Interview de Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées, à France Info le 30 octobre 2025, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, la réforme des affections longue durée, la suspension de la réforme des retraites, la fermeture de la maternité des Lilas, l'adoption de la réforme du permis de conduire dans l'Union européenne, le dispositif médecins volontaires et sa dyslexie.

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Média : France Info

Texte intégral

PAUL LARROUTUROU
Bonjour Stéphanie RIST.

STÉPHANIE RIST
Bonjour.

PAUL LARROUTUROU
Bonjour Paul BARCELONNE.

PAUL BARCELONNE
Bonjour à tous.

PAUL LARROUTUROU
Madame la ministre de la Santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées, on va prendre le temps d'évoquer le vif débat sur le budget, le cas emblématique de la fermeture de la maternité des Lilas et évidemment dans le menu détail parce que ça nous concerne tous, notre santé, le projet de loi de financement de la sécurité sociale, PLFSS, de son petit nom. Mais à l'instant, la procureure de Paris, chez nos confrères d'RTL, annonce cinq interpellations dans le casse du Louvre, dans le cadre de l'affaire du casse du Louvre, donc c'était hier soir à 21h à Paris, dans l'agglomération parisienne et notamment en Seine-Saint-Denis. Quelle est la réaction de la ministre de la Santé là-dessus ?

STÉPHANIE RIST
Écoutez, moi je suis comme tous les Français en fait, j'ai été choquée par ce cambriolage et il y a une enquête en cours, je fais tout à fait confiance à mes collègues du Gouvernement d'ailleurs pour faire avancer le dossier.

PAUL BARCELONNE
C'est un bon signe, vous avez bon espoir que les bijoux disparus, retrouvés. L'affaire a été très symbolique, vous avez dit vous comme les Français ont été choqués par ce casse du siècle presque.

STÉPHANIE RIST
J'espère vraiment que les bijoux vont être retrouvés mais encore une fois, je suis comme tous les Français-là.

PAUL BARCELONNE
Nous vous proposons d'écouter la présidente du groupe de la France Insoumise, Mathilde PANOT, elle était assise à votre place hier matin et elle vous a laissé un message.

MATHILDE PANOT, PRESIDENTE DU GROUPE DE LA FRANCE INSOUMISE
Nous avons un Gouvernement qui est en train de présenter le budget le plus cruel pour les gens, qui n'ait jamais été présenté au XXIe siècle, qui prend à la fois aux apprentis cinquante euros par mois, qui prend aux chômeurs, qui prend aux malades, y compris aux malades du cancer, qui prend aux retraités.

PAUL BARCELONNE
On va prendre le temps ce matin de dérouler tout ce PLFSS, donc ce projet de financement de la sécurité sociale. Vous avez fixé ce qu'on appelle un ONDAM, on va essayer de ne pas trop jargonner, c'est un Objectif de dépenses de santé bien en dessous de l'inflation médicale. C'est important ça aussi, on va expliquer ce que c'est. Tout le monde, la fédération hospitalière, les syndicats, toutes les assos disent que ça va casser la machine. Madame la ministre de la Santé, est-ce que ce budget de la sécu est un budget d'austérité ?

STÉPHANIE RIST
Alors, ce budget de la sécurité sociale, il augmente, je crois qu'il faut dire les choses aux Français, il est difficile, je le reconnais, mais il augmente les dépenses de cinq milliards d'euros. Cinq milliards, c'est le remboursement des fauteuils roulants à partir du 1er décembre, c'est plus de 1 500 personnels en plus pour nos EHPAD, c'est des places pour les personnes en situation de handicap, c'est des mesures d'accès aux soins avec les Maisons France Santé. Ce que je veux dire par là, c'est qu'on a une responsabilité collective à faire que le trou de la sécu, qui est à 23 milliards cette année, doit diminuer l'année prochaine. Pas pour se faire plaisir, mais parce que c'est comme ça que notre sécurité sociale va pouvoir continuer à protéger les Français. Donc on peut dire "Oui, c'est difficile", c'est vrai que c'est difficile, mais on a une responsabilité aujourd'hui à faire attention à notre sécurité sociale pour que demain elle puisse nous protéger.

PAUL BARCELONNE
Mais est-ce que philosophiquement, c'est souhaitable d'avoir des dépenses de santé qui explosent, mais surtout de faire des économies sur la santé, au risque peut-être que les Français trouvent ça extrêmement injuste ?

STÉPHANIE RIST
Alors on fait des maîtrises de dépenses.

PAUL BARCELONNE
Plus que des économies ?

STÉPHANIE RIST
J'insiste sur le fait de dire que ce budget est en augmentation de cinq milliards. Pourquoi je dis ça ? Parce que ça veut dire aussi que si on ne le vote pas, on n'aura pas ces cinq milliards en plus. Donc il est important d'arriver au bout de ce vote de ce budget de la sécurité sociale. Mais oui, on doit maîtriser nos dépenses et il y a un effort collectif qui est demandé dans cette copie, il est vrai, aux assurés, aux industries pharmaceutiques, aux organismes complémentaires, aux professionnels de santé. On a tous un rôle pour prendre notre sécurité sociale en charge, je dirais.

PAUL LARROUTUROU
On va rentrer dans le concret, ça nous concerne tous, d'abord le doublement des franchises médicaments. Concrètement une boîte de médicaments ce serait un à deux euros en plus et quand on ira chez le médecin de deux à trois euros. Là, vous allez essayer de me vendre ce que vous appelez un forfait de responsabilité. Qu'est-ce que c'est ?

STÉPHANIE RIST
Moi, pourquoi j'appelle ça un forfait de responsabilité ? Parce que je l'ai dit, on a une responsabilité collective. Mais je crois que dans ce collectif, on a aussi une responsabilité individuelle. Quand on est le pays qui consomme le plus de paracétamol, d'antidouleurs, alors qu'on a les mêmes maladies que nos voisins. On est quand même le premier pays qui consomme. Peut-être qu'on peut regarder dans nos pharmacies s'il nous reste des boîtes de paracétamol avant d'aller en racheter.

PAUL LARROUTUROU
Mais un à deux euros de plus pour une boite de Doliprane, ça va être compliqué pour les gens.

STÉPHANIE RIST
Vous savez, malgré cette augmentation de forfait de responsabilité, je voudrais dire deux choses. Malgré cette augmentation, on reste le pays qui a le reste à payer, le reste à charge, le moins haut du monde. Malgré cette augmentation. Et surtout une deuxième chose, parce que je crois qu'il faut rassurer nos concitoyens sur ces franchises, ces forfaits de responsabilité. 18 millions de Français ne les paient pas. Un Français sur trois ne les paie pas. Les plus fragiles.

PAUL LARROUTUROU
Il y a 68 millions de Français.

STÉPHANIE RIST
Parce que mon boulot de ministre de la Santé, c'est de protéger les plus fragiles. Donc vous avez les femmes enceintes, les mineurs, les gens qui ont la complémentaire solidaire. Et c'est un débat qui pourrait être intéressant à avoir au Parlement sur ce sujet de qui doit les payer ou pas. Mais un Français sur trois ne paie pas ces franchises. Les plus fragiles ne les paient pas.

PAUL BARCELONNE
Ce que vous reprochent vos oppositions, mais aussi certains professionnels et experts du secteur, on en reparlera tout à l'heure. C'est de cibler en priorité les malades. Paul parlait de la hausse des franchises médicales, du reste à charge. Moindre remboursement chez le dentiste. Limitation de la durée du premier arrêt maladie. Quinze jours maximum, renouvelable par tranche de deux mois. Est-ce que vous ne craignez pas malgré tout de faire des malades une sorte de bouc émissaire ? Ou alors de créer une santé réservée aux riches ?

STÉPHANIE RIST
Non, ma motivation et mon seul enjeu est de faire que les malades puissent continuer à être soignés aujourd'hui et demain. Mais dans ce budget, il y a un effort demandé aux malades. Je ne le dis pas, je viens de le dire sur les franchises. Mais il y a aussi sur les autres secteurs. L'industrie pharmaceutique, pour qui on va baisser le prix des médicaments de 1,6 milliard. C'est beaucoup. Sur les taxes, sur les complémentaires, sur les professionnels de santé qui sont en excès, je dirais, de rentes. Donc tous les secteurs. Parce que l'objectif, c'est qu'un euro dépensé de la sécurité sociale aille au bon endroit.

PAUL LARROUTUROU
Votre réforme.

STÉPHANIE RIST
Si on ne fait pas cet effort-là, on aura du mal à faire pérenniser notre santé sociale.

PAUL LARROUTUROU
Madame la ministre de la Santé, pardon, il faut qu'on avance parce qu'on a énormément de questions avec vous. Je vous en prie. Réforme des affections de longue durée, ça inquiète énormément de personnes. Je rappelle qu'actuellement, il y a trente maladies graves qui sont intégralement remboursées par la Sécu, sans limite de temps. Vous avez annoncé un objectif de recentrer cela sur ce que vous appelez les cas les plus graves. Est-ce qu'on peut être très concret ? Et combien de milliards d'euros d'économie vous espérez ?

STÉPHANIE RIST
Non, ce qu'on dit dans ce texte, est qu'une réforme, je voudrais m'arrêter deux secondes parce que c'est vraiment important, parce que c'est un changement culturel. On dit que la sécurité sociale va prendre en charge des soins qui actuellement ne sont pas pris en charge, comme l'activité physique adaptée pour certaines maladies, pour éviter qu'ils arrivent en ALD, en Allocation longue durée.

PAUL BARCELONNE
Affection longue durée

STÉPHANIE RIST
Affection longue durée. Et donc, ça va permettre effectivement des économies, parce que les gens vont aller mieux. Vous voyez, c'est un changement de philosophie.

PAUL LARROUTUROU
N'avez-vous pas retourné ma question ? Vous allez aussi limiter dans la durée, si je ne m'abuse ?

STÉPHANIE RIST
Non, ce qu'on fait, c'est qu'on fait cette mesure, et donc l'idée est de dire aussi, dans le cadre de cette mesure, quand est-ce qu'on sort de ces affections longue durée ? C'est-à-dire, si vous allez mieux…

PAUL LARROUTUROU
C'était ça ma question. Quand est-ce que vous allez sortir de ces affections longue durée ?

STÉPHANIE RIST
Pardon ?

PAUL LARROUTUROU
C'était ça ma question. Quand est-ce que vous allez sortir ? Quels seront vos critères pour sortir, puisque vous inquiétez des gens malades ?

STÉPHANIE RIST
Mais ça va ensemble, vous vouez, parce que l'objectif qu'on a, c'est que les gens soient moins malades, mais elle est majeure, la partie prévention…

PAUL LARROUTUROU
J'entends la partie prévention, mais il y a aussi une partie économie. Quels seront vos critères pour les économies ?

STÉPHANIE RIST
Notre question est de dire : "Soyons sérieux, si le malade n'a plus de raison d'être ALD, il ne faut plus qu'il y soit". C'est ce qu'on dit.

PAUL BARCELONNE
Autre mesure de votre projet de budget de la sécurité sociale, qui a fait polémique notamment cette semaine, et on va vous entendre dans un instant, c'est l'idée de la vaccination contre la grippe pour tous les soignants et les résidents, notamment en EHPAD. Je vous propose d'écouter, avant d'en parler ensemble, Françoise GOBELED, elle est présidente de la Fédération nationale des associations de personnes âgées en établissement. Elle était lundi l'invitée de la matinale de France Info.

FRANÇOISE GOBELED, PRÉSIDENTE DE LA FÉDÉRATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS DE PERSONNES ÂGÉES ET DE LEURS FAMILLES
Non, on ne la soutient pas. Parce que là, on est quand même contre la liberté individuelle des résidents, et puis contre le Code de la santé publique, comme quoi aucun acte médical ou traitement ne peut être pratiqué sans consentement éclairé.

PAUL BARCELONNE
Vous entendez que ça puisse générer de l'inquiétude ? Est-ce que ce n'est pas une mesure qui vient fouler au pied la liberté individuelle, le principe de liberté individuelle ?

STÉPHANIE RIST
Il y a un soignant sur cinq qui se vaccine. C'est trop bas. Ce qu'on dit dans le texte du budget de la Sécurité sociale, c'est que s'il y a des raisons scientifiques, c'est la Haute Autorité de Santé, qui est une autorité indépendante, qui le dira, nous ferons cette obligation. Mais pas pour obliger pour obliger, déjà pour protéger plus les soignants, mais surtout pour protéger, s'il y a des raisons scientifiques, les personnels. Vous savez, le vaccin, il y a beaucoup de gens qui en ont peur. Le Covid a amené ce lot de désinformation qui entraîne de la peur, de l'angoisse sur le vaccin. Ce que je dis, parce que c'est le moment-là d'aller se faire vacciner, notamment pour les plus fragiles, les plus de 65 ans. C'est en ce moment qu'il faut aller se faire vacciner. Si vous avez peur, vous avez le droit d'avoir peur. Allez en parler aux professionnels. On a des réponses qui sont des réponses scientifiques. Les réponses scientifiques, ça veut dire qu'il y a des raisons d'aller se faire vacciner. Que c'est protecteur et que ça n'abîme pas les gens, ça les protège.

PAUL BARCELONNE
Je me mets aussi à l'appel des enfants, des personnes qui sont dans les EHPADs et qui se disent : "Mais pourquoi mes parents se font vacciner alors que le personnel ne se fait pas vacciner ?" Vous nous avez annoncé ce matin qu'un membre du personnel sur cinq seulement est vacciné, donc vous allez les obliger à se vacciner, c'est bien ça ?

STÉPHANIE RIST
Ce qu'on dit, c'est que là je les encourage. Je leur dis, allez vous faire vacciner.

PAUL LARROUTUROU
Vous les encouragez, ce n'est pas obligatoire.

STÉPHANIE RIST
Ça va être obligatoire si la Haute Autorité de Santé, qui est une autorité scientifique indépendante, dit qu'il y a une raison scientifique pour les professionnels.

PAUL LARROUTUROU
Dans votre projet de loi de la sécurité sociale, il y a aussi la brûlante réforme des retraites. Est-ce que vous avez lu Le Parisien, vous vous souvenez de Gérard LARCHER, le président qui a dit qu'il promettait de rétablir la réforme des retraites et que le Premier ministre a proposé lui de suspendre en échange de la non-censure du PS ? C'est un dossier extrêmement compliqué. Qu'est-ce que vous répondez à Gérard LARCHER ?

STÉPHANIE RIST
Je dis comme ce que le Premier ministre a dit. On a suspendu la réforme pour qu'il puisse y avoir un débat parlementaire. Et donc je n'ai pas de conseils à donner à aucun parlementaire. Le débat va avoir lieu et c'est important, je crois.

PAUL BARCELONNE
Mais les Français ne comprennent plus rien. Vous avez dealé la suspension de la réforme des retraites en échange de la non-censure du Parti Socialiste. Vos alliés ou anciens alliés, d'ailleurs je vous pose la question, des Républicains, disent mais non on va la rétablir. Est-ce qu'on y voit encore clair ? Est-ce que le prix à payer n'est pas trop cher ?

STÉPHANIE RIST
Vous savez, j'étais rapporteure de la réforme des retraites quand j'étais députée. J'ai combattu avec conviction cette réforme que je pense nécessaire. Je crois que chacun doit être dans sa responsabilité et dans son rôle de débat. C'est ce que le Premier ministre s'est engagé, c'est ce qui va se passer. Il va y avoir un débat sur la suspension de la réforme des retraites. Je crois que c'est important.

PAUL BARCELONNE
Vous êtes totalement à l'aise avec ça ? Ce n'est pas trop douloureux pour vous ? Vous disiez, vous étiez rapporteur du texte.

STÉPHANIE RIST
J'ai mes convictions personnelles. Si j'étais députée, je les défendrais en tant que convictions personnelles. Mais il y a la réalité en face, la réalité politique de notre pays, la stabilité qui est nécessaire.

PAUL BARCELONNE
Donc il y a une majorité pour suspendre aujourd'hui ?

STÉPHANIE RIST
Cette réalité entraîne le débat et de voir s'il y a une majorité pour suspendre. C'est ce que je crois, oui.

PAUL LARROUTUROU
Dans une seconde, ça y est, il est 8 h 45, tapante sur France Info. On va écouter le Fil Info. On aura beaucoup de questions sur l'aspect politique de votre budget, sur le dossier des maternités, sur le permis de conduire. Mais il est l'heure d'écouter l'info une minute avec Maureen SUIGNARD.

(…)

Avec Stéphanie RIST, ministre de la Santé, des Familles, de l'Autonomie et des Personnes handicapées. Semaine cruciale au Parlement avec l'examen du budget, Paul.

PAUL BARCELONNE
Et peut-être de la taxe ZUCMAN dans les prochaines heures, on va vous poser la question dans un instant. D'abord, j'ai prononcé ce mot, taxe, qui est peut-être le mot à la mode des dernières heures dans les débats qui se poursuivent au Parlement sur ce budget : taxe sur les géants du numérique, taxe sur les bénéfices des multinationales, des taxes, des taxes… Chaque jour c'est nouvelle taxe. Est-ce que le Gouvernement contrôle encore quelque chose dans cette copie ?

STÉPHANIE RIST
Le Gouvernement a dit que la copie était celle du Parlement et c'est l'engagement quand on retire le 49.3, c'est-à-dire que le Parlement va proposer une copie. Moi, je pense qu'il faut que cette copie soit réaliste et qu'elle n'entraîne pas trop d'illusions.

PAUL BARCELONNE
Elle ne l'est pas aujourd'hui en état ?

STÉPHANIE RIST
Je ne sais pas. Vous savez, je suis concentrée sur les sujets qui correspondent à mon ministère, mon budget de la Sécurité Sociale et rencontrer tous les acteurs, comme on l'a dit tout à l'heure.

PAUL LARROUTUROU
Mais quand même, il y a des illusions pour vous ? Qui a des illusions, pour reprendre votre mot ?

STÉPHANIE RIST
Non, ce que je veux dire, c'est qu'il faut qu'il puisse y avoir plus de justice fiscale, on l'a dit, il faut avancer vers ça. Les Français nous le demandent. Il ne faut pas faire semblant. Parce que quand on est parfois enfermé dans un débat qui fait parfois de la surenchère - je l'ai vécu dans tous les autres budgets que j'ai pu voter en tant que députée - je vois que parfois on s'emballe et on est loin de la réalité.

PAUL LARROUTUROU
Est-ce que vous croyez toujours à la possibilité d'un vote solennel, comme prévu a priori le 4 novembre, donc la semaine prochaine, dans moins d'une semaine ? Ça risque quand même de faire très court. Et question connectée, est-ce que vous appelez solennellement, comme l'a fait Éric COQUEREL hier, les oppositions, voire même le groupe Renaissance à retirer des amendements pour que ça passe dans les temps ?

STÉPHANIE RIST
On est au début d'un grand cheminement. Le budget c'est d'abord l'Assemblée, ensuite le Sénat. Moi je commence le budget de la Sécurité Sociale mardi prochain à l'Assemblée. Vous voyez, je crois qu'il faut regarder vraiment cette évolution sur l'ensemble, et pas jour… un vote de la première partie. Enfin, il y aura aussi la deuxième partie, vous voyez. Je pense qu'il faut qu'on avance, que ce budget peut être voté, en tout cas on doit continuer à faire…

PAUL LARROUTUROU
Dans les temps ?

STÉPHANIE RIST
Et moi, ma mission au Gouvernement est, comme mes collègues, celle d'essayer d'avoir du compromis pour arriver à un vote, parce qu'on a besoin d'un budget.

PAUL BARCELONNE
Vous faisiez référence au fait que Sébastien LECORNU a promis de ne pas utiliser le 49.3 qui permet de passer en force et de faire adopter des budgets sans vote. C'est valable pour le budget de l'État et votre budget de la Sécurité Sociale. Est-ce que tout cela ouvre la voie à des budgets, y compris pour vous, pour la Sécurité Sociale, adoptés par ordonnance ?

STÉPHANIE RIST
Je ne le souhaite pas. Comme je l'ai dit, on a une augmentation du budget qui est prévue de 5 milliards, alors qui n'est probablement pas suffisant par rapport à ce que tout le monde voudrait, mais c'est une augmentation. Avec les ordonnances, vous n'avez pas ces mesures nouvelles. Donc je crois qu'on doit avant avoir un rôle de responsabilité collective. Et je mettrai toute mon énergie à essayer d'obtenir ces compromis pour faire évoluer la copie, pour qu'à la fin elle puisse être votée, pour qu'il y ait des mesures pour les Français. C'est ça l'important.

PAUL LARROUTUROU
C'est un dossier emblématique pour des raisons financières, la maternité des Lilas en Seine-Saint-Denis va fermer demain à 20h. Une marche silencieuse est d'ailleurs prévue aujourd'hui. Beaucoup d'émotions, notamment pour la psychologue Naomi SENIOR, au micro France Info d'Augustin HOURLIER.

NAOMI SENIOR, PSYCHOLOGUE
C'était très émouvant pour moi aussi, d'avoir ma dernière consultation avec cette femme qui disait au revoir à ce lieu. Mais du coup, moi aussi j'avais un peu envie de pleurer avec elle à ce moment-là. Puis nous, dans l'équipe, on n'est pas mal à être nés ici aussi, donc on dit au revoir au lieu où on est nés aussi.

PAUL LARROUTUROU
En tant que médecin rhumatologue, vous n'êtes pas franchement dans les maternités, mais vous connaissez quand même. Est-ce que, vous aussi, ça vous fait pleurer, est-ce que c'est un lieu mythique, symbole d'un problème français ?

STÉPHANIE RIST
Alors c'est vrai que c'est un symbole. C'est un symbole plutôt d'une prise en charge innovante, moderne, à l'époque surtout. C'est une page vraiment qui se tourne. Après c'est aussi l'évolution qui est celle-là, et ce n'est pas un abandon d'ailleurs de toute existence pour cet endroit.

PAUL BARCELONNE
Il y a un peu de fatalisme chez vous ce matin, en entendant ce dossier-là ou pas ?

STÉPHANIE RIST
Non, alors pas de fatalisme. Parce que dans cet endroit, il va y avoir une prise en charge des femmes, avant l'accouchement, après l'accouchement, où il pourra y avoir encore de l'innovation ; juste qu'il n'y aura pas le moment de l'accouchement. Je crois que ce qui est très important pour les femmes…

PAUL LARROUTUROU
Pardon, ce n'est pas de la langue de bois, il n'y aura pas le moment de l'accouchement ? Excusez-moi.

STÉPHANIE RIST
Ce n'est pas de la langue de bois. C'est le moment d'accoucher…

PAUL LARROUTUROU
Dans une maternité, s'il n'y a pas le moment de l'accouchement, à quoi sert une maternité ?

STÉPHANIE RIST
Non, vous avez tout l'accompagnement avant d'accoucher qui est très important, tout l'accompagnement après l'accouchement qui est très important, et parfois plus qu'important que le moment pile où vous accouchez. L'accompagnement, ça a été bien démontré après l'accouchement, pour les mille premiers jours de l'enfant, et de la prise en charge de dépression postpartum. Donc il y a des moments, et la préparation de l'accouchement, elle est un moment très important, où on peut amener de l'innovation.
Donc ce centre va rester un centre pour la santé des femmes. Moi je suis très engagée sur la santé des femmes. J'ai pu faire un rapport sur la ménopause. Je vous en reparlerai, c'est sûr... Il faut qu'on prenne en compte la santé des femmes. Cet endroit sera un endroit pour la santé des femmes. Juste le moment technique, le moment où on a besoin de professionnels, beaucoup de professionnels, ne peut plus se faire dans cet endroit.

PAUL BARCELONNE
Si je vous posais la question du fatalisme, c'est aussi celle de l'impuissance, il y a une forme d'impuissance, quand vous êtes ministre de la Santé, à constater la fermeture des lits, des maternités en région parisienne, de plus en plus difficile d'accoucher ?

STÉPHANIE RIST
Non, je ne crois pas. Moi je crois que le boulot de la ministre que je suis, est de dire la vérité. Il est de dire, si vous n'êtes pas en sécurité à tel endroit, j'aurai la responsabilité de fermer cet endroit, mais j'aurai la responsabilité aussi de vous accompagner pour que vous puissiez être prise en charge correctement.
Donc c'est les deux choses, ce n'est pas que la fermeture, et tant pis pour vous, c'est comment on fait pour vous accompagner. On reviendra avec le Premier ministre dès cet après-midi sur les maisons France Santé. Vous verrez que c'est tout l'engagement que le Premier ministre porte sur le sujet.

PAUL LARROUTUROU
Je vais vous proposer de partir plutôt à Marseille, mais d'abord on part à Bruxelles. Mardi les eurodéputés ont adopté définitivement une réforme du permis de conduire dans l'Union Européenne. Selon cette réforme, les permis seront désormais valables uniquement 15 ans, et la durée de validité pourra être réduite pour les personnes de plus de 65 ans, et il faudra des visites médicales. On va partir à Marseille, on va écouter Raymond. Raymond, il a 80 ans, il a une sciatique. Il a dit que c'est hors de question, il ne fera pas de visite médicale. Il est au micro, Ici Provence, de Justine LEBLOND.

RAYMOND, 80 ANS
Il devrait faire un point plutôt sur les jeunes : le cannabis, la cocaïne… Là, il est nécessaire de faire une visite médicale ?

PAUL LARROUTUROU
Qu'est-ce que vous répondez à Raymond ? Il ne veut pas y aller à la visite médicale. Il n'est pas le seul en France à mon avis. Il ne la fera pas, la visite médicale.

STÉPHANIE RIST
Je réponds à deux choses. Un, quand le Parlement Européen décide, on a trois ans pour que les différents pays mettent dans leurs lois, il va y avoir un débat.

PAUL LARROUTUROU
Il y a une vraie pression de Bruxelles. C'est un dossier politiquement explosif, sérieusement ?

STÉPHANIE RIST
C'est vrai, c'est vrai, mais il va y avoir un débat sur ce sujet. Mais ce que je dis, c'est dès aujourd'hui. Il ne faut pas attendre. Je suis ministre de la Santé... Dès aujourd'hui, il faut que les Français se demandent s'ils sont capables de prendre la voiture avant de la prendre.

PAUL BARCELONNE
Mais vous dites que c'est un enjeu de sécurité et de santé publique ?

STÉPHANIE RIST
Je dis que dès aujourd'hui, quand on prend la route, on a une arme entre les mains. Dès qu'on prend la route, on doit se poser la question : est-ce qu'on est en capacité de la prendre ? Est-ce qu'on a pris des médicaments ? Est-ce qu'on a pris des produits interdits ? Est-ce qu'on a trop bu d'alcool ? On n'a pas le droit de prendre la voiture si on n'est pas apte à la prendre, et ce n'est pas que chez les personnes âgées. En tout cas, c'est ma position.

PAUL LARROUTUROU
Autre question très intéressante dans les archives d'Anne Le GALL du service santé et environnement de France Info. Nous avons trouvé une promesse un petit peu oubliée. Nous sommes le 1er septembre dernier. Votre prédécesseur Yannick NEUDER était en déplacement dans le sud-ouest, dans les Landes, pour annoncer le déploiement, je cite - ce mot est important - dès la semaine suivante, du dispositif des médecins volontaires. On n'en a pas trop entendu parler depuis. Vous en êtes où avec le dispositif des médecins volontaires ?

STÉPHANIE RIST
Oui, mais ce n'est pas parce qu'on n'a pas entendu parler que ce n'est pas mis en place. Ça se met en place. Les administrations, d'ailleurs les agences régionales de santé, ont fait un énorme travail avec les professionnels de santé, avec les élus locaux, pour mettre en place des lieux qui accueillent des médecins volontaires. C'est en route. Il y a une plateforme qui permet aux médecins d'aller faire des consultations. Il y a plus de 150 endroits où ça se fait. C'est en train d'être mis en place et il y a mon engagement pour continuer ce dispositif.

PAUL BARCELONNE
Vous leur demandez un effort. Concrètement, comment ça peut se traduire ? Et quel va être le bénéfice pour les Français qui nous écoutent ?

STÉPHANIE RIST
Là aussi, c'est une responsabilité collective et notamment des professionnels, mais aussi de toute l'administration pour les accompagner. Parce que quand vous arrivez dans un cabinet, il faut qu'il puisse y avoir un dossier informatique, il faut que vous puissiez avoir un bureau. Bref, ce que je dis pour les Français qui nous écoutent, c'est que toute l'énergie qu'on met, c'est qu'il y ait un accès aux soins très proche de chez eux. C'est l'engagement aussi de France Santé qui va compléter ce dispositif.

PAUL LARROUTUROU
Et l'engagement de France Info, c'est de vérifier aussi ce qui se passe sur le terrain. Et les agences régionales de santé et les médecins que nous avons contactés font état de difficultés administratives majeures ou matérielles pour pouvoir effectivement démarrer ces consultations. Qu'est-ce que vous répondez vraiment concrètement ?

STÉPHANIE RIST
Concrètement, j'ai eu une réunion lundi avec les agences régionales de santé. Oui il y a des difficultés, oui nous prenons problème par problème. Et c'est un peu mon mantra depuis que je suis arrivée puisqu'avec beaucoup d'humilité, je suis la huitième ministre de la Santé en deux ans. Donc ce que j'ai dit, c'est qu'il fallait qu'on débloque tous les jours un blocage. Donc ça fait partie des déblocages qu'il faut que nous fassions et chaque jour nous avançons pour accueillir des médecins. Mais c'est déjà mis en place dans certains endroits.

PAUL BARCELONNE
Est-ce que c'est le genre de dispositif qui peut permettre de lutter contre la désertification médicale ? C'est un peu ça la question de Paul.

STÉPHANIE RIST
Oui, avec le Premier ministre, on se déplace cet après-midi pour présenter le dispositif Maisons France Santé et vous aurez vraiment des réponses et surtout concitoyens pour avoir, comme l'a dit le Premier ministre, un médecin à moins de trente minutes dans les 48 heures ; une réponse à votre demande en santé.

PAUL LARROUTUROU
Vous pensez réussir là où tous vos prédécesseurs ont échoué ? Parce que les déserts médicaux s'aggravent.

STÉPHANIE RIST
Non, je ne pense pas réussir là où les autres ont échoué mais par contre, il y a eu beaucoup de travail de fait ces dernières années qui permettent de voir passer un cran et c'est ce que j'espère qu'on va pouvoir faire dès cet après-midi avec le Premier ministre.

PAUL LARROUTUROU
Il est 8h56 sur France Info. Il est l'heure de la question qui, aujourd'hui, la question qui se confie exceptionnellement, madame la Ministre, vous avez eu droit à l'avoir un tout petit peu en avance. Ce qui n'avait pas été le cas de tous les invités avant vous parce que vous êtes, Madame la Ministre, chargée des personnes handicapées. Et vous-même, vous n'avez non pas un handicap mais vous avez une particularité, une singularité, c'est que vous avez une dyslexie.

STÉPHANIE RIST
Oui, alors je ne suis pas la seule et je ne suis pas très embêtée avec ça. Mais c'est vrai que je n'étais pas une bonne élève du coup et que j'ai heureusement eu l'amour et la confiance de mes parents qui m'ont pas mal soutenue. Donc, ce que je voudrais dire, je suis aussi la ministre des Familles.

PAUL LARROUTUROU
Oui, pardon, racontez-moi. Parce que vous me racontiez tout à l'heure que vous avez découvert tardivement que vous aviez une dyslexie en lisant une affiche. Racontez-nous, c'est intéressant. Vous avez du mal avec certains mots. Ce n'est pas à l'écrit, c'est ça ?

STÉPHANIE RIST
Non, c'est que parfois les phrases sont compliquées à être correctement... Les mots sont mis difficilement les uns après les autres, si je peux dire. Donc voilà, ça s'embrouille un peu dans ma tête pour que ça sorte clairement. Donc ça donne des difficultés scolaires. Et puis je m'en suis rendue compte très récemment parce que je n'arrivais pas à lire une affiche et que quelqu'un m'a dit : "Mais tu dois avoir une dyslexie".

PAUL LARROUTUROU
Ça concerne environ un Français sur dix qui a des troubles de ce qu'on appelle "dys". Donc vous concrètement, pour préparer cette interview par exemple, ça vous demande un effort particulier ? Comment vous le vivez en tant que ministre ? Ça peut donner de l'espoir d'ailleurs à toutes les personnes dyslexiques ce matin.

STÉPHANIE RIST
Ça donne un peu d'humilité, ce n'est pas mal dans ces temps. Mais ça demande beaucoup de travail, mais ça veut dire aussi beaucoup de confiance. Et je voudrais dire à ceux qui nous écoutent, c'est quand on travaille, on peut aussi avancer et avoir ce qu'on veut dans la vie.

PAUL BARCELONNE
Ce type de poste auquel vous accédez aujourd'hui, ministre, etc., c'est aussi un message d'espoir ?

STÉPHANIE RIST
Oui, je crois qu'on peut le dire comme ça. Je n'étais pas une très bonne élève. Personne n'était politique ou docteur dans mon entourage. Et on peut, quand on est bien accompagné… Et je voudrais le dire parce que je suis ministre des Familles de l'enfance et que c'est cette protection des enfants qui me tient beaucoup à coeur et c'était important pour moi de le dire aussi.

PAUL LARROUTUROU
Merci madame la ministre de votre confiance. Il est 8 h 58, un entretien à retrouver sur le YouTube de France Info et évidemment sur l'application Radio France. C'est à vous Paul BARCELONNE, merci beaucoup.


Service d'information du Gouvernement, le 30 octobre 2025