourquoi ? Parce que dans les…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est un slogan envoyé par votre collègue Bruno RETAILLEAU, pardon, mais…

JULIETTE MEADEL
Mais je n'y suis pas favorable, parce que vous avez qu'à regarder le profil des casseurs. Ce n'est pas qu'un problème d'argent. C'est aussi un problème d'éducation.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a peu de délinquants. Il y a peu de mineurs, en plus.

JULIETTE MEADEL
La réalité, c'est qu'il faut…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Beaucoup de délinquants, mais peu de mineurs.

JULIETTE MEADEL
C'est à ça qu'on va travailler vendredi à Montpellier. Il faut qu'on puisse avoir une école qui soit ouverte sur une amplitude horaire plus importante, de 8h à 18h dans les quartiers, avec de l'éducation, des éducateurs sportifs, de la culture. Il faut que ces gamins soient pris en main. S'ils s'ennuient, s'ils sont fragiles, s'il n'y a personne à la maison quand ils rentrent, c'est précisément dans ces moments-là qu'ils peuvent dévier. Donc la responsabilité de la société, c'est de s'en occuper.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors ce qui est extraordinaire, vous êtes dans le même Gouvernement, mais vous n'êtes pas du tout d'accord avec Bruno RETAILLEAU. Pas du tout d'accord, j'imagine, avec les propositions de Gérald DARMANIN, vous allez me dire. Code pénal, il veut revoir le code pénal à l'automne.

JULIETTE MEADEL
Alors on va commencer dans l'ordre, cher Jean-Jacques BOURDIN.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Avec Bruno RETAILLEAU.

JULIETTE MEADEL
Bruno RETAILLEAU, nous partageons tout à fait le même constat sur la nécessité de la prévention, à tel enseigne qu'il sera non pas présent parce qu'il ne peut pas, mais représenté par le ministre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ni RETAILLEAU, BUFFET…

JULIETTE MEADEL
Mais Jean-Noël BUFFET, pardon, ministre adjoint de l'Intérieur aussi, qui va s'occuper de la question de la police municipale et de la police nationale et de renforcer la présence des forces de l'ordre dans les quartiers. C'est tout ce que je souhaite. Je vais vous dire. Moi, il n'y a pas de politique de la ville s'il n'y a pas de sécurité. La première personne que je suis allée voir dans le gouvernement pour travailler avec lui, c'est Bruno RETAILLEAU. Et je lui ai dit : " Merci de lutter contre le trafic de drogue ". Parce que vous savez quoi ? Les habitants ne me parlent que de ça.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais alors, pourquoi ? Dites-moi un mot. Je reviens sur les slogans dont vous parlez de Bruno RETAILLEAU. Ce sont des slogans en prévision de la présidentielle de 2027.

JULIETTE MEADEL
Mais quel slogan ? Avec Bruno RETAILLEAU, nous en avons encore parlé hier.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais c'est vous qui m'avez parlé de slogans. Ce n'est pas moi. On dit que c'est un slogan " suspension des allocations familiales " aux parents des mineurs délinquants. C'est un slogan.

JULIETTE MEADEL
Est-ce que c'est ce que le Premier ministre a décidé de faire, Jean-Jacques BOURDIN ?

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais vous me dites dans la bouche de Bruno RETAILLEAU que c'est un slogan. Ça veut dire quoi ? C'est un slogan pour la présidentielle de 2027 ?

JULIETTE MEADEL
Mais oui, ça veut dire qu'on ne va pas le faire. Mais ça lui appartient. Moi, je suis dans un Gouvernement de coalition. Et je partage avec Bruno RETAILLEAU le point qu'il faut de la sécurité et il partage avec moi le point qu'il faut de la prévention et qu'il faut investir massivement dans l'enfance. Mais ça ne vous surprend pas ce que je vous dis. Mais pourtant, vous devriez l'être.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais je ne suis pas surpris.

JULIETTE MEADEL
Parce que si nous sommes dans un Gouvernement ensemble, alors que nous sommes d'origines politiques très différentes et que je ne partage pas tout ce qu'il dit, sur la prévention, nous avons la même idée. La preuve, il soutient. Et la preuve, il sera présent par l'intermédiaire de Jean-Noël BUFFET, avec qui je partage aussi beaucoup…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Gérald DARMANIN ne sera pas là non plus, mais…

JULIETTE MEADEL
Pardon.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais Juliette MEADEL.

JULIETTE MEADEL
Non, mais on y travaillera pour la prochaine fois.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah ouais, d'accord. Mais enfin, il n'est pas là, hein. Juliette MEADEL. Il ne sera pas là demain. Alors que c'est pourtant important. Alors lui, il propose de revoir le Code pénal, suppression du sursis, condamnation minimum systématique une fois la culpabilité reconnue, suppression des aménagements de peine obligatoires. Il dit : " Les condamnations ne sont pas à la hauteur ", vous êtes d'accord avec tout ça ?

JULIETTE MEADEL
Moi, j'ai tendance à respecter la justice au sens où…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça veut dire qu'il ne la respecte pas.

JULIETTE MEADEL
Évidemment, il est ministre de la Justice et donc moi, je diverge un peu sur ces questions-là, parce que je pense qu'il faut laisser au juge ce qu'on appelle la capacité à individualiser et à personnaliser la peine, c'est l'essence de la justice…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes contre, vous êtes opposé à ses propositions.

JULIETTE MEADEL
Nous sommes dans un Gouvernement où nous avons des points de vue différents.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il va y avoir un débat. Il va y avoir un débat. Il va y avoir un débat. Dites-le complètement si c'est vrai.

JULIETTE MEADEL
Non, d'abord, non, parce que j'attends de voir précisément ce qu'il propose.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Enfin il l'a dit.

JULIETTE MEADEL
Et que par ailleurs, ce qui relève de la politique de la ville... Je retourne à mon sujet. Ce n'est pas tout à fait ça. C'est la question de la récidive en prison. C'est la question de la police judiciaire. Et ça, ce sont des sujets sur lesquels nous allons travailler davantage. Il y en a besoin. Je suis d'accord avec vous.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous regrettez qu'il ne soit pas là demain ?

JULIETTE MEADEL
Mais je pense que oui, ça aurait été bien qu'on puisse travailler ensemble sur ce sujet-là. Mais on va finir par y arriver. Vous savez, cinq mois pour organiser un comité interministériel, ce n'était pas beaucoup.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, je sais, mais…

JULIETTE MEADEL
Je suis très heureuse d'avoir…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Sans les deux principaux ministres du Gouvernement, c'est quand même gênant.

JULIETTE MEADEL
Mais attendez. Jean-Noël BUFFET, François-Noël BUFFET…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui mais, c'est un ministre annexe, pardon.

JULIETTE MEADEL
Ça n'est pas un ministre annexe. Pourquoi ? Parce que la question du dialogue entre la jeunesse et la police, c'est chez lui. Le soutien de Bruno RETAILLEAU sur la prévention est essentiel. Et par ailleurs, nous avons quand même la chance d'avoir un Gouvernement très mobilisé. J'étais hier en conseil des ministres. J'ai expliqué tout ce que je viens de vous dire. Tout le gouvernement est ensemble réuni sur cette idée qu'il faut prévenir les difficultés en investissant dans la France. Élisabeth BORNE sera là. On a annoncé ensemble la création de quarante sites éducatifs, c'est-à-dire plus de moyens dans les quartiers pour l'éducation. Il y aura également avec moi, il y a mes côtés, le ministre de la Santé, essentiel Yannick NEUDER, sur le renforcement des moyens en santé mentale, fondamental. Le ministre François REBSAMEN, qui est le ministre de l'Aménagement du territoire, qui va aussi faire des annonces consistantes. La ministre du Logement, Valérie LETARD. Le ministre François-Noël BUFFET. La ministre du Budget, Amélie DE MONTCHALIN. Pardon.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'allez pas me décliner tout le Gouvernement ?

JULIETTE MEADEL
Mais non, mais attendez.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais, enfin, il en manque deux, tout ce qui est régalien. Bon, Juliette MEADEL…

JULIETTE MEADEL
François-Noël BUFFET et le Premier ministre, quand même. Vous exagérez un petit peu, je trouve.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, je n'exagère plus. Allez, si vous voulez. Juliette MEADEL, l'habitat. Parlons-en. En janvier, vous étiez venue nous voir. Vous menaciez les bailleurs sociaux de sanctions si rien n'était fait pour améliorer la qualité de l'habitat social.

JULIETTE MEADEL
Oui. Nous avons bien avancé.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, le bilan.

JULIETTE MEADEL
Le bilan, c'est qu'aujourd'hui, il y a 85% des bailleurs que j'ai classés dans le vert, c'est-à-dire qui travaillent bien. Il y en a 15 % que j'ai classés dans l'orange, c'est-à-dire accompagnement renforcé par l'État. Et si les choses ne s'améliorent pas, après le 15 juillet, il y aura suppression de l'abattement de TFPB, c'est-à-dire une aide publique pour entretenir les bâtiments dans les quartiers politiques de la ville. Par exemple, il y a un bailleur... Je vais vous donner son nom. Je l'ai prévenu. Il y a un bailleur qui s'appelle 13 HABITAT, qui est localisé dans les Bouches-du-Rhône, dont j'ai visité des logements et des parties communes qu'il laisse à désirer. Donc lui, on peut dire qu'il est dans l'oeil du cyclone.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il est dans l'oeil du... Bon. Très bien. Les AIRBNB, Paris, c'est la ville, est la championne du monde du nombre de logements en AIRBNB. Alors que faire ? Parce que bon, des quantités de mesures sont annoncées. Mais pour l'instant, ça ne bouge pas et ça ne change rien. Est-ce qu'il faut fixer, comme c'est proposé à Paris, des quotas par quartier ou par arrondissement pour l'installation des AIRBNB ?

JULIETTE MEADEL
Écoutez, là, vous m'obligez à sortir de mon champ de compétences. Nous sommes sur celui de…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes ministre de la Ville.

JULIETTE MEADEL
Je suis ministre de la Ville, mais je suis aussi la ministre des Quartiers et il n'y a pas beaucoup d'AIRBNB dans les quartiers. Maintenant, là où il y a un vrai sujet fondamental sur lequel il faut qu'on travaille tous, et c'est le travail de Valérie LETARD, c'est quand même la crise du logement. Et c'est certain que les AIRBNB font monter les prix. Donc c'est un sujet à regarder avec beaucoup de précautions. Je pense qu'il ne faut pas qu'il y ait plus d'une certaine proportion dans une ville, pour pas que ça plombe. Et il faut réfléchir à un seuil. Mais ça, c'est vraiment un travail à mener avec les maires.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Fixer… Bah j'imagine. Non, non, mais…

JULIETTE MEADEL
Donc ça ne sera pas à l'État, à mon sens. Et personnellement, je pense que ce n'est pas à l'État d'intervenir.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes ministre de la Ville. Vous n'êtes pas ministre du Logement. Mais MaPrimeRénov' qui est officiellement suspendue, ça gronde, hein.

JULIETTE MEADEL
Oui. Et là…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça gronde dans le bâtiment, les artisans du bâtiment.

JULIETTE MEADEL
Vous savez, c'est l'ancienne magistrate à la Cour des comptes qui va vous répondre. MaPrimeRénov', c'est 3,5 milliards. Moi, j'ai un principe de femme politique aussi. C'est qu'il faut que l'argent public soit utilisé là où il doit être utilisé. MaPrimeRénov' était destinée à faire de la rénovation énergétique des bâtiments. C'est certain qu'en termes écologiques, les problèmes que nous avons sont dans le logement et la rénovation énergétique des bâtiments. Mais 3,5 milliards d'euros d'argent public chaque année dans l'économie, alors qu'on sait qu'il y a une fraude importante, on sait que ça contribue à faire monter les prix. Donc moi, je dis qu'il faut réguler tout ça, le faire en concertation avec les industriels du bâtiment, des travaux publics, avec également le logement, le secteur du logement.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, avec les artisans.

JULIETTE MEADEL
Mais vous savez, politique de la Ville... Je vais vous dire pourquoi je me bats, moi. Moi, je me bats pour dix-quinze millions d'euros. Et là, on est en train de chercher à réguler 3,5 milliards d'euros sur MaPrimeRénov'. Vous voyez la différence ? Et les dix-quinze millions d'euros sur lesquels je vais me battre, moi, pour la politique de la Ville, c'est des emplois dans les quartiers pour faire de la médiation. C'est du soutien scolaire. C'est extrêmement efficace, extrêmement utile. Et ça, au moins, je sais que quand je dépense un euro en politique de la Ville, parce que je n'en ai pas beaucoup, contrairement à ce qu'on pense, quand je dépense un euro, je sais où il va. Il va directement pour aider des enfants, des personnes handicapées et aider à améliorer la vie quotidienne dans les quartiers.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 juin 2025